« Siddhartha Gautama » : différence entre les versions

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{{Voir homonymes|Bouddha (homonymie)|Gautama (homonymie)|Siddhartha}}
{{Infobox Biographie2
|image = Buddha in Sarnath Museum (Dhammajak Mutra).jpg
|légende = Bouddha enseignant, [[Sarnath]], {{s-|V}}.
| maître = [[Arada Kalama]], [[Uddaka Ramaputta]]
|charte = moine bouddhiste
}}
[[Fichier:Bodhisattva Gandhara Guimet 181171.jpg|vignette|PrinceLe prince [[Siddhârtha Gautama]] ou [[Bodhisattva]] [[Avalokiteshvara]]. Gandhara site de Shahbaz-Garhi. Empire Kouchan, {{sp-|I|er|-|III|e}}. [[Schiste]]. Hauteur : {{unité|120|cm}}. Mission [[Alfred Foucher]]<ref>Notice du Musée Guimet : {{Lien web |langue= |titre=Bodhisattva debout |url=http://www.guimet.fr/fr/collections/afghanistan-pakistan/20-bodhisattva-debout |date= |site=Musée Guimet |consulté le=14 février 2016}}.</ref>, [[Musée national des artsArts asiatiques - Guimet|Musée Guimet]].]]
'''Siddhārtha Gautama''' ([[sanskrit]] ; [[pâli|pāli]] : ''Siddhattha Gotama''), dit '''Shakyamuni''' (« sage des [[Shakya (clan)|Śākyas]] ») ou le '''[[Bouddha]]''' (« [[Éveil spirituel|l’Éveillé]] »), est un [[Guru (maître spirituel)|chef spirituel]] qui vécut au {{-s|VI|e}} ou au {{-s|V|e}}, fondateur historique d'une communauté de moines errants<ref name=BT2>{{Ouvrage | auteur1=Roger Favry | titre=Le bouddhisme | éditeur=Pemf | collection=BT2 | année=1997 | pages totales=63 | isbn=978-2-87785-487-0 | isbn2=2-87785-487-6}}</ref> qui donna naissance au [[bouddhisme]].
 
Il naîtest né à [[Lumbini|Lumbinî]] situé, dans l'actuel [[Népal]]<ref>{{Lien web|langue=fr|nom1=mondial|prénom1=UNESCO Centre du patrimoine|titre=Lumbini, lieu de naissance du Bouddha|url=http://whc.unesco.org/fr/list/666|site=whc.unesco.org|consulté le=2018-03-13}}</ref>, sur la route de [[Kapilavastu]], la capitale du clan familial, dans l’actuel [[Terraï|Teraï]] [[népal]]aisnépalais<ref name=k/>, de [[Māyā (reine)|Māyādevī]] et [[Shuddhodana|Śuddhodana]], souverain des [[Shakya (clan)|Śākyas]] appartenant à la caste des [[Kshatriya|kṣatriyas]] guerriers et administrateurs, et fut actif dans les États de [[Kosala]] et [[Magadha]] au nord-est de l’[[Inde]] actuelle.
 
Il aurait vécu à peu prèsenviron quatre-vingts ans, mais les traditions ne s'accordent pas sur les dates exactes de sa vie, que les recherches modernes tendent à situer de plus en plus tard : vers [[Années 620 av. J.-C.|623]]-[[Années 540 av. J.-C.|543 av. J.-C.]] selon la tradition [[Theravāda|theravada]], vers [[Années 560 av. J.-C.|563]]-[[483 av. J.-C.]] selon la majorité des spécialistes du début du {{s|XX}}<ref>{{Ouvrage
|auteur1=Akira Hirakawa
|auteur2=Paul Groner
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Tous les courants bouddhistes le considèrent comme le « bouddha pur et parfait » (''samyaksambuddha'')<ref>Voir [[Bouddha#Trois types d'éveil]] et [[Bouddha#Dans le Theravāda]] pour la définition du ''samyaksambuddha''.</ref> de notre ère, qui non seulement a atteint l’éveil, mais est capable de « mettre en branle la [[Dharmachakra|roue de la Loi]] » et de propager l’[[Dharma|enseignement bouddhiste]] dans le monde. Son enseignement se transmit oralement pendant trois à quatre siècles avant d’être couché dans les textes du [[Tripitaka|canon pali]].
 
