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{{homonyme|Segre}}
{{ébauche physicien}}
{{Infobox Biographie2
[[Image:Emilio Segre ID badge.png|thumb|right|Emilio Gino Segrè]]
| charte = scientifique
[[Image:Nobel prize medal.svg|left|80px]]
| œuvres principales= Découverte des [[antiparticule|antiproton]]s, du [[technétium]] et de l'[[astate]]
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}}


'''Emilio Gino Segrè''', né le {{Date de naissance|1|février|1905|en science}} à [[Tivoli]] et mort le {{Date de décès|22|avril|1989|en science}} à [[Lafayette (Californie)|Lafayette]], est un [[physicien]] italien naturalisé américain. Lui et [[Owen Chamberlain]] sont colauréats du [[prix Nobel de physique]] de 1959 {{Citation|pour leur découverte de l'[[antiparticule|antiproton]]<ref name=laureat_nobel_1959>{{Lien web Nobel
'''Emilio Gino Segrè''' est un [[physicien]] [[italie]]n né le 1{{er}} février [[1905]] à [[Tivoli (Italie)|Tivoli]] et décédé le 22 avril [[1989]] aux [[États-Unis d'Amérique|États-Unis]].
|url=http://nobelprize.org/nobel_prizes/physics/laureates/1959/
|titre=The Nobel Prize in Physics 1959
|auteur=Personnel de rédaction
|année= 2010
|éditeur=[[Fondation Nobel]]
|citation=for their discovery of the antiproton|consulté le= 17 juin 2010}}</ref>}}.


== Biographie ==
Gino Emilio Segrè commence ses recherches en physique nucléaire à [[Rome]] à l'institut de physique théorique, sous la direction de [[Enrico Fermi]] puis à [[Palerme]]. Mais chassé par le gouvernement [[fasciste]], il les poursuit à l'[[Université de Californie (Berkeley)|université de Berkeley]] ([[Californie]]). Il a découvert le [[technétium]], premier élément artificiel, en [[1936]], l'[[astate]] en 1940 et plus tard le [[plutonium]] 239 dont il démontre la fissibilité analogue à celle de l'[[uranium]] 235 (le plutonium 239 sera utilisé dans la première [[Bombe A|bombe atomique]] et dans la bombe américaine larguée sur [[Nagasaki]]). Co-découvreur avec l'Américain [[Owen Chamberlain]] de l'[[antiproton]], la particule de même masse que le proton mais de charge électrique opposée, il sera récompensé, ainsi que son confrère, par le [[prix Nobel]] en [[1959]]. Gino Emilio Segrè est mort le 22 avril [[1989]] aux [[États-Unis d'Amérique|États-Unis]].
Emilio Segrè naît à [[Tivoli]] près de [[Rome]] dans une famille [[Séfarades|juive séfarade]], d'un père, Giuseppe Segrè (1859-1944), industriel dans les manufactures de papier de la ville, et d'Amelia Treves (1868-1943)<ref name="NYT89">{{en}} [https://www.nytimes.com/1989/04/24/obituaries/dr-emilio-g-segre-is-dead-at-84-shared-nobel-for-studies-of-atom.html?scp=14&sq=tivoli%20italy&st=cse ''{{Dr}} Emilio G. Segre Is Dead at 84; Shared Nobel for Studies of Atom''] dans ''[[The New York Times]]'' du 24 avril 1989.</ref>. Il est élève à Tivoli, puis à Rome après le déménagement de sa famille en 1917. Il obtient son diplôme en juin 1922 et commence des études d'ingénieur à l'[[université de Rome « La Sapienza »|université La Sapienza]]<ref>{{Ouvrage|langue=en|auteur1=John David Jackson|titre=Emilio Gino Segrè January 30, 1905–April 22, 1989|éditeur=[[National Academies Press]]|date=2002|oclc=51822510|lire en ligne=https://www.nasonline.org/publications/biographical-memoirs/memoir-pdfs/segr-emilio.pdf}}</ref>.
Emilio Segre a écrit un ouvrage donnant un panorama exhaustif de la physique du XX° siècle : "Les physiciens modernes et leur découverte".


