« Avalokiteśvara » : différence entre les versions

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{{à sourcer|date=août 2010}}
[[Fichier:Avalokitesvara Plaosan.jpg|vignette|Avalokiteśvara du [[temple de Plaosan]] ([[Java central]], [[Indonésie]])]]
Le [[bodhisattva]] '''Avalokiteshvara''' ([[hindi]] : अवलोकितेश्वर, Avalokiteśvara « seigneur qui observe depuis le haut », [[langue chinoise|chinois]] : 觀世音, Guānshìyīn ou 觀音, Guānyīn ([[Guanyin]]), [[shanghaïen]] : Kueu (sy) in, [[coréen]] : 관세음, Gwanseeum, [[japonais]] : 観音, Kan'non ou Kanzeon, [[tibétain]] : Chenrezig, [[vietnamien]] : Quán Thế Âm, [[indonésien]] : Kwan Im, [[Khmer (langue)|khmer]] : លោកេស្វរ, Lokesvara), est sans doute le grand bodhisattva le plus vénéré et le plus populaire parmi les [[bouddhisme|bouddhistes]] du [[bouddhisme mahâyâna|Grand véhicule]]<ref>Robert E. Buswell Jr. & Donald S. Lopez Jr., ''The Princeton Dictionary of Buddhism'', Princeton, Princeton University Press, 2014{{ISBN|0691157863}}, {{p.|82}}.</ref>. Il est aussi utilisé comme [[yidam]] (déité tutélaire) dans les méditations [[Tantrisme|tantriques]].
 
Bodhisattva protéiforme et syncrétique (il peut représenter tous les autres bodhisattvas), incarnant la [[compassion]] ultime, il peut être féminin en [[Chine]], en [[Corée]], au [[Japon]] et au [[Viêt Nam]], sous forme de [[Guan Yin]], toutefois sa forme japonaise, [[Guanyin|Kannon]], a quelquefois des traits masculins<ref>{{Cornu}}.</ref>.
 
Il est considéré comme le protecteur du [[Tibet]] où le roi [[Songtsen Gampo]] et plus tard les [[dalaï-lama|dalaï-lamas]] sont vus comme ses émanations. C'est aussi le cas d'autres [[tulkou]] comme le [[karmapa]].
 
Aussi nommé Padmapāṇi ou [[Maṇipadmā]] en sanskrit, il est invoqué par le célèbre [[mantra]] du mahayana, ''[[om manipadme hum|Om̐ Maṇipadme hūm]]'' ({{lang-sa|ॐ मणिपद्मेहूम्}})<ref>{{Ouvrage|langue=fr|auteur1=[[Tenzin Gyatso|Dalaï-lama]]|titre=Cent éléphants sur un brin d'herbe|éditeur=|année=|isbn=}} Voir l'un des chapitres pour une explication générale du mantra</ref>{{Référence à confirmer}}.
 
== Signification ==
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Le nom « Avalokiteśvara » (अवलोकितेश्वर) signifie « ''le Seigneur qui nous observe'' »<ref>{{Lien web |auteur=[[Gérard Huet]], [[Dictionnaire|titre=avalokiteśvara Héritage du Sanscrit]], version Dico en ligne, lire : [|url=https://sanskrit.inria.fr/DICO/7.html#avalokitezvara] |site=sanskrit.inria.fr ConsultéThe leSanskrit Heritage Site {{date|consulté le=6 février 2020}}</ref>. Il est composé du préfixe ''"ava"'' (अव) « ''vers le bas'' »<ref>Ainsi les deux expressions: « ''le Seigneur qui observe vers le bas'' » et « ''le Seigneur qui observe depuis le haut'' » sont-elles synonymes.</ref> + ''"lokita"'', (participe passé du verbe ''"lok"'' (लोक्)) « ''voir, regarder (observer)'' » + "''[[Ishvara|īśvara]]''" (ईश्वर) « ''Seigneur'' » = ''"« Ava-lokit'''a-ī'''śvara »'' qui devient « Avalokit'''e'''śvara » (car suivant la règle du [[sandhi en sanskrit]] (externe en l’occurrence), les voyelles « '''''a''' + '''ī''' = '''e''''' » (अ + इ = ए)<ref>Gérard Huet, ''Dictionnaire héritage du sanscrit'': ''The Sandhi Engine'', lire en ligne : [https://sanskrit.inria.fr/cgi-bin/SKT/sktsandhier.cgi?lex=SH&l=a&r=i&t=VH&k=external]. Consulté le {{date|6 février 2020}}.</ref> , lorsqu’elles sont respectivement lettres finale et initiale de deux mots qui se suivent).
 