Le titre de [[''Bouddha]]'' (en [[sanskrit]] ''buddha'', « éveillé », participe passé passif de la [[radical (linguistique)|racine]] [[sanskrit]]e ''budh-'', « s'éveiller ») lui aurait été accordédonné plus tard par ses disciples. Ainsi, doté d’une majuscule dans la notation conventionnelle, ce titre désigne Shakyamuni afin de le différencier d’autresdes personnes[[Vingt-huit bouddhas|vingt-sept bouddhas]] qui l'ont précédé, mais aussi nomméesdes [[buddhabouddha]], pourau sens de titre donné à des personnes avoirayant transcendé la dualité [[samsara]]/[[nirvāna]] selon le [[bouddhisme mahāyāna]]. Il est également connu pour être unle ''[[tathāgata]]'', « l'Ainsi-Venu ou Allé / celui qui est venu / allé ainsi prêcher la bonne Loi » (''[[Dharma]]'').
 
== Nom et épithètes ==
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Parmi les nombreuses épithètes employées pour désigner le Bouddha, les textes bouddhistes, en particulier ceux de la tradition mahayana, emploient couramment Shakyamuni, ''Śākyamuni'' en sanskrit, « le Sage des Shakyas », les [[Shakya (clan)|Shakyas]] (sanskrit ''Śākya'', les « capables ») étant la tribu (ou clan, ou ethnie) du Bouddha. Ce terme est notamment employé pour le distinguer des autres Bouddhas qui ont existé et vont exister{{sfn|Buswell, Jr.|Lopez, Jr.|2014|p=741}}.
 
Les autres épithètes les plus courantes sont : ''[[tathāgata]]'', l'« Ainsi venu », ce qui renvoie aux attentes messianiques autour de la venuvenue d'un Bouddha, un terme souvent employé par le Bouddha dans les sutras pour se désigner lui-même et désigner les Bouddhas du passé{{sfn|Buswell, Jr.|Lopez, Jr.|2014|p=897}} ; [[samyaksambuddha]], « Bouddha/Éveillé complet et parfait » en sanskrit, ce qui renvoie à sa qualité de Bouddha qui a atteint l'Éveil suprême, qui surpasse tous les autres{{sfn|Buswell, Jr.|Lopez, Jr.|2014|p=764}}. Le terme sanskrit et pali ''[[Bhagavan|baghavat]]'', « Bienheureux » (ou plus simplement « Seigneur »), qui désigne en général un humain éminent ou les dieux, est réservé dans la littérature bouddhiste au Bouddha{{sfn|Buswell, Jr.|Lopez, Jr.|2014|p=108}}. La liste est loin de s'arrêter là : un texte lexicographique bouddhiste, le ''Mahāvyupatti'', mentionne quatre-vingt épithètes du Bouddha{{sfn|Bechert|2004|p=87}}.
 
== Vie du Bouddha ==
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=== Principaux épisodes et trame biographique ===
 
Les biographies traditionnelles du Bouddha sont relativement cohérentes. Un texte pali, le ''Buddhavaṃsa'' (la « Lignée des Bouddhas »), en donne un résumé, propos placés dans la bouche du Bouddha en personne, au seuilterme de sa vie :
 
{{citation bloc|La ville où je suis né est Kapilavatthou, mon père est le prince Souddhodhana, la mère qui m'a donné le jour est la dame Maya. Vingt-neuf ans, j'ai vécu à la maison, dans les trois palais incomparables de Rama, de Sourama, de Soubhata. Entouré de quarante mille femmes, de Bhaddacha, mon épouse, et de Rahoula, mon fils. Après avoir vu, pendant mes promenades en char ou à cheval, les quatre signes, j'ai pratiqué durant six années des austérités douloureuses. La Roue (de la Loi) a été mise en mouvement par moi à l'Isipatana de Bénarès, et je suis, moi Gotama, le Bouddha, le refuge de toutes les créatures. […] C'est sous le figuier que j'ai atteint l'Illumination suprême. Ma gloire s'élève à une hauteur de seize coudées. Ma vie embrasse presque un siècle et n'est pas terminée. Tant que je demeurerai sur cette terre, je ferai passer bien des êtres sur l'autre rive et fixerai le flambeau de la Loi pour ceux qui viendront après moi. Car, je n'ai plus longtemps à vivre avec mes disciples ; je m'éteindrai complètement comme le feu qui manque de combustible<ref>{{Ouvrage|titre=Gotama le Bouddha, sa vie d'après les écritures palies choisies par E. H. Brewster, avec une préface de C. A. F. Rhys Davids|lieu=Paris|éditeur=Payot|année=1952|passage=60-62}}, cité par {{harvsp|Ducoeur|2011|p=284-285}}.</ref>.}}
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=== Chemin spirituel et Éveil ===
==== Découverte de la souffrance : les quatre signes ====
[[Fichier:Great Departure.JPG|vignette|250px|gauche|''Abhiniskramana'', la grande renonciation : Gautama quitte Kapilavastu.]]
[[Fichier:Siddharta Gautama Borobudur.jpg|vignette|250px|gauche|Gautama se rase la tête et devient un ascète, [[Borobudur]], {{s-|VIII}}.]]
La tradition affirme qu'à 29 ans, alors qu'il se promène hors de l'enceinte du palais, il découvre la [[dukkha|souffrance]] endémique de son peuple qui lui avait été cachée jusqu'alors et le fossé qui la sépare du luxe de sa vie aristocratique.
 
