Histoire de la Savoie dans l'Antiquité

L'histoire de la Savoie dans l'Antiquité présente une synthèse de la période antique de l'entité géographique et historique appelée Savoie, un territoire correspondant aux deux départements français actuels de la Savoie et de la Haute-Savoie. Elle s'étend de l'installation au VIe siècle av. J.-C. de peuplements celtes, originaires des plaines du Danube, à la concession de la Sapaudie ou Sapaudia au peuple germain des Burgondes, au Ve siècle, par les Romains, en passant par les premières incursions romaines à partir du IIe siècle av. J.-C. et la conquête définitive de ce territoire à la fin du siècle suivant.

Au cours de cette période, la Savoie en tant que telle n'a pas de définition précise, le nom de Sapaudie ou Sapaudia apparaît pour la première fois dans les Res Gestae d'Ammien Marcellin, vers la fin du IVe siècle, où il décrit le cours du Rhône : « d'où sans perte il va à travers la Savoie et les Séquanes ; et, ayant beaucoup avancé, il longe la Viennoise du côté gauche, la Lyonnaise du côté droit (...) »[1],[Note 1].

Peuplement celto-ligure

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Les territoires de la Savoie sont occupés dès 500 av. J.-C. par les peuplades celtes, originaires des plaines du Danube.

Les Allobroges

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Territoire des Allobroges.

Le plus important d'entre eux est constitué des tribus Allobroges qui s'établissent dans l'avant-pays plat, entre le Rhône et les Alpes (le Viennois, le Graisivaudan, la Savoie Propre, le Genevois, le Chablais moderne et le bas-Faucigny). « (...) géants blonds, armés de longues épées de fer, occupèrent exclusivement les vallées riches et les petites Alpes d'eaux vives, de rochers calcaires et de bois (Aravis, Bauges, Chartreuse) »[3]. Fédérés, ils prennent Vienne comme capitale, développant les bourgades de Grenoble et de Genève. Les Allobroges sont des agriculteurs et ils exploitent les mines de fer de la région. On a trouvé des traces de cette exploitation au Salève ou encore à proximité de Faverges[4].

Les tribus montagnardes

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Ils se distinguent des autres peuples occupant les parties les plus hautes de ce milieu, maîtrisant les différents passages par les cols alpins[5]. On distingue ainsi les Médulles qui occupent la basse-Maurienne ; les Adanates et les Graiocèles dans le haut de la vallée de l'Arc ; dans la vallée voisine, la Tarentaise, ce sont les Ceutrons qui sont aussi présents dans le Beaufortain, le haut-Faucigny.

Il semble aussi que les Ligures soient présents dans la haute vallée de Tarentaise et du Beaufortain.

La description du territoire chez les auteurs anciens

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La Savoie romaine

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Conquête et intégration

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Carte de l'Italie du Nord sous Auguste. La future Savoie partagée entre l'Italie et la Gaule.

Le contact avec l'histoire écrite remonte avec l'hypothétique passage des Alpes par Hannibal par cette région en -218. Toutefois, l'intérêt romain pour cette région tarde jusqu'à ce que les Allobroges et des Arvernes viennent prêter main-forte aux Celto-ligures de la Provence, en 122, contre Marseille, elle-même alliée aux Romains. Ce conflit est un échec pour les Celto-ligures. Les Romains, qui ont entamé la conquête du pays des Allobroges (ou Allobrogie), vers -125 avec le passage par le col de Montgenèvre par le consul Fulvius Flaccus, sont menés par le consul Q. Fabius Maximus et ils défont les Allobroges en -121[6],[7]. Cette région est incorporée à la Narbonnaise. Seules les trois grandes vallées intra-alpines de la Maurienne, de la Tarentaise et du Faucigny restent inoccupées.

L'Allobrogie se soulève à nouveau, dans le Ier siècle av. J.-C., avec Catugnatos, "le chef de la nation entière des Allobroges"[8]. L'armée allobroge est battue en -62/-61 par le consul Dominius en un lieu nommé Solonion.

