Aller au contenu

Histoire d'Amiens

Un article de Wikipédia, l'encyclopédie libre.
Ceci est une version archivée de cette page, en date du 3 janvier 2015 à 14:46 et modifiée en dernier par 86.192.243.249 (discuter). Elle peut contenir des erreurs, des inexactitudes ou des contenus vandalisés non présents dans la version actuelle.

L'Histoire d'Amiens commence au Paléolithique selon les vestiges archéologiques mis au jour depuis le XIXe siècle qui démontrent que le site de double confluence où s'est construit Amiens était occupé par l'homme, il y a 500 000 ans. Mais c'est Jules César qui nomma pour la première fois le lieu dans La Guerre des Gaules. Au Ier siècle, les Romains fondèrent la ville de Samarobriva qui devint Amiens au IVe siècle.

Armoiries d'Amiens :
Les armoiries de la ville d'Amiens se blasonnent ainsi:
de gueule au lierre diaprant d'argent, au chef d'azur semé de fleurs de lis d'or.
Le tenant et le support sont deux licornes (la licorne est le symbole des vertus chevaleresques de pureté et d'attrait pour la beauté et la délicatesse).
le soutien est de feuilles d'acanthe, tandis que
le cimier est un château donjonné de cinq pièces.
Devise :
« Liliis tenaci vimine jungor » (Un lien puissant m'unit au lis).
Ornements extérieurs :
Légion d'honneur, Croix de guerre 1914-1918 avec palme et Croix de guerre 1939-1945 avec palme[1].
Les armoiries d'Amiens dans leur forme actuelle et la devise remontent au XVe siècle.

Préhistoire

Paléolithique

En 2007, des fouilles archéologiques, rue du Manège, ont mis au jour à Amiens les toutes premières traces d'occupation humaine dans une nappe alluviale perchée à 35 mètres au-dessus du fond de la vallée actuelle. L'âge des vestiges recueillis lors de cette intervention est daté d'environ 500 000 à 550 000 ans.

La présence d'hommes Homo heidelbergensis vraisemblablement, il y a 450 à 300 000 ans, est attestée dans la Somme grâce à des fouilles archéologiques réalisées à Abbeville, Amiens (Jardin archéologique de Saint-Acheul) et à Cagny, village voisin.

Biface en silex de Saint-Acheul

En 1853, des « haches taillées », selon le terme de l’époque, sont recueillies dans les anciennes alluvions de la Somme dans le quartier Saint-Acheul, à l’est de la ville. Cette découverte passionna les plus grands spécialistes internationaux de l’époque, Joseph Prestwich, Hugh Falconer, Charles Lyell ou John Evans, qui se pressent sur le site. En août 1859, Albert Gaudry y découvrit neuf « haches taillées » qui attestaient, selon lui, de la grande antiquité de l’humanité.

Albert Gaudry, Gabriel de Mortillet et Victor Commont comptent parmi les principaux préhistoriens ayant étudié le gisement préhistorique de Saint-Acheul à Amiens. En 1872, Gabriel de Mortillet donna le nom d'Acheuléen à la civilisation du Paléolithique ancien caractérisée par les silex taillés identiques à ceux trouvés dans la quartier Saint-Acheul. Des gisements acheuléens ont été retrouvés près de la Ferme de Grâce près de Montières (quartier d'Amiens), dans plusieurs sites de la vallées de la Somme et de ses affluents. On retrouve cette civilisation en Europe et en Asie.

Ces découvertes marquèrent le début de la grande période de Saint-Acheul qui dura plus de trois-quarts de siècle. Entre 1860 et 1880, 20 000 bifaces sont ainsi recueillis. Saint-Acheul, dont la renommée est devenue internationale, accueille de très nombreux spécialistes et collectionneurs français et étrangers. Ce succès donnera naissance à un commerce lucratif de faux silex taillés.

Vers 35 000, l'Homo sapiens arriva au Paléolithique supérieur. On a retrouvé des sites d'occupation humaine et de débitage de silex du Magdalénien et du Périgordien dans la vallée de la Somme. À Amiens, dans le quartier de Renancourt, a été mise au jour, en juillet 2014, dans les vestiges d'un campement, une statuette féminine aux attributs sexuels très prononcés, datant de 23 000 ans avant notre ère. La Vénus de Renancourt, en pierre calcaire, est comparable aux 244 Vénus paléolithiques retrouvées à ce jour, en Europe et jusqu'en Sibérie[2].

Mésolithique

Le mésolithique est une période de la préhistoire situé entre le paléolithique et le néolithique qui débute vers 9 600 et prend fin vers 5 500 avant notre ère. En 2006, des fouilles archéologiques ont permis de découvrir des sites mésolithiques sur des positions d’anciennes berges de la Somme et de la Selle[3].

Néolithique

Un important gisement du Néolithique a été mis au jour dans le secteur Montières-Etouvie livrant une abondante industrie en silex jaune. Les briqueteries de Renancourt (quartier d'Amiens) ont également révélé d’importants vestiges attribuables au Néolithique ou au Chalcolithique comme en témoigne la hache bipenne naviforme exposée au musée de Picardie.

Âge du fer

La Tène

La période de La Tène, l'usage du fer se généralise, on a retrouvé un peu partout y compris dans des fermes isolées, des bas-fourneaux.

Au IIIe siècle avant notre ère, le territoire de l'actuelle département de la Somme est occupé par un peuple gaulois, les Belges, divisé en plusieurs tribus : les Ambiens occupent les environs d'Amiens jusqu'au littoral, et les Viromanduens la partie est du département. Cette population exploite densément le territoire, avec l'implantation d'un réseau de fermes. À partir du IIe siècle av J.-C., des oppidums sont fondés : L'Étoile, La Chaussée-Tirancourt, Méricourt-sur-Somme, etc.

Les Ambiens ont frappé des monnaies s'inspirant des statères de Tarente, en Grande Grèce, ce qui tend à prouver la prospérité de cette tribu et ses liens économiques avec la Méditerranée. Le monnayage ambien servit de modèle aux Parisii et aux Bellovaques[4].

Antiquité

La conquête romaine

Jules César passa un hiver avec ses légions sur le territoire des Ambiens dans un lieu qu'il désigne sous le nom de Samarobriva dans son ouvrage De Bello Gallico (La guerre des Gaules).

Il y explique qu'après sa première tentative de conquête de la Bretagne (l'actuelle Grande-Bretagne) il a pris ses quartiers d'hiver à Samarobriva de l'automne 54 av. J.-C. au printemps 53 av. J.-C.. Il y a convoqué deux fois un concilium Galliae (un conseil de représentants de tribus gauloises)

« [...] Quand il eut fait mettre les navires à sec et tenu à Samarobriva l'assemblée de la Gaule, comme la récolte de cette année avait été peu abondante à cause de la sécheresse, il fut obligé d'établir les quartiers d'hiver de l'armée autrement que les années précédentes, et de distribuer les légions dans diverses contrées[5]. »

« [...] César renvoya Fabius dans ses quartiers avec sa légion, et résolut d'hiverner lui-même aux environs de Samarobriva avec trois légions dont il forma trois quartiers. Les grands mouvements qui avaient eu lieu dans la Gaule le déterminèrent à rester tout l'hiver près de l'armée[6]. »

César établit donc un camp militaire à Samarobriva qui perdura jusqu'aux premières années du règne d'Auguste. Selon toute vraisemblance, aux abords du ou des camps successifs, se développèrent des habitats civils gaulois, des canabae, ce qui incita sûrement les Romains à établir en ces lieux la capitale de la cité des Ambiens[7].

Haut Empire

Le territoire de l'actuelle département de la Somme fut intégré par les Romains dans la province de la Gaule belgique dont la capitale fut Durocortorum (Reims), sous le règne d'Auguste. Dans le courant du Ier siècle, les Romains fondèrent les premières villes, Samarobriva (Amiens) fut l'une d'entre elles qui était traversé par plusieurs voies romaines dont la plus importante la Via Agrippa de l'Océan reliait Lugdunum (Lyon) à Gesoriacum (Boulogne-sur-Mer).

Bas Empire

À partir du milieu du IIIe siècle, le nord de la Gaule subit des raids de marins saxons et francs. Des invasions de Francs et d'Alamans se produisirent en 275-276. Les élites municipales délaissèrent progressivement les villes et se réfugièrent dans leur villae à la campagne. Les villes réduisirent leur taille et s'entourèrent de remparts comme à Amiens. À la charnière des IIIe et IVe siècles les villes prirent le nom du peuple gaulois dont elles étaient le chef-lieu, ainsi Samarobriva devint Ambianorum.

