Bolet de Quélet

espèce de champignons

Suillellus queletii

Suillellus queletii, le Bolet de Quélet, anciennement Boletus queletii, est une espèce de champignons basidiomycètes du genre Suillellus dans la famille des Boletaceae. Il est caractérisé par son pied lisse sans ornementation, à la base de couleur betterave. Les couleurs orangeâtres de son chapeau et de ses pores sont assez variables.

Taxonomie

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Le nom correct complet (avec auteur) de ce taxon est Suillellus queletii (Schulzer) Vizzini, Simonini & Gelardi, 2014[1].

L'espèce a été initialement classée dans le genre Boletus sous le basionyme Boletus queletii Schulzer, 1885[1].

Synonymes

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Suillellus queletii a pour synonymes[1] :

  • Boletus lateritius Bres. & Schulzer
  • Boletus purpureus var. luteopurpureus Gillet
  • Boletus queletii Schulzer
  • Boletus rubicundus (Maire) E.-J.Gilbert
  • Dictyopus queletii (Schulzer) Quél.
  • Suillus lateritius (Bres. & Schulzer) Kuntze
  • Suillus queletii (Schulzer) Kuntze
  • Tubiporus queletii (Schulzer) Imler
  • Tubiporus queletii (Schulzer) Imler ex S.Ahmad, 1962
  • Tubiporus queletii (Schulzer) Maire
  • Versipellis queletii (Schulzer) Quél.

Phylogénie

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Deux Bolets de Quélet.

Cette espèce a été décrite pour la première fois vers 1885, simultanément mais séparément, par le mycologue autrichien Stephan Shulzer von Müggenburg et le Français Lucien Quélet. Les deux mycologues ont donné un nom différent à ce champignon, le dédiant l'un à l'autre. En effet, Schulzer l'a appelé Boletus queletii, tandis que Quélet l'a appelé Boletus schulzeri ; cependant, le champignon a reçu le nom qui lui a été donné en premier dans l'ordre chronologique, à savoir : Boletus queletii.

En fait, en 1796, Christiaan Hendrik Persoon avait décrit une espèce de bolet, lui donnant son premier nom scientifique Boletus erythropus, puis, au cours des 200 années suivantes, ce même nom a été largement utilisé pour reconnaître et identifier une espèce bien connue à pores rouges. Cependant, on a récemment découvert que le champignon de Persoon n'avait pas de pores rouges, mais des pores orange, et il a donc été décidé que l'utilisation du nom B. erythropus n'était pas valable pour celle-ci, et aujourd'hui l'espèce à pores rouges, probablement trouvée par Persoon, est connue sous le nom de Neoboletus luridiformis/Neoboletus erythropus/Neoboletus praestigiator (un autre nom qui a fait l'objet de mille disputes). Selon le livre Funga Nordica, le basidiomycète décrit à l'origine par Persoon était en fait ce que l'on connaît aujourd'hui sous le nom de Suillellus queletii.

Au cours de la période suivante, vers la fin du 19e et le début du 20e siècle, d'autres surnoms ont été donnés et utilisés pour ce champignon. Shulzer l'a également appelé Boletus lateriotius, puis Suillus lateritius. Après environ 130 ans, le nom a de nouveau été modifié. En 2014, après que le champignon ait été appelé Boletus Queletii pendant une longue période, ce sont les chercheurs italiens Alfredo Vizzini, Giampaolo Simonini et Matteo Gelardi qui, grâce à des examens moléculaires approfondis visant à comprendre la phylogénie de ce champignon, ont confirmé le changement de genre et l'ont réinséré dans le groupe des Suillellus au lieu de celui des Boletus[2],[3],[4].

Étymologie

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L'épithète spécifique queletii de son nom binominal lui a été attribué en l'honneur des travaux du mycologue Lucien Quélet (1832-1899).

Noms vulgaires et vernaculaires

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Ce taxon porte en français le nom vernaculaire ou normalisé suivant : Bolet de Quélet[5], Bolet betterave[6]. En Anglais, on l'appelle "Deceiving Bolete", ce qui se traduirait par "Bolet trompeur", en référence à sa grande variabilité de couleur et de morphologie.

Description du sporophore

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Jeune S. queletii en Slovaquie.

