Grève des urgences : comprendre la crise en cinq minutes

Un nouveau rassemblement s’est tenu ce mardi en début d’après-midi devant le ministère de la Santé, à l’appel de la CGT, FO, Sud santé et de la CFE-CGC.

    Presque trois mois après le début de la mobilisation, la colère continue de s'amplifier. Débutée le 18 mars dernier à l'hôpital Saint-Antoine à Paris, la grève du personnel paramédical s'étend désormais à une petite centaine de services. Ce mardi, un nouveau rassemblement s'est tenu en début d'après-midi, devant le ministère de la Santé.

    Pourquoi les urgentistes sont-ils en colère ?

    Le mouvement s'est déclenché à la suite de plusieurs agressions du personnel des urgences d'hôpitaux de l'est parisien. La plus violente a eu lieu le 13 janvier dernier à l'hôpital Saint-Antoine, quand un patient a frappé deux infirmiers et une aide-soignante, entraînant une incapacité temporaire de travail (ITT) de huit jours pour chacun d'entre eux. Le 18 mars, le service des urgences de cet hôpital a entamé une grève illimitée, soutenue par la CGT, FO et SUD.

    Le mouvement s'est ensuite étendu à 21 autres hôpitaux parisiens. « Depuis, ça se propage de manière importante dans le reste de la France et on pense que ça va continuer », se félicite Orianne Plumet, membre de l'association Inter-Urgences, constituée à l'occasion de la grève.

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    Combien de services concernés ?

    La France compte 524 services d'urgences publics. Selon le décompte réalisé par l'association Inter-Urgences, sur la base des préavis déposés, 95 sont touchés par la grève ce mardi. Un chiffre en progression constante. Il y a deux semaines, 60 urgences étaient concernées. L'association souligne aussi être en contact avec 111 autres services. Ces derniers sont donc susceptibles de se mettre en grève prochainement.

    Que réclament les grévistes ?

    Les grévistes s'indignent du manque de moyens alors que le nombre de patients pris en charge aux urgences est passé de 10 millions en 1996 à 21 millions en 2016.

    « On demande plus d'effectifs, 10 000 équivalents temps plein exactement, zéro hospitalisation sur des brancards, aucune fermeture de ligne de Samu ainsi qu'une prime de 300 euros mensuels nets en reconnaissance de la pénibilité de leur travail », précise Candice Lafarge du collectif Inter-Urgences.

    Le mouvement a-t-il un impact sur le traitement des patients ?

    Soumis à une obligation de service minimum, la plupart des grévistes se contentent d'afficher leur mécontentement sur des banderoles, des brassards ou sur leur blouse. « On distribue aussi des tracts aux usagés pour expliquer les raisons de notre grève. On rappelle que s'il y a beaucoup d'attente et donc des incivilités, c'est à cause du manque de moyens », précise Orianne Plumet.

    Certains urgentistes sont en arrêt maladie. Ce qui peut avoir un impact sur la continuité des soins. Samedi soir, à l'hôpital Saint-Antoine, « 15 paramédicaux sur 19, épuisés par leurs conditions de travail, n'ont pas pu prendre leur poste » et « trois paramédicaux de l'équipe de jour ont dû rester pour continuer de prendre en charge les patients », travaillant ainsi « 18 heures d'affilée » en attendant « la relève de l'équipe du lendemain », a expliqué l'association Inter-Urgences.

    Dans le cas où la continuité des soins n'est pas assurée, et en dernier recours, les membres du personnel paramédical peuvent être réquisitionnés par les forces de l'ordre. Le cas s'est présenté à Lons-le-Saunier (Jura), dans la nuit du 29 mai. Des gendarmes sont venus réveiller des soignants directement à leur domicile pour les obliger à assurer le service.

    À noter que le mouvement est initié et ne concerne pour le moment que les paramédicaux (aides-soignants, infirmiers, accueil…). Les médecins urgentistes ne sont pas encore engagés dans la grève, même si d'après Candice Lafarge, « ils nous soutiennent évidemment. »

    Quelle réponse du gouvernement ?

    La ministre de la Santé, Agnès Buzyn affirme « comprendre l'impatience » des personnels des urgences face à « un quotidien devenu insupportable ». La ministre s'est rendue jeudi dernier au congrès des urgentistes. Elle en a profité pour annoncer cinq mesures à court terme : une accélération de la rénovation des bâtiments vétustes des urgences, des crédits exceptionnels pour les services qui font face à une forte hausse de leur activité, la généralisation d'une prime déjà existante et la création d'une prime de coopération pour les paramédicaux qui se verraient déléguer certaines tâches des médecins.

    Agnès Buzyn a également confié une mission de refondation des urgences au député LREM Thomas Mesnier, urgentiste de profession, et au professeur Carli, président du Syndicat national des urgences hospitalières.

    Ces mesures s'ajoutent aux dispositions à plus long terme comprises dans la loi Santé, qui doit être votée ce mardi au Sénat. Son objectif est notamment de contribuer à une meilleure organisation de la médecine de ville pour désengorger en amont les urgences.

    Mais les annonces d'Agnès Buzyn n'ont pas suffi à calmer la colère des grévistes. « Aucune mesure en matière de rémunération, d'effectifs, d'ouverture de lits », a déploré l'intersyndicale FO-CGT-SUD.

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