Début de la christianisation

En mai 346, à Ambianorum (Amiens), un légionnaire romain, Martin, partagea, aux portes de la ville, son manteau avec un pauvre, puis se convertit au christianisme. La région fut évangélisée à cette période et la tradition chrétienne fait de Firmin d'Amiens, Fuscien, Victoric d'Amiens et Gentien de Sains-en-Amiénois (Somme) auraient été les premiers propagateurs les propagateurs de la foi nouvelle. Le premier évêque d'Amiens dont l'existence est historiquement attesté, en 346, fut Euloge.

Anarchie militaire du IVe siècle

En 350, un général romain d'origine barbare, Magnence, né à Amiens en 303, se souleva contre les fils de Constantin, Constant et Constance II. Proclamé Auguste par la troupe, il fut reconnu empereur par la plupart des provinces occidentales de l'empire. Il créa à Amiens un atelier monétaire. Battu militairement, Magnence mourut à Lyon en 353.

En 367, Valentinien Ier s'installa à Amiens et y fit acclamer Auguste, son fils Gratien.

Les invasions barbares

Le territoires des Ambiens fut envahi par des peuples germaniques dont les Francs qui occupent la ville d'Amiens en 435.

Moyen Âge

Haut Moyen Âge

Période mérovingienne

Au Ve siècle, l'histoire d'Amiens entre dans une période obscure faute de sources écrite, mais, à partir du début du VIe siècle, une reconquête chrétienne et une remise en ordre de la région s'effectue à partir d'Amiens.

La ville à l'époque mérovingienne reste enserrée dans les remparts du bas-empire et garde une superficie de 20 ha ce qui en fait la plus étendue des villes de la région devant Boulogne (10 ha) Beauvais (10 ha), Soissons (12 ha), Arras (8,5 ha)...

À l'époque mérovingienne, le développa le culte des martyrs. À la fin du VIe siècle, l'évêque Sauve d'Amiens aurait fait transférer d'Abladène (aujourd'hui quartier Saint-Acheul) le corps de Firmin d'Amiens dans la cathédrale intra muros. au VIe siècle Grégoire de Tours signala la présence d'un débarcadère pour les bateaux sillonnant la Somme. Un atelier monétaire fonctionna durant les VIe et VIIe siècles.

Depuis le VIIe siècle, au moins, le roi franc était représenté à Amiens par un comte aux pouvoirs étendus. La fondation de l'abbaye de Corbie, en 657, à qui le roi attribua la moitié nord du comté d'Amiens, soustraite à l'autorité du comte, réduisit considérablement sa puissance[8].

Période carolingienne

Bibliothèques d'Amiens Métropole, Enluminure du Psautier de Corbie

En 779, dans un diplôme de Charlemagne accordant aux moines de Saint-Germain-des-Prés, le tonlieu d'Amiens est cité parmi les plus importants du royaume franc.

La paix carolingienne fut à Amiens et ses envions d'assez courte durée. Après le Partage de Verdun de 843, Amiens et sa région firent partie du royaume de Francie occidentale. Au IXe siècle les Vikings ravagèrent la ville d'Amiens et ses alentours en 859 et 881. En 883, les Vikings établirent leur camp à proximité de la ville pour y passer l'hiver et y restèrent jusqu'en octobre 884. En 891, ils s'établirent dans la ville même pendant plusieurs mois tenant en échec le roi Eudes. En 925, les Normands de Rouen envahirent à nouveau l'Amiénois et incendièrent Amiens. Les Normands assagis, le pouvoir royal étant considérablement affaibli, ce furent les féodaux qui vinrent troubler la paix dans la région.

Après 925, la ville d'Amiens et son comté tombent aux mains d'Herbert II de Vermandois qui possède déjà Saint-Quentin, Soissons et Reims. En 932, pour affaiblir la puissance de se grand seigneur, Hugues le Grand fit le siège d'Amiens. Puis Louis IV d'Outremer, parvint à entrer dans la ville et à en chasser Eudes, fils d'Herbert II de Vermandois. En 949, les amiénois livrent leur ville à Arnoul Ier de Flandre qui reste maître de la cité jusqu'à sa mort en 965. En 950, Hugues le Grand subit un second échec en assiégeant le Castillon, la forteresse du comte d'Amiens[8].

Moyen Âge classique

La féodalité

L'affaiblissement du pouvoir royal renforça le pouvoir politique local des comtes et des seigneurs, ce fut la naissance de la féodalité. Du IXe au XIe siècles, naquirent les puissantes familles nobiliaires de comme celle d'Enguerrand Ier de Coucy (1042-1116), comte d'Amiens. La ville était partagée entre plusieurs autorités. Le comte qui possède la forteresse du Castillon domine la partie occidentale. L'évêque exerçait son autorité sur la quartier épiscopal situé à l'est de la cité. Outre la cathédrale, le cloitre canonial, l'évêque possédait une tour dans l'angle nord-est de la cité et avait la charge de la garde des remparts et des portes. Il avait également dans sa dépendance, un groupe d'hommes, les « hommes de Saint-Firmin » exemptés de tonlieu contre une redevance de 4 deniers par an, cette clientèle s'élargit peu à peu à l'ensemble de la bourgeoisie. Ainsi l'évêque pouvait-il tenir tête au comte depuis le milieu du IXe siècle.

En 965, le roi Lothaire récupéra le comté d'Amiens et le remit à Gautier Ier de Vexin, comte de Valois et de Vexin. Cette famille garda le comté d'Amiens jusqu'en 1077 sans parvenir à constituer une principauté territoriale comme celle des comtes de Flandre ou de Champagne par exemple. Le pouvoir comtal, cependant, parvint à se redresser, preuve en est, l'élection entre 992 et 1077 de trois fils de comtes sur le siège épiscopal d'Amiens Foulques de Vexin, Foulques d'Amiens et Guy d'Amiens. Le plus remarquable seigneur de cette période fut Raoul IV de Vexin, comte de Vexin, de Valois et d'Amiens. Il posséda jusqu'à sept comtés, à la mort du roi Henri Ier, il épousa - bien qu'étant déjà marié - sa veuve, Anne de Kiev et devint le tuteur en fait du roi Philippe Ier encore enfant. Il fut redouté dans toute la France du nord mais sa principauté territoriale sans continuité territoriale ne lui survécut pas. Sa succession fut chaotique et le comté d'Amiens échut entre 1095 et 1104 à Enguerrand de Boves dont la lignée jusque là était restée discrète[8].

C'est au XIIe siècle que la puissance féodale entama son déclin. Le pouvoir royal s’appuyant sur le mouvement communal tenta de l'affaiblir.

Par le Dit d'Amiens du 23 janvier 1264, saint Louis prononça, dans la cathédrale Notre-Dame d'Amiens encore en construction, un arbitrage dans un conflit opposant le roi Henri III d'Angleterre à ses barons révoltés autour de Simon V de Montfort; cet arbitrage rendu fut en faveur du roi d'Angleterre.

Le Traité d'Amiens (1279) entre le roi de France Philippe III le Hardi et le roi d'Angleterre Édouard Ier régla le différend qui les opposait à propos de la possession de l'Agenais et de la Saintonge.

La commune d'Amiens

La ville d'Amiens connu grâce à la paix retrouvé un essor dès le début du XIe siècle comme en témoignent la construction d'églises Saint-Nicolas et Saint-Martin aux Jumeaux, près de la cathédrale, Saint-Rémi, Saint-Marin au bourg et d'un nouveau quartier situés au nord de la ville entre les différents bras de la somme, le quartier Saint-Leu où prospérèrent différentes activités industrielles : moulin à blé, moulin à guède, moulin à taillant (à fer) etc. En 1077, l'évêque Gui de Ponthieu fit don de douze moulins aux chanoines de la cathédrale à chage pour eux d'entretenir les berges et les ponts. C'était le domaine des meuniers et des bateliers. Au XIIe siècle s'installèrent les métiers à tisser, le peuplement du quartier se densifia.

À partir de la fin du XIe siècle, l'essor urbain entraîna le mouvement communal par lequel les bourgeois des villes obtinrent, pacifiquement ou de manière conflictuelle, de leur seigneur une charte de commune, avec le plus souvent, l'appui du roi de France :

Amiens bénéficia, vers 1095, d'une ébauche d'organisation municipale ; la commune fut jurée en 1113 avec l’accord de l’évêque mais le comte d’Amiens, Enguerrand de Boves et son fils Thomas de Marle refusèrent de reconnaître la commune. En 1115, le roi Louis VI le Gros vint en personne soutenir la rébellion des bourgeois soutenus par l'évêque Geoffroi, contre leurs seigneurs[8].