En 1927, par l'intermédiaire de [[Franco Rasetti]], Segrè rencontre [[Enrico Fermi]], qui l'engage à étudier plutôt la [[physique nucléaire]] avec lui à l'Institut de physique théorique de la Sapienza, dirigé par [[Orso Mario Corbino]], situé rue Panisperna. Sous la direction de Fermi et avec l'aide de son collègue [[Edoardo Amaldi]], Segrè obtient son doctorat en 1928, avec une thèse portant sur des travaux expérimentaux de [[spectroscopie]]. Après son [[service militaire]] en 1928/1929, Segrè commence à étudier l'[[effet Zeeman]] dans certains [[Métal alcalin|métaux alcalins]]. Il est invité par [[Pieter Zeeman]] lui-même, à l'[[université d'Amsterdam]], pour réaliser ses travaux. Il profite également d'une [[Fondation Rockefeller|bourse Rockefeller]] pour étudier avec [[Otto Stern]] à l'[[université de Hambourg]], où il travaille notamment avec [[Otto Frisch]] sur une variation de l'[[expérience de Stern et Gerlach]] pour prouver la quantification du [[spin]]. En 1932, Segrè obtient un poste de professeur assistant à la Sapienza où il fait partie du groupe des [[garçons de la rue Panisperna]].
{{portail physique}}


Il rencontre en 1934 sa future femme, Elfriede Spiro (1907-1970), une juive ayant fui le nazisme en Allemagne, et l'épouse à la [[Grande synagogue de Rome]] le {{Date-|2/2/1936}}. Ils auront trois enfants.
[[Catégorie:Prix Nobel de physique|Segre, Emilio Gino]]
[[Catégorie:Physicien italien|Segre, Emilio Gino]]
[[Catégorie:Naissance en 1905|Segre, Emilio Gino]]
[[Catégorie:Décès en 1989|Segre, Emilio Gino]]


Il accepte ensuite un poste de professeur de physique à l'[[université de Palerme]]. En 1936, il se rend pour la première fois au [[Laboratoire national Lawrence-Berkeley|laboratoire de radiation Berkeley]] d'[[Ernest Orlando Lawrence|Ernest Lawrence]], où il s'intéresse au fonctionnement du [[cyclotron]] et emporte avec lui des morceaux de métaux irradiés par cet instrument. De retour à Palerme et avec l'aide du minéralogiste [[Carlo Perrier]], il découvre dans les échantillons un grand nombre d'[[Isotope|isotopes]] [[Radioactivité|radioactifs]]. En 1937, dans un morceau de [[molybdène]] irradié envoyé par Lawrence, ils remarquent la présence d'un élément radioactif inconnu. En 1947, ils le baptiseront « [[technétium]] », le premier élément chimique produit artificiellement.
[[ca:Emilio Gino Segrè]]

[[de:Emilio Segrè]]
En juin 1938, Segrè est à nouveau en visite à Berkeley. Pendant son séjour, le gouvernement fasciste de [[Benito Mussolini|Mussolini]] instaure des [[Lois raciales fascistes|lois raciales]] l'empêchant de garder son poste de professeur. Face à cette situation et sentant la guerre imminente, il demande à sa famille de le rejoindre en [[Californie]]. Contraint à accepter un poste à Berkeley en deçà de ses capacités, il parvient néanmoins à des résultats importants : avec [[Glenn Theodore Seaborg|Glenn Seaborg]], il isole l'isotope métastable du technétium ([[Technétium 99m|{{exp|99m}}Tc]]) ; avec Alexander Langsdorf et [[Chien-Shiung Wu]], il découvre le [[xénon 135]], dont le rôle de [[Empoisonnement au xénon|poison nucléaire]] sera vital à comprendre pour la réalisation des premières [[Pile atomique|piles atomiques]] ; avec [[Dale R. Corson|Dale Corson]], [[Robert Cornog]] et [[Kenneth Ross MacKenzie|Kenneth MacKenzie]], il isole l'[[astate]]. Il aide également à la création du [[plutonium 239]]. Il manque de peu la découverte du [[neptunium]] et du [[prométhium]].
[[en:Emilio G. Segrè]]

