« Hongrie ottomane » : différence entre les versions

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La Hongrie ottomane (en hongrois : Török hódoltság soit « occupation turque » dans l'historiographie hongroise) fait référence aux parties du Royaume de Hongrie qui ont été conquises et gouvernées par l'Empire ottoman entre 1541 et 1699. Elle couvrait le sud de la Transdanubie et la quasi-totalité de la région de la Grande Plaine de Hongrie.

Histoire

Au XVI^e siècle, le pouvoir de l'Empire ottoman s'accroit au fil de sa conquête des Balkans tandis que celui des Hongrois s'affaiblit en raison des dissensions dans la noblesse et des jacqueries paysannes, notamment durant le règne de Louis II de Hongrie (1506-1526).

Le sultan ottoman, Soliman le Magnifique (1520–1566) prend Belgrade en 1521 et dans la suite de son expansion il inflige une lourde défaite à l'armée hongroise lors de la bataille de Mohács (1526). Après la chute de Buda en 1541, alors que le centre et le Sud de la Hongrie passent sous domination directe du Sultan, l'Ouest reconnait les Habsbourg comme souverains : c'est la Hongrie royale ; le Nord se constitue brièvement en principauté de Haute-Hongrie sous le règne d'Imre Thököly et à l'est, le fils de Jean I^er Zapolya agrandit la principauté de Transylvanie, vassale du royaume hongrois devenue vassale de l'Empire ottoman, en un royaume de Hongrie orientale reconnu en 1570.

Durant la période ottomane, les Turcs espèrent conquérir les possessions des Habsbourg tandis que ces derniers espèrent repousser l'invasion musulmane vers les Balkans, hors d'Europe centrale, tout en promouvant la Contre-Réforme car le protestantisme gagne du terrain en Transylvanie et parmi la bourgeoisie et la noblesse hongroise. Les bouleversements et les guerres favorisent la constitution de bandes de betyárs et de hajdús, mi-brigands, mi rebelles anti-ottomans, qui s'en prennent notamment aux caravanes de sel et aux élevages ottomans de bétail (en quelques années la Hongrie ottomane exporte plus de 500 000 têtes de bétail vers Constantinople)^[1].

L'échec du second grand assaut turc contre Vienne en 1683 marque la fin de l'avancée ottomane en Europe. En 1699 le traité de Karlowitz qui met fin à la grande guerre turque, ne laisse aux Ottomans que le Banat, à son tour évacué au traité de Passarowitz en 1718 : c'est la fin de la période ottomane en Hongrie. Quant à la principauté de Transylvanie, elle retrouve ses limites d'avant 1526 et devient, comme la Hongrie, une composante de la monarchie des Habsbourg. De ce fait, les Habsbourg prennent les titres de « rois de Hongrie et voïvodes de Transylvanie »^[2].

Administration

Le territoire hongrois sous administration ottomane est divisé en sandjaks (provinces). Le pacha de Buda avait le titre le plus élevé du pays. Les sandjak-beys étaient responsables de l'administration, juridiction et de la défense. Les Ottomans veillèrent à la prospérité et à la sécurité de leurs nouvelles terres, confisquées à la noblesse hongroise. La « Sublime Porte » (terme désignant le gouvernement ottoman) possédait 20 % des terres, le reste étant divisé entre les soldats et les fonctionnaires. Le principal souci de l'administration turque était la collecte des impôts, les sujets chrétiens ou juifs étant plus rentables que les musulmans, car payant une double-capitation conformément à la loi islamique. Cette rentabilité encouragea la tolérance religieuse des ottomans et l'émergence d'une nouvelle bourgeoisie travaillant dans l'artisanat et le commerce. Le calvinisme se répandit rapidement parmi ces bourgeois et ces artisans^[3].

Certaines sources modernes affirment que des millions de Magyars ont été réduits en esclavage par les Turcs et dispersés dans l'Empire ottoman^[4] et que c'est cette ponction démographique ciblée sur une seule ethnie qui explique que dans la Grande-Hongrie d'avant 1918, la proportion de Magyars était inférieure à 50 %, alors qu'elle aurait été, antérieurement à la période ottomane, supérieure à 75 %^[5], ce qui est impossible à démontrer en l'absence de statistiques ethniques avant le milieu du XVIII^e siècle^[1].

Culture

Les bains Rudas de Budapest conservent une coupole ottomane.