La présence de l’Église catholique

Au début des années 1020, Amiens participa au mouvement patronné par l’Église appelé la Paix de Dieu. Un pacte fut signé avec Corbie pour éviter à l'avenir tout affrontement en cas de litige. Il fut convenu qu'une fois l'an, le jour de la saint Firmin, les litiges seraient évoqués devant le comte et l'évêque. Cette assemblée se tenait dans la plaine de Daours au bosquet de l'Indict. Les deux populations se rendaient en procession derrière des reliques, après les prêches, les autorités religieuses réglaient seules les conflits. Une monnaie épiscopale fut frappée.

Au début du XIIIe siècle, la ville d'Amiens comptait douze paroisses : Saint Germain l'Ecossais, Saint Firmin le Confesseur, Saint Martin aux Waides, Saint Rémy, les plus anciennes, Saint-Firmin en Castillon, Saint-Firmin à la Porte, Saint Michel, dans l'enceinte primitive, Saint Leu et Saint Sulpice, dans les nouveaux quartiers du nord, Saint Maurice, Saint Pierre, Saint Jacques dans les faubourgs.

La présence monastique fut plutôt mince à Amiens au Moyen Âge. Un seul prieuré dépendant de l'abbaye de Marmoutiers en Touraine, était situé à Saint-Denis-des-Prés (actuel square Saint-Denis), hors les murs. L'ordre canonial par contre était très nombreux. Les chanoines séculiers d'abord : le chapitre cathédral était le plus nombreux avec cinquante prébendes auxquelles s'ajoutaient les huit de la collégiale Saint-Nicolas, les six de la collégiale Saint-Firmin-le-Confesseur. Les chanoines réguliers ensuite, à la vie plus austère : abbaye Saint-Martin-aux-Jumeaux, abbaye de Saint-Acheul, Abbaye Saint-Jean-des-Prémontrés d'Amiens. Au XIIIe siècle, les ordres mendiants arrivèrent dans la cité, les cordeliers ou franciscains en 1233, les jacobins ou dominicains en 1245, les augustins, enfin un béguinage fondé dans les années 1260, accueillait les femmes seules laïque voulant vivre religieusement.

Une école épiscopale assurait la formation intellectuelle du clergé du diocèse. Pour les plus doués, la poursuite des études se faisait à Paris dans les collèges comme celui des Cholets ou celui du cardinal Lemoine. Pour les laïcs, un enseignement en langue vulgaire était assurait par les petites écoles paroissiales qui enseignaient aux enfant de la bourgeoisie, la lecture, l'écriture et le calcul[8].

L'essor économique des XIIe et XIIIe siècles

La croissance de la ville d'Amiens fut marqué par l'essor de l'industrie textile, Amiens fut l'une des principales « villes drapantes », l'industrie drapière connut une véritable prospérité grâce à la teinture des draps de laine obtenue à partir d'une plante la waide cultivée massivement dans la région. Elle faisait partie de La hanse des dix-sept villes, qui était en fait avant 1230, une ghilde de marchands drapiers de villes des Pays-Bas et de la France du Nord (dont le nombre dépassa, largement, dix-sept), fréquentant les foires de Champagne. Cette association disparut avec le déclin de celles-ci.

Amiens au cœur de l'art gothique

L'art gothique est né pour une large part en Picardie. L'essor économique et la paix intérieure permirent l'éclosion et la diffusion de cette architecture nouvelle:

Bas Moyen Âge

Guerre de Cents ans

Bibliothèque nationale de France, Chroniques de Jean Froissart, enluminure, Hommage d’Édouard III d'Angleterre à Philippe VI de Valois pour la Guyenne en 1329

En 1329, dans la cathédrale d'Amiens, Edouard III d'Angleterre prêta l'hommage au roi de France pour ses possessions de Guyenne. Cependant quelque temps après, Édouard III d'Angleterre disputa à son cousin Philippe VI de Valois le trône de France qu'il estimait lui revenir en tant que petit-fils de Philippe IV le Bel et neveu du roi Charles IV le Bel. Une première campagne en 1339 le rendit maître du Ponthieu dont il était héritier par sa mère, fils de Philippe IV le Bel. Mais en 1342, les Abbevillois, se révoltèrent contre la lourdeur des impôts que les Anglais levaient sur eux et les chassèrent de la ville.

Le lendemain de la Bataille de Crécy, le 27 août 1346, les milices communales d'Amiens, Beauvais et Rouen, ignorant l'issue des combats furent taillées en pièce par l'armée anglaise qui les surprit à proximité du champ de bataille. Une assemblée générale des habitants se réunit à Amiens et décision fut prise de construire un rempart pour protéger les faubourgs au sud de la ville. De 1346 à 1355, la commune aurait englouti dans la construction de ce rempart la somme colossale pour l'époque de 60 000 livres.

Amiens à la fin du XIVe siècle

Le roi Jean II le Bon, fait prisonnier à Poitiers en 1356, fut libéré sur parole. Il repartit pour Londres le 3 janvier 1364 pour renégocier le Traité de Brétigny sa rançon n'étant toujours pas payée. Avant de partir, il réunit les états à Amiens fin décembre 1363 pour leur faire part de sa décision. Le Dauphin y reçut l'instruction d'attaquer Charles le Mauvais et obtint de pouvoir lever l'impôt nécessaire pour enrôler 6 000 hommes pour lutter contre les Grandes Compagnies.

La Guerre civile entre Armagnacs et Bourguignons

La Guerre civile entre Armagnacs et Bourguignons pendant la folie du roi Charles VI eut des répercussions en Picardie et à Amiens. Les partisans du duc de Bourgogne Philippe le Hardi, oncle de Charles VI et régent du royaume de 1380 à 1388 puis de son fils Jean sans Peur s'opposèrent à Louis d'Orléans, frère du roi qu'il firent assassiné le 14 novembre 1407 à Paris. Cet assassinat déclencha les hostilités entre les deux partis. Le fils du duc assassiné, Charles d'Orléans avait épousé Bonne d'Armagnac fille du connétable Bernard VII d'Armagnac.

Par le Traité de Troyes du 21 mai 1420, le successeur désigné du roi Charles VI de France était son gendre le roi Henri V d'Angleterre et la couronne de France serait transmise à ses descendants. Or Henri V mourut quelque temps après Charles VI en 1422. Le duc de Bedford, régent d'Angleterre et de France, fit venir à Amiens, Jean V de Bretagne et le duc Philippe III de Bourgogne qui y signèrent, le 17 avril 1423, un traité de de triple alliance entre les trois princes pour lutter contre Charles VII réfugié à Bourges.

La querelle entre armagnacs et bourguignons s'apaisa avec la signature du Traité d'Arras de 1435 qui donnait les Villes de la Somme, dont Amiens, au duc de Bourgogne.

Le rattachement de la Picardie au royaume de France

Carte de la France à la fin du Moyen Âge.

Les villes de la Somme furent rachetées par Louis XI, le 20 août 1463, à Philippe le Bon contre 400 000 écus, afin de protéger la frontière nord du royaume par une série de place fortes. Il s'agissait des villes de : Saint-Quentin, Corbie, Amiens, Doullens, Abbeville, Montreuil-sur-Mer, Rue, Saint-Valery, Le Crotoy, Saint-Riquier, Crèvecœur-en-Cambrésis et Mortagne ainsi que des châtellenies de Roye, Péronne et Montdidier.

La Ligue du Bien public réunit en 1465, les opposant à Louis XI sous la houlette de Charles le Téméraire héritier de Bourgogne. Par le Traité de Conflans du 5 octobre 1465, le duc de Bourgogne récupérait les villes de la Somme, notamment Amiens, Abbeville, Guînes et Saint-Quentin, mais aussi le comté de Boulogne.

En octobre 1468, craignant une résurrection de la Ligue du Bien Public et le débarquement d'une armée anglaise pour la soutenir, Louis XI vint à Péronne, quartier général bourguignon pour y discuter d'un accord de paix. En échange Charles le Téméraire souhaitait obtenir une confirmation de la ligne de la Somme et une juridiction souveraine sur ses fiefs français.

Alors que les négociations étaient sur le point d'aboutir, Charles apprit, avec colère, que Liège s'était à nouveau révoltée à l'instigation du roi de France, pensa-t-il. Louis XI, captif et craignant pour sa vie, fut contraint d'accepter de signer le traité de Péronne et d'accompagner Charles le Téméraire dans l'expédition punitive que celui-ci mena aussitôt contre la ville de Liège.

En 1475, le Traité de Picquigny entre Édouard IV d'Angleterre et Louis XI mit fin officiellement à la Guerre de Cent ans, la France versait 75 000 écus d'or à l'Angleterre et une rente annuelle de 50 000 écus. L'Angleterre renonçait à son alliance avec le duc de Bourgogne.