Il semble toutefois que son nom le plus ancien fut ''Avalokita-svara''<ref name="Chandra1988">{{Ouvrage|langue=en|auteur1=[[Lokesh Chandra]]|titre=The Thousand-armed Avalokiteśvara|éditeur=Abhinav Publications|date=1988|isbn=978-81-7017-247-5|lire en ligne=https://books.google.fr/books?id=0kBSFcX-K4wC&pg=PA18|page=18-22|consulté le=2020-08-21}}</ref> « qui a observé le son (ou les mots) », comme l’indique sa traduction la plus ancienne en chinois : kuìyīn 闚音 et d’autres telles que Guanyin, ainsi qu’un manuscrit sanskrit du {{s-|V}}. La forme chinoise 觀世音 Guānshìyīn, par exemple utilisée par [[Kumarajiva]] dans sa traduction du ''[[Sutra du Lotus]]'', et qui se traduirait en sanskrit par « *Avalokita-loka-svara », « qui a observé le son du monde », n’est confirmée par aucune source sanskrite ; une hypothèse émise par [[Lokesh Chandra]] est que les traducteurs chinois ont voulu expliciter ''loka'' qui pouvait être implicite dans ''avalokita'' en sanskrit<ref name="Chandra1988"/>. Selon Chandra, le glissement de ''svara'' en ''īśvara'' pourrait être dû à une influence [[Shivaïsme|shivaïte]]<ref name="Chandra1988"/>. En 646, le célèbre pèlerin et traducteur [[Xuanzang]] expliqua que l’on devrait traduire par Guānzìzài 觀自在 (zizai signifie Īśvara), ce qui indique qu'Avalokiteśvara était la forme prévalent à son époque<ref>{{OuvrageArticle |langue=en |auteursauteur1=Lokesh Chandra |titre=The Origin of Avalokiteśvara |lieu=Torino|éditeurpériodique=Indologica Taurinensia, The Online Journal of The [[International Association of Sanskrit Studies]] |date=1984, 16 p., lesquelles sont incluses dans un recueil de textes rassemblés, pp. de 187 à 202}} Lire|lire en ligne: [=http://www.asiainstitutetorino.it/Indologica/volumes/vol13/vol13_art13_CHANDRA.pdf]. Consulté|consulté le {{date|=5 mai 2020 |pages=187-202 }}.</ref>. Selon Seishi Karashima, ''svara'' signifiait en [[gandhari]] aussi ''smara'', « pensée » et Avalokitasvara « celui qui observe les pensées » et ce sens de ''svara'' dans cette langue moyenne-indienne (un [[prakrit]]) fut oublié lors de la traduction ultérieure des textes en sanskrit<ref>Seishi Karashima, « "Underlying Languages of Early Chinese Translations of Buddhist Scriptures" », in: Christoph Anderl and Halvor Eifring (Eds.), ''Studies in Chinese Language and Culture: Festschrift in Honour of Christoph Harbsmeier on the Occasion of his 60th Birthday, ed. by Christoph Anderl and Halvor Eifring'', Oslo 2006, Hermes Academic Publishing, 2006, pp. 355-366</ref>{{,}}<ref>Seishi Karashima, « Philological Remarks on the Lotus Sutra:On the Name Avalokitasvara », ''Journal of Chinese Literature and History'', 2009-03, n° 3</ref>.
 
Dans son nom en tibétain, Chenrézig, ''Chen'' signifie l'œil, ''ré'' le coin de l'œil et ''zig'' voir<ref>[[Sogyal Rinpoché]], [[Le Livre tibétain de la vie et de la mort]], Éditions de la Table ronde, 1993, p. 103</ref>.
 
== Premières représentations d'Avalokiteśvara ==
Les premières représentations d'Avalokiteshvara <ref>Référence : Gérard Fussman et Anna Maria Quagliotti, ''The early iconography of Avalokitesvara'' : '' L'iconographie ancienne d'Avalokitesvara'', Paris, Collège de France, Publications de l'Institut de Civilisation indienne. Paris, Diffusion De Boccard, 2012. {{ISBN|978-2-86803-080-1}}.</ref> datent d'après Jésus Christ et suivent de près les [[Art gréco-bouddhique #Premières représentations du Bouddha|premières représentations humaines de BuddhaBouddha]]. etElle desemblent bodhisattva-apparaître en [[Inde]] dans la seconde moitié du {{s|premièresII}}, représentationsdans humainesl'[[art gréco-bouddhique]] du [[Gandhara]] et dans l'art [[Kouchans|kusana]] de Buddha[[Mathura]]<ref>{{Ouvrage|langue=fr|prénom1=Amina|nom1=Okada|prénom2=Musée Guimet (Paris|nom2=France)|titre=Sculptures indiennes du musée Guimet|éditeur=Réunion des musées nationaux|date=2000|isbn=978-2-7118-4026-7|lire en ligne=https://books.google.fr/books?id=Q8VKAQAAIAAJ|page=84|consulté le=2021-07-08}}</ref>. Dans le [[Gandhara]] sous domination [[kouchan]] il est paré et vêtu comme un prince, le traitement du drapé suit peu ou prou les motifs en vigueur dans le monde hellénistique, dont le Gandhara est l'ultime héritier, à ses confins. Au centre de la coiffure figure le ''[[Cinq dhyani bouddhas|dhyâni-buddha]]'' [[Amitābha]].
 