Les bolets sont des champignons dont l'hyménophore, constitué de tubes et terminés par des pores, se sépare facilement de la chair du chapeau. Ce chapeau d'abord rond, recouvert d'une cuticule, devient convexe à mesure qu’il vieillit. Ils ont un pied (stipe) central assez épais et une chair compacte. Les caractéristiques de Suillellus queletii, le Bolet de Quélet, sont les suivantes :

Son chapeau mesure de 5 à 15 cm, il est sec et souvent velouté, variable de couleur, brun, brun orangé, brun cuivré, brun orange, brun-rouge à rouge orangé, parfois avec des teintes cuivrées ou olivâtres.

L'hyménophore présente des tubes jaunes puis jaune olivâtre, nettement bleuissants. Ses pores sont fins, jaunes à orangés et enfin rouges, bleuissants. La sporée est de couleur brun olive foncé[7].

Son stipe mesure 5 à 15 cm x 1,5 à 4,5 cm. Il est de couleur crème à jaunâtre clair, sans aucun réseau, couvert de très fines granulations, presque indistinctes, si ce n'est sublisse. La base de ce pied est typiquement de couleur rouge pourpre betterave, à l'extérieur comme à la coupe.

La chair est jaune à jaune pâle, bleuissante à la coupe, de couleur rouge pourpre betterave à la base. Sa saveur est douce et son odeur est faible[8],[9].

Caractéristiques microscopiques

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Spores de Suillellus queletii.

Ses spores mesurent 10 à 13,5 µm x 5 à 6,5 µm[8]. Elles sont allongées-fusoïdes[9], lisses, jaune olive pâle, guttulées[7].

Ses basides sont clavées, tétrasporiques, non bouclées. Ses cheilocystides et pleurocystides sont fusiformes, clavées à vésiculeuses, en partie à contenu jaunâtre, mesurant 30 à 45 µm x 8 à 11 µm.

La cuticule est formée d'hyphes dressées à extrémités fusiformes ou cylindriques, non bouclées, plus ou moins pigmentées de brun, larges de 3 à 8 µm[7].

Galerie

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Variétés et formes

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De nombreuses variétés et formes ont été décrites pour Suillellus queletii. Tout comme S. luridus, elles traduisent la grande variabilité chromatique de l'espèce, c'est pourquoi certains mycologues les considèrent également comme assez superflues devant cette variabilité naturelle.

  •  
    Forme discolor.
    Suillellus queletii f. discolor, forme décolorée. Chapeau jaunâtre, tubes jaunes, pores orangeâtres, stipe jaune jonquille, betterave à la base. Couche orangeâtre sous les tubes. Spores 11,7-14,5 X 6-7,5 μm[10]. Peut très facilement se confondre avec la forme discolor de N. erythropus.
  •  
    Forme rubicundus.
    Suillellus queletii var. rubicundus, variété rubiconde. Chapeau rouge pourpre, rougeâtre. Pores orangeâtre sale. Stipe plus ou moins ponctué de rouge pourpre, rougeâtre. Base betterave, couche jaune sous les tubes. Sous chênes divers, assez fréquent sous chênes verts[10].
  • Suillellus queletii var. pseudoluridus, variété semblable à S. luridus. Chapeau irrégulier orangeâtre d'aspect granité. Pores orangeâtres. Stipe ponctué de fines méchules rouges avec parfois un début de pseudo-réseau. Chair jaune, rouge betterave dans sa moitié inférieure, plus noirâtre à la coupe que chez S. queletii. Ligne de Bataille plus au moins bien définie[10].
  • Suillellus queletii var. zugazae, chapeau crème plus ou moins sombre ou ochracé-orangé. Pores jaunes à rose orangé. Stipe nu ou éraillé, crème foncé, jaunâtre. Chair blanche, un peu jaunâtre, rouge foncé dans le stipe, se prolongeant par une faible ligne rougeâtre plus ou moins longue au-dessus des tubes. Sous Pinus sylvestris. Spores 16-18 x 5-8,5 μm[10].
  • On notera également Suillellus queletii var. lateritius, Suillellus queletii var. aurantiacus, Suillellus queletii f. junquilleus et Suillellus queletii var. squarrosipes.