La mort de Charles le Téméraire en 1477 mit fin à la rivalité franco-bourguignonne, Louis XI récupérant le duché de Bourgogne et les villes de la Somme, la Picardie se trouva définitivement rattaché au royaume de France. Cette rivalité se ranima au XVIe siècle avec les descendants de Marie de Bourgogne, fille du Téméraire et de Maximilien de Habsbourg, les Habsbourg d'Autriche et d'Espagne.

Le renouveau économique à la fin du XVe siècle

Depuis le dernier tiers du XIVe siècle, la concurrence de la draperie anglaise provoqua une crise de l'industrie textile en Picardie. La reprise fut amorcée par l'implantation d'une nouvelle industrie textile, la sayetterie. Les sayetteurs furent chasser d'Arras en 1480 sur ordre de Louis XI. Ils s'installèrent à Amiens. Le roi Louis XI autorisa, par ses lettres patentes, la tenue à Amiens de deux foires annuelles, afin de dynamiser le commerce locale et de freiner la fuite des devises du royaume, en raison de l'attractivité des foires d'Anvers et de Bruges.

La bourgeoisie commerçante étendit son emprise sur le monde rural par la possession de terres et son pouvoir politique par l'achat d'offices de justice ou de finances. Elle accéda ainsi aux plus hautes fonctions municipales et aux honneurs.

Époque moderne

De la Renaissance aux décennies précédant la Révolution, Amiens fut à la fois le théâtre permanent de luttes de frontières (illustrées par l'édification de citadelles par Jean Erard et le cadre d'un essor de l'industrie textile favorisé grâce en autres à la politique de Colbert, ministre de Louis XIV.

Au nombre des épisodes douloureux pour la population, il faut citer la grande disette de 1562 et de nouveau la peste en 1587 ainsi qu'en 1596.

Militairement, les Espagnols envahirent la Picardie à la fin du XVIe siècle, puis en 1636, la paix ne revint qu'en 1659 avec la signature du Traité des Pyrénées.

Renaissance

La Renaissance, en Picardie, est synonyme de guerre civile et d'invasion étrangère.

Les invasions espagnoles

Après l'échec de l'entrevue du Camp du drap d'or, près de Calais, entre Ardres et Guînes, en 1520, François Ier dut affronter l'Empereur Charles Quint et le roi d'Angleterre Henry VIII.

En 1559, la Paix du Cateau-Cambrésis entre la France, l'Espagne et l'Angleterre mis fin aux Guerres d'Italie et aux conflits entre les trois puissances.

Guerres de religion

La diffusion du protestantisme en France et à Amiens suscita une réaction de princes catholiques qui reçurent le soutien de l'Espagne. En 1568, le gouverneur de Péronne, Jacques d'Humières, refusa de remettre la ville aux protestants, fonda la Ligue avec l'appui de seigneurs des picards qui lancent à Péronne, en juin 1576, un appel aux princes et prélats du royaume, afin de rétablir la religion catholique et « l’obéissance de Sa Majesté ». Le mouvement s’étendit à toute la Picardie ralliant les villes d'Abbeville, Amiens, Saint-Quentin, Beauvais, Corbie...

Le 31 mars 1585, la « Proclamation de Péronne » relança l'action de la Ligue dont le chef était Henri de Guise dit « Le Balafré ». Elle déclarait vouloir rétablir la religion unique (le catholicisme), soustraire le roi Henri III à l'emprise de ses favoris, et l'obliger à faire appel régulièrement aux États généraux.

Prise d'Amiens par les Espagnols

Henri IV au siège d'Amiens (1597), Annonyme

Le 11 mars 1597, Les Espagnols prirent par surprise la ville d'Amiens. Selon le récit des événement transmis par la tradition, avec trois chariots, les Espagnols avancèrent et pénétrèrent sous l’une des portes de la ville, renversèrent un chariot rempli de noix, pour créer un encombrement. Le chariot renversé les bourgeois accoururent, houspillant le paysan maladroit, tout en se jetant sur les noix. C’est alors que les soldats espagnols déguisés prirent leurs armes et tuèrent les sentinelles et firent rentrer les 500 soldats mis en embuscade et quatre compagnies de cavalerie qui pénétrèrent dans la ville.

Aussitôt la nouvelle de la prise d'Amiens connue, le roi Henri IV confia au Maréchal de Biron le soin de reprendre la ville en l'assiégeant. Henri IV lui-même et sa cour fit attaquer la ville par l'artillerie au début du mois d'avril. Après plusieurs sortie des assiégés, plusieurs attaquent des assiégeants, l'échec de l'armée de secours espagnole, le gouverneur espagnol d'Amiens se rendit le 25 septembre 1597.

La frontière nord du royaume se trouvait dégagée pour un temps de la pression espagnole. Henri IV chargea Jean Errard d'édifier une citadelle au nord de la ville. La Citadelle d'Amiens garda un rôle militaire jusqu'à la fin du XXe siècle.

La Guerre de Trente ans et la Guerre franco-espagnole

En 1635, cela faisait déjà dix-sept ans que l'Europe était en guerre. La Guerre de Trente ans avait débuté en 1618. Au début, la France n'intervint, dans le conflit que par puissance interposée, le Danemark puis la Suède, c'est ce que Richelieu appelait la "guerre couverte". En 1635, cette position n'était plus tenable, la France entra alors dans le conflit, c'était "la guerre ouverte" avec la Maison de Habsbourg c'est-à-dire l'Autriche et l'Espagne.

Le 2 juillet 1636, Les troupes espagnoles commandées par le prince Thomas de Savoie-Carignan et Jean de Werth.

Les Lumières à Amiens

Jean-Baptiste Gresset, membre fondateur de l’Académie d’Amiens

Dans le courant du XVIIIe siècle, la Picardie fut sensible aux Lumières. Des académies se créèrent comme l'Académie des sciences, des lettres et des arts d'Amiens créée en 1746 par Jean-Baptiste Gresset ou la Société d'émulation d'Abbeville fondée en 1797.

L'Intendant de la généralité d'Amiens, Bruno d'Agay en fut membre. Il y prit part à des discussions sur la vaccine, les paratonnerres ou les améliorations concernant l’agriculture et l’industrie. Il y prononça des discours sur l’utilité des Sciences et des Arts (1774) et sur Les avantages de la navigation intérieure (1782). En 1751, le Jardin des plantes d'Amiens fut créé et des cours de botanique y furent dispensés.

Des loges maçonniques se créèrent à Amiens à partir de 1774.

Après son passage triomphal à Amiens en 1767, Jean-Jacques Rousseau passa les six dernières semaines de sa vie, en 1778, à Ermenonville (Oise).

De 1781 à 1784, Roland de La Platière fut à Amiens, inspecteur des manufactures, il publia des ouvrages: L'Art du fabricant d’étoffes en laine, L’Art du fabricant de velours de coton et L'Art du tourbier, en 1782. Son épouse Manon Roland, passionnée de botanique, herborisa le long des canaux aux abords de la ville. Elle constitua un herbier aquatique.

À la veille de la Révolution française, existait un service de diligences et de messageries avec départ de Paris, les mardis et jeudis à 11 h 30 et arrivée à Amiens, les mercredis et dimanches à 8 h. Il desservait Chantilly, Creil, Laigneville, Clermont-en-Beauvaisis, Saint-Just-en-Chaussée, Breteuil-sur-Noye, Flers-sur-Noye et Hébécourt. Les diligences pouvaient transporter dix personnes (dont deux au cabriolet) pour un montant de 25 livres, 15 sols par personne.

Époque contemporaine

Révolution française

La Picardie fut, en juillet 1789, le point de départ de la Grande Peur qui prit naissance dans les villages autour d'Estrées-Saint-Denis, sur le Plateau picard.

Lors de la création des départements, en 1790, la majeure partie des régions de la Picardie forma le département de la Somme (parties de l’Amiénois, du Santerre, du Vermandois, du Ponthieu, du Marquenterre et du Vimeu) .

De 1791 à 1793, les cinq districts (Amiens, Abbeville, Doullens, Montdidier et Péronne) du département de la Somme fournirent huit bataillons de volontaires nationaux et une compagnie.

Consulat et Premier Empire

La Paix d'Amiens de Jules-Claude Ziegler (1853)

En 1802, fut signé la Paix d'Amiens entre la France et le Royaume-Uni. Ce traité ne rétablit la paix que pour une courte durée, en 1805, la guerre reprenait.

Au début du XIXe siècle, Amiens est encore fortement marquée par son caractère médiéval. Le ville est encore enserrée par des remparts qui limitent son extension. Les activités commerciales sont regroupés autour de la mairie, les notables résident aux alentours de la cathédrale et du Palais de Justice. Dans la ville basse, le quartier Saint-Leu, parcouru par des bras de la Somme, se concentrent les activités industrielles : teintureries, tanneries, tissage et l'habitat ouvrier fait de maison de torchis. Les faubourgs de Noyon, de Beauvais, de La Hotoie, de Hem, Saint-Maurice et Saint-Pierre gardent un aspect champêtre et restent peu peuplés[9].