==== Les quatre signes ====
[[Fichier:083 Four Signs (9225063815).jpg|vignette|redresse|Gautama rencontre un malade, un vieillard, un cadavre et un ermite.]]
La tradition affirme que quatre rencontres changent sa vie : un vieillard lui fait prendre conscience de la souffrance du temps qui passe et de la déchéance du corps vieillissant ; un malade lui apprend que le corps souffre aussi indépendamment du temps et un cadavre que l'on menait au bûcher lui révèle la mort dans tout son caractère sordide. Enfin, un ermite lui montre ce que peut être la sagesse. Selon diverses sources du canon, après la première rencontre, il fait part de son étonnement à son cocher [[Channa (bouddhisme)|Channa]], qui l’emmène hors du palais où il découvre les autres signes et prend pleine conscience de l’ubiquité de la souffrance<ref>[http://www.palikanon.com/namen/c/channa.htm Channa dans le canon pali – palikanon.com]</ref>.
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[[Fichier:Sermon in the Deer Park depicted at Wat Chedi Liem-KayEss-1.jpeg|vignette|gauche|Le Bouddha donnant son premier sermon à [[Sarnath]] (près de [[Bénarès]]) ; Wat Chedi Liem (Thaïlande).]]
 
Selon la tradition, devenu Gautama Bouddha (après avoir atteint l'éveil) il hésite à enseigner, se demandant si une telle parole sera entendue. La tradition fait intervenir un [[nâga]] qui le convainc de faire profiter l'Humanité de sa connaissance.
 
La ''[[Dhammacakkappavattana Sutta|Misemise en mouvement de la roue de la loi]]'' désigne le premier sermon de Gautama, dans lequel il énonce les [[quatre nobles vérités]] au groupe de cinq ascètes avec qui il vivait avant son éveil, et furent donc ses premiers disciples ''religieux''. On notera en effet<ref>{{Ouvrage|langue=en|auteur1=John S. Strong|titre=Relics of the Buddha|lieu=Delhi|éditeur=Motilal Banarsidas|année=2007|année première édition=2004|pages totales=xvii + 290 p.|passage=74|isbn=978-8-120-83139-1}}</ref> que, selon certaines versions de la vie du Bouddha, ses premiers disciples ne furent pas des religieux mais deux ''laïcs'' du nom de [[Trapusa et Bhallika]].
 
D'après la tradition, il affirme qu'il a réalisé l'éveil ou la compréhension totale de la nature et des causes de la [[Dukkha|souffrance]] humaine et des étapes nécessaires à son élimination. Cette illumination, possible pour tous les êtres, s'appelle la ''[[bodhi]]'' et donne son nouveau nom à Siddhārtha : celui qui a atteint la bodhi est un Bouddha.
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La deuxième est que tout être sensible possède en lui la [[tathagatagharba|nature de Bouddha]] (''tathāgatagarbha''), véritable nature de l'esprit, appelée parfois « graine d'éveil ». Cette interprétation, qui postule l'existence d'une nature universelle [[ontologique]] ou transcendante, est rejetée par le [[theravāda]] orthodoxe.
 
