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Dérive des pesticides

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Processus de pollution environnementale par les pesticides.
Exemple de dérive (exodérive) sous l'effet d'un vent transverse ; Après le traitement du champ, certaines zones auront été sous-traitées et d'autres auront reçu plus que la dose prévue

La dérive des pesticides est l'ensemble des phénomènes qui accompagnent l'application des produits phytosanitaires et qui contribuent à ce qu'une part variable de ces derniers se perd dans l'environnement sans atteindre les plantes ciblées. Le phénomène principal est la « dérive de pulvérisation » dans lequel une partie du produit est directement emportée hors de la zone ciblée (fossé ou cours d'eau éventuellement) ou la quitte avant d'atteindre le sol (pour alors à nouveau polluer l'air, éventuellement jusqu'à grande distance). De manière connexe, un phénomène de déperdition et migration dans le sol et, pour les pesticides solubles dans l'eau, de dérive dans les cours d'eau et/ou nappe intervient souvent également, les produits étant entraînés par les eaux de ruissellement notamment[1].

Plusieurs facteurs déterminent ou modulent la dérive : ils sont environnementaux (comme les conditions météorologiques : vent, pluie, température, humidité relative, etc.) et/ou technique (réglage du matériel de pulvérisation, nature de la substance active qui peut être sujette à un séchage ou une cristallisation trop rapide [dans l'air, avant d'être « collé » à la feuille ou au sol et/ou à une ou plusieurs volatilisation(s) ultérieure(s)]. Une étude récente (2024) basée sur l'analyse d'échantillonneurs passifs (des bracelets en silicone adsorbant)[2], capables d'enregistrer des profils d’exposition aux pesticides gazeux et particulaires (et à certains de leur métabolites), hautement individualisés[3],[2] montre que la contamination de l'air extérieur et intérieur, et celle des agriculteurs et riverains par les dérives, envols et évaporation de pesticides ont été sous-estimées[4].

Effets sanitaires

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la dérive des pesticides a des conséquences sur au moins trois plans[1],[5]. :

  1. ) économique (moindre efficacité des traitements, perte de produit et donc gaspillage d'argent) ;
  2. ) environnemental, avec notamment une pollution accrue de l'environnement et en particulier de l'eau, de l'air (selon une étude récente (2024) ayant mesuré l'exposition individuelle aux pesticides particulaires et gazeux à l'extérieur et dans l'air intérieur en zones d'agriculture intensive : « les 2/3 de l'exposition concerne des pesticides provenaient principalement issus de sources non professionnelles ["dissipation à distance"] (...) plus de 43 % des riverains ou personnes de passage sont exposés au même niveau d’exposition que les agriculteurs. Environ 7 % et 3 % des agriculteurs locaux et des passants peuvent souffrir de risques chroniques pour la santé »)[4] et des sols, avec des effets écotoxicologiques induits, directs et indirects) ; et des sols, avec des effets écotoxicologiques induits, directs et indirects) ;
  3. ) santé publique.

Types de dérives

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Toutes choses égales par ailleurs, la dérive est fortement liée au mode de pulvérisation (taille des gouttes, puissance du jet qui déterminent la plus ou moins grande légèreté de la brumisation de pesticide) et à la distance entre le pulvérisateur et le sol (le cas extrême étant celui de l'avion). Dans le cas de pulvérisation en ultra-bas volume (UBV), l'entraînement par le vent apporte une aide efficace à la diffusion des gouttelettes sur une vaste zone.

Himel en 1974 distingue l'« exodérive » (le transfert de pulvérisation hors de la zone cible) de l'« endodérive » où la substance active contenue dans les gouttelettes tombe dans la zone cible, mais sans atteindre sa cible biologique.
L'endodérive est plus importante sur le plan volumétrique, et donc source d'une plus grande contamination de l'environnement (par exemple, pollution des eaux souterraines)[6].

Précautions à prendre

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Dans le cas de traitements localisés par pulvérisation de pesticides à large spectre, l'entraînement par le vent doit être minimisé. Des efforts considérables ont été réalisés pour quantifier et maîtriser les dérives de pulvérisation provenant de buses hydrauliques[7].

L'incorporation rapide de certains pesticides dans le sol peut réduire ou prévenir la volatilisation.