Après la victoire des coalisés à la bataille de Waterloo (18 juin 1815), le département est occupé par les troupes britanniques de juin 1815 à novembre 1818.

La Restauration

Louis XVIII débarqua à Calais, le 24 avril 1814, grâce aux armées de la coalition et gagna Paris. Il octroya aux Français une Charte constitutionnelle et restaura la monarchie sans retour à l'Ancien Régime.

En 1815, les jésuites établirent à l'abbaye de Saint-Acheul d'Amiens, l'un de leur six collèges qui fut l'un des moteur de la renaissance de la Compagnie de Jésus en France.

De 1814 à 1848,

Sous la Restauration fut achevée la construction du Canal de la Somme, commencée en 1786 et achevée en 1827. Il fut inauguré par Charles X.

La Révolution des Trois Glorieuses, les 27, 28, 29 juillet 1830 qui provoqua l'abdication de Charles X, fut accueilli favorablement dans les villes et provoquèrent quelques incidents à Amiens.

La Monarchie de Juillet

La Monarchie de Juillet fut pour la Somme une période de construction des premières lignes de chemin de fer:

Seconde République et Second Empire

Seconde République

La Révolution de février 1848 rencontra un certain écho en Picardie, on planta des arbres de la liberté dans les villes mais lors des Journées de juin 1848, l'opinion s'inquiéta et de nombreux Picards s'enrôlèrent dans la Garde nationale pour mater l'insurrection parisienne.

À l'élection du Président de la République des 10 et 11 décembre 1848, Louis-Napoléon Bonaparte rassembla, en Picardie, une très grande majorité de suffrages (plus de 80 %).

Le coup d’État du 2 décembre 1851 ne suscita guère d'opposition dans la Somme.

Second Empire

Le Second Empire fut pour la Picardie une période de prospérité avec le développement de l'industrie et le prolongement du réseau ferré : en 1867 mise en service de la ligne Amiens-Laon et de la ligne Amiens-Rouen.

IIIe République

La défaite de Sedan du 2 septembre 1870, provoqua un soulèvement des Parisiens, la République fut proclamée le 4 septembre. Un Gouvernement de la Défense nationale prend la direction du pays et organise la défense du territoire mais le 19 septembre, Paris est encerclé par l'armée prussienne. Léon Gambetta, ministre de l'Intérieur et Eugène Spuller s’échappèrent de Paris en ballon et atterrir sur le territoire de la commune d'Épineuse dans le département de l'Oise. De là il gagnèrent Amiens puis Tours d'où ils organisèrent les armées françaises.

Guerre de 1870

Lors de la Guerre franco-prussienne de 1870, le département de la Somme fut envahi et occupé par les Prussiens. Des combats se déroulèrent en particulier à Amiens, Longpré-les-Corps-Saints et Pont-Noyelles. De nombreuses communes durent contribuer aux exigences imposées par l'ennemi, en particulier par la fourniture de matériel (chevaux, chariots, foin).

Le 28 novembre 1870, les Prussiens entrèrent dans la ville d'Amiens. Le commandant Jean-François Vogel, retranché dans la citadelle d'Amiens avec 450 mobiles ne disposait que de 22 pièces d'artillerie. Le 29, il fut mortellement blessé. Le commandant Woirhaye prit alors le commandement de la citadelle et entama des négociations, en vue de la reddition, avec le général von Gœben commandant le VIIIe Corps d'Armée prussien. Le 1er décembre 1870, la citadelle d'Amiens capitulait. Les Prussiens rendirent au commandant Vogel les honneurs militaires.

Le triomphe de la République

après le succès initial des royalistes aux élections législatives de 1871, les républicains progressèrent à chaque élection jusqu'à devenir majoritaires à la Chambre des députés et au Sénat en 1879. À Amiens, Jules Barni, René Goblet, Frédéric Petit (homme politique) furent les principaux chefs de file des républicains. René Goblet devint même ministre et Président du Conseil en 1886-1887, il fut un membre actif de la fondation du Parti radical et radical-socialiste en 1901.

Les transformations économiques et sociales

L'essor de l'industrie se manifesta dans la somme dans la seconde moitié du XIXe siècle jusqu'aux années 1970. Le textile fut la première industrie amiénoise avec la confection de velours de coton pour l'habillement et de velours d'ameublement. Tandis que le développement du réseau ferré provoquait l'essor de villes cheminotes comme Longueau.

Plaque commémorative de la charte d'Amiens à l'entrée de l’École publique du Faubourg de Noyon, rue Rigollot.

La population quitta les campagnes pour les villes, à partir de la seconde moitié du XIXe siècle, avec le développement des chemins de fer et de l'industrie. Dixième ville française au début du XXe siècle, la population d'Amiens doubla entre 1800 et 1900 en passant de 41 000 à plus de 90 000 habitants. Cette mutation sociale s'accompagna d'une évolution politique, le mouvement socialiste s'enracina progressivement, comme à Amiens, à la création de la SFIO, avec l'élection du typographe Lucien Lecointe au conseil municipal, en 1900, au conseil général de la Somme, en 1904 et à la chambre des députés, en 1909.

En 1906, la CGT tint congrès à Amiens. Ce congrès adopta une motion connue sous le nom de Charte d'Amiens, le 13 octobre 1906, par lequel la C.G.T. se déclarait indépendante des partis politiques.

La colonisation

La colonisation ne fut pas sans influence en Picardie. En 1906, se déroula à Amiens une exposition internationale. Dans ce cadre, fut inauguré le 14 mai, « Le village noir », en présence de Mamdou Sek, chef de tribu, maître-bijoutier à Gorée (Sénégal), recruté par des imprésarios français, entouré de sa femme et de ses enfants. Les visiteurs affluèrent. Le grand bal « noir et blanc » du 14 juillet fut un succès[10]. Ainsi le village sénégalais tentait-il de sensibiliser les Picards aux « bienfaits » de la colonisation[11].

Amiens à la Belle Époque

Un concert au kiosque Montplaisir vers 1908.

Devant la nécessité de loger les nouveaux arrivants, la ville se transforma et s'étendit vers le sud-est par le faubourg de Noyon et la quartier Saint-Acheul, au sud-ouest par le faubourg de Baeuvais, au nord, par le faubourg Saint-Pierre et le faubourg Saint-Maurice où se construisent de nombreuses maisons « amiénoises ».

En 1913, la ville comptait 38 entreprises de confection. Les quartiers Saint-Leu, Saint-Pierre ainsi que le faubourg de Hem, où prédominzit l'industrie textile, contrastaient avec la prospérité du centre-ville et du quartier bourgeois d'Henriville. Les Nouvelles Galeries, qui ouvrirent leurs portes en 1895, rue des Trois-Cailloux, concurrencèrent le petit commerce. En 1902, l'Amiénois Henri Devred y installa son premier magasin de prêt-à-porter.

La capitale picarde était alors une cité animée, riche d'activités sportives et culturelles. En 1913, se déroula, à Amiens, le Grand Prix automobile de France qui réunit 100 000 spectateurs[12]. Une grande activité intellectuelle a cours dans la ville avec plusieurs sociétés savantes influentes comme la Société des antiquaires de Picardie, une presse variée et un théâtre.

Première Guerre mondiale

au début de la Grande Guerre, de fin août à début septembre 1914, la ville d'Amiens fut occupée par l'armée allemande. Le maire Alphonse Fiquet fut retenu prisonnier et douze membre du conseil municipal furent emmené comme otages jusqu'au versement d'une indemnité de guerre par la ville.

Durant le conflit, la ville d'Amiens, située à proximité du front fut un carrefour où passèrent de nombreuses troupes notamment britanniques et des matériels militaires.

En 1917, vingt-cinq grèves, vingt-cinq se déroulèrent dans la ville.

Au printemps 1918, la ville d'Amiens subit de violents bombardements allemands qui occasionnèrent d'importantes destructions. Face aux bombardements réguliers, la municipalité mit en place dès 1915 la protection des monuments historiques, comme la cathédrale. Fin mars 1918, une vague de bombardements intense détruisit la gare du Nord, les Nouvelles Galeries et la Halle aux blés. La population fut évacuée ; la municipalité se réfugia à Neufchâtel-en-Bray. La ville échappa à une seconde occupation allemande par l'intervention décisif du corps expéditionnaire australien à Villers-Bretonneux.

Le bilan humain des victimes civiles fut pour la période 1914-1918 de 152 tués et 213 blessés, celui des dégâts matériels fut de 731 immeubles complètement détruits et près de 3 000 endommagés.

