Déforestation : la forêt amazonienne a perdu l’équivalent de la Colombie en quatre décennies

    Amnesty International estime que « les présidences sud-américaines doivent plus que jamais prendre des mesures urgentes pour éviter une catastrophe climatique ».

    La forêt amazonienne, ici en 2022 au Brésil, a perdu l'équivalent de la Colombie en 40 ans, selon une étude. AFP/Michael Dantas
    La forêt amazonienne, ici en 2022 au Brésil, a perdu l'équivalent de la Colombie en 40 ans, selon une étude. AFP/Michael Dantas

    Alerte sur la plus grande forêt tropicale de la planète. L’Amazonie, qui joue un rôle crucial contre le réchauffement climatique, a perdu en moins de quatre décennies une surface presque aussi grande que la Colombie, selon une étude du Réseau amazonien d’information socioenvironnementale et géographique (RAISG), un collectif de chercheurs et d’ONG, à laquelle l’AFP a eu accès ce lundi.

    Ce lundi aussi, l’observatoire européen Copernicus a sonné l’alarme : l’Amazonie et la zone humide du Pantanal, autre sanctuaire de biodiversité situé plus au sud, ont connu ces derniers mois leurs « pires incendies en deux décennies ». Conséquence : les émissions de carbone ont été « significativement au-dessus de la moyenne, battant des records régionaux et nationaux », affectant « gravement » la qualité de l’air dans toute l’Amérique du Sud.

    « Il faut agir maintenant »

    Les événements climatiques « de plus en plus extrêmes et fréquents » favorisés par la déforestation « continuent de toucher une Amazonie déjà fragilisée, autant dans sa capacité de régénération que dans son rôle pour réguler le climat de la planète », résume l’étude du RAISG. L’Amazonie a une importance capitale pour le climat via l’absorption d’énormes quantités de CO2.

    « Les présidences sud-américaines doivent plus que jamais prendre des mesures urgentes pour éviter une catastrophe climatique qui pourrait avoir des conséquences irréversibles. Il faut agir maintenant », a déclaré Ana Piquer, directrice pour les Amériques d’Amnesty International, dans une lettre ouverte publiée ce lundi. Amnesty réclame notamment « davantage d’efforts pour abandonner les énergies fossiles, transformer le modèle actuel d’agriculture industrielle, protéger les peuples autochtones et offrir des garanties aux défenseurs de l’environnement ».

    En Amazonie, la déforestation a détruit 12,5 % de la couverture végétale de 1985 à 2023, selon les données de satellites analysées par le RAISG. Plus de 88 millions d’hectares ont été déboisés au Brésil, en Bolivie, au Pérou, en Équateur, en Colombie, au Venezuela, au Guyana, au Suriname et en Guyane française.

    Les spécialistes du RAISG font état d’une « transformation accélérée » en Amazonie, identifiant une « augmentation alarmante » de l’usage du sol auparavant occupé par la forêt pour y installer des mines (+ 1 063 %), des cultures (+ 598 %) ou de l’élevage (+ 297 %). « Un grand nombre d’écosystèmes ont disparu pour donner lieu à d’immenses étendues de pâturages, de champs de soja ou d’autres monocultures, ou se sont transformés en cratères pour l’extraction d’or », alertent-ils.



    « Avec la perte de la forêt, nous émettons plus de carbone dans l’atmosphère et cela bouleverse tout un écosystème qui régule le climat et le cycle hydrologique, affectant clairement les températures », explique à l’AFP Sandra Rios Caceres, de l’Institut du Bien commun, une association péruvienne qui a pris part à l’étude. Cette spécialiste estime que la perte de couverture végétale en Amazonie est directement liée « aux événements extrêmes que nous vivons », notamment la sécheresse sévère et les incendies de végétation qui ravagent plusieurs pays sud-américains.

    Des cours d’eau à des niveaux très bas

    Certains affluents de l’Amazone sont à leur niveau le plus bas depuis des décennies, menaçant le mode de vie de quelque 47 millions de personnes qui vivent sur leurs rives. Malgré les efforts de pays comme le Brésil ou la Colombie pour réduire la déforestation en Amazonie, 3,8 millions d’hectares de forêt tropicale ont été déboisés dans la région l’an dernier, du jamais-vu en deux décennies, soit une surface presque aussi vaste que la Suisse.

    Au Brésil, qui accueillera en 2025 à Belem la COP30, conférence de l’ONU sur le climat, le nombre de foyers d’incendie depuis janvier a déjà dépassé le total de toute l’année dernière (200 013 contre 189 926), selon les données de l’institut d’études spatiales (INPE). Le gouvernement du plus grand pays d’Amérique latine pointe dans de nombreux cas la responsabilité de « criminels ».



    Selon Copernicus, le total d’émissions cumulées depuis le début de l’année est « plus haut que la moyenne, soit 183 mégatonnes de CO2 jusqu’au 19 septembre, suivant le rythme des émissions records de 2007 ». C’est également de cette année-là que date le record de foyers d’incendies identifiés au Brésil (393 915), selon l’INPE.