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Étimasie

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Hétimasie représentée dans les fresques de Giotto à Assise (panneau 9)

L’hétimasie[1] (du grec ἑτοιμασία - hetoïmasia - prononcé avec iotacisme etimasia) et aussi sous forme vieillie hétémasie, en latin hetoemasia, en italien « etimasia »[2] est le nom donné à un motif iconographique de la peinture chrétienne représentant un trône vide, symbolisant l'attente du retour du Christ, sa Parousie (etoimasai, Luc 1:17, Luc 1:76, Luc 9:52, Jean 14:2)[3].

Ce thème du trône vide destiné à un dieu se retrouvait à Rome lors de la cérémonie du lectisternium avec le pulvinar, il se retrouve également dans l'art-gréco bouddhique.

Représentation d'un trône vide dans l’art non chrétien

Le symbolisme du « trône vide » a une longue histoire, qui a commencé bien avant l’ère chrétienne. On en trouve de nombreuses traces dans les civilisations et cultures antiques du continent asiatique, du sous-continent indien et sur l’île de Bali, une des provinces d’Indonésie.

  • Civilisations et religions préchrétiennes:
- Art assyrien. Durant la période du royaume médio-assyrien, du XVe au Xe siècle av. J.-C., un bas-relief sculpté sur un bloc de pierre taillé en forme de siège, montre le roi [[Tukulti-Ninurta Ier]], agenouillé devant le trône vide de Nusku, le dieu de la lumière et du feu. Conservé au Musée de Pergame ( Pergamonmuseum ) dans l’ Île aux Musées de Berlin, il date de -1243[4] ;
- Dans l'Art bouddhique primitif durant la période aniconique du Ve au Ier siècle av. J.-C., un des symboles utilisés pour représenter le Bouddha était un Trône vide, souvent placé sous un arbre de la Bodhi ou sous une ombrelle. Les représentations anthropomorphiques n’apparaitront qu’au Ier siècle av. J.-C.[5] ;
- Dans la Grèce antique, à Époque classique (Ve et IVe siècle av. J.-C.), après le règne d’Alexandre le Grand, une couronne déposée sur un trône personnifiait un roi absent[6] ;
- Une théorie controversée voit en l'Arche d'alliance israélite un trône vide surmonté de deux chérubins[7] ;
- Les Étrusques, entre les IXe et Ier siècle av. J.-C., lors de certaines fêtes religieuses, laissaient, en bout de table, un siège vide réservé au dieu célébré[8] ;
- Les Hittites, au IIe siècle av. J.-C., disposaient des trônes dans les sanctuaires importants, pour que les esprits des défunts puissent y prendre place[8] ;
-Les Romains de la Rome antique organisaient des banquets rituels : la fête annuelle en l’honneur de Jupiter, l’Epulum Jovis et le lectisterne, célébré du IVe au IIe siècle av. J.-C., dans lesquels les dieux invités étaient représentés par des statues posées sur des pulvinaria ( des coussins) recouvrant les litières, ainsi que le rapporte Tite-Live[9].
- Il en était de même dans Circus Maximus, où avant chaque spectacle de course de chars ou de jeux du cirque, des statues symbolisant les dieux étaient placées sur le pulvinar sacré[10] ;
- Sur un denier en argent datant de , sous le règne de Titus, le revers représente un siège curule, un des symboles du pouvoir, surmonté d’une couronne (sur l’avers figure l’effigie de l’empereur)[11].
  • Autres religions pré ou postchrétiennes:
- Hindouisme en Indonésie. À Bali, Brahmā le dieu créateur est désigné par l’appellation Acintya (en). Il est représenté au dessus d’un trône vide, au sommet d’une colonne ou d’une construction verticale[12].
- Manichéisme. Dès le IIIe siècle, le symbole du « trône vide » se retrouve dans la plus importantes fêtes, le Bema Festival, célébré annuellement[13].
Exemples de représentations de «Trônes vides » dans l’art non chrétien
  • Descriptions des illustrations:
  1. Art Assyrien. Bloc de pierre sculpté provenant du temple dédié à la déesse Ishtar, à Assur, Irak actuel, où est représenté le roi médio-assyrien [[Tukulti-Ninurta Ier]], qui a régné de -1243 à -1207. Armé d’une massue, il est figuré debout puis agenouillé, devant le trône vide du dieu de la lumière et du feu Nusku, ce qu’indique l’inscription en écriture cunéiforme. Musée de Pergame, Berlin, Allemagne.
  2. Art bouddhique. Sculpture IIe siècle. Représentation aniconique représentant Māra , le tentateur de Siddhārtha Gautama. Provenance : site d’Amaravati, État Andhra Pradesh, Inde. Conservé au Musée Guimet
  3. Art bouddhique (entre les Ier siècle av. J.-C. et IIIe siècle).Bas-relief représentant un trône vide symbolisant Bouddha, devant lequel on distingue ses empreintes de pieds. Il est entouré de quatre personnages: deux devant priant les mains jointes; deux derrière agitant des éventails. Provenance: site archéologique de Kanaganahalli (en), État de Karnataka, Inde.
  4. L’Arche d’Alliance. « Carte du voïage des Israëlites dans le désert depuis leur sortie de l'Egipte jusqu'au passage du Jourdain, dressé par l'auteur du commentaire de l'Exode ». Gravure réalisée par Jean-Baptiste Liébaux, géographe, XVIIe siècle. Conservée à la Bibliothèque nationale de France (BnF)[14].
  5. Empire romain. Denier en argent de . Avers: effigie de l’empereur Titus; revers: siège curule surmonté d’une couronne.
  6. Bali (Hindouisme en Indonésie). Le dieu créateur Acintya (en), assimilé à Brahmā (aussi désigné par l’appellation Sang Hyang Widhi Wasa) , représenté sculpté sur le dossier d’un trône vide, sur lequel sont déposées des offrandes[12].
Mosaïque de Ravenne