 
Partition des alpes occidentales entre les provinces de la Gaule et de l'Italie au temps de l'empire romain.

Cependant, les peuples de hautes vallées résistent encore. Jules César, dans ses Commentaires sur la Guerre des Gaules, en cite certains qui s'opposent à son passage, en 58 av. J.-C., entre Ocellum, en Gaule cisalpine, et le territoire des Voconces : « [...] il (César) gagne l’Italie par grandes étapes ; il y lève deux légions, en met en campagne trois autres qui prenaient leurs quartiers d’hiver autour d’Aquilée, et avec ses cinq légions il se dirige vers la Gaule ultérieure, en prenant au plus court, à travers les Alpes. Là, les Centrons, les Graiocèles, les Caturiges, qui avaient occupé les positions dominantes, essayent d’interdire le passage à son armée. » — Jules César, Livre I, 10.

Toutefois, la soumission de l’ensemble des territoires alpins s'accélère. La Tarentaise et le Faucigny, pays des Ceutrons deviennent la province des Alpes Graies ou Grées. Axima (aujourd'hui Aime) en devient la capitale, sous le nom de Forum Claudii Ceutronum, en l'an -42. La Maurienne composée de Médulles appartient à la province des Alpes Cottiennes, avec pour capitale Suse (le roi Cottius devient préfet de la province)[9],[10]. L’arc de Suse (9 av. J.-C.) et le Trophée de la Turbie (6 av. J.-C.), au-dessus de Nice, célèbrent la victoire des légions romaines sur les peuples des Alpes (dont les Médulles et les Adanates)[11].

L'administration romaine

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La partie occidentale, l'Allobrogie, intègre la province de la Narbonaise. La vallée de l'Arc (Maurienne) est intégrée dans un État indépendant, les Alpes cottiennes, avec le roi Marcus Julius Cottius, avec Suse pour capitale. Elle n'est réunie à l'Empire que sous Néron, à la suite de la mort de Cottius II, dans les Alpes Grecques. La vallée de l'Isère (Tarentaise) appartient à ce dernier ensemble avec Axima pour centre, qui est remplacé par Darantasia.

En 171, une réforme administrative et territoriale a pour conséquence l'unification des provinces des Alpes Graies et des Alpes Pennines (canton du Valais, une partie de la Tarentaise). À nouveau en 286, une nouvelle réorganisation fusionne les Alpes Graies et des Alpes Pennines, et le Viennois, et donc l'ancienne Allobrogie, devient une province avec pour capitale Vienne (au détriment de la province de la Narbonnaise).

Vers 290, la "légion thébaine" a pour ordre de tuer la population d'Octodure (Martigny). Parmi les légionnaires refusant ce traitement, le martyr Maurice d'Agaune (futur saint Maurice), qui devient le saint patron de la famille de Savoie (avec la création de l’ordre des Saints-Maurice-et-Lazare). Le site où disparut cette légion révoltée voit l’établissement d’une abbaye en 515.

Il faut attendre 354 pour qu'Ammien Marcellin emploie l'expression « Sapaudia » pour désigner ce territoire naturel.

Les voies romaines

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Vue partielle de la Table de Peutinger. Au centre la voie passant en Tarentaise par les cités : Axima (Aime) X. Darantasia (Moûtiers) XIII. Obilonna III. Ad Publicanos (Conflans, Albertville) XVI Mantala (Saint-Jean-de-la-Porte).

Ce territoire possède en effet un intérêt géostratégique pour les Romains, car par ses cols, il est un lien entre la péninsule et la Gaule. Les Romains vont donc construire un réseau routier (voir Voie romaine) important dans cet axe nord-sud - voies prétoriennes, consulaires et militaires - et développer un réseau secondaire pour relier les cités. La Table de Peutinger, l'Itinéraire d'Antonin indiquent les différents tracés passant par les cols alpins et quadrillant la Savoie.