Selon les nationalistes modernes comme Pál Fodor, les conséquences des guerres turques auraient été terribles pour la région et les infrastructures de la Hongrie médiévale auraient été en grande partie détruites, tandis que les villes florissantes tombées aux mains des Ottomans auraient décliné avec un transfert des principaux pôles économiques^[5].

L'historiographie universitaire ne partage pas ce point de vue et note que plusieurs centres culturels font leur apparition durant la période ottomane. Au XVI^e siècle, 165 écoles primaires musulmanes (mekteb) et 77 écoles secondaires et théologiques (madrassas) dispensent des cours dans 39 grandes villes de la province^[6] ; en outre, des écoles catholiques et protestantes se multiplient en une « concurrence des confessions »^[7]. Les écoles primaires enseignent l'écriture, l'arithmétique de base, la lecture de la Bible ou du Coran et les sciences religieuses de chaque confession ; les Juifs ont leurs yechovot. Pál Fodor lui-même reconnaît que l'Empire ottoman toléra en Hongrie les Ordres du royaume (clergé, noblesse, bourgeoisie)^[8]^,^[9], qu'une politique d'islamisation n'a pas eu lieu et que le devchirmé ou « impôt sur le sang », qui désigne le recrutement forcé de jeunes garçons pour qu'ils deviennent des janissaires, fut très appliqué en Hongrie^[10].

Les Ottomans n'ont interdit ni le christianisme, ni le judaïsme, mais l'arrivée de près de 80 000 colons musulmans a contribué à une certaine progression de l'islam dans le pays. La maintenance des lieux de cultes musulmans, chrétiens et juifs était à la charge des Ottomans, la seule limitation étant d'ordre architectural : aucun lieu de culte non-musulman ne devait être plus haut que les mosquées, et c'est pourquoi certains clochers furent abaissés et de hauts minarets furent construits^[11]. Des exemples d'architectures ottomanes subsistent, semblables à des bâtiments d'Istanbul ou d'Edirne. L'apparition des bains turcs, avec les bains Rudas, est le point de départ d'une longue tradition en Hongrie. Pas moins de 75 hammams seront construits durant la période ottomane.

Notes et références

↑ ^{a et b} (en) Stanford J. Shaw, History of the Ottoman Empire and modern Turkey, vol. 1, Cambridge University Press, 1976, 368 p. (ISBN 978-0-521-29163-7, lire en ligne).
↑ Charles Kecskeméti, Sándor Csernus (préface), La Hongrie des Habsbourg, Presses universitaires de Rennes, Rennes, 2010, tome 2, De 1790 à 1914, 405 p., (ISBN 978-2-75351-700-4).
↑ György Székely, La Hongrie et la domination ottomane : XV^e – XVII^e siècles, Université Loránd Eötvös, 1975.
↑ (en) Paul Fregosi, Jihad in the West : Muslim Conquests from the 7th to the 21st Centuries, Part. VII : « By Land and By Sea ». NY : Prometheus Books (1998).
↑ ^{a et b} Pál Fodor, « La Hongrie entre Orient et Occident : l'héritage turc », Histoire, économie & société, vol. 34anné, n^o 3,‎ 2015, p. 19 (ISSN 0752-5702 et 1777-5906, DOI 10.3917/hes.153.0019, lire en ligne, consulté le 23 janvier 2022).
↑ Christian Combaz, « Crise des migrants : une petite histoire de la Hongrie », lefigaro.fr, 17 septembre 2015.
↑ Jean de Saint Blanquat, « La Hongrie : le paradoxe protestant », sur Regards protestants, 17 août 2016 (consulté le 3 août 2020).
↑ Olivier Chaline et Marie-Françoise Vajda-Saudraix, « La Hongrie ottomane XVI^e – XVII^e siècles. Introduction », Histoire, économie & société, vol. 34anné, n^o 3,‎ 2015, p. 5 (ISSN 0752-5702 et 1777-5906, DOI 10.3917/hes.153.0005, lire en ligne, consulté le 23 janvier 2022).
↑ Gilles Veinstein, « Chapitre II. L’Europe ottomane », dans L'Europe et l’islam, Odile Jacob, 19 février 2009 (DOI 10.3917/oj.laure.2009.01.0161, lire en ligne), p. 161–174.
↑ László J. Nagy, « Prisonniers protestants hongrois sur les galères de Naples et leur rédemption (1675-1676) », Cahiers de la Méditerranée, n^o 65,‎ 15 décembre 2002, p. 69–75 (ISSN 0395-9317, DOI 10.4000/cdlm.46, lire en ligne, consulté le 23 janvier 2022).
↑ George Young (1872-1952), Corps de droit ottoman : Recueil des codes, lois, règlements, ordonnances et actes les plus importants du droit intérieur, et d'études sur le droit coutumier de l'Empire ottoman, Clarendon Press, 1905-1906, 7 volumes (BNF 31676517, lire en ligne).