=== DoctrineLa etdiffusion disciplinede la Loi ===
{{...}}
 
Selon la tradition, pendant les quarante-cinq années restantes de sa vie, le Bouddha voyage dans la plaine gangétique du centre de l'[[Inde]] (la région du [[Gange]] et de ses affluents), enseignant son savoir à une grande variété de personnes.
 
=== La mort du Bouddha ===
Le Bouddha aurait décrit ses enseignements par l'expression ''dharma vinaya'', ce qui peut être traduit par « doctrine et discipline ». Cela revient à dire que ses principaux enseignements ont consisté à fournir un socle doctrinal et un code de conduite pour la communauté qui se forme autour de lui{{sfn|Lopez, Jr.|2001|p=106}}.
[[Fichier:EndAscetism.JPG|vignette|Le partage des reliques du Bouddha, art [[gréco-bouddhisme|gréco-bouddhique]] du [[Gandhara]], {{sp-|II|-|III}} ; Zenyōmitsu-ji, [[Setagaya]].]]
 
Le Bouddha mourut, selon la tradition, à quatre-vingts ans près de la localité de [[Kusinâgar]]<ref name=BT2/>. Il expira en méditant, couché sur le côté droit, souriant : on considéra qu'il avait atteint le ''[[parinirvāṇa]]'', la volontaire extinction du soi<ref name=BT2/> complète et définitive. Le Bouddha n'aurait pas souhaité fonder une religion<ref name=BT2/>. Après sa mort s'exprimèrent des divergences d'opinions qui, en l'espace de huit siècles, aboutirent à des écoles très différentes<ref name=BT2/>.
 
Selon le ''[[Mahāparinibbāṇa Sutta]]'', les derniers mots du Bouddha furent : {{citation|À présent, moines, je vous exhorte : il est dans la nature de toute chose conditionnée de se désagréger — alors, faites tout votre possible, inlassablement, en étant à tout moment pleinement attentifs, présents et conscients<ref>{{Lien web|titre = bouddhisme: mahaparinibbana sutta traduction jeanne schut|url = http://www.dhammadelaforet.org/sommaire/sutta_tipaka/txt/mahaparinibbana_js.html|site = www.dhammadelaforet.org|consulté le = 2015-08-19}}</ref>.}}
 
Selon ce même [[sutra]], son corps fut incinéré mais huit des princes les plus puissants se disputèrent la possession des [[sarira]], ses reliques saintes. Une solution de compromis fut trouvée : les cendres furent réparties en huit tas égaux et ramenées par ces huit seigneurs dans leurs royaumes où ils firent construire huit [[stūpa]]s pour abriter ces reliques. Une légende ultérieure veut que l'empereur [[Ashoka]] retrouva ces stūpas et répartit les cendres dans 84 000 reliquaires, les seuls stūpas datant de l'époque de cet empereur étant ceux de [[Sanchi]] et de [[Bharhut]]<ref>{{Ouvrage|auteur1=Charles Emmanuel Deuzeune|titre=La Mort et ses rites|éditeur=Le plein des sens|année=2003|passage=249-251|isbn=}}</ref>.
 
== Doctrine et discipline ==
 
Le Bouddha aurait décrit ses enseignements par l'expression ''dharma vinaya'', ce qui peut être traduit par « doctrine et discipline ». Cela revient à dire que ses principaux enseignements ont consisté à fournir un socle doctrinal et un code de conduite pour la communauté qui se forme autour de lui, posant les bases du Bouddhisme{{sfn|Lopez, Jr.|2001|p=106}}.
 
=== Sources ===
 
Le Bouddha n'a laissé aucun écrit, il s'est toujours exprimé sous forme orale à un auditoire hétéroclite, l'écriture n'étant probablement pas utilisée en Inde au {{-s|V|e}} Ce sont donc ses disciples qui se sont chargés de transmettre ses enseignements doctrinaux et ses prescriptions disciplinaires, avant de commencer à le coucher par écrit. Cela ne fut pas une mince affaire : la tradition bouddhiste rapporte la tenue de pas moins de trois « conciles », dont un qui a lieu tout juste un an après la mort du Bouddha, pour organiser et transmettre l'héritage spirituel du maître{{sfn|Becker|2016|p=50-51}}. Concrètement, au sortir de cette période de formation du corpus bouddhiste, la doctrine se trouve dans les écrits appelés ''[[sutra]]'', et la discipline monastique dans ceux appelés ''[[vinaya]]'' ; on y adjoint un troisième ensemble de textes qui ne découle pas directement des enseignements du Bouddha, mais de commentaires de sa doctrine, appelé ''[[abhidharma]]''{{sfn|Lopez, Jr.|2001|p=106}}. Il en est résulté un corpus de textes fondamentaux désigné par l'expression de « [[Trois corbeilles]] », reconnus comme valides par toutes les traditions bouddhistes, même si elles se divisent quant à la fixation de leur contenu et leur portée{{sfn|Becker|2016|p=50-51}}.
 