L'Entre-deux-guerres

L'Entre-deux-guerres est une période de reconstruction pour Amiens. À partir de mars 1919 Louis Duthoit, son cousin; Pierre Ansart et Joseph Mallet, furent chargés de préparer un plan de rénovation urbaine pour la ville d’Amiens. Jugé trop onéreux par l'État, la demande de dommages de guerre formulée par la municipalité fut rejeté en 1924. Les édiles picards réduisirent le projet à un simple redressement de voirie, de reconstruction et d’alignement d’immeubles.

Des Années folles à la dépression des années 1930

Sur le plan politique la période fut marquée en Picardie par une certaine stabilité politique jusqu'en 1936. Le radicalisme s'était implanté dans les campagnes et à partir de 1920, un acteur politique nouveau, le Parti communiste français, fit son apparition après sa scission d'avec la SFIO au Congrès de Tours. En 1925, la cité cheminote de Longueau, élisait un maire communiste.

Avec la crise de 1929 et la montée du chômage des années 1930, Amiens vécut des temps difficiles, les ligues d'extrême droite firent leur apparition telle les Chemises vertes d'Henri Dorgères.

Le Front populaire

La victoire du Front populaire, en 1936, marqua un net glissement à gauche de l'électorat picard. Amiens élisait deux députés communistes Jean Catelas et Louis Prot à Amiens.

Seconde Guerre mondiale

Drôle de guerre

Le 3 septembre 1939, débutait pour la France la Seconde Guerre mondiale. Après la Drôle de guerre, l'attaque allemande débuta le 10 mai 1940 ; le passage de la Meuse à Sedan débuta le 14 mai, l'objectif des blindés allemands étaient d'atteindre Abbeville le plus vite possible.

Bataille de France (1940)

Sur le sol de la Picardie se déroulèrent plusieurs batailles importantes de la Bataille de France. Les 18 et 19 mai 1940, la ville d'Amiens subit de très violents bombardements aériens et fut occupée dès le 20 mai par les Allemands. Du 20 mai au 8 juin 1940, de durs combats se déroulèrent autour d'Amiens, dans la vallée de la Somme et sur le plateau du Santerre pour tenter de dégager la ville et freiner la marche de la Wehrmacht vers Paris[13].

L'Occupation

Les rigueurs de l'Occupation se firent sentirent dès le mois de juillet 1940. La Somme servait de limite entre deux zones d'occupation: au nord la zone interdite, au sud la zone occupée, il fallait un Ausweiss (laissez-passer) pour aller d'une zone à l'autre. La ville d'Amiens fut ainsi coupée en deux

La population manquait de tout: produits alimentaires, carburant, charbon, gaz etc. Des tickets de rationnement furent distribués par les mairies. Les rations alimentaires, fin 1942, se limitaient dans la Somme à 1 200 calories par jour pour un adulte. La ration de viande était fixée à 120 g de viande par semaine et par personne en avril 1943[14].

La presse locale était étroitement contrôlée par les Autorités d'Occupation qui supervisaient le contenu des articles et leur mise en page. Elle ne pouvait publier que des articles favorables à l'Allemagne ainsi le quotidien Le Progrès de la Somme de juin 1940 à août 1944[15].

La Collaboration

Les bureaux de placement pour le travail en Allemagne firent appel aux chômeurs. Des permanences s'ouvrirent à Abbeville, Albert, Amiens, Friville-Escarbotin, Montdidier, Péronne et Roye, mais le succès ne fut pas au rendez-vous malgré des primes alléchantes[16]. La loi du 16 février 1943 institua le Service du travail obligatoire (S.T.O.) qui frappait tous les jeunes gens du même classe d'âge ; 5 000 Picards du département de la Somme furent concernés.

La Collaboration décidée à l'Entrevue de Montoire, entre Hitler et Pétain, le 24 octobre 1940 n'eut guère de succès en Picardie. Les partis politiques collaborationniste ne recrutèrent qu'une centaine de personnes chacun dans le département de la Somme. En 1943, le Parti franciste créa une section féminine à Amiens qui offrait aux mère une garderie pour leurs enfants sans grand succès là encore. Seul le Parti populaire français (PPF) eut une certaine audience en organisant des séances de cinéma où furent projeter des films comme Le Péril juif, Les Forces occultes etc., à Amiens et à Albert, le PPF put imprimer ses propres tracts. Il milita pour que des Picards s'engagent dans la Légion des volontaires français contre le bolchevisme (LVF) à partir de 1941. Les actions violentes des collaborationnistes se limitèrent à des bris de bustes de Marianne dans certaines mairies et le renommage de quelques rues de certaines villes[15].

Au printemps 1944, la Collaboration avec les Allemands entra dans une phase plus active. Elle se consacra à la recherche des réfractaires au STO et des Résistants. La Milice ne fut active dans la Somme qu'à partir de mai 1944 mais le Débarquement de Normandie, le 6 juin 1944 eut tôt fait de calmer les ardeurs des plus convaincus, beaucoup de collaborationnistes démissionnèrent, se cachèrent ou cherchèrent à entrer dans la Résistance[15].

La Résistance

Le Picard, Philippe de Hautecloque, capitaine de l'armée française, parvint à s'échapper des griffes allemandes en juin 1940 et à gagner l'Angleterre via le Portugal pour rejoindre la France libre du général de Gaulle. Il prit le nom de Général Leclerc et fut l'un des plus glorieux chefs militaires de la Résistance extérieure.

La Résistance intérieure dans la Somme, débuta dès 1940 par la collecte et la transmission de renseignements pour l'Angleterre et la France libre, la constitution de réseaux d'évasion pour les soldats des armées en déroute et des aviateurs alliés dont l'avion avait été abattu, la diffusion de tracts et de journaux clandestins, des actions de sabotage.

Jeanne Fourmentraux, professeure au lycée d'Amiens, entra en résistance dès octobre 1940, avec quelques jeunes gens, récupérant des armes abandonnées. Progressivement, elle entra en relation avec des salariés des PTT et de la SNCF et ce fut la fabrication de faux papiers. Ce groupe se rattacha au Bataillon de la mort de Paris en mars 1941.

Le Parti communiste clandestin, bien implanté dans la Somme, distribuait des tracts depuis août 1940 à Amiens, Longueau et Albert. Le Front national et Front national (FTP) en étaient l'émanation. Le 31 octobre 1941, une gerbe était déposée au monument aux morts d'Amiens par les résistants. Le 24 décembre 1944, à 21 h 30, une explosion retentit au "Royal" restaurant d'Amiens, transformé en Soldatenheim (foyer du soldat allemand) : 37 soldats furent tués et une centaine furent blessés.

Léon Gontier était chef de service à la préfecture de la Somme, militant socialiste, syndicaliste et franc-maçon. Il était dans l'entre-deux-guerres président de la section d'Amiens de la Ligue des droits de l'homme. Il fit partie du petit nombre de personnes avec Louis Sellier, Louis Saillant et Léon Tellier qui se réunirent dès août 1940 pour résister à l'occupant. Il entreprit de reconstituer clandestinement la Fédération SFIO de la Somme et en devint le secrétaire fédéral. En 1941, il fut l'un des cofondateurs du groupe de résistance Libération-Nord à Amiens. Il fut également membre du réseau Brutus chargé du renseignement, fournit des faux papiers aux réfractaires, fit circuler tracts et journaux clandestins. Ce fut un véritable chef qui guida de nombreuses actions contre l'armée d'occupation allemande.

Le « Groupe Michel » était un groupe de résistants affilié au Front national et aux FTP. Il réalisa une série de coups de main audacieux de février à avril 1943 : déraillements de trains par déboulonnage des voies ferrées à Montières, Thézy-Glimont, Remiencourt, Aveluy, Guillaucourt, Fontaine-sur-Somme, Hangest-sur-Somme (ce dernier déraillement faisant 25 tués et 50 blessés parmi les soldats allemands), dynamitage de l'écluse de Sailly-Laurette etc.

Madeleine Michelis, professeure de lettres au lycée de jeunes filles d'Amiens, resta aujourd'hui encore une figure de la Résistance. Elle hébergea alors une jeune juive, Claude Bloch - dont le père, l'architecte Jean-André Bloch, avait été déporté - avant de réussir à lui faire passer la ligne de démarcation. Elle était membre du réseau Libération-Nord et aussi membre du réseau Shelburn, branche du Special Operations Executive des services secrets britanniques. Elle avait pour mission de mettre à l'abri et de d'assurer le rapatriement en Angleterre des parachutistes et des aviateurs alliés. Son action dans la Résistance avait commencé en Normandie avant son arrivée à Amiens[17]-[18].

D'autres réseaux comme l'Organisation civile et militaire (O.C.M.), le réseau Zéro France, se consacrèrent au renseignement et aux filières d'évasion. L'Organisation de résistance de l'armée (O.R.A.), non-gaulliste, était également implantée à Amiens[15].

