Chute du dernier bastion de Daech : cinq années de califat en Syrie et en Irak

Avec la fin du siège de Baghouz en Syrie, le groupe djihadiste perd son dernier territoire. Après avoir régné sur une zone grande comme la Grande-Bretagne, à cheval sur l’Irak et la Syrie.

 Le 30 juin 2014, selon le canal de communication officiel de Daech, qui publiait des photos, des combattants de l’EI paradaient à Raqa près d’un missile longue portée.
Le 30 juin 2014, selon le canal de communication officiel de Daech, qui publiait des photos, des combattants de l’EI paradaient à Raqa près d’un missile longue portée. AFP

    En juin 2014, un groupe djihadiste proclamait l'« Etat islamique en Irak et au Levant ». Samedi, près de cinq ans plus tard, les forces démocratiques syriennes ont annoncé « l'élimination totale » du territoire du califat qui a fait trembler la communauté internationale. Retour sur cette période où ISIS ou Daech, selon les acronymes anglais et arabe, a poussé sur les centres du régime de Saddam Hussein et prospéré au milieu du désordre syrien.

    Janvier 2014. Des combattants armés, défendant une lecture rigoriste et guerrière de l'islam, prennent le contrôle de la ville de Raqa, dans le nord de la Syrie, après avoir chassé les groupes rebelles au régime de Damas.

    10 juin 2014. Avec le soutien d'ex-officiers de Saddam Hussein et de groupes salafistes, ces combattants s'emparent de Mossoul, deuxième ville d'Irak, et d'une grande partie de la province de Ninive dont elle dépend, après la déroute de l'armée irakienne. Mossoul apporte une manne financière et un gros dépôt d'armes de l'armée irakienne, les territoires alentour permettent de mettre la main sur des raffineries dont le pétrole de contrebande est revendu à profit.

    29 juin 2014. Dans un enregistrement audio diffusé le premier jour du ramadan, les djihadistes de l'« Etat islamique en Irak et au Levant » (EIIL) annoncent l'établissement d'un « califat islamique » dans les régions conquises en Irak et en Syrie. Leur calife, leur chef, sera Abou Bakr Al-Baghdadi. Les deux capitales sont Raqa et Mossoul.

    5 juillet 2014. Depuis Mossoul, Abou Bakr Al-Baghdadi appelle tous les musulmans à prêter allégeance.

    Juillet 2014. Selon les informations de terrain ou de la propagande de Daech, la terreur règne sur place, des villages sont en coupe réglée et on assiste à des décapitations en nombre. Des combattants étrangers arrivent de nombreux pays, notamment de France.

    8 août 2014. Premières frappes américaines à l'initiative de Barack Obama.

    15 août 2014. Le Conseil de sécurité de l'ONU menace de sanctions ceux qui financent le groupe Etat islamique ou lui envoient armes et combattants.

    19 août 2014. Daech diffuse les images de la décapitation du journaliste américain James Foley, enlevé dans le nord de la Syrie en novembre 2012.

    20 août 2014. Barack Obama annonce vouloir être « implacable » face au « cancer » de Daech. Sur le terrain, seuls les peshmergas, les combattants kurdes d'Irak, semblent en mesure de contenir l'expansion des islamistes.

    Sur les traces des djihadistes de l'EI avec les peshmergas en Irak

    2 septembre 2014. De nouveau Daech revendique la décapitation d'un journaliste américain, Steven Sotloff, dont l'enlèvement avait été tenu secret pendant un an.

    13 septembre 2014. Le travailleur humanitaire britannique David Haines, enlevé en mars 2013, est exécuté.

    Septembre 2014. Une coalition internationale de 70 pays dirigée par les Etats-Unis lance, après l'Irak, ses premières frappes contre l'EI en Syrie. La France, tout comme neuf autres Etats, fait partie du cœur du dispositif.

    23 septembre 2014. Premiers raids aériens de la coalition dans les provinces syriennes de Deir Ezzor et Raqa.