La tradition [[theravada]] considère que les sources en pali renvoient à l'enseignement authentique du Bouddha, et que cette langue était celle dans laquelle s'était exprimé le Bouddha. Ce statut a longtemps été accepté par les chercheurs avant d'être remis en cause, car elles n'ont été fixées par écrit qu'aux débuts de l'ère chrétienne et ne reprennent probablement pas une langue parlée du temps du Bouddha{{sfn|Becker|2016|p=52-53}}. De leur côté, les différentes écoles du [[Mahayana]] s'appuient sur d'autres sutras, présentés comme l'enseignement du Bouddha, mais révélé lors d'une [[Trois tours de roue du dharma|deuxième puis une troisième mises en mouvement de la roue de la Loi]], qui auraient contenu un enseignement plus profond et auraient été dispensées à des personnes plus accomplies que les disciples traditionnels du Bouddha. Selon la critique historique moderne, il s'agit de textes élaborés au plus tôt au dernier siècle avant notre ère et jusqu'au {{s|VII|e}}, qui ne sont donc parpas employés dans les tentatives de reconstitution des doctrines du bouddhisme primitif{{sfn|Harvey|1993|p=134-136}}{{,}}{{sfn|Buswell, Jr.|Lopez, Jr.|2014|p=243}}{{,}}{{sfn|Becker|2016|p=76}}.
 
Dans ces conditions, il est difficile de déterminer dans quelle mesure ces sources permettent d'approcher l'enseignement de Bouddha : certains estiment qu'il a été rapporté sans grands changements et que le contenu des textes les plus anciens peut permettre d'approcher l'enseignement authentique de Bouddha, alors que d'autres au contraire estiment qu'il a été altéré et reflète plus la pensée des générations postérieures au Bouddha que celle du maître dont elles se revendiquent<ref name=holt12/>.
 
==== La doctrine du Bouddha ====
 
[[Fichier:Bodnath2Bodnath, Katmandu in 1996.jpg|vignette|Temple de [[Bodnath]] à [[Katmandou]] (Népal).]]
[[Fichier:Large Gautama Buddha statue in Buddha Park of Ravangla, Sikkim.jpg|vignette|Statue de Siddhartha Gautama à [[Ravangla]] en Inde. Photo mai 2018.]]
{{Article détaillé|Bouddhisme#Doctrine}}
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Les récits qui le concernent, s'ils sont fiables, semblent révéler d'évidents talents dans l'art du discours et de l'enseignement, notamment une grande capacité à s'adapter à son auditoire{{sfn|Harvey|1993|p=59-62}}. L'efficacité de son premier sermon et des Quatre nobles vérités a notamment été mise en avant{{sfn|Becker|2016|p=49-50}}, en particulier sa structure de type médical, diagnostiquant d'abord la maladie, puis identifiant sa cause, déterminant ensuite si elle est guérissable, avant de proposer le remède{{sfn|Harvey|1993|p=82}}.
 
==== La formation de la communauté bouddhiste ====
 
Le Bouddha fonde la communauté des moines et des nonnes bouddhistes (''[[Sangha (bouddhisme)|saṅgha]]''), à laquelle il incombe de perpétuer ses enseignements après sa disparition.
 