Art chrétien

En Italie

Notes et références

  1. Encyclopédia Universalis, "Hétimasie"[1] ; "Hétimasie", dans : Dictionnaire reverso" [2] ; Athanase" : Hétimasie (n.f.) : du grec *etoimasia,* etoimasias, « préparation ». L’hétimasie désigne l’attente symbolique de la seconde venue du Christ pour le Jugement dernier. En iconographie, l’hétimasie est représentée par le trône vide du Juge suprême ; sur le trône on voit la Croix, le livre des Ecritures et, parfois, le Saint-Esprit sous forme de colombe[3].
  2. M. Bezzi 2007.
  3. Frédérick Tristan 1996, p. 438-441.
  4. Le trône sculpté sur le bas-relief reproduit la forme du bloc de pierre (voir illustration).
  5. Depuis la fin du XIXe siècle les historiens considèrent que la période du bouddhisme primitif, Ve - Ier siècle av. J.-C., était aniconique. Mais en Suzan L. Hutington, professeure d’Histoire de l’art à l’ Université d’État de l’Ohio (OSU) [4], a contesté cette thèse « Early Buddhist art and the theory of aniconism, Art Journal, Vol. 49 n° 4, pp.401-408 », sur ccbs.ntu.edu.tw, (consulté le ).
  6. Eduard Syndicus 1962, p. 151.
  7. Ménahem Haran 1985, p. 247-249.
  8. a et b James Hall 1983, p. 95.
  9. W.M Ramsay 1863, p. 344.
  10. John H. Humphrey 1986, p. 78-80.
  11. Geir Hellemo 1989, p. 107.
  12. a et b Julian Davison, Bruce Granquist 1999, p. 8-9.
  13. William Bayne Fisher, Ehsan Yarshater 1968, p. 986.
  14. Voir la carte complète sur le site Gallica : [5]. Consulté le .

Bibliographie

  • (en) William Bayne Fisher, Ehsan Yarshater, The cambridge History of Iran, Cambridge, Royaume-Uni, Cambridge University Press, , 1396 p. (ISBN 9780521069359), lire: [6]. Consulté le .
  • (it) M.Bezzi, Iconologia della sacralità del potere: il tondo Angaran e l'etimasia, Spolète, Centro Italiano Del Studi Sull'Alto Medioevo (Fondazione CISAM), , 224 p. (ISBN 9788879880725) [7]. Consulté le .
  • (en) Julian Davison, Bruce Granquist, Balinese Temples, Hongkong, Periplus Editions Limited, , 32 p. (ISBN 9789625931968) [8]. Consulté le .
  • Carmen Buda, L'hétimasie dans l'art monumental byzantin, 2002 (Fribourg/Freiburg, Chaire d'archéologie paléochrétienne et byzantine. Mémoires de licence achevés).
  • Léna Grigoriadou, Tradition et création. Notes sur le système figuratif byzantin, Annales. Économies, Sociétés, Civilisations, 1974, volume 29, n° 2, pp. 337-348 : « Hétimasie ».
  • (en) James Hall, History of Ideas and Images in Italian Art, Londres, John Murray , , 415 p. (ISBN 9780719539718), [9]. Consulté le .
  • (en) Menahem Haran, Temples and Temple-Service in Ancient Israel: An Inquiry into Biblical Cult Phenomena and the Historical Setting of the Priestly School, Penn State University Press, , 416 p. (ISBN 9781575061856) [10]. Consulté le .
  • (en) Geir Hellemo, Adventus Domini: Eschatological Thought in 4th Century Apses and Catecheses, Leyde, Pays-Bas, Éditions Brill, , 309 p. (ISBN 9789004088368) [11]. Consulté le
  • (en) John H. Humphrey, Roman Circuses: Arenas for Chariot Racing, University of California Press, , 703 p. (ISBN 9780520049215), [12]. Consulté le .
  • (en) W.M. Ramsay, A manual of Roman antiquities, Oxford, Université d’Oxford, , 485 p., [13]. Consulté le .
  • (en) Eduard Syndicus, Early Christian Art, Portland (Oregon), Hawthorn Books, , 188 p. (ISBN 978-1199434715), [14]. Consulté le .
  • Frédérick Tristan, Les premières images chrétiennes: Du symbole à l'icône, IIe siecle-VIe siècle, Paris, Éditions Fayard, 672 p. (ISBN 978-2213596426) [15]. Consulté le .

Articles connexes