[[eo:Emilio Gino Segrè]]
Fin 1942, [[Robert Oppenheimer]], qu'il connait depuis son premier voyage américain, lui demande de rejoindre le [[projet Manhattan]]. Ainsi, il dirige de 1943 à 1946 un groupe de recherche au [[laboratoire national de Los Alamos]]. Son objectif est de mesurer et de cataloguer la radioactivité de différents [[Produit de fission|produits de fission]] afin de déterminer quel [[Isotope fissile|matériau]] est le plus adapté à la réalisation de la [[Bombe A|bombe atomique]]. Il sera également chargé de mesurer la [[Rayon gamma|radiation gamma]] issue de l'essai atomique [[Trinity (essai atomique)|Trinity]].
[[es:Emilio Gino Segrè]]

[[fi:Emilio Gino Segrè]]
La mère de Segrè est arrêtée par les nazis dans une [[rafle]] en octobre 1943 et son père meurt le {{Date-|4/10/1944}} sans qu'il n'ait pu les revoir. Lui et sa femme deviennent citoyens américains en 1944.
[[id:Emilio Segrè]]

[[io:Emilio Gino Segrè]]
Segrè décide de retourner à Berkeley en janvier 1946, et y restera jusqu'à sa retraite en 1973, sauf pour quelques années à l'[[université de l'Illinois à Urbana-Champaign]]. En litige avec le gouvernement américain au sujet des [[Brevet d'invention|brevets]] que lui et ses collègues avaient déposé avant et pendant la guerre sur la génération de neutrons et la synthèse du plutonium, il est finalement indemnisé au cours des années 1950. Il est élu à [[académie nationale des sciences]] en 1952 et à la [[Société américaine de philosophie]] en 1963.
[[it:Emilio Segrè]]

[[ja:エミリオ・セグレ]]
Avec son ancien élève [[Owen Chamberlain]] et d'autres à Berkeley, il s'intéresse à l'[[antiproton]], antiparticule prédite par [[Paul Dirac]] en 1933 mais encore jamais détectée. Grâce au [[Bevatron]], un [[accélérateur de particules]] de 6 GeV nouvellement construit dans ce but, Chamberlain, Segrè, [[Clyde Wiegand]] et [[Thomas Ypsilantis]] parviennent à l'observer en 1955. Cette découverte leur vaudra (aux deux premiers seulement) le [[prix Nobel de physique]] 1959.
[[no:Emilio Segrè]]

[[oc:Emilio Gino Segrè]]
Sa femme Elfriede meurt le {{Date-|16/10/1970}}. Il se remarie avec Rosa Mines (1926-1997) en février 1972. Après sa retraite à Berkeley, Segrè enseigne encore une année en 1974/1975 à la Sapienza de Rome. Il meurt le {{Date-|22 avril 1989}} non loin de son domicile à [[Lafayette (Californie)|Lafayette]] en [[Californie]]. S'intéressant à l'histoire des sciences, il a écrit plusieurs livres et pris beaucoup de photographies documentant ses recherches et celles de ses collègues. Beaucoup de ces témoignages sont actuellement dans les collections de l'[[American Institute of Physics]].
[[pl:Emilio Segrè]]

[[pt:Emilio Gino Segrè]]
== Apports scientifiques ==
[[ru:Сегре, Эмилио Джино]]
Segrè a découvert le [[technétium]], premier élément artificiel, en 1936, l'[[astate]] en 1940 et plus tard le [[plutonium 239]] dont il démontre la fissibilité analogue à celle de l'[[uranium 235]] (le plutonium 239 sera utilisé dans la première [[Bombe A|bombe atomique]], ''[[Gadget (bombe atomique)|Gadget]]'', testée lors de l’essai ''[[Trinity (essai atomique)|Trinity]]'' le {{date|16 juillet 1945}} au [[Nouveau-Mexique]], puis dans la bombe ''[[Fat Man]]'', elle aussi américaine, larguée sur [[Nagasaki]] le {{Date|9|août|1945}}). Codécouvreur avec l'Américain [[Owen Chamberlain]] de l'[[antiparticule|antiproton]], la particule de même masse que le [[proton]] mais de [[charge électrique]] opposée, il sera récompensé, ainsi que son confrère, par le [[prix Nobel de physique]] en [[1959 en science|1959]]<ref name=laureat_nobel_1959/>.
[[sl:Emilio Gino Segrè]]