Bibliographie

Édouard Sayous, Histoire générale des Hongrois, Budapest/Paris, Alcan, 1900 [lire en ligne] ; réédition British Library, Historical Print Editions, 2012 (ISBN 978-1249017387)
Albert Lefaivre, Les Magyars pendant la domination ottomane en Hongrie (1526-1722), volumes 1 & 2. Perrin et Cie, Paris, 1902.

[shaw-1] {a et b} (en) Stanford J. Shaw, History of the Ottoman Empire and modern Turkey, vol. 1, Cambridge University Press, 1976, 368 p. (ISBN 978-0-521-29163-7, lire en ligne).

[2] Charles Kecskeméti, Sándor Csernus (préface), La Hongrie des Habsbourg, Presses universitaires de Rennes, Rennes, 2010, tome 2, De 1790 à 1914, 405 p., (ISBN 978-2-75351-700-4).

[3] György Székely, La Hongrie et la domination ottomane : XV^e – XVII^e siècles, Université Loránd Eötvös, 1975.

[4] (en) Paul Fregosi, Jihad in the West : Muslim Conquests from the 7th to the 21st Centuries, Part. VII : « By Land and By Sea ». NY : Prometheus Books (1998).

[:0-5] {a et b} Pál Fodor, « La Hongrie entre Orient et Occident : l'héritage turc », Histoire, économie & société, vol. 34anné, n^o 3,‎ 2015, p. 19 (ISSN 0752-5702 et 1777-5906, DOI 10.3917/hes.153.0019, lire en ligne, consulté le 23 janvier 2022).

[6] Christian Combaz, « Crise des migrants : une petite histoire de la Hongrie », lefigaro.fr, 17 septembre 2015.

[7] Jean de Saint Blanquat, « La Hongrie : le paradoxe protestant », sur Regards protestants, 17 août 2016 (consulté le 3 août 2020).

[8] Olivier Chaline et Marie-Françoise Vajda-Saudraix, « La Hongrie ottomane XVI^e – XVII^e siècles. Introduction », Histoire, économie & société, vol. 34anné, n^o 3,‎ 2015, p. 5 (ISSN 0752-5702 et 1777-5906, DOI 10.3917/hes.153.0005, lire en ligne, consulté le 23 janvier 2022).

[9] Gilles Veinstein, « Chapitre II. L’Europe ottomane », dans L'Europe et l’islam, Odile Jacob, 19 février 2009 (DOI 10.3917/oj.laure.2009.01.0161, lire en ligne), p. 161–174.

[10] László J. Nagy, « Prisonniers protestants hongrois sur les galères de Naples et leur rédemption (1675-1676) », Cahiers de la Méditerranée, n^o 65,‎ 15 décembre 2002, p. 69–75 (ISSN 0395-9317, DOI 10.4000/cdlm.46, lire en ligne, consulté le 23 janvier 2022).

[11] George Young (1872-1952), Corps de droit ottoman : Recueil des codes, lois, règlements, ordonnances et actes les plus importants du droit intérieur, et d'études sur le droit coutumier de l'Empire ottoman, Clarendon Press, 1905-1906, 7 volumes (BNF 31676517, lire en ligne).