Le bodhisattva Avalokiteshvara apparaît dans le [[Sūtra du Cœur|Sūtra du cœur]] et dans le chapitre 25 du ''[[Sūtra du Lotus]] de la Bonne Loi''. Cela dans la version en chinois classique : c’est « l'être d’Éveil Considérant les Voix du Monde »<ref>{{Ouvrage |langue=fr |auteur1=Shakyamuni |titre=''Le Sûtra du Lotus suivi du Livre des sens innombrables et du Livre de la contemplation du Sage-Universel'' |traducteur1=[[Kumarajiva]] |traducteur2 [[Jean-Noël Robert]] | lieu=Paris éditeur=[[Fayard]]|année=1997 et 2003 |isbn=2213598576 |chapitre=25. La Porte universelle de l'être d’Éveil Considérant les Voix du Monde |passage=363-375}}</ref>ou « le bodhisattva Sensible-aux-sons-du-monde »<ref>{{Ouvrage |langue=fr|titre=Le Sûtra du Lotus |auteur1=Shakyamuni |auteur2=Kumarajiva |traducteur1=Burton Watson |traducteur2=Sylvie Servan-Schreiber et Albert |chapitre=XXV. La porte universelle du bodhisattva Sensible-aux-sons-du-monde |lieu=Paris |éditeur=Les Indes savantes |année=2007 |pages totales=323 |passage=281 à 287 |isbn=978-2-84654-180-0}}</ref>.<br>Dans la version sanskrite traduite en français par [[Eugène Burnouf]], il s'agit du chapitre 24, intitulé « Récit parfaitement heureux »<ref>Chapitre XXIV «Récit parfaitement heureux» lire en ligne=https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k6278061s/f274.item</ref> qui traduit le titre du chapitre {{citation|''Samantamukha-parivarta XXIV''}}<ref>{{Ouvrage |langue=en |auteur1=Shakyamuni |auteur2=Kumarajiva |traduction=Tsugunari Kubo et Akira Yuyama |titre=The Lotus Sutra, Revised Second Edition |sous-titre=Taishō 262. Volume 9 |année=2007 |pages totales=362 |isbn=978-1-886439-39-9}}</ref>.<br> Ces deux soutras, probablement rédigés au nord-ouest de l'Inde, étant parmi les écrits les plus connus du [[Mahāyāna]], sont à ce titre récités quotidiennement dans la plupart des écoles bouddhistes du Grand Véhicule.
 
Les vingt-deux premiers chapitres du ''Sūtra du Lotus'' dateraient du {{Ier siècle}} et les six derniers du {{IIe siècle}} de notre ère. Dans le monde chinois, la traduction qui a fait autorité est celle du moine [[Koutcha|koutchéen]] Kumārajīva (344-413). Le Bouddha y expose qu'une grande figure se dresse pour aider toute personne en difficulté. Il entend toute personne qui prononce son nom. Il est donc « Celui qui considère les appels ». Le bodhisattva Avalokiteshvara (अवलोकितेश्वर) devient donc [[Guanyin]] (观音) : en chinois, ''guān'' signifie « qui considère, qui tourne son regard vers » et ''yīn'' est le son ou plutôt l'incantation. Son nom est traduit en anglais “the Bodhisattva Perceiver of the World’s Sounds” par [[Burton Watson]] puis en français « Sensible-aux-sons-du-monde ».<br>Interrogé sur ce nom, le Bouddha explique longuement qu’en tout lieu l’invoquer ou penser à son pouvoir est semblable à une porte universelle qui s’ouvre pour tout un chacun sur de nombreux bienfaits de toutes sortes. Il peut en effet prendre de multiples formes et se présenter en bouddha, en bodhisattva, en brahmane, en Roi Céleste ou en femme. Sont exposés ensuite différents cas où il peut intervenir : il protège de la magie noire, des bêtes féroces ou des serpents qui tuent par le regard. Le chef d'une caravane attaqué par des brigands peut l'invoquer. Une mère peut également faire appel à lui pour avoir un fils ou une fille.
 