[[sv:Emilio Segrè]]
== Ouvrages ==
[[sw:Emilio Segre]]

* ''Nuclei and Particles'', 1964.
* ''Enrico Fermi, Physicist'', [[University of Chicago Press]], 1970.
* ''From X-rays to Quarks: Modern Physicists and Their Discoveries'', [[Dover Publications]], 1980. Traduit de l'anglais par Patrick Leroux Hugo sous le titre ''Les Physiciens modernes et leurs découvertes'', [[Librairie Arthème Fayard|Fayard]], 1984
* ''Personaggi e scoperte della fisica classica'', [[Arnoldo Mondadori Editore]], 1983. Traduit de l'anglais par Suzanne de Cheveigné sous le titre ''Les Physiciens classiques et leurs découvertes'', Fayard, 1987
* ''A Mind Always in Motion: The Autobiography of Emilio Segrè'', [[University of California Press]], 1993

== Notes et références ==
{{Références|colonnes=2}}

== Voir aussi ==
=== Article connexe ===
* [[Carte des nucléides]]

=== Liens externes ===
* {{Site Fondation Nobel |https://www.nobelprize.org/prizes/physics/1959/segre/biographical/ |Biographie}}
{{Liens}}

{{Palette
|Projet Manhattan
|Lauréats du prix Nobel de physique
|Personnalité de l'année
|Prix Nobel italiens
}}
{{Portail|physique|prix Nobel|Italie|judaïsme}}

{{DEFAULTSORT:Segre, Emilio Gino}}
[[Catégorie:Naissance en février 1905]]
[[Catégorie:Naissance à Tivoli]]
[[Catégorie:Décès en avril 1989]]
[[Catégorie:Décès à 84 ans]]
[[Catégorie:Lauréat du prix Nobel de physique]]
[[Catégorie:Lauréat italien du prix Nobel]]
[[Catégorie:Membre de l'Académie internationale d'histoire des sciences]]
[[Catégorie:Personnalité de l'année selon Time Magazine]]
[[Catégorie:Physicien américain du XXe siècle]]
[[Catégorie:Physicien italien du XXe siècle]]
[[Catégorie:Physicien nucléaire]]
[[Catégorie:Professeur à l'université de Palerme]]
[[Catégorie:Universitaire italien du XXe siècle]]
[[Catégorie:Universitaire américain du XXe siècle]]
[[Catégorie:Étudiant de l'université de Rome « La Sapienza »]]
[[Catégorie:Boursier Guggenheim]]
[[Catégorie:Décès à Lafayette (Californie)]]

Dernière version du 19 octobre 2023 à 11:34

Emilio Segrè
Biographie
Naissance
Décès
Voir et modifier les données sur Wikidata (à 84 ans)
LafayetteVoir et modifier les données sur Wikidata
Sépulture
Lafayette Cemetery (d)Voir et modifier les données sur Wikidata
Nom de naissance
Emilio Gino SegrèVoir et modifier les données sur Wikidata
Nationalités
italienne ( - )
américaine (à partir de )Voir et modifier les données sur Wikidata
Domicile
Formation
Activités
Fratrie
Angelo Segrè (d)Voir et modifier les données sur Wikidata
Conjoint
Elfriede Spiro (d)Voir et modifier les données sur Wikidata
Enfant
Claudio Segrè (d)Voir et modifier les données sur Wikidata
Autres informations
A travaillé pour
Membre de
Directeur de thèse
Distinctions
Prix Nobel de physique ()Voir et modifier les données sur Wikidata
Liste détaillée
Médaille August Wilhelm von Hofmann (d) ()
Prix mémorial Richtmyer (en) ()
Bourse Guggenheim ()
Prix Nobel de physique ()
Membre de la Société américaine de physiqueVoir et modifier les données sur Wikidata
Archives conservées par
Niels Bohr Library & Archives (d) (AR 2010-964, 32238)[1]Voir et modifier les données sur Wikidata
Renommé pour
Découverte des antiprotons, du technétium et de l'astate
signature d'Emilio Segrè
Signature

Emilio Gino Segrè, né le à Tivoli et mort le à Lafayette, est un physicien italien naturalisé américain. Lui et Owen Chamberlain sont colauréats du prix Nobel de physique de 1959 « pour leur découverte de l'antiproton[2] ».