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+[[Fichier: Europe centrale 1683 traduit.png|thumb|La domination ottomane sur la Hongrie a atteint son apogée en 1683, avec notamment les oeillets de Budin, Egri, Kanije, Temesvar, Uyvar et Varat. La Principauté semi-indépendante de Transylvanie était un État vassal ottoman pendant la majeure partie des {{s2-|XVI|XVII}}, la Principauté de Haute-Hongrie était également un État vassal entre 1682 et 1685.]]
-[[Fichier:Magyar- és Erdélyország 1629-ben (Pallas).jpg|thumb|La Hongrie en 1629 : [[Hongrie royale]] en rose, [[Empire ottoman]] en jaune, [[Principauté de Transylvanie]] en bleu-vert.]]
-La '''Hongrie ottomane''' (en [[hongrois]] : ''Török hódoltság'' soit « occupation turque » dans l'historiographie [[Hongrie|hongroise]]) fait référence à la période durant laquelle la partie centrale et méridionale du [[Royaume de Hongrie]], correspondant à environ un tiers du territoire, devint une [[Provinces de l'Empire ottoman|partie]] de l'[[Empire ottoman]] entre [[1541]] et [[1699]] (1718 pour le [[Banat historique|Banat]]).
+La '''Hongrie ottomane''' (en [[hongrois]] : ''Török hódoltság'' soit « occupation turque » dans l'historiographie [[Hongrie|hongroise]]) fait référence aux parties du [[Royaume de Hongrie]] qui ont été conquises et gouvernées par l'[[Empire ottoman]] entre 1541 et 1699. Elle couvrait le sud de la [[Transdanubie]] et la quasi-totalité de la région de la [[Alföld|Grande Plaine de Hongrie]].
 == Histoire ==
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 Le [[Liste des souverains ottomans|sultan ottoman]], [[Soliman le Magnifique]] (1520–1566) prend [[Belgrade]] en 1521 et dans la [[Expansion de l'Empire ottoman|suite de son expansion]] il inflige une lourde défaite à l'armée hongroise lors de la [[bataille de Mohács (1526)|bataille de Mohács]] (1526).
-Après la chute de [[Buda (ville)|Buda]] en 1541, alors que le centre et le Sud de la [[Royaume de Hongrie|Hongrie]] passent sous domination directe du Sultan, l'Ouest reconnait les [[Habsbourg]] comme souverains : c'est la [[Hongrie royale]] ; le Nord se constitue brièvement en principauté de [[Haute-Hongrie]] sous le règne d'[[Imre Thököly]] et à l'Est, le fils de [[Jean Ier de Hongrie|Jean I{{er}} Zapolya]] agrandit la [[principauté de Transylvanie]], vassale du royaume hongrois devenue vassale de l'Empire ottoman, en un [[royaume de Hongrie orientale]] reconnu en 1570.
+Après la chute de [[Buda (ville)|Buda]] en 1541, alors que le centre et le Sud de la [[Royaume de Hongrie|Hongrie]] passent sous domination directe du Sultan, l'Ouest reconnait les [[Habsbourg]] comme souverains : c'est la [[Hongrie royale]] ; le Nord se constitue brièvement en principauté de [[Haute-Hongrie]] sous le règne d'[[Imre Thököly]] et à l'est, le fils de [[Jean Ier de Hongrie|Jean I{{er}} Zapolya]] agrandit la [[principauté de Transylvanie]], vassale du royaume hongrois devenue vassale de l'Empire ottoman, en un [[royaume de Hongrie orientale]] reconnu en 1570.
-Durant la période ottomane, les Turcs [[Siège de Vienne (1529)|espèrent conquérir]] les [[Monarchie des Habsbourg|possessions des Habsbourg]] tandis que ces derniers espèrent repousser l'invasion musulmane vers les [[Balkans]], hors d'[[Europe centrale]], tout en promouvant la [[Contre-Réforme]] car le [[protestantisme]] gagne du terrain en [[Transylvanie (région)|Transylvanie]] et parmi la bourgeoisie et la [[noblesse hongroise]]. Les bouleversements et les guerres favorisent la constitution de bandes de [[betyár]]s et de [[Haïdouk|hajdú]]s, mi-brigands, mi rebelles anti-ottomans, qui s'en prennent notamment aux caravanes de sel et aux élevages ottomans de bétail (en quelques années la Hongrie ottomane exporte plus de {{nombre|500000}} têtes de bétail vers [[Constantinople]])<ref name=shaw>{{Ouvrage |langue=en |auteur1=Stanford J. Shaw |titre=History of the Ottoman Empire and modern Turkey |volume=1 |éditeur=[[Cambridge University Press]] |année=1976 |pages totales=368 |isbn=978-0-521-29163-7 |lire en ligne=https://books.google.fr/books?id=Xd422lS6ezgC&pg=PA92}}.</ref>.
