Ophtalmologie : un tiers des demandes de consultation n’aboutit pas

Faute de créneaux disponibles dans les agendas surchargés des ophtalmologistes, 3,5 à 4 millions de rendez-vous sont cette année en suspens ou reportés à plus de six mois.

 La durée médiane d’attente avant une consultation (43 jours, et 10 jours pour les cas urgents) cache de fortes disparités régionales.
La durée médiane d’attente avant une consultation (43 jours, et 10 jours pour les cas urgents) cache de fortes disparités régionales. LP/ Philippe Lavieille

    Votre vue baisse? Les délais d'attente pour une consultation aussi… A condition d'obtenir un rendez-vous! Selon un testing présenté ce vendredi par le Syndicat national des ophtalmologistes de France (Snof), réalisé en avril et mai par l'Institut CSA, 36 % des demandes de consultation simple n'aboutissent pas. Et parmi ceux qui ont réussi à décrocher une date, la moitié doit patienter plus de 43 jours. Une durée « médiane » qui cache de fortes disparités régionales. Mais il semble que cette difficulté d'accès aux soins s'améliore. Détails.

    Encore trop de demandes insatisfaites. La première difficulté pour consulter, c'est d'obtenir un rendez-vous. Un casse-tête : le testing du CSA réalisé auprès de 1890 ophtalmologistes libéraux montre que pour un simple contrôle de vue, seulement 64 % des demandes de rendez-vous sont satisfaites. Pire, en cas d'urgence, 49 % des demandes par téléphone reçoivent une fin de non-recevoir. « Les agendas sont saturés », admet Thierry Bour, président du Snof. Selon lui, entre les rendez-vous insatisfaits et ceux de plus de six mois, le stock est cette année de « 3,5 à 4 millions ».

    43 jours d'attente pour une consultation simple. Le CSA a choisi d'établir non pas un délai moyen d'attente mais un délai « médian », chiffre au-dessus duquel la moitié des patients attend moins, l'autre attend plus. Cette médiane est à 43 jours pour les consultations simples sollicitées par téléphone et de 42 jours par Internet. En cas de besoin « urgent » (des symptômes sont apparus), ce délai « médian » tombe à 10 jours. Mais pour les 10 % les plus affectés par le manque de médecins, l'attente est supérieure à quatre mois. « Les sites de réservation en ligne comme Doctolib et Alaxione n'ont pas permis de réduire les délais, mais ils ont apporté de la souplesse… », analyse Thierry Bour.

    Fortes disparités régionales. « Ma sœur habite au Havre où il est impossible d'avoir un rendez-vous, explique Sébastien. Du coup, elle profite de sa venue à Paris pour consulter, et ça va beaucoup plus vite. » Ce témoignage illustre bien le constat fait par l'étude, car c'est en Normandie, ainsi qu'en Bretagne, que les délais sont les plus longs pour un simple contrôle de la vue : 135 jours chez les Normands et 126 jours pour leurs voisins. En venant consulter en Ile-de-France, ils peuvent gagner plus de trois mois d'attente !

    Baisse en vue. Bien que la méthodologie d'enquête soit différente, le Snof a comparé ces résultats aux délais relevés en 2017 par la Direction des études et des statistiques du ministère de la Santé (Drees). Il y a deux ans, tous motifs de consultations confondus, le délai médian d'attente était de 52 jours en France, en 2019 il est plus court de vingt jours. Des éléments objectifs expliquent cette baisse. Notamment, « la délégation de tâches avec les orthoptistes et opticiens, introduite par le décret de 2016, a libéré du temps pour les ophtalmos, rapporte Thierry Bour. S'y ajoute l'afflux de praticiens étrangers qui compense les départs en retraite et un assouplissement des règles d' installation ». Preuve de l'efficacité de ces mesures : « A effectif constant, nous sommes passés de 27 millions de patients vus en 2015 à 30 millions en 2018 », glisse le président du syndicat.