Emilio Segrè naît à Tivoli près de Rome dans une famille juive séfarade, d'un père, Giuseppe Segrè (1859-1944), industriel dans les manufactures de papier de la ville, et d'Amelia Treves (1868-1943)[3]. Il est élève à Tivoli, puis à Rome après le déménagement de sa famille en 1917. Il obtient son diplôme en juin 1922 et commence des études d'ingénieur à l'université La Sapienza[4].

En 1927, par l'intermédiaire de Franco Rasetti, Segrè rencontre Enrico Fermi, qui l'engage à étudier plutôt la physique nucléaire avec lui à l'Institut de physique théorique de la Sapienza, dirigé par Orso Mario Corbino, situé rue Panisperna. Sous la direction de Fermi et avec l'aide de son collègue Edoardo Amaldi, Segrè obtient son doctorat en 1928, avec une thèse portant sur des travaux expérimentaux de spectroscopie. Après son service militaire en 1928/1929, Segrè commence à étudier l'effet Zeeman dans certains métaux alcalins. Il est invité par Pieter Zeeman lui-même, à l'université d'Amsterdam, pour réaliser ses travaux. Il profite également d'une bourse Rockefeller pour étudier avec Otto Stern à l'université de Hambourg, où il travaille notamment avec Otto Frisch sur une variation de l'expérience de Stern et Gerlach pour prouver la quantification du spin. En 1932, Segrè obtient un poste de professeur assistant à la Sapienza où il fait partie du groupe des garçons de la rue Panisperna.

Il rencontre en 1934 sa future femme, Elfriede Spiro (1907-1970), une juive ayant fui le nazisme en Allemagne, et l'épouse à la Grande synagogue de Rome le . Ils auront trois enfants.

Il accepte ensuite un poste de professeur de physique à l'université de Palerme. En 1936, il se rend pour la première fois au laboratoire de radiation Berkeley d'Ernest Lawrence, où il s'intéresse au fonctionnement du cyclotron et emporte avec lui des morceaux de métaux irradiés par cet instrument. De retour à Palerme et avec l'aide du minéralogiste Carlo Perrier, il découvre dans les échantillons un grand nombre d'isotopes radioactifs. En 1937, dans un morceau de molybdène irradié envoyé par Lawrence, ils remarquent la présence d'un élément radioactif inconnu. En 1947, ils le baptiseront « technétium », le premier élément chimique produit artificiellement.

En juin 1938, Segrè est à nouveau en visite à Berkeley. Pendant son séjour, le gouvernement fasciste de Mussolini instaure des lois raciales l'empêchant de garder son poste de professeur. Face à cette situation et sentant la guerre imminente, il demande à sa famille de le rejoindre en Californie. Contraint à accepter un poste à Berkeley en deçà de ses capacités, il parvient néanmoins à des résultats importants : avec Glenn Seaborg, il isole l'isotope métastable du technétium (99mTc) ; avec Alexander Langsdorf et Chien-Shiung Wu, il découvre le xénon 135, dont le rôle de poison nucléaire sera vital à comprendre pour la réalisation des premières piles atomiques ; avec Dale Corson, Robert Cornog et Kenneth MacKenzie, il isole l'astate. Il aide également à la création du plutonium 239. Il manque de peu la découverte du neptunium et du prométhium.

Fin 1942, Robert Oppenheimer, qu'il connait depuis son premier voyage américain, lui demande de rejoindre le projet Manhattan. Ainsi, il dirige de 1943 à 1946 un groupe de recherche au laboratoire national de Los Alamos. Son objectif est de mesurer et de cataloguer la radioactivité de différents produits de fission afin de déterminer quel matériau est le plus adapté à la réalisation de la bombe atomique. Il sera également chargé de mesurer la radiation gamma issue de l'essai atomique Trinity.

