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Economie

Cancer : des innovations porteuses d’espoir

SANTÉ. Le Congrès international de recherche contre le Cancer (ASCO) se tient jusqu’à mardi à Chicago. David Khayat, ancien président de l’Institut national du Cancer, fait un point sur les avancées les plus prometteuses.

Propos recueillis par Stéphanie De Muru
David Khayat : « Je m'intéresse à mon patient, je lui donne de l'espoir. »
David Khayat : « Je m'intéresse à mon patient, je lui donne de l'espoir. » © DR

Le JDD. Un mot tout d’abord sur les chiffres du cancer… Sont-ils toujours en hausse ?

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David Khayat. Le cancer est la première cause de mortalité dans le monde. En 2000, on comptait dix millions de cas, et six millions de morts. Vingt ans plus tard, c’est le double, et 10 millions de morts.

La maladie touchera un homme sur deux, et une femme sur trois dans sa vie en France. Nous sommes, par ailleurs, confrontés à deux phénomènes inquiétants : le rajeunissement des cas de cancer, notamment dans le cancer du côlon et du sein, ainsi qu’une épidémie d’un certain nombre de cancers inexpliqués comme celui du pancréas, et du poumon chez la femme non fumeuse (plus 200 % d’augmentation en 15 ans) sans qu’on ait à ce stade aucune raison prouvée scientifiquement de cette explosion.

La prévention est le premier pilier dans la lutte contre le cancer… Quelles innovations pour prévenir la maladie ?

Les deux premières causes de cancer sont le tabac et l’obésité. Pour enrayer l’addiction, des innovations comme la cigarette électronique ou le tabac chauffé sont utilisés depuis plusieurs années déjà.

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Concernant, l’obésité, le Semaglutide (Ozempic) qui vient de sortir a des résultats spectaculaires. Ces médicaments du diabète (GLP-1) qu’on a détourné vers la perte de poids réduisent le risque d’infarctus, et du cancer du côlon.

Aux États-Unis, le phénomène est tel que la chaîne Walmart affiche une baisse de 7 % sur l’alimentaire et la valeur en bourse de Weight Watcher a chuté.

Le dépistage est également crucial. Des avancées dans ce domaine ?

Par une simple prise de sang, grâce au séquençage, on détecte la présence d’un ADN muté qui suggère qu’il y a un cancer. Nous sommes proches de la commercialisation de cet outil prometteur qui permettra aussi de suivre l’évolution de la maladie. Concernant le cancer du poumon, nous avons de bons résultats avec l’utilisation d’un nouveau type de scanner, à faible dose de radiation, qui tourne en continu autour du patient en descendant.

Les chiffres montrent que la population est parfois réticente au dépistage…

En effet, le dépistage du cancer du sein plafonne à 50 % et celui du colon à 34 %. Mais grâce à des nouvelles technologies, les choses vont aller en s’améliorant.

Par exemple, une start-up marseillaise Lightcore utilise une imagerie quasi quantique mêlée à de l’intelligence artificielle, qui va permettre de manière non invasive, de déterminer l’existence d’un cancer en quelques heures à peine.

Venons-en au traitement. De grands progrès ont été effectués ces dernières années, où en est-on ?

Il faut déjà souligner déjà que malgré l’augmentation des cancers, le taux de mortalité n’augmente pas. Avant 1989, la spécialité « oncologie » n’existait pas. Les malades étaient diagnostiqués tardivement, et on amputait parfois de manière catastrophique. La chirurgie est devenue conservatrice.

Elle se fait aujourd’hui le plus souvent par célioscopie, c’est-à-dire avec des sondes sans ouvrir le corps, avec des durées d’hospitalisation courtes. Idem pour la radiothérapie qui est devenue précise grâce à une balistique aidée par la cybernétique.

« Je m'intéresse à mon patient, je lui donne espoir »

Quid des médicaments ?

Outre la chimiothérapie qui reste l’arme essentielle, les innovations portent sur l’immunothérapie et les thérapeutiques ciblées.

La première stimule le système immunitaire du patient, avec des résultats extraordinaires quand cela fonctionne. Les deuxièmes consistent à identifier la protéine mutée (signe du cancer) et à fabriquer un médicament qui la cible spécifiquement.

Entre ces deux options, le Car-T Cell consiste à prélever vos globules blancs, les modifier génétiquement en laboratoire pour qu’ils reconnaissent la protéine mutée propre à votre cancer, et ensuite réinjecter des milliards de cellules qui vont aller « manger » les cellules malignes. Le seul problème, c’est son prix élevé : 400 000 euros par malade.

Vous avez suivi et soigné de nombreuses personnalités… Y a-t-il une médecine à deux vitesses ?

Ce n’est pas le cas en France, contrairement par exemple à, l’Angleterre. La majorité de ces médicaments sont exclusivement disponibles dans les hôpitaux publics en réalité.

Le problème est que notre pays interdit la vente de médicaments du cancer quand ils sont trop onéreux, c’est dommage.

Qu’en est-il de l’intelligence artificielle ? Les robots vont-ils être bientôt meilleurs cancérologues que vous ?

J’aimerais vous dire que oui, mais excepté l’aide au diagnostic, la part de l’IA est infime dans le combat contre le cancer à ce stade.

Dans le futur, l’intelligence artificielle nous permettra probablement d’accélérer le processus de guérison en analysant les données cancer par cancer, pour créer des médicaments spécifiques.

Mais, en tant que médecin, je m’intéresse à mon patient, je lui donne de l’espoir, je le pousse à trouver des raisons de vouloir vivre… ce que ne fera pas une IA.

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