== Représentations dans les pays d'Asie ==
=== En Chine : Guanyin ===
{{Article détaillé| Guanyin}}
 
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Fichier: Bodhisattva Avalokitesvara.jpg| Le bodhisattva Avalokiteshvara [[Guanyin]], assis en position de délassement, [[bois]], {{s mini-|XIV|e}} s., [[Musée Cernuschi]], [[Paris]]
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===== Au Tibet : Tchenrézi =====
''Tchenrézi'' (''spyan ras gzigs)'' est le nom tibétain d'Avalokiteśvara; bouddha pleinement éveillé et corps de gloire d'Amitabha, il prend l'aspect du bodhisattva de la compassion ; le [[dalaï-lama]] et le [[karmapa]] en sont considérés comme des émanations. Il est invoqué de façon universelle par les bouddhistes tibétains, notamment par la récitation du [[mantra]] ''[[om mani padme hum]]'' <ref>Jack Lu, [https://books.google.fr/books?id=fE6WAgAAQBAJ&pg=PA347 Les Deux visages du Tibet], Publibook.</ref>{{,}}<ref>{{en}} Lea Terhune, [https://books.google.fr/books?id=Wsk6Ovitb9YC&pg=PA270 Karmapa: The Politics of Reincarnation], Wisdom Publications , 1998, {{p.|270}}</ref>. Thukje Chenpo qui signifie « grande compassion » est un autre nom d'Avalokitesvara.
 
Il existe sous plusieurs aspects, à 2, 4 ou encore mille bras, un ou onze visages, seul ou en union avec une [[parèdre]], etc., selon les Tantras auquel il est associé. Différents aspects sont indiqués par [[Patrül Rinpoché|Patrul Rinpotché]] dans son ''Trésor du cœur des êtres éveillés'' <ref>{{Ouvrage|langue=fr|auteur1=Dilgo Khyentsé Rinpotché|titre=Le Trésor du cœur des êtres éveillés|lieu=Paris|éditeur=Seuil|collection=Points Sagesses|année=1996|isbn=978-2-020-22777-3}}</ref>.
 
Selon Lama [[Anagarika Govinda]], dans la mystique tibétaine, {{citation|Avalokiteśvara, le tout-compatissant, dont le mantra [[Om mani padme hum|OM MANI PADME HÛM]] constitue la plus haute expression de cette sagesse du cœur qui descend courageusement dans les profondeurs du monde et même dans les abîmes infernaux pour transmuer le poison de la mort en l'élixir de vie. Cependant Avalokiteśvara prend lui-même l'aspect de Yama, Dieu de la mort et Juge des morts, pour faire du fini le réceptacle de l'infini, le transfigurer dans sa lumière, le sanctifier et le libérer de la morte rigidité de l'isolement hors de la grande vie de l'esprit<ref>Lama [[Anagarika Govinda]], ''Les fondements de la mystique tibétaine'', Paris, Albin Michel, Spiritualités vivantes, 1960, {{ISBN|2-226-00-260-X}}, p. 182.</ref>.}}
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Fichier:'Bodhisattva Avalokiteshvara with Eleven Heads', Tibet, Norton Simon Museum.JPG|Avalokiteśvara à onze têtes, Tibet, {{s-|XVI|e}}
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===== En Mongolie =====
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==== Taïwan ====
Dans le monde chinois, et particulièrement à [[Taïwan]] où la pratique religieuse n'a pas subi d'entraves politiques, Guanyin est une des déités vers lesquelles on se tourne le plus souvent pour demander secours. En [[1981]], sur l'île de [[Île de Taïwan|Formose]], elle comptait 572 temples, un peu plus que la grande déesse taïwanaise [[Mazu]].
 
Seule une partie de ces temples est exclusivement bouddhique (sì 寺) ; la plupart appartiennent au grand réseau des temples de la [[religion traditionnelle chinoise|religion populaire]]. Le mode de culte dépend de l’administration du temple, prise en main tantôt par des [[bonze]]sses, tantôt par des laïques. Certains ne gardent de bouddhique qu'un espace à l’arrière du bâtiment réservé à la lecture des [[soutra]]s, alors que dans la salle principale on pratique [[divination]]s, exorcismes, ou incinération de papier-monnaie ; les offrandes alimentaires y sont au moins en partie carnées ; la déesse, comme toutes les divinités chinoises, fait sa tournée d'inspection de la « paroisse » lors des fêtes. Les statues de différents temples sont parfois liées entre elles par des relations hiérarchiques ou de parenté exprimant les relations sociales entre les communautés de fidèles ou les administrateurs des temples.
 