La mère de Segrè est arrêtée par les nazis dans une rafle en octobre 1943 et son père meurt le sans qu'il n'ait pu les revoir. Lui et sa femme deviennent citoyens américains en 1944.

Segrè décide de retourner à Berkeley en janvier 1946, et y restera jusqu'à sa retraite en 1973, sauf pour quelques années à l'université de l'Illinois à Urbana-Champaign. En litige avec le gouvernement américain au sujet des brevets que lui et ses collègues avaient déposé avant et pendant la guerre sur la génération de neutrons et la synthèse du plutonium, il est finalement indemnisé au cours des années 1950. Il est élu à académie nationale des sciences en 1952 et à la Société américaine de philosophie en 1963.

Avec son ancien élève Owen Chamberlain et d'autres à Berkeley, il s'intéresse à l'antiproton, antiparticule prédite par Paul Dirac en 1933 mais encore jamais détectée. Grâce au Bevatron, un accélérateur de particules de 6 GeV nouvellement construit dans ce but, Chamberlain, Segrè, Clyde Wiegand et Thomas Ypsilantis parviennent à l'observer en 1955. Cette découverte leur vaudra (aux deux premiers seulement) le prix Nobel de physique 1959.

Sa femme Elfriede meurt le . Il se remarie avec Rosa Mines (1926-1997) en février 1972. Après sa retraite à Berkeley, Segrè enseigne encore une année en 1974/1975 à la Sapienza de Rome. Il meurt le non loin de son domicile à Lafayette en Californie. S'intéressant à l'histoire des sciences, il a écrit plusieurs livres et pris beaucoup de photographies documentant ses recherches et celles de ses collègues. Beaucoup de ces témoignages sont actuellement dans les collections de l'American Institute of Physics.

Apports scientifiques

[modifier | modifier le code]

Segrè a découvert le technétium, premier élément artificiel, en 1936, l'astate en 1940 et plus tard le plutonium 239 dont il démontre la fissibilité analogue à celle de l'uranium 235 (le plutonium 239 sera utilisé dans la première bombe atomique, Gadget, testée lors de l’essai Trinity le au Nouveau-Mexique, puis dans la bombe Fat Man, elle aussi américaine, larguée sur Nagasaki le ). Codécouvreur avec l'Américain Owen Chamberlain de l'antiproton, la particule de même masse que le proton mais de charge électrique opposée, il sera récompensé, ainsi que son confrère, par le prix Nobel de physique en 1959[2].

  • Nuclei and Particles, 1964.
  • Enrico Fermi, Physicist, University of Chicago Press, 1970.
  • From X-rays to Quarks: Modern Physicists and Their Discoveries, Dover Publications, 1980. Traduit de l'anglais par Patrick Leroux Hugo sous le titre Les Physiciens modernes et leurs découvertes, Fayard, 1984
  • Personaggi e scoperte della fisica classica, Arnoldo Mondadori Editore, 1983. Traduit de l'anglais par Suzanne de Cheveigné sous le titre Les Physiciens classiques et leurs découvertes, Fayard, 1987
  • A Mind Always in Motion: The Autobiography of Emilio Segrè, University of California Press, 1993

Notes et références

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  1. « https://history.aip.org/ead/20100333.html »
  2. a et b (en) « for their discovery of the antiproton » in Personnel de rédaction, « The Nobel Prize in Physics 1959 », Fondation Nobel, 2010. Consulté le 17 juin 2010
  3. (en) Dr Emilio G. Segre Is Dead at 84; Shared Nobel for Studies of Atom dans The New York Times du 24 avril 1989.
  4. (en) John David Jackson, Emilio Gino Segrè January 30, 1905–April 22, 1989, National Academies Press, (OCLC 51822510, lire en ligne)

Article connexe

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Liens externes

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  • (en) Biographie sur le site de la fondation Nobel (le bandeau sur la page comprend plusieurs liens relatifs à la remise du prix, dont un document rédigé par la personne lauréate — le Nobel Lecture — qui détaille ses apports)