La ligne Paris Orly-Brest d’Air France sera prolongée de six mois

Au 30 octobre, plus de ligne entre l’aéroport Brest-Bretagne et Paris-Orly. La décision d’Air France, brutale et visiblement sans appel, a fait bondir les acteurs économiques et politiques de la pointe Bretagne qui se sont rassemblés ce jeudi matin, pour en discuter. A la suite de cette réunion, le ministre des Transports Clément Beaune a décidé de prolonger la ligne de six mois supplémentaires.

La ligne entre Brest et Paris-Orly qui devait s'arrêter au 30 octobre 2022 sera prolongée de 6 mois supplémentaires. LP/Fred Dugit
La ligne entre Brest et Paris-Orly qui devait s'arrêter au 30 octobre 2022 sera prolongée de 6 mois supplémentaires. LP/Fred Dugit

    La décision est tombée comme la foudre sur la pointe bretonne. Air France, gérant de longue date de la ligne reliant l’aéroport Brest Bretagne et Paris-Orly (1,2 million de passagers par an avant le Covid – maintenant dans les 800 000 passagers), a tranché : à compter du 30 octobre : Brest Orly, c’est fini. En cause ? La compagnie pointe du doigt le manque rentabilité de la ligne, qui connaîtrait un taux de remplissage de ses vols inférieurs à 30 %. Sauf que depuis juillet 2020, Air France avait cédé cette liaison à l’une de ses filiales, Transavia, et donc troqué ses avions classiques, des CRJ 1 000 de 100 places, contre des Boeing 737-800 de 186 sièges et en baissant de manières drastiques les rotations.

    Mais voilà, les acteurs des mondes économique et politique bretons, très concernés par cette ligne, qui revêt une importance cruciale pour la région, n’apprécient pas la méthode, jugée « méprisante » et « brutale ». Une trentaine d’entre eux se sont rassemblés à Brest (Finistère), ce jeudi matin, pour discuter d’une éventuelle marche à suivre. « Quatre rotations par semaine avec des horaires plus du tout adaptés… On ne va pas se mentir, il y a une volonté délibérée d’Air France de sacrifier cette ligne », lâche Claude Ravalec, tout nouveau président de la CCIMBO (Chambre de commerce et d’industrie métropolitaine Bretagne ouest), En mars, nous avions déjà adressé un courrier à Air France, ne comprenant pas le sens de cette stratégie pour essayer d’avoir des réponses, d’une part et de trouver des solutions adaptées pour remédier à cela. Nous n’avons jamais eu de retour. Aujourd’hui, ils prétendent même ne jamais avoir reçu ce courrier ».

    Pour le président de la CCI de la pointe bretonne, il ne s’agit pas d’un simple jouet ou d’une coquetterie : « C’est un véritable enjeu de préserver cette accessibilité dans le territoire. » Et le représentant d’ajouter : « De Brest, par le TGV, on ne fait pas l’aller-retour dans la journée (malgré le récent tronçon LGV entre Rennes et Paris, on est en moyenne à 4 heures de train pour relier Brest à la capitale). On se bat depuis 20 ans pour développer la LGV, et même si l’on a gagné un peu de temps, la problématique est toujours là. »

    « On nous enferme dans notre territoire ! »

    Pour Jean-Christophe Cagnard, PDG d’Asten, groupe informatique d’envergure nationale, basé à Brest et comptant 130 salariés, la ligne Brest Orly est indispensable. « On nous enferme dans notre territoire ! Même si la Covid a effectivement fait baisser le nombre de passagers et que l’on utilise beaucoup plus des solutions à distance pour des réunions, les rendez-vous physiques sont parfois obligatoires et déterminants. (…) Avant, nous pouvions partir très tôt le matin et rentrer par l’avion de 21h30, ce qui nous permettait de faire jusqu’à quatre rendez-vous déterminants dans la journée -très productive, de fait. Le billet était cher, mais très pratique ».

    Décideurs et poids lourds économiques s’accordent à le dire : « le sud et l’ouest de Paris, c’est là où se trouvent les grosses entreprises et les acteurs du numérique. En Bretagne ouest, les industriels locaux, de l’électronique civil à la Défense en passant par les Télécom… les habitudes sur cette ligne sont « déjà bien ancrées ». La possibilité de développer une ligne régionale, avec le soutien de l’État, a été évoquée. Deux compagnies locales, Chalair, à Quimper, et Céleste, à Morlaix, se seraient même positionnées.



    Jean-Charles Larsonneur, député la 2e circonscription du Finistère (Brest), s’est justement exprimé sur le sujet, ce jeudi midi, au sortir de la réunion extraordinaire de ce jeudi. « Nous avons conscience que l’objectif d’Air France est de tout ramener sur Paris Charles de Gaulle (CDG), afin de privilégier une clientèle plus touristique. Nous savons aussi, depuis des années, qu’ils sont très largement déficitaires sur leurs lignes régionales (200 millions d’euros). Pour autant, nous attendons d’Air France, avec l’appui du ministère des Transports à ce que la ligne Brest-Orly soit maintenue au-delà du 30 octobre, et qu’on puisse, à terme, nous aider à en nous aidant monter une compagnie régionale, afin de pallier leur absence ».

    Qui pour succéder à Air France ?

    Le jeune député aura visiblement été entendu. Contacté par Le Parisien, le ministre des Transports, Clément Beaune nous a confirmé, en tout début d’après-midi, qu’Air France devra prolonger de six mois supplémentaires la ligne Brest Orly. Histoire de réfléchir, sans doute, à une autre solution, cette fois pérenne. Air France affirme ce jeudi après-midi dans un communiqué que « des discussions ont d’ores et déjà débuté, en coordination avec l’État et les collectivités locales » pour trouver un nouvel opérateur pour cette ligne.