+Durant la période ottomane, les Turcs [[Siège de Vienne (1529)|espèrent conquérir]] les [[Monarchie des Habsbourg|possessions des Habsbourg]] tandis que ces derniers espèrent repousser l'invasion musulmane vers les [[Balkans]], hors d'[[Europe centrale]], tout en promouvant la [[Contre-Réforme]] car le [[protestantisme]] gagne du terrain en [[Transylvanie (région)|Transylvanie]] et parmi la bourgeoisie et la [[noblesse hongroise]]. Les bouleversements et les guerres favorisent la constitution de bandes de [[betyár]]s et de [[Haïdouk (brigand)|hajdú]]s, mi-brigands, mi rebelles anti-ottomans, qui s'en prennent notamment aux caravanes de sel et aux élevages ottomans de bétail (en quelques années la Hongrie ottomane exporte plus de {{nombre|500000}} têtes de bétail vers [[Constantinople]])<ref name=shaw>{{Ouvrage |langue=en |auteur1=Stanford J. Shaw |titre=History of the Ottoman Empire and modern Turkey |volume=1 |éditeur=[[Cambridge University Press]] |année=1976 |pages totales=368 |isbn=978-0-521-29163-7 |lire en ligne=https://books.google.fr/books?id=Xd422lS6ezgC&pg=PA92}}.</ref>.
 L'échec du [[Siège de Vienne (1683)|second grand assaut turc contre Vienne]] en [[1683]] marque la fin de l'avancée ottomane en Europe. En 1699 le [[traité de Karlowitz]] qui met fin à la [[grande guerre turque]], ne laisse aux Ottomans que le [[Banat historique|Banat]], à son tour évacué au [[traité de Passarowitz]] en 1718 : c'est la fin de la période ottomane en Hongrie. Quant à la [[principauté de Transylvanie]], elle retrouve ses limites d'avant 1526 et devient, comme la Hongrie, une composante de la [[monarchie des Habsbourg]]. De ce fait, les Habsbourg prennent les titres de « [[Liste des souverains de Hongrie|rois de Hongrie]] et [[Liste des souverains de Transylvanie|voïvodes de Transylvanie]] »<ref>Charles Kecskeméti, Sándor Csernus (préface), ''La Hongrie des Habsbourg,'' Presses universitaires de Rennes, Rennes, 2010, tome 2, De 1790 à 1914, 405 p., {{ISBN| 978-2-75351-700-4}}.</ref>.
 == Administration ==
-Le territoire hongrois sous administration ottomane est divisé en ''[[Sandjak (division)|sandjaks]]'' (provinces). Le [[Pacha (titre)|pacha]] de Buda avait le titre le plus élevé du pays. Les [[Bey (titre)|sandjak-beys]] étaient responsables de l'administration, juridiction et de la défense. Les Ottomans veillèrent à la prospérité et à la sécurité de leurs nouvelles terres, confisquées à la [[noblesse hongroise]]. La « [[Sublime Porte]] » (terme désignant le gouvernement ottoman) possédait 20 % des terres, le reste étant divisé entre les soldats et les fonctionnaires. Le principal souci de l'administration turque était la collecte des impôts, les [[Millet (Empire ottoman)|sujets chrétiens ou juifs]] étant plus rentables que les musulmans, car payant une [[Kharadj|double]]-[[capitation]] conformément à la [[Charia|loi islamique]]. Cette rentabilité encouragea la tolérance religieuse des ottomans et l'émergence d'une nouvelle bourgeoisie travaillant dans l'artisanat et le commerce. Le [[calvinisme]] se répandit rapidement parmi ces bourgeois et ces artisans<ref>György Székely, ''La Hongrie et la domination ottomane : XV{{e}}-XVII{{e}} siècles'', [[Université Loránd Eötvös]], 1975.</ref>.
