Elections : la timide chasse aux fake news des réseaux sociaux

Après avoir reconnu avoir été manipulés pour favoriser la victoire de Donald Trump, Facebook, Google ou encore Twitter tentent de mettre en place des stratégies pour limiter la propagation des fake news lors des prochains scrutins.

 Début octobre, à l’occasion de la présidentielle brésilienne, une war-room d’une vingtaine d’ingénieurs a été mise en place au siège californien de Facebook.
Début octobre, à l’occasion de la présidentielle brésilienne, une war-room d’une vingtaine d’ingénieurs a été mise en place au siège californien de Facebook. REUTERS/Dado Ruvic

    Surtout, faire preuve de bonne volonté. Sous pression après les différents scrutins des deux dernières années marqués par les fake news (infos bidon), les grandes plates-formes internet comme Google, Facebook ou Twitter cherchent à renforcer leurs processus de contrôle.

    Il y avait urgence à l'approche de la présidentielle au Brésil (le second tour a lieu le dimanche 28 octobre), des midterms américaines début novembre puis des élections européennes en mai prochain. Le candidat brésilien Jair Bolsonaro, favori de l'élection, a d'ailleurs été accusé cette semaine d'avoir diffusé des centaines de messages défavorables à son adversaire Fernando Haddad sur la messagerie WhatsApp (rachetée par Facebook en 2014)!

    Le réseau social avait reconnu avoir largement sous-estimé l'impact des fausses informations relayées sur sa plate-forme pendant les campagnes de Donald Trump ou d'Emmanuel Macron. Début octobre, à l'occasion de la présidentielle brésilienne, une war-room d'une vingtaine d'ingénieurs a été mise en place au siège californien. Leur mission : surveiller les informations circulant sur la toile et supprimer au plus vite celles qui ont pour but de tromper les électeurs. Facebook, habitué au secret et à garder ses algorithmes opaques, a cette fois entrouvert ses portes aux médias.

    Trouver le bon dosage

    « Vingt personnes pour vérifier des messages de milliards d'utilisateurs, ça ne va servir à rien. Les fake news continueront à circuler et au mieux, ils vont limiter la diffusion de certaines d'entre elles », balaie l'expert en numérique à Sciences-po Fabrice Epelboin, qui critique une « opération de com ».

    L'un des responsables de Facebook s'est vanté à l'inverse d'avoir pu retirer des rumeurs de report de l'élection brésilienne « avant que l'histoire ne devienne virale ». Et de nombreux analystes reconnaissent que la propagation des informations frelatées a déjà baissé depuis deux ans grâce à ces efforts. Même si l'enseignant au Celsa, Tristan Mendès-France, pointe un « problème propre aux réseaux sociaux : vous pouvez couper une source, comme une discussion sur un forum, mais rien n'empêche des milliers de comptes de la reprendre ».

    Tout l'enjeu pour ces plates-formes est aussi de trouver le bon dosage entre liberté d'expression, censure, information délibération fausse… « Les stratégies de manipulation ne sont pas que des fake news, c'est un mélange très toxique de vrai, de faux, de sensationnaliste, d'omission… », remarque Tristan Mendès-France. Par exemple, les médias d'État russes Sputnik ou RT, considérés par Emmanuel comme des « organes de propagande », ne diffusent pas forcément de contenus toujours faux.

    Systèmes d'intelligence artificielle

    La chasse aux propos extrémistes a aussi donné lieu à une passe d'armes récente entre Twitter et le conspirationniste américain Alex Jones, dont le compte a finalement été supprimé. Ses partisans ont aussitôt hurlé à l'atteinte à la liberté d'expression. « Il y a beaucoup de gens exaspérés par le système, prêts à croire des choses pourvu que ça ne vienne pas de médias traditionnels », rappelle le chercheur à l'Institut de relations internationales et stratégiques (Iris), François-Bernard Huyghe. Gare aussi aux effets pervers comme « le danger de créer des faux positifs en retirant une info qui va finalement se révéler vraie ».

    Conscientes que l'humain ne pourra pas tout réguler, les plates-formes disent travailler sur des systèmes d'intelligence artificielle. Un « fantasme » selon certains spécialistes, mais qui pourrait tout de même servir à débusquer les deepfakes, ces fausses vidéos qui font dire n'importe quoi à n'importe qui. On a ainsi pu voir Barack Obama injurier face caméra Donald Trump. Un tel montage indétectable à l'œil nu pourrait surmobiliser, en pleine campagne électorale, de nombreux électeurs républicains pour qui l'ancien président est un chiffon rouge.

    Reste qu'il sera toujours compliqué de démasquer l'énorme flux des contenus faux ou trompeurs, quels que soient les moyens mis en place. D'où l'importance de l'éducation aux médias dès l'adolescence et avant d'obtenir le droit de vote pour « que chacun soit à même de vérifier tout seul l'information qu'il reçoit », conclut Tristan Mendès France.

    ET POUR LA FRANCE ?

    À l'approche des élections européennes de mai prochain, une proposition de loi contre « la manipulation de l'information » en période électorale a été adoptée en seconde lecture par l'Assemblée nationale le 9 octobre dernier.

    Ce texte anti fake news, voulu par Emmanuel Macron, doit désormais repasser une dernière fois au Sénat. Son but : qu'un candidat ou un parti puisse saisir un juge pour faire cesser la diffusion d'une fausse information durant les trois mois précédant un scrutin national. Les plates-formes internet devront aussi être plus transparentes sur les contenus sponsorisés.

    Mais le texte est jugé liberticide ou dangereux par l'opposition et des associations de journalistes qui reprochent notamment le flou entourant l'expression « fausse information ».

    Droit de réponse de RT France

    « L'article « Elections : la timide chasse aux fake news des réseaux sociaux » reproche à la chaîne RT FRANCE de diffuser des contenus tantôt vrais, tantôt faux et d'inscrire dans une stratégie de manipulation de l'opinion publique du fait qu'elle est une chaîne publique russe.

    RT FRANCE réfute fermement ces imputations qui atteignent sa probité et celle de ses journalistes, dont elle rappelle qu'ils sont tous des professionnels, titulaires de cartes de presse françaises.

    RT FRANCE rappelle qu'elle ne serait certainement pas autorisée à diffuser par le CSA si elle n'offrait pas les garanties élémentaires d'une ligne éditoriale indépendante.

    RT FRANCE entend par conséquent rétablir que sa chaine, son site internet et ses journalistes n'ont d'autre vocation que d'informer le public de la manière la plus professionnelle, sérieuse et impartiale qui soit.