Kateri Tekakwitha

sainte amérindienne du XVIIe siècle

Kateri Tekakwitha (Tekakwitha : « Celle qui avance en hésitant » en langue iroquoise ; aussi connue comme le « lys des Mohawks[1] »), née en 1656 à Ossernenon sur les rives de la rivière Mohawk (aujourd'hui située dans l'État de New York) et morte en 1680, est une jeune Agniers convertie au christianisme.

Kateri Tekakwitha
Image illustrative de l’article Kateri Tekakwitha
Sainte Kateri par Joseph Légaré, 1843.
Sainte
Naissance 1656
Ossernenon (proche d'Auriesville), Iroquoisie
Décès   (24 ans)
Kahnawake, Nouvelle-France (aujourd'hui Québec)
Nationalité « Mohawk »
Béatification
par Jean-Paul II
Canonisation  Vatican
par Benoît XVI
Fête 17 avril
Attributs vêtements traditionnels, avec voile ou cape, tenant un crucifix ou un chapelet
Sainte patronne l'environnement, l'écologie, les autochtones

Après sa béatification par Jean-Paul II le , un décret portant sur un nouveau miracle a été signé en et a permis qu'elle soit déclarée sainte par l'Église catholique. Elle devient ainsi, le , la toute première autochtone d'Amérique du Nord à être canonisée, lors d'une cérémonie présidée par le pape Benoît XVI à Rome.

Biographie

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Enfance

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Sa mère, convertie au catholicisme, était algonquine alors que son père était agnier[2] ; ils venaient donc de deux tribus traditionnellement ennemies. Son lieu de naissance a vu le martyre d'Isaac Jogues, de René Goupil et de Jean de La Lande. Surnommée le « lys des Agniers », parfois on l'appelle tout simplement Catherine. Elle est une figure importante de l'histoire catholique canadienne et même nord-américaine[3],[4].

À l'âge de quatre ans, elle perd toute sa famille (ses parents et son frère) à la suite d'une épidémie de petite vérole qui frappe la région de 1661 à 1663, sa vue est alors considérablement affaiblie et sa figure demeurera « grêlée » des suites de cette terrible maladie jusqu'à sa mort. C'est par ailleurs l'évènement qui est à l'origine de son nom : « Tekakwitha »[5], traduisible en « celle qui avance en hésitant (ou péniblement) » ou « celle qui meut quelque chose devant elle »[6],[3],[7],[4].

Conversion chrétienne

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Portrait de Kateri Tekakwitha.

Elle a dix ans quand son village déménage à Caughnawaga (l'actuelle ville de Fonda, dans l’État de New York). En 1667, ce village reçut la visite de missionnaires jésuites, les Pères Frémin, Bruyas et Pierron. C’est par eux que la jeune fille fait la connaissance de la religion catholique[8].

Lorsqu'elle en a l'âge, ses parents adoptifs (oncle et tante) ainsi que le chef amérindien l'obligent à choisir un mari mais, d'après les historiographes catholiques, elle souhaite ardemment conserver sa virginité afin de se consacrer à Jésus. Sa foi chrétienne serait largement due à l'arrivée de missionnaires catholiques dans son village[6],[7]. Son refus de mariage la réduit quasiment à l'esclavage[3],[4].

Elle exprime alors le vif désir de devenir chrétienne, d'être baptisée. Jacques de Lamberville, un jésuite, accède ainsi à sa demande mais seulement après six mois de catéchuménat : elle est baptisée par ce même prêtre le jour de Pâques, le . Elle reçoit du père Lamberville le nom de Catherine , en l'honneur de la sainte Catherine de Sienne[9],[3],[7]. D'après Robert Derome, le nom de « Kateri » qui lui est aujourd'hui associée n'est « qu'une création fictionnelle de la fin du XIXe siècle »[10],[4]. D'autre sources hagiographiques expliquent que « Kateri » est la traduction en iroquois de Catherine[7],[4].