+Le territoire hongrois sous administration ottomane est divisé en ''[[Sandjak (division)|sandjaks]]'' (provinces). Le [[Pacha (titre)|pacha]] de Buda avait le titre le plus élevé du pays. Les [[Bey (titre)|sandjak-beys]] étaient responsables de l'administration, juridiction et de la défense. Les Ottomans veillèrent à la prospérité et à la sécurité de leurs nouvelles terres, confisquées à la [[noblesse hongroise]]. La « [[Sublime Porte]] » (terme désignant le gouvernement ottoman) possédait 20 % des terres, le reste étant divisé entre les soldats et les fonctionnaires. Le principal souci de l'administration turque était la collecte des impôts, les [[Millet (Empire ottoman)|sujets chrétiens ou juifs]] étant plus rentables que les musulmans, car payant une [[Kharadj|double]]-[[capitation]] conformément à la [[Charia|loi islamique]]. Cette rentabilité encouragea la [[tolérance religieuse]] des ottomans et l'émergence d'une nouvelle bourgeoisie travaillant dans l'artisanat et le commerce. Le [[calvinisme]] se répandit rapidement parmi ces bourgeois et ces artisans<ref>György Székely, ''La Hongrie et la domination ottomane : {{sp-|XV|-|XVII|s}}'', [[Université Loránd Eötvös]], 1975.</ref>.
-Certaines sources modernes affirment que des millions de [[Magyars]] ont été [[Traite orientale|réduits en esclavage]] par les Turcs et dispersés dans l'Empire ottoman<ref>{{en}} Paul Fregosi, ''Jihad in the West : Muslim Conquests from the 7th to the 21st Centuries'', Part. VII : « By Land and By Sea ». NY : Prometheus Books (1998).</ref> et que c'est cette ponction démographique ciblée sur une seule [[ethnie]] qui explique que dans la [[Royaume de Hongrie (1867-1918)|Grande-Hongrie]] d'avant 1918, la proportion de [[Magyars]] était inférieure à 50 %, alors qu'elle aurait été, antérieurement à la période ottomane, supérieure à 75 %<ref name=":0">{{Article|prénom1=Pál|nom1=Fodor|titre=La Hongrie entre Orient et Occident : l'héritage turc|périodique=Histoire, économie & société|volume=34anné|numéro=3|date=2015|issn=0752-5702|issn2=1777-5906|doi=10.3917/hes.153.0019|lire en ligne=https://doi-org.wikipedialibrary.idm.oclc.org/10.3917/hes.153.0019|consulté le=2022-01-23|pages=19}}</ref>, ce qui est impossible à démontrer en l'absence de statistiques ethniques avant le milieu du {{XVIIIe siècle}}<ref name=shaw/>.
+Certaines sources modernes affirment que des millions de [[Magyars]] ont été [[Traite orientale|réduits en esclavage]] par les Turcs et dispersés dans l'Empire ottoman<ref>{{en}} Paul Fregosi, ''Jihad in the West : Muslim Conquests from the 7th to the 21st Centuries'', Part. VII : « By Land and By Sea ». NY : Prometheus Books (1998).</ref> et que c'est cette ponction démographique ciblée sur une seule [[ethnie]] qui explique que dans la [[Royaume de Hongrie (1867-1918)|Grande-Hongrie]] d'avant 1918, la proportion de [[Magyars]] était inférieure à 50 %, alors qu'elle aurait été, antérieurement à la période ottomane, supérieure à 75 %<ref name=":0">{{Article|prénom1=Pál|nom1=Fodor|titre=La Hongrie entre Orient et Occident : l'héritage turc|périodique=Histoire, économie & société|volume=34anné|numéro=3|date=2015|issn=0752-5702|issn2=1777-5906|doi=10.3917/hes.153.0019|lire en ligne=https://doi-org.wikipedialibrary.idm.oclc.org/10.3917/hes.153.0019|consulté le=2022-01-23|pages=19}}.</ref>, ce qui est impossible à démontrer en l'absence de statistiques ethniques avant le milieu du {{XVIIIe siècle}}<ref name=shaw/>.
 == Culture ==
 [[Fichier:BudapestDSCN3938.JPG|thumb|200px|right|Les [[bains Rudas]] de [[Budapest]] conservent une coupole ottomane.]]
-Selon les nationalistes modernes comme Pál Fodor, les conséquences des guerres turques auraient été terribles pour la région et les infrastructures de la Hongrie médiévale, auparavant florissante, auraient été en grande partie détruites, tandis que les villes florissantes tombés dans les mains des Ottomans auraient décliné avec un transfert des principaux pôle économique<ref name=":0" />.
+Selon les nationalistes modernes comme Pál Fodor, les conséquences des [[Guerres ottomanes en Europe|guerres turques]] auraient été terribles pour la région et les infrastructures de la Hongrie médiévale auraient été en grande partie détruites, tandis que les villes florissantes tombées aux mains des Ottomans auraient décliné avec un transfert des principaux pôles économiques<ref name=":0" />.