Les travaux de l'abbé Ducis (1861, Mémoire sur les voies romaines en Savoie, p. 13)[12] distinguent ainsi :

Enfin, les voies secondaires reliant Darantasia à Octodurum (Martigny), une autre entre la Tarentaise et la Maurienne, celle entre Boutæ et Aquae (Aix) etc.

Pré-christianisation du territoire

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Les communautés chrétiennes apparaissent dès le IIe siècle à Vienne et à Lyon, avec la création d'évêchés. La christianisation de la Sapaudie semble elle plus tardive. Elle se diffuse depuis Vienne vers les deux autres importantes bourgades, Grenoble et Genève, élevées au rang de cité vers 380, deviennent le siège d'évêchés peu de temps après[13]. Le premier évêque de Genève est mentionné vers 400[13]. La partie nord de la Savoie (Petit-Bugey savoyard) et la région de Belley forment également un évêché détaché de Vienne, créé au Ve siècle[13]. Les vallées alpines ne semblent pas concernées dans un premier temps, il faut attendre les Ve et VIe siècles pour voir se créer les premiers diocèses, Tarentaise (vers 427-428) et Maurienne (vers 575)[13].

Pour aller plus loin

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Bibliographie

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Articles connexes

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Liens externes

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Notes et références

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  1. Unde sine jactura rerum per Sapaudiam fertur et Sequanos (...)[1],[2].

Références

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  1. a et b Pierre Duparc, « La Sapaudia », Comptes rendus des séances de l'Académie des Inscriptions et Belles-Lettres, vol. 102, no 4,‎ , p. 371-384 (lire en ligne).
  2. Adolphe Gros, Dictionnaire étymologique des noms de lieu de la Savoie, La Fontaine de Siloé, (réimpr. 2004, 2021) (1re éd. 1935), 519 p. (ISBN 978-2-84206-268-2, lire en ligne), p. 443.
  3. Henri Ménabréa, Histoire de la Savoie, Bernard Grasset, (réimpr. 1960, 1976, 2009), p. 10.
  4. Aristide Béruard, Marius Hudry, Juliette Châtel, Alain Favre, Découvrir l’Histoire de la Savoie, Centre de la Culture Savoyarde, , 240 p. (ISBN 2-9511379-1-5), p. 22-23.
  5. Louis Comby, Histoire des Savoyards, Nathan, coll. « Dossier de l'histoire », , 160 p. (ISSN 0154-9499), p. 10.
  6. Aristide Béruard, Marius Hudry, Juliette Châtel, Alain Favre, Découvrir l’Histoire de la Savoie, Centre de la Culture Savoyarde, , 240 p. (ISBN 2-9511379-1-5), p. 25
  7. Roland Edighoffer, Histoire de la Savoie, t. 151, Presses universitaires de France, coll. « Que sais-je ? », , 128 p. (ISBN 978-2-13-044838-9), p. 13.
  8. Histoire de Savoie 1984, p. 168, Extrait de Dion Cassius, Histoire romaine.
  9. Aristide Béruard, Marius Hudry, Juliette Châtel, Alain Favre, Découvrir l’Histoire de la Savoie, Centre de la Culture Savoyarde, , 240 p. (ISBN 2-9511379-1-5), p. 26
  10. Louis Comby, Histoire des Savoyards, Nathan, coll. « Dossier de l'histoire », , 160 p. (ISSN 0154-9499), p. 11.
  11. Le trophée de la Turbie atteste la soumission de 44 tribus alpestres, toutefois les Ceutrons ne sont pas répertoriés.
  12. Jules-Joseph Vernier, Étude historique et géographique sur la Savoie, Paris, Le Livre d'Histoire - Res Universis, (réimpr. 1993) (1re éd. 1896), 185 p. (ISBN 978-2-7428-0039-1 et 2-7428-0039-5, ISSN 0993-7129), p. 36-41.
  13. a b c et d Jacques Lovie, Histoire des diocèses de France : Chambéry, Tarentaise, Maurienne, vol. 11, Paris, Éditions Beauchesne, , 299 p. (ISSN 0336-0539), Introduction, p.14. ([PDF] en ligne).