    24 septembre 2014. Un groupe algérien lié à l'EI, qui avait menacé de tuer un guide français de haute montagne si la France ne renonçait pas à ses frappes aériennes en Irak, décapité Hervé Gourdel.

    3 octobre 2014. Un nouvel otage de Daech est exécuté, le travailleur humanitaire britannique Alan Henning. Comme chaque fois, un ultimatum est lancé et le nom de la victime suivante annoncé.

    16 novembre 2014. Peter Kassig, travailleur humanitaire américain converti à l'islam, est tué, ainsi qu'une quinzaine de soldats syriens otages.

    15 décembre 2014. Une prise d'otages au nom de l'Etat islamique se produit dans un café de Sydney, en Australie.

    7 et 9 janvier 2015. La France est touchée par les attentats commis au nom d'Allah. Amedy Coulibaly, qui a abattu une policière à Montrouge puis quatre personnes à l'Hypercacher, brandit l'étendard noir de Daech. Quelques jours avant qu'il ne passe à l'acte, sa femme Hayat Boumeddiene a pris la route du califat via la Turquie.

    26 janvier 2015. Les forces kurdes soutenues par la coalition chassent l'EI de Kobané, ville kurde à la frontière turque. L'EI appelle à de nouvelles attaques contre « l'occident infidèle ».

    23 mai 2015. Deux Français membres de l'EI commettent des attentats suicides en Irak.

    Juin 2015. Selon des ONG syriennes, le califat aurait déjà exécuté 2 600 personnes en un an pour imposer la charia.

    26 septembre 2015. La France effectue ses premiers raids aériens en Syrie.

    13 novembre 2015. Des attaques coordonnées à Paris et Saint-Denis font 123 victimes et plus de 400 blessés. Sept terroristes sont abattus ou meurent dans l'explosion de gilets piégés. L'attentat est revendiqué par les frères Clain.

    Février 2016. Raqa, « cité modèle » de Daech est, pour les habitants non endoctrinés, une prison à ciel ouvert où règne la terreur. Le rond-point Paradis, au centre, est rebaptisé « rond-point de l'enfer » : comme au stade, les exécutions y sont nombreuses, les têtes coupées exposées longuement à la vue de tous. Sous leur voile, courageusement, des femmes syriennes transmettent les images d'une ville sans libertés.

    Mars 2016. Attentats de Bruxelles. L'enquête démontrera que ce sont les mêmes cellules qui ont agi à Paris et dans la capitale belge.

    Printemps 2016. La logistique impressionnante de Daech est mise au jour, on découvre un système de fichage des habitants les plus dévoués, 20 000 uniformes destinés à habiller les combattants de l'organisation sont interceptés en Espagne, etc.

    Mars 2017. La cité antique de Palmyre, conquise deux fois par l'EI depuis 2015, est définitivement reprise par le régime syrien, aidé de son allié russe. Les djihadistes y avaient détruit une partie des trésors archéologiques classés au patrimoine mondial de l'Unesco.

    Les ruines de Palmyre, après l'occupation de l'EI

    10 juillet 2017. Après une offensive de neuf mois des forces fédérales soutenues par la coalition internationale, la ville de Mossoul est libérée.

    17 octobre 2017. L'EI doit abandonner Raqa, sa capitale en Irak.

    9 décembre 2017. Le Premier ministre irakien proclame la victoire sur l'EI.

    15 janvier 2018. Double attentat suicide à Bagdad. Le bilan est de 30 morts. L'EI revendique, comme plusieurs autres attentats meurtriers en Irak.

    22 janvier 2019. Début de l'offensive de Baghouz, une poche de quelques centaines de mètres carrés où les derniers djihadistes et une partie de leurs familles vivent terrés.

    23 mars 2019. Après la crise de Baghouz, les Forces démocratiques syriennes proclament la mort territoriale de Daech. Désormais l'EI ne règne plus sur aucun territoire.