Volatilisation des pesticides

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La volatilisation est due à l'évaporation ou la sublimation des herbicides volatils, généralement combiné à un solvant ou à divers additifs. Elle varie selon le produit en fonction de la Constante de Henry propre à chaque produit et formulation.

L'effet attendu des produits chimiques est perdu au lieu prévu pour l'application s'il s'est transformé en vapeur, particule ou nanoparticules (qui se comportent physiquement plus comme un gaz que comme une particule), et il peut advenir ailleurs et plus tard sous l'effet du vent et d'une redéposition (via la pluie, la rosée, la brume) et ainsi affecter d'autres plantes ou organismes, qui n'étaient pas destinées à être traitées, provoquant des dégâts collatéraux.

Le vent, la température et l'humidité affectent aussi le taux de volatilisation, l'humidité tendant à la réduire. le 2,4-D et le dicamba sont des produits chimiques couramment utilisés comme herbicides qui sont connus pour être sujets à la volatilisation[8], mais il en existe beaucoup d'autres[9].

L'application des pesticides, dont les herbicides utilisés pour protéger les plantes génétiquement modifiées résistantes à certains herbicides, augmente le risque de volatilisation du fait que la température est plus élevée et l'incorporation dans le sol impraticable[8].

Notes et références

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  1. a et b (en) « Introduction to Pesticide Drift », sur Reducing Pesticide Drift, Environmental Protection Agency (consulté le ).
  2. a et b (en) Kim A Anderson, Gary L Points, Carey E Donald et Holly M Dixon, « Preparation and performance features of wristband samplers and considerations for chemical exposure assessment », Journal of Exposure Science & Environmental Epidemiology, vol. 27, no 6,‎ , p. 551–559 (ISSN 1559-0631 et 1559-064X, PMID 28745305, PMCID PMC5658681, DOI 10.1038/jes.2017.9, lire en ligne, consulté le )
  3. (en) Raf Aerts, Laure Joly, Philippe Szternfeld et Khariklia Tsilikas, « Silicone Wristband Passive Samplers Yield Highly Individualized Pesticide Residue Exposure Profiles », Environmental Science & Technology, vol. 52, no 1,‎ , p. 298–307 (ISSN 0013-936X et 1520-5851, DOI 10.1021/acs.est.7b05039, lire en ligne, consulté le )
  4. a et b (en) Hongyu Mu et Xiaomei Yang, « Exposure risk to rural Residents: Insights into particulate and gas phase pesticides in the Indoor-Outdoor nexus », Environnement International,‎ , p. 108457 (DOI 10.1016/j.envint.2024.108457, lire en ligne, consulté le )
  5. (en) « Community Guide to Recognizing and Reporting Pesticide Problems », California Department of Pesticide Regulation (DPR) (consulté le ).
  6. (en) « Dropdata home page », International Pesticide Application Research Centre (IPARC).
  7. (en) A.J. Hewitt, « Spray drift: impact of requirements to protect the environnement », Crop Protection, vol. 19,‎ , p. 623-627 (résumé).
  8. a et b (en) Andrew Pollack, « Dow Corn, Resistant to a Weed Killer, Runs Into Opposition », The New York Times,‎ (lire en ligne, consulté le ).
  9. (en) Fabian Menalled et William E. Dyer, « Getting the Most from Soil-Applied Herbicides », Université d'État du Montana (consulté le ).

Articles connexes

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Bibliographie

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  • (en) C.M. Himel, « Analytical methodology in ULV », dans Pesticide application by ULV methods, British Crop Protection Council, coll. « Monographs n° 11, », , 292 p. (ISBN 9780901436344), p. 112-119.
  • (en) Graham Matthews, Pesticides : Health, Safety and the Environment, John Wiley & Sons, , 248 p. (ISBN 978-1-4051-7298-1, lire en ligne).
  • (en) Spray Drift Management : Principles, Strategies and Supporting Information, Csiro Publishing, coll. « numéro 82 de Primary Industries Report Series (PISC) report, Standing Committee on Agriculture and Resource Management (SCARM) Series », , 71 p. (ISBN 978-0-643-06835-3, lire en ligne).

Liens externes

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