 [[Fichier:Torokok lajstromozzak a gyerekeket.JPG|thumb|200px|Palais ottoman en Hongrie : les Turcs [[Devshirme|enrôlant dans l'armée]] les enfants hongrois.]]
-L'historiographie universitaire ne partage pas ce point de vue et note que plusieurs centres culturels font leur apparition durant la période ottomane. Au {{s-|XVI|e}}, 165 écoles primaires musulmanes (''mekteb'') et 77 écoles secondaires et théologiques (''[[Médersa|madrassas]]'') dispensent des cours dans 39 grandes villes de la province<ref>[[Christian Combaz]], « [http://www.lefigaro.fr/vox/monde/2015/09/17/31002-20150917ARTFIG00129-crise-des-migrants-une-petite-histoire-de-la-hongrie.php Crise des migrants : une petite histoire de la Hongrie] », ''lefigaro.fr'', 17 septembre 2015.</ref> ; en outre, des écoles catholiques et protestantes se multiplient en une « concurrence des confessions »<ref>{{Lien web |langue=fr-FR |auteur=Jean de Saint Blanquat |titre=La Hongrie : le paradoxe protestant |url=https://regardsprotestants.com/monde/la-hongrie-le-paradoxe-protestant/ |site=Regards protestants |date=2016-08-17 |consulté le=2020-08-03}}</ref>. Les écoles primaires enseignent l'écriture, l'arithmétique de base, la lecture de la [[Bible]] ou du [[Coran]] et les sciences religieuses de chaque confession ; les [[Histoire des Juifs en Hongrie|Juifs ont leurs ''yechovot'']]. Pál Fodor lui-même reconnaît que l'Empire ottoman toléra en Hongrie les [[Ordre#Organisation sociale|Ordres du royaume]] ([[clergé]], [[Noblesse hongroise|noblesse]], [[bourgeois]]ie)<ref>{{Article|prénom1=Olivier|nom1=Chaline|prénom2=Marie-Françoise|nom2=Vajda-Saudraix|titre=La Hongrie ottomane {{sp-|XVI|-|XVII|s}}. Introduction|périodique=Histoire, économie & société|volume=34anné|numéro=3|date=2015|issn=0752-5702|issn2=1777-5906|doi=10.3917/hes.153.0005|lire en ligne=https://doi-org.wikipedialibrary.idm.oclc.org/10.3917/hes.153.0005|consulté le=2022-01-23|pages=5}}</ref>{{,}}<ref>{{Chapitre|prénom1=Gilles|nom1=Veinstein|titre chapitre=Chapitre II. L’Europe ottomane|titre ouvrage=L'Europe et l’islam|éditeur=Odile Jacob|date=2009-02-19|doi=10.3917/oj.laure.2009.01.0161|lire en ligne=https://doi-org.wikipedialibrary.idm.oclc.org/10.3917/oj.laure.2009.01.0161|consulté le=2022-01-23|passage=161–174}}</ref>, qu'une politique d'islamisation n'a pas eu lieu et que le [[devchirmé]] ou « impôt sur le sang », qui désigne le recrutement forcé de jeunes garçons pour qu'ils deviennent des [[janissaires]], fut très appliqué en Hongrie<ref>{{Article|langue=fr|prénom1=László J.|nom1=Nagy|titre=Prisonniers protestants hongrois sur les galères de Naples et leur rédemption (1675-1676)|périodique=Cahiers de la Méditerranée|numéro=65|date=2002-12-15|issn=0395-9317|doi=10.4000/cdlm.46|lire en ligne=https://journals.openedition.org/cdlm/46?lang=en#bodyftn1|consulté le=2022-01-23|pages=69–75}}</ref>.
+L'historiographie universitaire ne partage pas ce point de vue et note que plusieurs centres culturels font leur apparition durant la période ottomane. Au {{s-|XVI|e}}, 165 écoles primaires musulmanes (''mekteb'') et 77 écoles secondaires et théologiques (''[[Médersa|madrassas]]'') dispensent des cours dans 39 grandes villes de la province<ref>[[Christian Combaz]], « [http://www.lefigaro.fr/vox/monde/2015/09/17/31002-20150917ARTFIG00129-crise-des-migrants-une-petite-histoire-de-la-hongrie.php Crise des migrants : une petite histoire de la Hongrie] », ''lefigaro.fr'', 17 septembre 2015.</ref> ; en outre, des écoles catholiques et protestantes se multiplient en une « concurrence des confessions »<ref>{{Lien web |langue=fr-FR |auteur=Jean de Saint Blanquat |titre=La Hongrie : le paradoxe protestant |url=https://regardsprotestants.com/monde/la-hongrie-le-paradoxe-protestant/ |site=Regards protestants |date=2016-08-17 |consulté le=2020-08-03}}.