Arrivée ensuite à la mission Saint-François Xavier, à La Prairie (cette mission est depuis 1716 établie sur le site de Kahnawake), en 1677, après un difficile voyage, elle désire alors se faire religieuse et ainsi entreprendre une démarche de conversion de la vallée iroquoise. La prière la transforme profondément[3],[7],[4] à tel point que sa piété impressionne l'historien François-Xavier Charlevoix, en mission en Nouvelle-France sur les ordres du roi Louis XIV qui l'avait délégué[11]. Elle ne vécut toutefois que trois années sur les bords du fleuve Saint-Laurent mais on lui attribue néanmoins d'avoir sauvé la colonie des attaques autochtones, la vue de sa tombe ayant effrayé et ainsi découragé les envahisseurs.

Elle rend l'âme le , à l'âge de vingt-quatre ans, en odeur de sainteté selon ses biographes jésuites. La tradition rapporte qu'à sa mort, son visage redevint lisse et « d'une beauté rayonnante »[7],[3]. Au fil du temps, sa réputation se répand à travers le monde catholique, notamment grâce aux écrits dits relations des jésuites. Tout au long de sa courte vie, Kateri a beaucoup pratiqué le jeûne ainsi que la mortification, parfois même excessive par une naïve ignorance et réprouvée par son confesseur, souvent sous forme de sévices corporels[4].

Aujourd'hui, son tombeau est exposé à l'église Saint-François-Xavier de Kahnawake, à l'intersection de Church Road et River Road[12].

Canonisation et culte

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Kateri Tekakwitha est inconnue des catholiques nord-américains, si ce n'est son culte local autour de Kahnawake jusqu'à la fin du XIXe siècle qui voit le catholicisme en expansion sur le sol américain se chercher des figures autochtones en guise de légitimation. Exemple d'inculturation, elle est alors devenue, aussi bien dans l'hagiographie jésuite que dans le discours anti-hagiographique des femmes, un symbole catholique intertribal polyvalent[13].

Béatification

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Les nombreuses guérisons lors de son enterrement, ainsi que la disparition des cicatrices de son visage sont considérés comme des miracles[4]. En 1884, on introduit sa cause en béatification au Synode des évêques américains de Baltimore. Les autochtones catholiques associés dans la Conférence de Tekakwitha (en) instituée en 1939, font de sa canonisation leur cheval de bataille[14].

Elle a été déclarée vénérable par Pie XII le . Mgr Gérard-Marie Coderre préside au transfert de ses reliques en 1972. Kateri est béatifiée par Jean-Paul II le [3]. C'est la première fois qu'une autochtone est béatifiée[15].

Canonisation

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Statue de Kateri Tekakwitha à la basilique Sainte-Anne-de-Beaupré, près de la ville de Québec.

Le décret concernant ses miracles a été signé le 2011. Il s'agit, en 2006, de la guérison d'un jeune garçon, Jake Fink-Bonner, de Sandy Point, une petite ville située près de Seattle (Washington), de la fasciite nécrosante, également connue sous l'appellation populaire de « bactérie mangeuse de chair ».

Sa canonisation est prononcée à Rome par le pape Benoît XVI le [16],[17].

Un sanctuaire lui est consacré à la Mission Saint-François-Xavier, à Kahnawake[18]. Des églises lui sont consacrée comme l'église Katheri-Tekakwhita dans la communauté montagnaise de Mashteuiatsh, dans la région du Saguenay–Lac-Saint-Jean, ou dans les communautés de Uashat, de Mak ou de Maliotenam, ainsi que la remarquable église de Gesgapegiag en pays Mi'kmaw en Gaspésie.

Surnommée « le lys des Mohawks », Sainte Kateri est la première sainte autochtone d'Amérique du Nord et la douzième canadienne[19]. Elle est également la sainte patronne de l'environnement, de l'écologie, des personnes en exil et des autochtones d'Amérique[20],[21].

