Ils s’appellent Jozef Sikela, Magnus Brunner, Christophe Hansen ou Piotr Serafin, ils sont tchèque, autrichien, luxembourgeois ou polonais, ils sont ministre de l’Industrie, ministre des Finances, eurodéputé ou ambassadeur auprès de l’Union européenne (UE), et ils sont tous prétendants au poste de commissaire européen. Mais, problème : ce sont tous des hommes, au grand dam de la présidente de l’institution, Ursula von der Leyen, qui avait demandé aux 27 États membres de soumettre, avant le vendredi 30 août, le nom d’une personnalité de chaque sexe pour, potentiellement, rejoindre Bruxelles. Ainsi, Ursula von der Leyen aurait pu trancher – et composer un collège des commissaires paritaire. Elle s’y était d’ailleurs engagée. Mais les capitales n’en ont eu que faire : pour l’heure, seules six femmes pour 18 hommes ont été proposées. La Belgique, la Bulgarie et l’Italie, qui n’ont pas répondu à temps, promettent un retour avant minuit.

Sans motif valide

Les six femmes prétendantes à la fonction sont la Croate Dubravka Suica, déjà commissaire européenne (responsable de la Démocratie et de la démographie) ; l’Espagnole Teresa Ribera, ministre de la Transition écologique ; la Finlandaise Henna Virkkunen, eurodéputée membre du groupe du Parti populaire européen (PPE) ; la Portugaise Maria Luis Albuquerque, ancienne ministre des Finances, ainsi que l’Estonienne Kaja Kallas. Le cas de cette dernière est particulier, puisque l’ancienne première ministre a été nommée cheffe de la diplomatie européenne par les chefs d’État et de gouvernement fin juin.

Le président Emmanuel Macron, lui, souhaite que Thierry Breton conserve son poste de commissaire pour cinq années supplémentaires. Les pays qui gardaient le même candidat étaient dispensés de proposer le nom d’un homme et d’une femme. Hormis la France, c’est par exemple également le cas de la Lettonie (avec Valdis Dombrovskis), des Pays-Bas (avec Wopke Hoekstra) ou de la Hongrie (avec Oliver Varhelyi). Mais pour les autres, aucun motif valide.

Déséquilibres à rectifier

Déjà loin de l’équilibre, la précédente « Commission von der Leyen » (2019-2024) comptait 18 hommes et 12 femmes, celle présidée par Jean-Claude Juncker avant elle (2014-2019), 19 hommes et neuf femmes. Le professeur de droit européen Alberto Alemanno considère que pour éviter une Commission « dominée » par les hommes, « UVDL » a trois options : refuser toutes les candidatures en bloc (comme le permet le Traité sur l’UE), demander à certains États de lui soumettre un autre nom, ou valider la liste actuelle et laisser le Parlement européen prendre la main (et refuser lui-même des candidats, si besoin).

En effet, les « commissaires désignés » seront appelés à répondre par écrit à un questionnaire préparé par les eurodéputés, avant de se présenter à une audition menée par les membres d’une ou plusieurs commissions parlementaires. Une tradition qui remonte à la Commission de Jacques Santer, en 1995.

Mais avant, Ursula von der Leyen devra distribuer des portefeuilles aux « commissaires désignés ». Or là encore, c’est un casse-tête : les États, même les plus petits, réclament des attributions « fortes » (l’économie, l’industrie, etc.). De plus, la présidente s’est notamment engagée à créer un poste de commissaire à la Défense, et un autre au Logement, mais ces ajouts ne font pas l’unanimité. Et il faut éviter les bourdes : en 2019, elle avait omis d’inclure la culture dans un portefeuille. La répartition des tâches de chacun devrait être connue dans les prochains jours.