Dans les temples bouddhiques, Guanyin a typiquement l'aspect d'un bodhisattva « standard » vêtu d'un drapé lâche, en méditation les yeux mi-clos sur un lotus aux côtés des [[bouddha]]s, et son physique féminin est peu accentué. Dans les autres temples, son aspect féminin est évident ; elle porte parfois un costume de dame noble au lieu de la robe ample habituelle ; son visage peut être paré de couleurs humaines (joues roses) ou semblable à celui des divinités populaires (noir par ex.) ; elle est souvent debout sur un lotus de dimensions réduites. Elle est accompagnée de personnages du bouddhisme populaire (''shàncái'' et ''liángnǚ'' 善才良女, deux convertis exemplaires de chaque sexe, ou les dix-huit luohans -[[arhat]]), ainsi que du [[dieu du sol]] et de la déesse donneuse d’enfants, occupants habituels des temples populaires. Parfois elle partage son lieu de culte avec une autre divinité importante.
 
Dans presque tous les cas, elle est vêtue de blanc et tient en main la bouteille contenant l’eau qui purifie, une branche de [[saule]] (plante [[apotropaïque]] en [[Chine]]) ou un [[sūtra]], à moins que sa main vide ne fasse un geste bouddhique de protection. Une autre caractéristique commune à presque tous ses lieux de culte est leur fonction de secours aux trépassés : on peut y trouver des [[Tablette ancestrale|tablettes ancestrales]] ou même des cendres funéraires. Guanyin, que la tradition populaire fait régner avec [[Amitabha]] sur le [[paradis]] de la « [[Terre pure]] d’Occident », joue un rôle important lors du ''pudu'', cérémonie de libération accompagnée d’un festin offert aux âmes errantes lors de la [[Fête des fantômes]].
 
=== En Corée : Gwanseeum-bosal, Gwaneum ===
[[Fichier:Portrait_de_Gwaneum.jpg|vignette|Suwol Gwaneum bosal (수월관음도) <ref>{{Lien web |langue=en-US |titre=Water-Moon Avalokitesvara (Suwol Gwaneum bosal) |url=https://asia.si.edu/object/F1904.13 |site=Freer Gallery of Art & Arthur M. Sackler Gallery |consulté le=2020-08-19}}</ref> fait en Corée, époque de [[Goryeo]].|alt=]]
 
En [[coréen]], Avalokitesvara est connu sous différentdifférents noms : ''Gwanseeum'' (관세음), ''Gwaneum'' (관음), Gwangseeum (광세음), Gwanjajae (관자재), Gwansejajae (관세자재) etc. ''Gwanjajae'' est la traduction la plus proche du mot sanskrit ''avalokiteśvara'', mais ''Gwanseeum'' est l'appellation la plus célèbre (provenant du chinois [[Guanyin|Guanshiyin]]<ref>{{Ouvrage|langue=en|prénom1=Gene|nom1=Reeves|titre=The Stories of the Lotus Sutra|page=269|éditeur=Simon and Schuster|date=2010-11|isbn=978-0-86171861-64671646-3|lire en ligne=https://books.google.fr/books?id=z9N3r7AyvMQC&pg=PA269|page=269|consulté le=2020-08-22}}</ref>) et accompagnée de ''bosal (''보살'')'' qui signifie ''[[bodhisattva]]''<ref>Sauf mention spécifique, les informations dans la section sur la Corée proviennent de {{Lien web |langue=ko |auteur= |titre=관음신앙(觀音信仰) - 한국민족문화대백과사전 (Gwaneum Faith (觀音 信仰) |url=http://encykorea.aks.ac.kr/Contents/Item/E0004972 |site=encykorea.aks.ac.kr |périodique=Encyclopédie de la Culture du Peuple Coréen éditée par l'[[Académie d'études coréennes]] (AKS). |date= |consulté le=21 août 2020}}</ref>.
 
Le nom se décompose en ''Gwan'' (voir, observer), ''Se'' (monde), ''Eum'' (sons). ''Gwanseeum'' (''Gwaneum'' en abrégé) veut donc dire « [Celui qui] écoute les sons du monde ». Aussi, lorsqu’on invoque son nom de tout son cœur, Gwanseeum-bosal est censé entendre ces prières et délivrer de toutes les souffrances.
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En Corée, ''Gwanseeum'' est le plus populaire de tous les grands bodhisattvas, et il représente surtout la [[compassion]] ultime pour tous les êtres vivants. L'expression « croyance en Gwaneum » ''(''관음신앙'')'' exprime bien sa popularité.
 