Sa mémoire figure au calendrier liturgique de l'Église catholique le 17 avril[3],[7].

Autres hommages

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Sa devise était : « Qui est-ce qui m'apprendra ce qu'il y a de plus agréable à Dieu afin que je le fasse ? »[3],[7].

Notoriété dans les arts et la culture

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Filmographie

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Un film documentaire « L'histoire De Sainte Kateri Tekakwitha » a été réalisé en 2017 pour présenter sa vie[24].

Peintures et portraits

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Le missionnaire jésuite Claude Chauchetière rencontre la jeune indienne dans la mission chrétienne. Il réalise plusieurs portraits d'elle, mais aucun n'a été conservé. L'existence de ces dessins est connue par ses propres écrits (sur Kateri), des écrits qui eux ont été conservés[10].

Le plus ancien portrait connu de Kateri est réalisé quatre décennies après sa mort, en 1717 (et huit ans après le décès du père Chauchetière). Au cours des XVIIIe et XIXe siècles les graveurs vont en réaliser de nombreuses variantes, lors des multiples rééditions des textes hagiographiques de Pierre Cholenec (qui a lui aussi connu Tekakwitha)[10].

Une huile sur toile conservée à Kahnawake (représentant le portrait de Tekakwitha) a été attribuée à Chauchetière au XIXe siècle, mais il s'agit d'un « tableau d'histoire » réalisé par de Joseph Légaré autour de 1843. Ce tableau diffère grandement des dessins et projets de dessins illustrant le manuscrit original de Chauchetière intitulé « Narration annuelle de la mission du sault depuis sa fondation jusques à l'an 1686 » publié quelques années plus tôt[10]. Ce portrait peint par Joseph Légaré a été très répandu, parce que l'on d'abord attribué à Chauchetière. Par la suite, de nombreuses autres variantes ont été réalisées (Idyllisme, Idéaux, Lily of the Mohawks, Kateri, Iconographie)[10].

Littérature

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Kateri Tekakwitha apparait comme personnage principal ou secondaire de différents ouvrages publiés dès le XVIIIe siècle

  • La poète Rina Lasnier lui a consacré une pièce de théâtre intitulée Féérie indienne en 1939.
  • Kateri Tekakwitha est également présente dans les épisodes 18 & 19 de la série de dessin animé Clémentine.
  • Un camp de vacances entièrement francophone, aux États-Unis, le camp Tékakwitha[27], a été fondé et nommé en son honneur.

