La rénovation énergétique des logements est-elle rentable ? Dans une note récente du Conseil d'Analyse économique (https://t.ly/mVaUM ), la réponse est "ça dépend pour qui".
Lors d'une opération de rénovation, le propriétaire va payer :
- les travaux proprement dits, c'est-à-dire tout ce qui sera encaissé par les artisans et prestataires
- les frais financiers sur ces dépenses, qui sont soit le cout du crédit, soit la perte de rémunération sur l'épargne qui cesse d'être disponible
- et enfin des coûts dits "induits" : audit énergétique éventuel, valorisation du temps passé pour gérer la rénovation, etc.
Dans le cas du logement collectif, le propriétaire ne peut pas toujours répercuter tout ce qu'il a payé dans les loyers. Il doit parfois reloger les locataires pendant les travaux, ou attendre la vacance des appartements pour agir (laquelle est rarement simultanée pour tous les logements d'un même immeuble), et tout cela engendre des charges supplémentaires.
En face, il y a bien sur les économies d'énergie réalisées, mais très souvent inférieures aux économies théoriques, car :
- le DPE peut mal modéliser le logement concerné
- les travaux peuvent comporter des malfaçons
- le ménage peut augmenter la température intérieure l'hiver après travaux.
Bilan des courses : il n'y a que 5% des rénovations possibles qui seraient rentables pour le propriétaire.
Mais la collectivité peut adopter un autre point de vue. En cas de rénovation, cette dernière diminue deux inconvénients :
- le changement climatique, évidemment. Les auteurs de la note valorisent le bénéfice à 200 euros la tonne de CO2 évitée (30 t évitées en moyenne par logement)
- les problèmes de santé des ménages les plus modestes (les 3 premiers déciles en pratique), notamment dans les logements énergivores, car l'exposition à des températures trop basses sans moyens convenables pour y faire face (ce n'est pas précisé dans la note, mais on peut imaginer qu'il s'agit de manger assez, d'avoir assez de vêtements et de couvertures, etc) engendre des troubles cardiovasculaires.
En monétarisant ces deux bénéfices, la rénovation devient rentable pour 55% du parc, et notamment pour 80% des logements chauffés au gaz et au fioul.
Les auteurs préconisent pour finir des politiques publiques permettant de réconcilier les deux. Ils proposent d'abord de renforcer le dispositif existant, en supprimant cependant les CEE, remplacés par une taxe sur les énergéticiens qui abonderait Ma Prime Rénov.
Puis viennent des vraies novations :
- en se dotant de moyens de ciblage, France Rénovation doit "aller chercher" les ménages qui doivent prioritairement faire les travaux, sans "juste" instruire les demandes entrantes
- les droits de mutation doivent augmenter sur les logements énergivores,
- il faut contrôler les travaux pour traquer les défauts de qualité, et la puissance publique est légitime pour le faire puisqu'elle paye.
Rappelons que le bâtiment c'est 40% de l'énergie en France. Un petit enjeu, donc.