</ref>. Les écoles primaires enseignent l'écriture, l'arithmétique de base, la lecture de la [[Bible]] ou du [[Coran]] et les sciences religieuses de chaque confession ; les [[Histoire des Juifs en Hongrie|Juifs ont leurs ''yechovot'']]. Pál Fodor lui-même reconnaît que l'Empire ottoman toléra en Hongrie les [[Société d'ordres|Ordres du royaume]] ([[clergé]], [[Noblesse hongroise|noblesse]], [[Bourgeoisie|bourgeois]]ie)<ref>{{Article|prénom1=Olivier|nom1=Chaline|prénom2=Marie-Françoise|nom2=Vajda-Saudraix|titre=La Hongrie ottomane {{sp-|XVI|-|XVII|s}}. Introduction|périodique=Histoire, économie & société|volume=34anné|numéro=3|date=2015|issn=0752-5702|issn2=1777-5906|doi=10.3917/hes.153.0005|lire en ligne=https://doi-org.wikipedialibrary.idm.oclc.org/10.3917/hes.153.0005|consulté le=2022-01-23|pages=5}}.</ref>{{,}}<ref>{{Chapitre|prénom1=Gilles|nom1=Veinstein|titre chapitre=Chapitre II. L’Europe ottomane|titre ouvrage=L'Europe et l’islam|éditeur=Odile Jacob|date=2009-02-19|doi=10.3917/oj.laure.2009.01.0161|lire en ligne=https://doi-org.wikipedialibrary.idm.oclc.org/10.3917/oj.laure.2009.01.0161|consulté le=2022-01-23|passage=161–174}}.</ref>, qu'une politique d'islamisation n'a pas eu lieu et que le [[devchirmé]] ou « impôt sur le sang », qui désigne le recrutement forcé de jeunes garçons pour qu'ils deviennent des [[janissaires]], fut très appliqué en Hongrie<ref>{{Article|langue=fr|prénom1=László J.|nom1=Nagy|titre=Prisonniers protestants hongrois sur les galères de Naples et leur rédemption (1675-1676)|périodique=Cahiers de la Méditerranée|numéro=65|date=2002-12-15|issn=0395-9317|doi=10.4000/cdlm.46|lire en ligne=https://journals.openedition.org/cdlm/46?lang=en#bodyftn1|consulté le=2022-01-23|pages=69–75}}.</ref>.
 Les Ottomans n'ont interdit ni le [[christianisme]], ni le [[judaïsme]], mais l'arrivée de près de {{nombre|80000}} colons musulmans a contribué à une certaine progression de l'[[islam]] dans le pays. La maintenance des lieux de cultes musulmans, chrétiens et juifs était à la charge des Ottomans, la seule limitation étant d'ordre architectural : aucun lieu de culte non-musulman ne devait être plus haut que les mosquées, et c'est pourquoi certains clochers furent abaissés et de hauts minarets furent construits<ref>{{Ouvrage |langue=fr |auteur1=George Young (1872-1952) |titre=Corps de droit ottoman |sous-titre=Recueil des codes, lois, règlements, ordonnances et actes les plus importants du droit intérieur, et d'études sur le droit coutumier de l'Empire ottoman |lieu= |éditeur=Clarendon Press |collection= |année=1905-1906 | format livre = 7 volumes |pages totales= |passage= |bnf=31676517 |lire en ligne=https://archive.org/details/corpsdedroitott01turkgoog}}.</ref>. Des exemples d'architectures ottomanes subsistent, semblables à des bâtiments d'[[Istanbul]] ou d'[[Edirne]]. L'apparition des bains turcs, avec les [[bains Rudas]], est le point de départ d'une longue tradition en Hongrie. Pas moins de 75 [[hammam]]s seront construits durant la période ottomane.

v · m Histoire de la Hongrie et des Magyars
Protohistoire	Magna Hungaria Levédia Etelköz Honfoglalás Tribus magyares	Chronicon pictum
Moyen Âge	Grande-principauté de Hongrie Royaume de Hongrie Árpádiens Anjou-Sicile Luxembourgs Jagellons
Époque moderne	Hongrie ottomane Hongrie royale Monarchie de Habsbourg Royaume de Hongrie orientale Principauté de Transylvanie Famille de Habsbourg branche des Habsbourg-Lorraine
Époque contemporaine	Empire d'Autriche Révolution hongroise de 1848 État hongrois (1849) Autriche-Hongrie États unis de Grande Autriche Pays de la Couronne de saint Étienne Royaume de Hongrie (1867-1918) Première Guerre mondiale République démocratique hongroise République de Hongrie (1919-1920) République des conseils de Hongrie Régence hongroise Loi de détrônement Deuxième République de Hongrie République populaire de Hongrie Révolution de 1956 Troisième République de Hongrie
Histoire thématique	Histoire des Juifs en Hongrie
Voir aussi : Gesta Hungarorum Chronica Hungarorum Chronologie de l'Autriche-Hongrie