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Ligue belge du droit des femmes

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Première revue de la Ligue belge du droit des femmes à l'occasion de l'Assemblée générale de 1893

La ligue belge du droit des femmes, que l’on peut considérer comme la première société féministe belge, naît le 27 novembre 1892. La première assemblée générale s’est organisée dans le grand auditoire de l’Université Libre de Bruxelles à cette date[1],[2].

Origine et historique

L'affaire Popelin[1] est l'événement déclencheur qui fut à l'origine de la création de la Ligue belge du droit des femmes[3].

Marie Popelin, avec l’aide de son avocat Louis Frank, Henri et Louise Lafontaine, Isala Van Diest, Hector Denis et sa femme, décide de réunir des fonds dans le but de créer la Ligue belge du droit des femmes. Elle est alors fondée sur le modèle de la Ligue Française des droits de la femme : les deux ligues ont par ailleurs entretenu des relations étroites par la suite. Louis Frank en rédige le programme et les statuts et va même concevoir son organisation et la diriger[3]. En 1892, la ligue compte 300 membres. Beaucoup d’entre-eux appartiennent à la bourgeoisie libre-pensante bruxelloise ou sont franc-maçons[1].

La ligue belge du droit des femmes noue des contacts avec les féministes étrangères, notamment avec le Conseil international des femmes. Bien qu’ils entretiennent des liens étroits, la ligue ne peut pas y adhérer car elle ne répond pas aux critères exigés[3].

La ligue belge du droit des femmes connaît rapidement une crise interne. Certains membres (en particulier Marie Popelin) trouvent Louis Frank trop monopolisateur car il prend des initiatives sans consulter l’avis du reste du Comité. Il soumet ses projets de loi dans toutes les sections de la Ligue et rédige seul tous les articles. Bien qu’ils avaient créé la ligue ensemble, Popelin restait souvent dans l’ombre de son collaborateur. Ces tensions atteignent leur paroxisme lors de l’assemblée générale de novembre 1893 où des querelles éclatent. Louis Frank démissionne, ce qui donne une nouvelle cohésion à la Ligue, mais elle ne survivra pas longtemps à cette séparation. Henriette Houyoux prend alors la place de Louis Frank et est nommée secrétaire générale de la Ligue. Elle tente d’accentuer l’action de la Ligue vers l’enseignement, ce qui déplait à Marie Popelin, qui tient au caractère revendicatif de celle-ci. De nouvelles tensions éclatent lors de l’assemblée générale de novembre 1895 entraînant le départ de plusieurs membres dont Isabelle Gatti de Gamond. La dissolution de la ligue est nette en 1899 lorsqu' Isabelle Gatti de Gamond rejoint le POB[1].

Revendications

A ses débuts, la ligue tenait à rester apolitique. Elle se voulait transcendante, unificatrice et non clivante, pour toutes les femmes belges, peu importent leurs origines et leur milieu social. Même si elle fut toujours soucieuse de préserver sa neutralité, elle émanait d’un milieu bien défini; la bourgeoisie libre-pensante bruxelloise. La ligue revendiquait avant tout l’émancipation des femmes ; l'abolition de la puissance maritale l' accessibilité sans distinction de sexe aux emplois, professions, carrière industrielles ; leur participation à la vie intellectuelle et dans la gestion des intérêts publics, qu’elles soient femmes plus que jamais en étant pleinement conscientes de leurs devoirs[1],[4].  Le but n’était pas de faire la révolution mais de, progressivement, faire évoluer la société. Pour cela, il avait été décidé qu’il fallait passer par la voie juridique. Avant de voir des changements concrets dans la société il était impératif de mettre sur pied une base légale qui établissait l’égalité des hommes et des femmes devant la loi.

Dans l’immédiat, il fallut faire le choix de la réforme qui avait le plus de chance d’aboutir. Il s’agissait de différer l’abolition de l’autorité maritale de suffrage politique car ces revendications avaient moins de chance de se concrétiser à l’époque. Ils se concentrèrent donc sur la reconnaissance d’épargner et du droit de témoigner, sur la protection de l’enfance et des jeunes filles, la reconnaissance du principe de la recherche de paternité, et sur l’admission des femmes dans les services bureaucratiques et au barreau[1].