Répression et déportation

Le 12 novembre 1940, furent fusillés dans les fossés de la citadelle d'Amiens, deux hommes originaires de Saint-Valery-sur-Somme : Lucien Brusque, marin-pêcheur, et Émile Masson, batelier, âgé de 18 ans, pour avoir coupé des câbles téléphoniques de l'armée allemande. L'exécution fut prise en photo par un soldat allemand qui fit développer sa pellicule par un photographe amiénois qui transmit un double du cliché à la Résistance. La photo fut publiée dans la presse anglo-saxonne.

Jean Catelas

Jean Catelas, député d'Amiens fut une victime du Régime de Vichy. Au début de la Seconde Guerre mondiale, il défendit le pacte germano-soviétique en 1939 et entra dans la clandestinité, après l'interdiction du Parti communiste. Il participa à la réorganisation clandestine des syndicats de cheminots d'obédience communiste. Après l'entrée des Allemands dans Paris le 14 juin 1940, il participa, aux côtés de Maurice Tréand, aux négociations visant à faire reparaître L'Humanité, sans succès. Membre de la direction du Parti communiste clandestin, il fut arrêté, à Paris, par la police française, le 14 mai 1941 et incarcéré à la prison de la Santé avec Gabriel Péri. Le 9 septembre 1941 le gouvernement de Vichy créait le « Tribunal d'État », juridiction d'exception comme les Sections spéciales, pour juger les opposants politiques sous la pression des Allemands qui, à la suite de l'attentat du 21 août 1941 contre l'aspirant Moser, exigèrent de l'État français l'exécution de six communistes. Jean Catelas fut condamné à mort, le 21 septembre 1941 et guillotiné le 24 à la prison de la Santé[19].

Raymond Gourdain (1920-1942) était un ouvrier électricien, habitant à Amiens dans le quartier Saint-Acheul. Le 1er février 1942, le jeune FTP participa à un attentat contre la permanence de la LVF (volontaires français pour se battre sur le front russe dans la Waffen SS). Arrêté par la police française en uniforme il fut condamné à mort par un Tribunal militaire allemand. Transféré à la prison de Fresnes, il fut fusillé le 21 mars 1942 au Mont Valérien.

Madeleine Michelis

Madeleine Michelis, résistante amiénoise, fut arrêtée par la Gestapo à son domicile, le 12 février 1944, elle fut transférée à Paris, au Lycée Montaigne. Le mercredi 16 février, elle fut amenée vers 13 h 00, à l'Hôtel des États-Unis, boulevard du Montparnasse pour un interrogatoire. Le 21 février 1944, sa famille était officiellement informée de sa mort[17]-[18].

Léon Gontier, résistant amiénois, fut arrêté à Paris, à la gare du Nord, le 13 janvier 1944 et fut incarcéré à Amiens, à la prison de la route d'Albert. Le 18 février 1944, lors de l'Opération Jéricho, Léon Gontier se distingua par son courage en aidant les personnes blessées à gagner la sortie, malgré les pressions de son entourage qui s'incitait à fuir. Il resta, de ce fait, prisonnier des Allemands. Transféré au camp de Royallieu à Compiègne dans l'Oise, il fut ensuite déporté, le 28 juillet 1944 au camp de concentration de Neuengamme, en Allemagne, où il mourut le 31 décembre 1944.

La Citadelle d'Amiens fut un lieu de détention, de torture et d'exécution pour les résistants tombés dans les griffes de la police française ou de la Gestapo. 35 résistants furent fusillés dans les fossés de la citadelle de 1940 à août 1944.

Rafles, internement et extermination des Juifs

Étoile jaune dont le port fut imposé aux Juifs de la Zone occupée à partir du 7 juin 1942.

Le gouvernement de Vichy promulgua le premier statut des Juifs le 3 octobre 1940. Les Allemands avaient promulgué, le 27 septembre 1940, une ordonnance définissant le premier statut allemand des Juifs pour les zones occupées et les dispositions concernant leurs biens : recensement des Juifs dans chaque département, interdiction d'un retour en zone occupée pour les Juifs qui l'avaient quittée...

Dans le département de la Somme, 93 Juifs furent recensés en 1940 mais ce chiffre sous-estime vraisemblablement le nombre réel de Juifs du département car certains noms, absents de cette première liste, apparaissent dans des documents postérieurs. Un certain nombre de Juifs étrangers furent dirigés en décembre 1940 dans les camps du département de l'Yonne, on en retrouva également dans les Pyrénées-Orientales etc. la plus importante rafle de Juifs eut lieu le 4 janvier 1944, certains furent arrêtés le 5. La plupart d'entre eux habitaient Amiens. Les Juifs arrêtés tôt le matin par les Allemands furent amenés à la gendarmerie d'Amiens et y restèrent jusqu'au soir où il furent acheminés à la gare du Nord d'Amiens pour prendre le train à destination de Drancy, dans la nuit du 4 au 5 janvier. Ils furent, pour la plupart, déportés à Auschwitz-Birkenau, le 20 janvier, par le convoi no 66 et exterminés le 23. Une seule Amiénoise issue de ce convoi a survécu[20]. Trois enfants juifs de la Somme furent déportés par ce convoi aucun d'eux n'est revenu[21] -[22].

La Libération et l'épuration

À partir 1942, les bombardements alliés sur la Picardie commencèrent, visant des objectifs militaires allemands, des nœuds ferroviaires etc.

L'opération Jéricho est le nom donné à un raid aérien de la Royal Air Force qui se déroula le 18 février 1944. Il avait pour but de libérer des Résistants incarcérés dans la prison d'Amiens. Cette opération, qui fit 98 morts, fut une action préparatoire à la Libération[23].

En mars 1944, Longueau, important nœud ferroviaire voisin d'Amiens, subit des bombardements d'une violence telle que la ville fut évacuée par ordre des autorités d'occupation. Vingt et un bombardements en trois jours. 1 132 immeubles furent partiellement ou totalement détruits. Toutes les installations ferroviaires furent détruites (sauf la gare de voyageurs).

La ville d'Amiens subit d'importants bombardements comme celui de la Pentecôte du 27 mai 1944 qui fit près de 400 tués parmi la population civile.

Le 31 août 1944, la ville d'Amiens était libérée par les Britanniques après plusieurs combats notamment pour le contrôle des ponts sur la Somme, les FFI réussirent à garder intact le pont Beauvillé, principal point de passage sur la Somme en allant vers le nord[24].

IVe République

La reconstruction

La ville fut reconstruite sur les plans de Pierre Dufau : son plan de reconstruction et d'aménagement fut adopté dès juillet 1942. Il reposait sur la volonté d'améliorer la circulation par l'élargissement des rues et la densification des îlots. La place Gambetta fut aménagée par l'architecte Alexandre Courtois, la place Alphonse Fiquet fut reconstruite par Auguste Perret. Dufau se concentra quant à lui sur la place au Fil et au parvis de la cathédrale[25].

Vie politique

La vie politique de la ville d'Amiens fut dominée pendant toute la IVe République et jusqu'au années 1980 par la gauche : la municipalité SFIO fut dirigée par Maurice Vast puis Camille Goret dans les années 1945 -1959 puis à nouveau par Maurice Vast de 1959 à 1971, cependant en 1965, ce dernier fit alliance avec le centre et la droite. Le PCF bien implanté depuis le Front populaire avait vu son influence croitre pendant la Résistance. De 1945 à 1958, les électeurs désignèrent deux députés communistes René Lamps et Louis Prot.

Ve République

La Guerre d'Algérie

Au début de la Guerre d'Algérie, le 24 mai 1956, une manifestation de conscrits rappelés se déroula, à Amiens. Un grand meeting fut organisé au cirque municipal, le 31 mai 1956, "Pour la paix en Algérie", par la Ligue des droits de l'homme.

En 1962, des pieds noirs et des harkis furent rapatriés d'Algérie à Amiens.

Le retour au pouvoir du général de Gaulle marqua une évolution de l'électorat qui glissa vers la droite. Aux législatives de 1958, René Lamps député communiste d'Amiens fut battu dans une triangulaire au profit du gaulliste Fred Moore.

La fin des Trente Glorieuses

Le vent de contestation qui souffle sur la France et dans le monde à la fin des années 1960, touche également Amiens. D'abord, une manifestation opposée à la guerre du Viêt Nam est organisée le 21 octobre 1967. Ensuite, alors que la Maison de la Culture avait accueilli le ministre de l'Éducation nationale Alain Peyrefitte en mi-mars 1968, à l'occasion d'un colloque sur l'éducation, les étudiants amiénois emboîtent le pas des événements parisiens en défilant les 6 et 7 mai.

