Patrimoine : Régine Engström, préfète du Loiret, sera jugée pour « prise illégale d’intérêt »

La haute fonctionnaire a adressé un mail au ministère de la Culture vantant les avantages du projet de son ancien employeur concernant la réhabilitation d’une ancienne caserne.

A Montargis, le chantier de démolition de la caserne Gudin, qui date du XIXe siècle, devait démarrer l'automne dernier. DR
A Montargis, le chantier de démolition de la caserne Gudin, qui date du XIXe siècle, devait démarrer l'automne dernier. DR

    Elle est soupçonnée d’avoir favorisé son ancien employeur dans le cadre d’un projet immobilier. Régine Engström, préfète du Loiret, sera jugée par le tribunal de correctionnel de Paris pour prise illégale d’intérêt concernant un projet immobilier à Montargis, annonce La République du Centre.

    Nommée en février 2021 à ce poste après un passage de deux ans au sein du groupe immobilier privé Nexity, issue du privé, Régine Engström a-t-elle voulu favoriser les intérêts de son ancienne entreprise plutôt que ceux de l’État ? Stéphane Bern, le Monsieur Patrimoine d’Emmanuel Macron, avait le premier jeté la suspicion à son égard. En octobre 2021, au micro de France Bleu Orléans, il avait lâché cette phrase énigmatique : « J’espère que la préfète est plus motivée par la défense du patrimoine que par les intérêts d’une entreprise privée. »

    En jeu, selon un article de Mediapart, l’avenir de la caserne Gudin, un bâtiment du XIXe siècle construit à Montargis. Portant le nom d’un célèbre général napoléonien, ce site a été vendu par l’agglomération de Montargis au promoteur Nexity pour un euro symbolique. Dans son projet initial de réhabilitation du lieu, le promoteur envisageait la destruction d’une partie de la caserne, située sur un terrain de 5,6 ha à deux pas du centre-ville de Montargis. Intolérable pour les défenseurs du patrimoine qui ont réclamé pendant plusieurs mois le classement du bâtiment au titre des monuments historiques. La décision, favorable, a été rendue au début du mois de mars, rendant caduc le projet immobilier.

    Un long mail au cœur de l’enquête

    Mais les enquêteurs et magistrats se demandent si la préfète Régine Engström n’a pas usé de son influence et de son pouvoir pour intervenir et empêcher le classement de la caserne au titre des monuments historiques, ce qui la mettrait dans une situation de conflit d’intérêts par rapport à son ancien employeur Nexity. La justice a estimé nécessaire de creuser la question. Mediapart avait ainsi révélé que la préfète avait adressé, le 4 octobre dernier, un long mail au sujet de la caserne Gudin à des membres du cabinet de Roselyne Bachelot, la ministre de la Culture. La représentante de l’État y listait les arguments favorables à la destruction d’une partie de la caserne, comme souhaité par Nexity.

    Le tribunal devra juger si elle a favorisé son ancien employeur. Le gouvernement a annoncé le remplacement de Régine Engström à son poste de préfète dès le mois prochain par Sophie Brocas, ancienne préfète d’Eure-et-Loir.