Concrètement une personne devient un moine (sanskrit ''bhikṣu'', pali ''bhikku'', « mendiant ») quand il accepte de suivre le Bouddha lorsque celui-ci lui dit « Viens, moine »{{sfn|Lopez, Jr.|2001|p=145}}. Les textes bouddhistes désignent les disciples du Bouddha par le terme ''śrāvaka'', littéralement « auditeur »{{sfn|Buswell, Jr.|Lopez, Jr.|2014|p=850}}. Ces disciples sont également souvent des ''[[arhat]]''s, « méritants », êtres qui ont atteint l'Éveil, statut qui constitue l'objectif à atteindre dans les écoles du bouddhisme ancien{{sfn|Buswell, Jr.|Lopez, Jr.|2014|p=62}}. Divers récits relatent le moment de leur Éveil, qui survient généralement à l'écoute d'un discours du Bouddha : les cinq ascètes qui deviennent ses premiers disciples après le sermon de Bénarès l'atteignent après avoir écouté le second sermon, [[Shariputra]] en écoutant le Bouddha converser avec un autre moine, alors qu'il évente son maître, et [[Ananda]] durant la nuit qui suit la mort du Bouddha{{sfn|Lopez, Jr.|2001|p=206}}. Dans les traditions mahayana en revanche, la place des ''śrāvaka'' et des ''arhats'' est reléguée à un rang secondaire au profit de celle des [[bodhisattva]]s, à qui sont réservés les enseignements plus élevés de la deuxième et de la troisième mises en branle de la roue du dharma{{sfn|Lopez, Jr.|2001|p=113}}.
 
Quoi qu'il en soit la tradition bouddhiste a retenu l'existence de plusieurs disciples éminents du Bouddha, qui ont une grande place dans les écrits de cette religion. Par le passé un groupe de dix principaux disciples du Bouddha était distingué, constitué par ceux qui ont été les plus proches du maître durant sa dernière vie terrestre (et qui l'ont également croisé durant leurs vies antérieures). Ils ont chacun une spécificité. L'ordre de préséance peut varier, mais les trois plus importants sont [[Mahakashyapa]], spécialiste de l'ascèse, [[Shariputra]], spécialiste de la sagesse, et [[Ananda]], cousin germain du Bouddha, celui qui garde en mémoire les paroles du Bouddha, et auquel on attribue la rédaction des sutras. Ce groupe comprend aussi [[Moggallana|Maudglyayana]], qui est le premier dans la maîtrise des pouvoirs surnaturels, [[Upāli]] qui est le spécialiste de la discipline, et [[Rahula]], le fils du Bouddha, patron des novices{{sfn|Frédéric|1992|p=95-98}}. Les groupes constitués par les ''arhat''s, dans lesquels ont retrouve les précédents, sont plus divers, et ont une importance notable dans le Bouddhisme de l'Est, et aussi au Tibet. Leur nombre se serait élevé à 500, ce qui est une manière de dire qu'ils sont très nombreux. Avec le temps la tradition a retenu un groupe de [[seize arhats]] auxquels le Bouddha aurait demandé de rester dans le monde jusqu'à la dernière vie du futur Bouddha, [[Maitreya]]. De nombreuses histoires sont attachées à [[Pindolabharadrāja]], particulièrement vénéré au Japon. Rahula et [[Nagasena]] font également partie de ce groupe{{sfn|Frédéric|1992|p=98-104}}{{,}}{{sfn|Lopez, Jr.|2001|p=62}}.
 
Selon ce qu'ilqui ressort de la tradition bouddhiste, le Bouddha et ceux qui le suivent sont au départ un groupe d'ascètes errants, qui vit de peu. Après quelques années s'est apparemment instaurée l'habitude de rester au même endroit pendant la saison des pluies (environ de mi-juillet à mi-octobre), où des mécènes leur construisaient des abris. Ces aménagements seraient l'origine des premiers monastères bouddhistes, à partir du moment où les on prit l'habitude de résider en un même lieu tout au long de l'année, la sédentarisation de la communauté bouddhiste intervenant assez rapidement{{sfn|Lopez, Jr.|2001|p=130-131}}.
 
Après les premières années d'enseignement et le recrutement de disciples de plus en plus nombreux, la nécessité de créer des règles de vie intervient. Elle se fait au gré des événements, quand se présente la nécessité d'énoncer une règle. Les textes de discipline monastique (''[[vinaya]]'') comportent donc des histoires expliquant la circonstance de mise en place des règles qu'ils décrivent. Ainsi le principe selon lequel les moines devaient être abstinents sexuellement est énoncé après qu'un disciple de Bouddha ait rejoint sa famille à la demande de sa mère afin de mettre au monde un héritier à même de perpétuer sa lignée, ce qui lui vaut d'être critiqué vertement par le Bouddha{{sfn|Lopez, Jr.|2001|p=140-141}}.
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Les enseignements du Bouddha attirent aussi à lui des laïcs, qui n'intègrent pas la communauté monastique. Les récits évoquent surtout ceux qui deviennent ses mécènes, par exemple des femmes riches qui fournissent à Bouddha et aux moines de quoi se nourrir et se vêtir, des lieux où se loger, des remèdes médicaux. Il leur professe plutôt de se comporter en épouses et mères dévouées au sein de leur foyer, afin de bénéficier d'une renaissance favorable{{sfn|Lopez, Jr.|2001|p=161}}. Les protecteurs les plus éminents du Bouddha sont de rang royal, le plus important étant [[Bimbisara]], le souverain du puissant royaume de [[Magadha]], qui offre un lieu de retraite au Bouddha pour des saisons des pluies, puis fait ériger pas moins de dix-huit monastères dans sa capitale [[Rajagriha]] et ses environs{{sfn|Lopez, Jr.|2001|p=179}}.
 
