Présidentielle à Taïwan : Lai Ching-te, candidat honni par la Chine, remporte l’élection

Le nouveau président, qualifié de « grave danger » par Pékin, a affirmé que Taïwan « a résisté aux efforts des forces extérieures pour influencer cette élection ».

Le nouveau président taïwanais Lai Ching-te, juste après la victoire, le 13 janvier 2024. REUTERS/Ann Wang
Le nouveau président taïwanais Lai Ching-te, juste après la victoire, le 13 janvier 2024. REUTERS/Ann Wang

    Il était le favori du scrutin. C’est désormais le nouveau président de Taïwan. Lai Ching-te, vice-président du Parti démocratique progressiste (DPP), arrive en tête de la présidentielle à Taïwan ce samedi avec 40,2 % des voix, selon des résultats officiels quasi définitifs portant sur 98 % des bureaux de vote. Il est vu par Pékin comme « un grave danger » car il est sur la même ligne que la présidente sortante, Tsai Ing-wen, qui clame que l’île est de facto indépendante.

    Aussitôt sa victoire annoncée, Lai Ching-te a affirmé que Taïwan « a résisté aux efforts des forces extérieures pour influencer cette élection ». « Nous sommes déterminés à protéger Taïwan des menaces et intimidations continuelles de la Chine », a-t-il déclaré face à ses partisans, promettant toutefois de « poursuivre les échanges et la coopération avec la Chine ».

    Face à lui, Hou Yu-ih, candidat du Kuomintang (KMT), principal parti d’opposition, prône un rapprochement avec Pékin. Il a obtenu 33,4 % des votes, selon ce décompte de la Commission électorale centrale. Il a reconnu sa défaite face à ses partisans : « Je respecte la décision finale du peuple taïwanais » et « je félicite Lai Ching-te et Hsiao Bi-khim (sa colistière, ndlr) pour leur élection, en espérant qu’ils ne décevront pas les attentes du peuple taïwanais ».

    Le troisième candidat, Ko Wen-je, du petit Parti populaire taïwanais (TPP), se présente comme anti-establishment. Il termine troisième avec 26,4 %. Lui aussi a accepté sa défaite.

    « Chérir notre démocratie et voter avec enthousiasme »

    Des millions de Taïwanais se sont rendus aux urnes ce samedi pour élire leur nouveau président. Les images des médias taïwanais montrent de longues queues face aux bureaux de vote, qui ont fermé à 16h00 (08h00 GMT). Sur d’autres, on voit des Taïwanais revenus au pays pour l’occasion, le vote à l’étranger n’étant pas autorisé.

    En 2020, la participation avait frôlé les 75 % dans ce territoire de 23 millions d’habitants situé à 180 km des côtes chinoises et salué comme un modèle de démocratie en Asie.

    L’UE a déclaré « féliciter tous les électeurs » ayant participé à « cet exercice démocratique ». Dans un communiqué, elle « souligne que la paix et la stabilité dans le détroit de Taïwan sont essentielles à la sécurité et à la prospérité régionales et mondiales » et déclare rester « préoccupée par les tensions croissantes dans le détroit de Taïwan », appelant à ne pas « modifier le statu quo. »



    Les Taïwanais votaient aussi pour renouveler les 113 sièges du Parlement, où le DPP pourrait perdre sa majorité. « S’il vous plaît, allez voter pour montrer la vitalité de la démocratie taïwanaise », a lancé Lai Ching-te samedi avant d’aller déposer son bulletin dans l’urne, dans le gymnase d’une école à Tainan (sud). « Nous devrions tous chérir notre démocratie et voter avec enthousiasme ».

    Hou Yu-ih, lui, a dit espérer que « quelles que soient les turbulences qui ont marqué le processus électoral, tout le monde s’unira après le scrutin pour faire face à l’avenir de Taïwan ».

    Le hashtag « Élection à Taïwan » bloqué sur Weibo

    Toute la semaine, Pékin a accentué sa pression diplomatique et militaire. Jeudi, cinq ballons chinois ont franchi la ligne médiane séparant l’île autonome de la Chine, selon le ministère taïwanais de la Défense, qui a aussi repéré dix avions et six navires de guerre. Depuis l’élection d’une candidate du DPP en 2016, la Chine a coupé toute communication de haut niveau avec Taïwan, qu’elle considère comme une de ses provinces.

    Samedi, des journalistes de l’AFP ont observé un avion de chasse chinois au-dessus de la ville de Pingtan, la plus proche de Taïwan. Et sur le réseau social chinois Weibo, le hashtag « Élection à Taïwan » a été bloqué dans la matinée.

    Pékin a appelé les électeurs à faire « le bon choix » et l’armée chinoise a promis d’« écraser » toute velléité d’« indépendance ».

    Le statut de Taïwan est l’un des sujets les plus explosifs de la rivalité entre la Chine et les États-Unis, premier soutien militaire du territoire, et Washington a prévu d’envoyer une « délégation informelle » sur l’île après le vote.

    Vendredi, le chef de la diplomatie américaine Antony Blinken a rencontré à Washington Liu Jianchao, à la tête de la division internationale du Comité central du Parti communiste chinois. Il lui a rappelé l’importance de « maintenir la paix et la stabilité dans le détroit de Taïwan ».