Selon le ''[[Sūtra du Lotus|Sutra du lotus]]'' si l’on garde bien son nom et qu'on l’appelle avec ferveur, on ne sera pas brûlé dans un grand feu, ni noyé, ni tourmenté par les mauvais esprits. Couteaux, bâtons, menottes, boulets, tous seront brisés. ''Gwanseeum'' libère non seulement tous les cœurs des êtres de l'angoisse et de la peur, mais il libère aussi des [[trois poisons]] que sont la convoitise, la colère et l’ignorance (à savoir l'ignorance de la [[Dharma|loi du bouddha]] qui laisse les êtres sans lumière (coréen:무명 ''moumyeong)''.
 
Il est dit que grâce à ''Gwanseeum'', on aura un enfant, fils ou fille selon ce qu'on désire. Tous les êtres peuvent donc atteindre la grande libération ''(''해탈'', [[Bodhi|éveil]]'' ou ''[[Nirvana (monde indien)|nirvana]])'', s'ils gardent son nom tout le temps, lui rendent hommage et le prient de tout leur cœur.
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==== Représentations ====
''Gwanseeum-bosal'' tient en général une fleur de lotus en bouton dans la main gauche, et une vase rituel contenant une eau purifiante ''(''coréen 감로병, 정병 淨甁'','' sanskrit ''Kundika''<ref>{{Lien web |langue=en |auteur=National Museum of Korea |titre=Celadon Kundika with Reeds and Wild Geese in Relief |url=https://www.museum.go.kr/site/eng/relic/represent/view?relicId=1226 |site= |date= |consulté le=20 août 2020}}</ref>'')'' dans la droite. Le lotus symbolise la [[nature de bouddha]] gardée en tout être ([[sattva]]). Sous sa forme pleinement épanouie, il signifie la réalisation de la bouddhéité, tandis qu'à l'état de bourgeon il figure l'épanouissement de cette nature du bouddha dans un futur libre de toute angoisse. Quant à l’eau du vase, elle purifie les êtres, les soulage de toutes les maladies, douleurs et angoisses, et elle symbolise ainsi l'immortalité.
 
À la différence des autres bodhisattvas, au centre de la coiffure de Gwaneum, on trouve en général la représentation du bouddha [[Amitābha|Amitabha]].
[[Fichier:해수관음상.jpg|vignette|alt=|Statue en pied de Gwaneum destineé à protéger la mer de l’Est. Temple de Naksansa, Yangyang''.'']]
 
Il sauve les êtres qui se montrent persévérantpersévérants, en prenant notamment corps sous trente-trois formes différentes.
 
En Corée, les six Gwaneum les plus connus sont:
 
*Seong-Gwaneum (coréen 성관음'','' [[sanskrit]] ''Aryavalokitesvara'') : Avalokitesvara.
* Cheonsu-Gwaneum (coréen 천수관음'','' sanskrit ''Sahasra-bhuja Sahasra-netra'') : Avalokitesvara aux mille bras et mille yeux, qui voit tout et aide tous les êtres. Représenté souvent avec 42 bras tenant chacun un objet symbolique de 42 mantras<ref>{{Lien web |langue=ko |auteur=Buddhist Chongji Order |titre=천수관음보살 (千手觀音菩薩) |url=http://www.chongji.or.kr/bbs/board.php?bo_table=detail2&wr_id=11 |site=chongji.or.kr |date= |consulté le=}}</ref>.
 
*Sibilmyeon-Gwaneum (coréen 십일면관음, sanskrit ''Ekādaśamukha'') : bodhisattva à onze visages qui permettent d'enseigner aux êtres. On a un bouddha au centre, trois bouddhas généreux devant, trois en colère à gauche, trois sourires à droite, un grand rire derrière.
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On ajoute souvent à cette liste un septième bodhisattva, Bulgonggyeonsak-Gwaneum ''(''coréen ''불공견삭관음,'' sanskrit ''Amoghapāśa''), qui a un filet de pêche en main pour sauver les êtres. De toute la série, Seong-Gwaneum est la forme principale, et les autres sont ses émanations. Toutefois, Sibilmyeon-Gwaneum, Cheonsu-Gwaneum, ainsi que Yangryu-Gwaneum (coréen 양류관음, avec une branche de saule en main, symbole de guérison et de réalisation des vœux, apparaissent le plus fréquemment dans l’histoire coréenne.[[Fichier:Sept_Statues_de_Gwaneum_Botajeon_Naksansa.jpg|vignette|alt=|Sept statues de Gwaneum, temple de Naksansa, Corée.]]
 