Les ouvriers de la Somme rejoignent le mouvement de contestation le 17, tandis que le lendemain, les cheminots de Longueau bloquent les aiguillages. Les ouvriers de Ferodo occupent leur usine à partir du 20 mai pour cinq semaines.

Sans connaître d'affrontements comparables aux nuits parisiennes, la ville est rapidement paralysée : l'absence de collecte des déchets ménagers donne aux rues des odeurs nauséabondes, et le département est à court d'essence à partir du 22. Face à ce mouvement de gauche, l'extrême-droite ne reste pas absente : alors que des militants avaient lancé un engin explosif sur la permanence communiste de la ville le 23 décembre 1967, des membres d'Occident s'opposent aux étudiants le 21 mai, devant le cinéma Picardy. Dans la nuit du 27 au 28 mai, les étudiants tentent de prendre la Maison de la Culture. Au lendemain de l'allocution de De Gaulle, ses partisans amiénois défilent le 31 mai, tandis que la reprise s'engage la semaine suivante. La loi Faure promulguée, l'université d'Amiens est créée le 26 octobre suivant[26].

Vie politique

Les conséquences de ce vaste et profond mouvement de contestation allaient provoquer d'important changements politiques. En 1971, une liste d'union de la gauche conduite par le député communiste René Lamps remporta les élections municipales. en 1978, il céda son siège de député à Maxime Gremetz. La victoire de François Mitterrand à l'élection présidentielle de 1981 provoqua aux élections législatives qui suivirent, le reflux communiste, le socialiste Jean-Claude Dessein adjoint au maire d'Amiens arrivé largement en tête au premier tour fut élu député.

Cependant le malaise social grandissant et l'usure de l'équipe municipale de gauche provoqua, en 1989, l'élection de Gilles de Robien à la tête de la municipalité.

La désindustrialisation

Depuis le milieu des années 1970, la Picardie subit inexorablement un processus de désindustrialisation ; des secteurs entiers de la production industrielle ont presque totalement disparu à Amiens : l'industrie du velours a déserté Amiens. Tout le tissu industriel de la région, jusque là pourvoyeur d'emplois, est touché. Les industries d'équipements automobiles connaissent dans les années 2000 et 2010 d'importantes difficultés des usines ferment à Amiens, les réductions d'emplois dans celles qui restent en activité sont fréquentes. Enfin, le secteur agro-industriel lui aussi connaît certaines difficultés, une coopérative laitière ferme ses portes etc. Il s'en suit un chômage de masse de travailleurs peu qualifiés qui provoque un profond malaise social.

Pour approfondir

Bibliographie

  • François-Hyacinthe Dusevel, Histoire de la ville d'Amiens depuis les Gaulois jusque 1830, Amiens, Imprimerie R. Machart 1832 - disponible sur boooks.google
  • Albéric de Calonne, Histoire de la ville d'Amiens, tomes 1, 2 et 3, Amiens, Piteux Frères, 1899
  • Pierre Vasselle, La Tragédie d'Amiens mai-juin 1940, Amiens, Librairie Léveillard, 1952
  • Jean Estienne et François Vasselle, Le Bel Amiens, préface de Robert Mallet, Amiens, Étienne et Vasselle Éditeurs, 1967
  • Ginette Hirtz, Les Hortillonnages sous la grêle, Histoire d'une famille juive en France sous l'Occupation, Paris, Mercure de France, 1982 (ISBN 2 - 7 152 - 0 014 - 5)
  • Didier Bayard, Jean-Luc Massy, Amiens romain, Samarobriva, Ambianorum, Amiens, Revue archéologique de Picardie, 1983
  • Ronald Hubscher (sous la direction de), Histoire d'Amiens, Toulouse, Éditions Privat, 1986 (ISBN 2 - 7 089 - 8 232 - X)
  • Raymond Regrain, Michel Gilloir, Joëlle Acoulon, Jean-François Leblond, Yvan Brohard, Michel Lazure, Paul Oudart, Amiens, Paris, Christine Bonneton éditeur, 1989 (ISBN 2 - 86 253 - 090 - 5)
  • Nisso Pelossof, Nisso, d'une île à l'autre suivi de Les hortillonnages : une tradition maraîchère, Amiens, Édition Encrage, 2007, 191 pages, (ISBN 978 - 2 - 911 576 - 74 - 4)
  • Xavier Bailly et Jean-Bernard Dupont (sous la direction de), Histoire d'une ville: Amiens, Amiens, Scérén-C.R.D.P., 2013 (ISBN 978 - 2 - 86 615 - 391 - 5)

Liens internes

Notes et références

Notes

Références

  1. Jacques Estienne et Mireille Louis, Armorial du Département et des Communes de la Somme, préface de Pierre-Marcel Wiltzer, Préfet de la région Picardie, Préfet de la Somme, Abbeville, 1972, Imprimerie F. Paillart
  2. Courrier picard des 13 septembre et 28 novembre 2014
  3. Rapport d'activité 2006 de l’Inrap, p. 102.
  4. Didier Bayard, Jean-Luc Massy, Amiens romain, Samarobriva, Ambianorum, Amiens, Revue archéologique de Picardie, 1983
  5. Jules César, De Bello Gallico, chapitre V, 24.
  6. Jules César, De Bello Gallico, chapitre V, 53
  7. Ronald Hubscher (sous la direction de), Histoire d'Amiens, Éditions Privat, Toulouse, 1986 (ISBN 2 - 7 089 - 8 232 - X)
  8. a b c d et e Ronald Hubscher (sous la direction de), Histoire d'Amiens, Toulouse, Éditions Privat, 1986 (ISBN 2 - 7 089 - 8 232 - X)
  9. Ronald Hubscher (sous la direction de), Histoire d'Amiens, Toulouse, Éditions Privat, 1986 (ISBN 2 - 7 089 - 8 232 - X)
  10. Nadine Laval, http://www.encyclopedie.picardie.fr/Zoo-humain-a-Amiens.html
  11. Jean-Michel Bergougniou, Le village sénégalais à l'Exposition internationale d'Amiens, 1906, Bulletin de la Société des Antiquaires de Picardie, premier trimestre 1999, Amiens, p.175-208
  12. « Le Grand Prix fête son centenaire », Le Courrier picard, (consulté le ).
  13. Pierre Vasselle, La Tragédie d'Amiens, Amiens, Librairie Léveillard, 1952
  14. Gérald Maisse, Occupation et Résistance dans la Somme, 1940-1944, Abbeville, F. Paillart, , 474 p., chap. 3 (« L'Occupation commence dans la Somme »), p. 97 et suiv. (ISBN 9 - 782 853 - 140 195)
  15. a b c et d Dominique Duverlie, Les Picards face à l'occupation allemande, le département de la Somme du 20 mai 1940 au 3 septembre 1944, thèse de 3e cycle, 1979, Amiens, Eklitra, 2004 (ISBN 978 - 2 - 85 706 - 121 - 2)
  16. René Debrie (dir.), La Picardie, Paris, Les Éditions d'Organisation, coll. « peuple et pays de France », 1981 (ISBN 2 - 7 081 - 0 422 - 5)
  17. a et b Julien Cahon, Madeleine Michelis, une Amiénoise dans la Résistance, Amiens, APHG Picardie - ONAC Somme, 11 octobre 2013
  18. a et b http://www.somme.gouv.fr/content/download/8236/46394/file/Brochure-Michelis.pdf
  19. Gérald Maisse, Occupation et Résistance dans la Somme, 1940-1944, Abbeville, F. Paillart, , 474 p., chap. 7 (« Le destin de Jean Catelas »), p. 167 et suiv. (ISBN 9 - 782 853 - 140 195)
  20. Ginette Hirtz, Les Hortillonnages sous la grêle, Paris, Mercure de France (ISBN 2 - 7 152 - 0 014 - 5)
  21. Claude Watteel, D'Amiens à Auschwitz, Claude Watteel, 2013 (ISBN 978 - 2 - 7 466 - 6 733 - 4)
  22. Françoise Bouygard, Les Bûcherons de Cazaux-Debat des Autrichiens dans la Résistance, Paris, Éditions Tirésias, 2013 (ISBN 2 - 915 293 - 82 - 1)
  23. Colonel Rémy, L'Opération Jéricho, Paris, France-Empire, 1954
  24. Albert Bécard et Jacques Lejosne, La Libération dans la Somme 1944-2014, 70e anniversaire, Camon, Centre de mémoire Somme Résistance et Déportation, août 2014
  25. Joseph Abram, L'Architecture moderne en France. Du chaos à la croissance, 1940-1966, éd. Picard, 1999, p. 28-31.
  26. Antoine Caux, Jean-Christophe Fouquet et Nicolas Lejeune, « 2008, souvenirs de mai », JDA Métropole no 487 du 28 mai 2008.