La priorité pour la ligue était d’abord économique et civile. En effet, tant que les femmes restaient sous la coupe de leur mari ou de leur patron, elles ne pourraient obtenir d’indépendance politique. Zoé de Gamond souligna d’ailleurs le lien important entre droit au travail et émancipation féminine. Louis Frank concentra alors le programme en trois points principaux : « abolir la puissance maritale et fonder le droit de la famille sur le principe de l’égalité entre les époux, concéder aux femmes le droit de faire un honnête usage de leurs facultés et rendre accessible à tous, sans distinction de sexe, les métiers, les emplois, les professions, les carrières industrielles et autres et enfin, reconnaître aux femmes une part d’intervention sans la gestion et le règlement des intérêts publics[5] ».

Pour obtenir cette fameuse égalité économique, il fallait donc passer d’une part par une réforme du Code civil, mais aussi et surtout par l’accès à un enseignement de qualité pour toutes les femmes.

Les très fortes tensions internes eurent rapidement raison de la bonne entente générale au sein de la ligue et de leur idéal apolitique.

Acteurs principaux

Marie Popelin est sans doute le personnage phare du mouvement. Féministe, le procès dans lequel elle fut engagée stimule son intérêt pour le combat du droit des femmes et la conduit à créer la Ligue belge du droit des femmes en 1892 où elle tiendra à ses débuts le rôle de secrétaire. Louis Frank, son avocat, a lui aussi joué un rôle majeur dans la Ligue et dans la question du féminisme en général. Ses différents travaux intéressent le public et stimulent l’intérêt pour le féminisme. C’est à lui que l’on doit, dû à son rôle de secrétaire général, la rédaction du programme et des statuts de la Ligue. Mais il ne s’exerca pas longtemps puisqu’en 1893, soit un an seulement après la création de la Ligue, Frank quitte son poste suite aux tensions qui animent le mouvement. Il sera remplacé par Henriette Houyoux durant deux ans, qui imposera un féminisme radical.

Isabelle Gatti de Gamond a elle aussi marqué le féminisme en créant le Cours d’Éducation pour jeunes filles, véritable enseignement pour filles. C’est donc, assez logiquement, que lui reviendra la présidence de la section “Éducation” de la Ligue. Citons encore Hector Denis, recteur de l’Université Libre de Bruxelles, qui permit à la Ligue de recevoir un relais dans l’espace public. Henri La Fontaine et sa sœur Léonie se montrèrent également très soucieux de la question féministe. C’est ainsi que Léonie occupa le poste de trésorière, puis de responsable de la section “Bienfaisance”. Enfin, Isala van Diest, première femme médecin et fervente féministe, adhère dès le début au mouvement[6].

Fazit

Si les réformes entreprises par la Ligue n’eurent pas un impact considérable sur l’opinion publique de l’époque, elles allaient à tout le moins, et pour toujours, ouvrir la question du féminisme et tenir compte des revendications des femmes. La Ligue a fait naître un nombre non négligeable de sociétés féministes après la fin de ses activités[1], comme le Conseil national des femmes belges (CNFB) dont Marie Popelin sera par ailleurs la présidente jusque 1913[6].

Notes et références

  1. a b c d e f et g Françoise Van Lierde, La ligue belge du droit de la femme, ULB, Sextant, Revue du groupe interdisciplinaire d'Etude sur le femmes, 10 p., p. 11-16
  2. Louis Frank, Notre première assemblée générale, ULB, H. Lamertin, , 9 p., p. 1-6
  3. a b et c Catherine Jacques, Le féminisme en Belgique de la fin du 19ème siècle aux années 1970, Bruxelles, Courrier hebdomadaire du CRISP 2009/7, , 49 p., p. 8
  4. Suzanne Van Rokeghem, Jeane Vercheval-Vervoort, Jacqueline Aubenas, Des femmes dans l'histoire en Belgique, depuis 1830, Bruxelles, Luc Pire, (ISBN 2-87415-523-3), p. 58
  5. Pol Boël et Christiane Duchène, Le féminisme en Belgique 1882-1914, Bruxelles, Conseil national des femmes belges, , p. 42
  6. a et b Eliane Gubin, Catherine Jacques, Valérie Piette et Jean Puissant, Dictionnaire des femmes belges, Bruxelles, Racine, , p. 180, 181, 252, 253, 254, 267, 268, 269, 353, 354, 355, 459, 460, 461, 556, 557.

Liens externes