Habitat et distribution

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Le Bolet de Quélet est une espèce ectomycorhizienne, thermophile, commune à inhabituelle en France et en Europe, poussant uniquement sous feuillus, surtout sous chênes et charmes dans les bois clairs, mais aussi sous les noisetiers, les hêtres et les tilleuls, à basse altitude. Il préfère les sols calcaires, alcalins, basiques, argileux ou limoneux, dont le pH est supérieur à 8,0[7]. À l'intérieur des forêts, il préfère se développer en bordure des chemins ou à proximité des zones humides, comme les prairies feuillues ou les landes herbeuses. Fructifiant du début de l'été à la fin de l'automne, en particulier de mai-juin à fin septembre-début octobre, avec une préférence pour les mois d'été les plus chauds[3], il n'est pas rare de le trouver dans les parcs, les jardins et autres zones herbeuses péri-urbaines, aux côtés de Suillellus luridus et Caloboletus radicans, elle apprécie particulièrement les microclimats anthropiques chauds[9],[11].

C'est une espèce en danger en République Tchèque, elle figure aussi sur la liste rouge des espèces menacées en Allemagne et dans d'autres pays européens tels que le Danemark, la Norvège, les Pays-Bas ou la Finlande. En Asie, elle a été observée à Taïwan. On la trouve en Amérique du Nord dans le Vermont et en Afrique du Nord au Maroc. En Europe, les populations se situent principalement au sud. Vers le nord, la répartition s'étend jusqu'au sud de la Suède. Vers l'est, on trouve le champignon au moins jusqu'au Caucase. Il est probable que sa répartition s'étende encore plus loin, jusqu'en Extrême-Orient ou même en Chine[4],[12],[3].

Comestibilité

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Le Bolet de Quélet est comestible à condition de prendre la précaution de bien le cuire car, comme le Bolet blafard ou le Bolet à pied rouge, il est toxique s'il est consommé cru ou mal cuit de par la présence de toxines hémolytiques thermolabiles. Sa toxicité est d'ordre gastrointestinale. C'est une espèce consommée occasionnellement, d'interêt gustatif généralement donné comme moyen, comparable à celui S. luridus, mais tout de même inférieur à d'autres espèces bleuissantes plus populaires comme N. erythropus[11],[13].

Confusions possibles

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Le Bolet de Quélet est une espèce aux teintes variables plus au moins facile à confondre avec d'autres espèces bleuissantes aux teintes orangées, les critères principaux pour la distinguer seront le pied lisse, sans réseau, et la base du pied de couleur betterave. S. queletii est à comparer avec les espèces suivantes :

  •   Le Bolet à pied jaune (Neoboletus xanthopus), qui n'a pas la chair de la base du pied de couleur betterave. Son chapeau est brunâtre marbré d'ochracé, contrairement au chapeau rougeâtre uniforme de S. queletii.

Voir aussi

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Bibliographie

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Articles connexes

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Liens externes

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Notes et références

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  1. a b et c V. Robert, G. Stegehuis and J. Stalpers. 2005. The MycoBank engine and related databases. https://www.mycobank.org/, consulté le 24 mars 2024
  2. (en) Giampaolo Simonini, Matteo Gelardi, Alfredo Vizzini, « Neotypification of Boletus erythropus »   [PDF], sur Researchgate, (consulté le )
  3. a b et c (it) « Suillellus queletii - Funghi Magazine », (consulté le )
  4. a et b Michal Mikšik, « Rare and Protected Species of Boletes of the Czech Republic », Field Mycology, vol. 13, no 1,‎ , p. 8–16 (ISSN 1468-1641, DOI 10.1016/j.fldmyc.2011.12.003, lire en ligne, consulté le )
  5. MNHN & OFB [Ed]. 2003-présent. Inventaire national du patrimoine naturel (INPN), Site web : https://inpn.mnhn.fr, consulté le 24 mars 2024
  6. UICN Comité Francais, « La Liste rouge des espèces menacées en France » [PDF], sur uicn.fr, (consulté le )
  7. a b c et d « MycoDB : Fiche de Suillellus queletii », sur www.mycodb.fr (consulté le )
  8. a et b « Mycocharentes - Suillellus queletii »
  9. a b et c Guillaume Eyssartier & Pierre Roux, Guide des champignons – France et Europe – 4ᵉ édition, Belin, 2017.
  10. a b c et d Alain Estades, Gilbert Lannoy, Bulletin Mycologique et Botanique Dauphiné-Savoie : Les bolets européens, , 79 p.
  11. a et b « Boletus queletii », sur www.francini-mycologie.fr (consulté le )
  12. Yeh K-W, Chen Z-C., The Boletes of Taiwan,
  13. italien, « GUIDA RAGIONATA ALLA COMMESTIBILITÀ DEI FUNGHI »