En Corée, la croyance en Cheonsu-Gwaneum se répand à partir du {{S-|viii}} environ, avec beaucoup d’histoires miraculeuses, comme par exemple celle de l’enfant aveugle qui a retrouvé la vue grâce à Gwanseeum-bosal. Après l''’époque'' [[Goryeo]] (고려), cette croyance se généralise encore plus avec le soutra Cheonsu-gyeong (천수경) qui existe uniquement en Corée, ainsi que des mantras célèbres comme le Mantra de la Grande compassion (coréen 신묘장구대다라니, sanskrit ''Nilakhanta [[Dharani]]''). Ce soutra s’utilise surtout lors des prières, et cela dans la plupart des temples jusqu’à aujourd’hui.
 
==== Croyance en Gwaneum dans l’histoire de la Corée ====
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===== Époque [[Silla (Corée)|Silla]] (57 av. J.C. - 935) =====
Après avoir produit mille statues de Gwaneum et fait la prière'', Sopanmulim'' (un ministre de la reine Jindeok<ref>{{Lien web |langue= |auteur= |titre=Jindeok de Silla |url=https://fr.qwe.wiki/wiki/Jindeok_of_Silla |site=fr.qwe.wiki |date= |consulté le=20 août 2020}}</ref>) a un fils qui prendra le nom de [[Jajang]] et deviendra un grand moine en Corée. Jajang joue un rôle important pour faire de Silla un royaume bouddhiste.
 
Cependant celui qui a développé la croyance en Gwaneum dans le pays, est un autre grand moine du nom de Uisang. Il se rend en Chine, et à son retour en Corée, il prie dans une grotte auprès de la mer de l’Est pour voir Gwanseeum-bosal. Après sept jours, il lance son coussin de méditation dans la mer, après quoi les ''huit dieux,'' par exemple le dragon du cie''l (''천룡'', Naga'' en pali), lui donnent un chapelet en cristal et une perle magique qui réalise un vœu (''여의주 Yeouiju, [[Chintamani]]''). Cependant, il ne voit pas Gwanseeum-bosal. Alors, il prie encore sept jours de plus, à la suite de quoi il voit enfin Gwaneum. Celui-ci lui dit de construire un temple en un lieu où une paire de bambous (''c''oréen 쌍죽, chinois 雙竹) pousse. Uisang bâtit alors le temple Naksansa, l’un des trois lieux saints de Gwaneum, avec une statue du bodhisattva, et il y laisse le chapelet en cristal et la perle.
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On peut également relever que dans la plupart des temples coréens, on a construit des palais indépendants spécialement pour Gwanseeum-bosal au nom de Wontong-jeon ou Gwaneum-jeon.
 
=== Au Japon : Kannon ===
[[Fichier:Kano White-robed Kannon, Bodhisattva of Compassion.jpg|vignette|Kannon, représentation japonaise.]]
Au Japon on compte pas moins de {{nobr|33 formes}} de Kannon (Kanzeon, Kanjizaï) qui ont donné lieu à un des pèlerinages les plus célèbres du Japon. La forme principale reprend la forme chinoise de Guanyin, dont il garde la graphie. Il est arrivé avec le [[bouddhisme chan]], après être passé par la Corée, dans la version japonaise du chan, le [[zen]].
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{{...}}
{{Article détaillé|Theravāda}}
Au Sri Lanka, Avalokiteśvara est connu sous le nom de Natha-deva<ref>{{En}} « Avalokiteshvara », dans l'''Encyclopedia Britannica'', [https://www.britannica.com/topic/Avalokiteshvara Lire en ligne]</ref>.
 
==== Féminisation ====
Sa féminisation a très probablement tout d'abord été spontanée et populaire. Son image dans l'iconographie et la statuaire [[hindouisme|hindoue]] ─ visage imberbe aux traits fins, chignon bouclé, embryon de poitrine, silhouette gracieuse, parfois boucles d'oreille et collier ─ très éloignée des représentations masculines chinoises, associée à sa nature compatissante, ont dû décider assez vite de son changement de sexe auprès du fidèle ordinaire. On peut cependant en trouver une justification canonique dans le {{Lienlien|langue=en|trad=Kāraṇḍavyūha SutraSūtra|fr=Sutra de Kāraṇḍavyūha}} et le ''[[Sūtra du Lotus]]'', qui mentionne<ref>{{Ouvrage |langue=fr |langue originale=zh |auteur1=Traduction en anglais de Burton Watson puis en français par Sylvie Servan-Schreiber et Marc Albert |titre=Le Sûtra du Lotus |lieu=Paris |éditeur=Les Indes savantes |année=2007 |pages totales=323 |passage=281-287. |titre du chapitre=chapitre XXV, La porte universelle du bodhisattva Sensible-aux-sons-du-monde |isbn=978-2-84654-180-0}}</ref> la capacité du [[bodhisattva]] à prendre des aspects multiples ainsi que sa fonction de donneur d'enfant.
 