=== Vies antérieures ===
=== La mort du Bouddha ===
[[Fichier:EndAscetism.JPG|vignette|Le partage des reliques du Bouddha, art [[gréco-bouddhisme|gréco-bouddhique]] du [[Gandhara]], {{sp-|II|-|III}} ; Zenyōmitsu-ji, [[Setagaya]].]]
 
Le Bouddha mourut, selon la tradition, à quatre-vingts ans près de la localité de [[Kusinâgar]]<ref name=BT2/>. Il expira en méditant, couché sur le côté droit, souriant : on considéra qu'il avait atteint le ''[[parinirvāṇa]]'', la volontaire extinction du soi<ref name=BT2/> complète et définitive. Le Bouddha n'aurait pas souhaité fonder une religion<ref name=BT2/>. Après sa mort s'exprimèrent des divergences d'opinions qui, en l'espace de huit siècles, aboutirent à des écoles très différentes<ref name=BT2/>.
 
Selon le ''[[Mahāparinibbāṇa Sutta]]'', les derniers mots du Bouddha furent : {{citation|À présent, moines, je vous exhorte : il est dans la nature de toute chose conditionnée de se désagréger — alors, faites tout votre possible, inlassablement, en étant à tout moment pleinement attentifs, présents et conscients<ref>{{Lien web|titre = bouddhisme: mahaparinibbana sutta traduction jeanne schut|url = http://www.dhammadelaforet.org/sommaire/sutta_tipaka/txt/mahaparinibbana_js.html|site = www.dhammadelaforet.org|consulté le = 2015-08-19}}</ref>.}}
 
Selon ce même [[sutra]], son corps fut incinéré mais huit des princes les plus puissants se disputèrent la possession des [[sarira]], ses reliques saintes. Une solution de compromis fut trouvée : les cendres furent réparties en huit tas égaux et ramenées par ces huit seigneurs dans leurs royaumes où ils firent construire huit [[stūpa]]s pour abriter ces reliques. Une légende ultérieure veut que l'empereur [[Ashoka]] retrouva ces stūpas et répartit les cendres dans 84 000 reliquaires, les seuls stūpas datant de l'époque de cet empereur étant ceux de [[Sanchi]] et de [[Bharhut]]<ref>{{Ouvrage|auteur1=Charles Emmanuel Deuzeune|titre=La Mort et ses rites|éditeur=Le plein des sens|année=2003|passage=249-251|isbn=}}</ref>.
 
=== Vies antérieures ===
{{Article détaillé|Jātaka}}
 
Les récits sur les vies antérieures du Bouddha, les ''Jātaka''s (« naissance », « nativité »), jouissent d'une grande popularité dans la tradition bouddhiste, qui se retrouve aussi bien dans les écrits que les représentations artistiques, qui en ont fait un de leurs thèmes de prédilection. Ils se comptent par centaines, le canon pali en compilant pas moins de 547 dans le ''[[Khuddaka Nikāya]]''. Un autre recueil majeur, en sanskrit, est le ''Jātakamāla'' d'Aryashura. Leur narrateur est le Bouddha historique lui-même, qui a acquis le pouvoir de se remémorer ses vies passées, alors qu'il était un [[bodhisattva]], un Bouddha en devenir. Les protagonistes de ces histoires sont des animaux comme des humains ou des divinités, essentiellement des personnages masculins, des êtres qui par la suite sont renés jusqu'à devenir le Bouddha historique. Ils présentent en particulier une des vertus cardinales du Bouddhisme, et plus largement des qualités annonciatrices de leur destin exceptionnel, et croisent aussi des vies antérieures de divers personnages amenés à côtoyer le Bouddha dans sa dernière vie (par exemple les antagonistes sont souvent des incarnations antérieures de [[Devadatta]]). Ces récits puisent leur inspiration dans des fables et contes du folklore indien, et mettent en exergue les différentes valeurs bouddhistes, ayant un rôle édifiant pour les fidèles<ref>{{en}} Reiko Ohnuma, « Jātaka », dans {{harvsp|Buswell, Jr.|2004|p=400-401}}.</ref>{{,}}{{sfn|Buswell, Jr.|Lopez, Jr.|2014|p=381}}.
 
