Confinement : 400 euros en moins pour les salariés en chômage partiel

Selon une évaluation de l’Observatoire français des conjonctures économiques (OFCE), les salariés en chômage partiel devraient perdre en moyenne 410 euros pour huit semaines de confinement.

 Pour certains salariés au chômage partiel et pour les indépendants, les pertes de revenus vont être importantes après la période de confinement.
Pour certains salariés au chômage partiel et pour les indépendants, les pertes de revenus vont être importantes après la période de confinement. LP/Arnaud Journois

    Pour l'heure, la crise du Covid-19 n'a amputé les revenus que d'une minorité de Français, et les mesures de chômage partiel mises en place par l'Etat ont permis de limiter la casse.

    Pourtant, selon une évaluation de l'Observatoire français des conjonctures économiques (OFCE), les salariés en chômage partiel devraient perdre au minimum 2,7 milliards d'euros de revenus, soit 410 euros en moyenne pour huit semaines de confinement. En d'autres termes, cette situation vient de creuser de nouvelles inégalités dans la population.

    Une étude du cabinet Xerfi en dresse le tableau. « À la sortie du confinement, l'impact de la crise du Covid-19 aura été insensible sur les revenus de la majorité des Français », estime ce cabinet spécialisé. Un constat qui repose sur de la pure arithmétique.

    Sept Français sur dix épargnés

    « Sur les 55 millions d'adultes de plus de 15 ans, 4 sur 10 sont des inactifs (hommes et femmes au foyer, en incapacité de travailler, étudiants, lycéens et retraités ne travaillant pas en complément de leurs études ou de leur retraite). Ils ne sont donc pas individuellement concernés par une baisse de rémunération, sauf s'ils ont un conjoint actif touché », reprend Xerfi.

    En effet, les pensions de retraite sont toujours versées, les indemnisations pour les 2,7 millions de chômeurs vont être payées. Même chose pour les fonctionnaires qui vont recevoir les salaires.

    « Additionnés, ces groupes représentent un peu plus de 32 millions de personnes, soit près de 6 Français en âge de travailler sur 10, auxquels viennent se greffer les 8-9 millions de salariés du privé qui ont continué, cahin-caha, de travailler normalement ou en télétravail, ou mis en congés, et dont les salaires n'ont donc pas été amputés », précise Alexandre Mirlicourtois, économiste chez Xerfi.

    Donc au total, 40-41 millions de Français, soit sept sur dix ont été pour le moment plus ou moins épargnés.

    Mais pour les autres le décrochage des revenus est brutal. À commencer le chômage partiel, qui touche 12 millions de personnes. En moyenne, la perte de revenu pour les deux mois devrait être en moyenne de l'ordre de 410 euros pour l'OFCE, et de 600 euros pour le cabinet Xerfi.

    Mais là encore, tout le monde n'est pas logé à la même enseigne. « Au Smic, l'indemnisation est de 100 %. Elle est plafonnée au-delà de 4,5 fois le salaire minimum. Mais à ces niveaux de rémunération, moins de 5 % des salariés sont concernés », reprend le cabinet.

    Le commerce en première ligne

    Selon l'OFCE, « les salariés dans le secteur du commerce risquent d'être en première ligne dans cette perte de revenus. Ils représentent 16 % des demandes de chômage partiel. Les salariés de la construction (11,5 % des demandes) et ceux de l'hébergement et la restauration (8,9 % des demandes) risquent de souffrir également. À l'opposé, les salariés du secteur agricole (0,4 % des demandes) ou des activités immobilières (1 % des demandes) risquent d'être moins frappés par ces diminutions de revenus. »

    Les conséquences pour les 3,2 millions d'indépendants sont plus fortes encore. « Leur répartition sectorielle donne une idée de l'impact. En premières lignes se retrouve la construction (et ses 364 000 indépendants), mais aussi le commerce et l'artisanat commercial, le transport (Taxis et VTC notamment), les services aux particuliers, les freelances dans le BtoB », ajoute Xerfi.

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    Et cette situation risque de s'aggraver dans les prochains mois. Beaucoup d'entreprises comme les bars et restaurants vont maintenir des mesures de chômage partiel avec une activité qui devrait reprendre à vitesse réduite. L'Insee anticipe que l'activité économique serait en baisse de 33 % par rapport à une situation normale.

    Selon la Banque de France, l'activité économique en France a plongé de 27 % au mois d'avril. Le taux d'utilisation des capacités de production dans l'industrie est passé de 77 % en février à 56 % en mars, puis à 46 % en avril « soit le plus bas niveau jamais enregistré dans cette enquête », souligne la Banque de France. Dans les services, le nombre moyen de jours de fermeture en avril varie entre 24 pour la restauration et l'hébergement et seulement un jour pour la programmation et le conseil, ainsi que pour le nettoyage.

    Dans le même temps, l'Etat envisage à partir du 1er juin de diminuer sa part dans l'indemnisation du chômage partiel sauf pour les secteurs où les fermetures administratives sont maintenues. De fait, la perte de revenu va encore s'accentuer pour certaines catégories de salariés.

    « Un décrochage plus lourd est sans doute à venir avec l'annonce d'une baisse de l'indemnisation du chômage partiel à partir du 1er juin et la menace croissante de licenciements collectifs », prévient Alexandre Mirlicourtois en ajoutant : « Nous ne sommes donc qu'au début de la spirale récessive. Les pertes de revenus massives sont en conséquence devant nous et elles concerneront progressivement une majorité de Français. »