==== Légende ====
[[Fichier:Avalokitesvara bronze Gandhara. Musée des arts asiatiques Guimet.jpg|vignette|Bodhisattva Avalokiteshvara. {{sp-|III|e|-|IV|e}} (voire plutôt {{sp-|IV|e|-|V|e}}). [[Gandhara]]. Bronze, incrustations d'argent, H. {{unité|37|cm}}. [[Musée national des Arts asiatiques-Guimet|Musée Guimet]] <ref>{{harvsp|Ouvrage collectif par les conservateurs du musée Guimet|2006|p=40}}.</ref>]]
Comme toutes les divinités [[religion traditionnelle chinoise|chinoises]] elle a reçu une biographie terrestre, qui existe en quelques versions différentes, la plus répandue étant celle qui fait d’elle une princesse, elle-même [[réincarnation]] d’Avalokiteśvara. La déesse [[Mazu]], qui joue comme elle un rôle de protectrice, est parfois considérée comme un de ses avatars.
 
[[Guanyin#La_légende_de_Miao-shan|La princesse Miàoshàn 妙善]] était la fille d’un roi de [[Sumatra]] qui avait choisi de devenir nonne plutôt que d’épouser le riche parti choisi par son père. Celui-ci avait ordonné aux moines de la faire travailler jour et nuit afin de la décourager, mais les animaux des alentours vinrent à son secours et elle fut toujours en mesure d’accomplir la tâche demandée, quelle que soit son importance. Exaspéré, son père décida de mettre le feu au [[monastère]]. Miaoshan éteignit alors l’incendie de ses mains sans souffrir la moindre brûlure. Son père la fit finalement mettre à mort. Alors qu’elle se dirigeait vers le [[paradis]], elle baissa la tête et vit la souffrance du monde. Elle décida alors d’y rester pour sauver les âmes en détresse.
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À [[Taïwan]] Guanyin est parfois simplement nommée ''fózǔ'' 佛祖, « bouddha-ancêtre », appellation honorifique pour toute divinité issue du bouddhisme. ''Fozu'' sans autre précision désigne le plus souvent Guanyin, la plus populaire des déités bouddhiques.
 
Le tableau ci-contre récapitule les formes que prend son nom dans les divers pays [[Asie|asiatiques]] où elle est présente. (Quel tableau? Lien?)
 
==== Similitudes avec le [[culte marial]] ====
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* Chün-fang Yü, ''Kuan-yin. The Chinese Transformation of Avalokitesvara'', New York, Columbia University Press, 2001
* [[Lokesh Chandra]], « The Origin of Avalokitesvara », ''Indologica Taurinensia (International Association of Sanskrit Studies)'', vol. XIII 1984 (1985-1986), p. 187–202
* {{Ouvrage| langue=fr| prénom1=Jérôme| nom1=Ducor| titre=Le regard de Kannon| sous-titre=[exposition, Conches, Musée d'ethnographie de Genève, du 29 janvier au 20 juin 2010]| éditeur=Infolio éditions et Musée d'ethnographie de Genève| lieu=Genève| année=2010| pages totales=104| isbn=978-2-88474-187-3| lire en ligne=http://www.ville-ge.ch/meg/edition.php?id=66}}.
* {{Ouvrage|langue=fr|nom1=Jean-François Jarrige (Dir.) et al.|titre=De l'Inde au Japon : 10 ans d'acquisitions au Musée Guimet. 1996-2006|éditeur=Réunion des musées nationaux et Musée des arts asiatiques Guimet|lieu=Paris|année=2006|pages totales=222|pages=222|isbn=978-2-7118-5369-4}}
*{{Ouvrage|auteur1=[[Marie-Thérèse de Mallmann]]|préface=de [[Paul Mus]]|titre=Introduction à l'étude d'Avalokiteçvara|lieu=Paris|éditeur=Civilisation du Sud|date=1948|pages totales=342 + xxxii p.}}
 
== Articles connexes ==
* [[Guanyin]]
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* [http://dharma-arts.net/fr/content/9-chenrezig Chenrezi dans le Bouddhisme Tibétain, lettres germe, mantra, mandala]
 
{{Palette|Bouddhisme|Foi Kasuga|Foi Kumano}}
{{Portail|monde indien|bouddhisme|monde chinois|Tibet}}
 
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