Un des récits de vie antérieure du Bouddha les plus célèbres est le ''[[Vessantara Jātaka]]'', qui relate la vie du prince Vessantara, l'antépénultième incarnation du Bouddha et le parangon de la générosité (''dāna''). Ce récit relate en effet comment, mû par son infinie générosité, il se dépouille progressivement de son statut et de ses biens, jusqu'à donner ses propres enfants à un brahmane malfaisant, ce qui le conduit à vivre dans le dénuement le plus complet. Puis le roi des dieux Shakra (Indra) se présente sous une identité cachée et lui demande son épouse, ce à quoi Vessantara consent, mais il s'agissait d'une dernière épreuve qui confirme au dieu la qualité exceptionnelle du prince. Ce dernier est revient finalement dans son pays, où son père le roi a racheté ses enfants, et le dieu Shakra fait pleuvoir des joyaux sur le palais{{sfn|Buswell, Jr.|Lopez, Jr.|2014|p=964-965}}.
 
Parmi les autres récits de vie antérieure du Bouddha dans lesquelles il est un homme, un autre relate comment il est un prince sacrifiant sa vie en se précipitant du haut d'un ravin pour permettre à une tigresse affamée de nourrir ses enfants. Une autre fois il est un marchand dont le navire coule, qui choisit de se suicider de façon que ses quatre compagnons survivants s'accrochent à son corps flottant pour survivre. Parmi les histoires dans lesquels il est un animal, une raconte comment, alors qu'il est un lapin, il se jette dans le feu afin de permettre à un sage affamé de le manger, une autre rapporte une vie dans laquelle il est un éléphant aidant sept cents hommes à survivre dans le désert en les guidant vers une carcasse d'éléphant qui va leur servir à se nourrir{{sfn|Lopez, Jr.|2001|p=67}}. Les vies dans lesquelles il est une femme sont rares. Une fois il est une femme d'une grande beauté nommée Rupyavati, qui coupe ses seins pour les donner à une femme et à son jeune enfant qui sont sur le point de mourir de faim. Son époux accomplit un « acte de vérité », une sorte de serment, qui lui permet de les repérerrécupérer. Le dieu Shakra, intrigué par sa grande générosité, vient à sa rencontre, là encore sous un déguisement, constate sa valeur, et à sa demande il la transforme en homme, désormais nommé Rupyavata, qui devient le roi de son pays{{sfn|Lopez, Jr.|2004|p=159-171}}.
 
Dans son avant-dernière vie, le Bouddha est une divinité du nom de Shvetaketu{{sfn|Buswell, Jr.|Lopez, Jr.|2014|p=883}}, résidant au domaine des êtres célestes nommés Tushita, les « Satisfaits ». Suivant un principe de succession des Bouddhas, il a été désigné et intronisé à la tête de ce paradis par le Bouddha [[Kashyapa (bouddha)|Kashyapa]], alors que celui-ci s'apprêtait à entamer sa dernière renaissance. Il vit dans ces cieux dans l'attente du moment propice pour sa propre dernière renaissance, qui doit se faire dans le monde des humains, plus propice à éprouver la souffrance conduisant à la réalisation des [[Quatre nobles vérités]]. Il sélectionne scrupuleusement le moment de sa réincarnation et la famille dans laquelle il va renaître, intronise à son tour le Bouddha qui va venir après lui, [[Maitreya]], qui prend sa place aux cieux Tushita, puis part pour sa dernière vie, dans laquelle il doit atteindre l'Éveil, comme annoncé par ses vies antérieures. Le départ des cieux sert couramment d'introduction pour les récits de la vie du Bouddha historique{{sfn|Ducoeur|2011|p=287-288}}.
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