Notes et références

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  1. La Presse canadienne, « La Mohawk Kateri Tekakwitha sera canonisée à l'automne prochain », Le Devoir,‎ (ISSN 0319-0722, lire en ligne).
  2. Jean-Christophe Laurence, « Kateri Tekakwitha décortiquée », La Presse,‎ (ISSN 0317-9249, lire en ligne).
  3. a b c d e f g h et i « Sainte Kateri Tekakwitha », sur nominis.fr
  4. a b c d e f g et h (it) Guido Pettinati, « Santa Caterina Tekakwitha Vergine », sur Santi e Beati, (consulté le ).
  5. Le nom de Tekakwitha présente de très nombreuses graphies, voir l'article de Robert Derome.
  6. a et b Michelle Paquette, "Notre Kateri" : un regard féministe sur l'imagerie canadienne-française de la première sainte autochtone dans la première moitié du 20e siècle, Université du Québec à Montréal, , p. 1. Mémoire de maîtrise (Histoire de l'art).
  7. a b c d e f g et h « Le martyrologe romain fait mémoire de Sainte Catherine Tekakwitha », Magnificat, no 245,‎ , p. 250.
  8. « Sainte Kateri Tekakwitha », sur Conférence des évêques catholique du Canada, (consulté le ).
  9. (en) Margaret Bunson, Kateri Tekakwitha. Mystic of the Wilderness, Our Sunday Visitor Publishing, , p. 69.
  10. a b c d et e Robert Derome, « TEKAKWITHA. Nouveaux regards sur ses portraits », sur rd.uqam.ca (consulté le ).
  11. L'historien lui consacrera un chapitre dans son ouvrage « Histoire et description générale de la Nouvelle France ».
  12. (en) « Saint Kateri Tekakwitha », sur findagave.com, (consulté le ).
  13. Allan Greer, « L'hagiographie en Nouvelle-France : le cas de Kateri Tekakwitha », La Création biographique, Rennes, Presses universitaires de Rennes,‎ , p. 267-274.
  14. (en) Rosemary Guiley, The Encyclopedia of Saints, Infobase Publishing, , p. 201
  15. « Kateri, la bienheureuse indienne », sur Etoile Notre Dame (consulté le ).
  16. « Un Torontois parmi les nouveaux cardinaux, une Autochtone parmi les saintes », Radio-Canada,‎ (lire en ligne, consulté le ).
  17. Jean-François Roussel, « La canonisation de Kateri Tekakwitha (1656-1680) : a propos d’un geste symbolique », (consulté le ).
  18. « Canada National Saint Kateri Shrine », sur nationalsaintkaterishrine.ca (consulté le ).
  19. « Kateri Tekakwitha, une sainte amérindienne », Radio Canada,‎ (lire en ligne, consulté le ).
  20. Anne-marie Pedersen et Maude-emmanuelle Lambert, « Sainte Kateri (Kateri Tekakwitha) », l'Encyclopédie Canadienne,‎ (lire en ligne, consulté le ).
  21. (en) « St. Kateri Tekakwitha », sur Catholic Online (consulté le ).
  22. « Bénédiction d’une statue de sainte Kateri Tekakwitha dans la Cathédrale Marie-Reine-du-Monde », sur Eglise Catholique de Montréal, (consulté le ).
  23. « Dévoilement d’une nouvelle statue de sainte Kateri Tekakwitha à l’Université Saint-Paul », sur Université Saint Paul, (consulté le ).
  24. « Sur Ses Traces – L’histoire de Kateri Tekakwitha », sur SL Plus (consulté le ).
  25. Peut être l'ouvrage Pierre Cholenec, « La vie de Catherine Tégakouita, Première Vierge Iroquoise », 1696.
  26. a et b (en) Allan Greer, Mohawk Saint : Catherine Tekakwitha and the Jesuits, New York (N.Y.), Oxford University Press, , 248 p. (ISBN 019-517487-9, lire en ligne), p. 190.
  27. « camp Tékakwitha », sur campdevacances.com (consulté le ).

Voir aussi

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Bibliographie

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  • (en) Henri Béchard, « Tekakouitha (Tagaskouïta, Tegakwitha), baptisée Kateri (Catherine) », Dictionnaire biographique du Canada, vol. I,‎ 1966 et 1986 (lire en ligne, consulté le ).
  • Robert Rumilly, Kateri Tekakwitha : le Lys de la Mohawk, la Fleur du Saint-Laurent, Bouasse-Jeune, .
  • Henri Béchard et Richard Arès, Kateri Tekakwitha, Éditions Bellarmin, .
  • Édouard Lecompte, Kateri Tekakwitha : le lis des missions iroquoises, .
  • Agnès Richomme, Kateri Tekakwitha, Fleurus, .
  • Allan Greer, Catherine Tekakwitha et les Jésuites : la rencontre de deux mondes, Boréal, .
  • Jacques Gauthier, Sainte Kateri Tekakwitha, Le Livre Ouvert, coll. « Paroles de vie », .
  • Jean-Michel Wissmer, Kateri Tekakwitha : L’entrée du Christ chez les Iroquois, Voyage au cœur de l’Amérique indienne et colonialiste, Canada, Éditions GID, , 186 p. (ISBN 978-2-89634-343-0).

Liens externes

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