C’est un découpage qui n’a pas de sens électoral, mais qui sera tout de même scruté attentivement entre les deux élections, européennes et législatives, séparées par à peine trois semaines. Le ministère de l’intérieur a publié, mardi 11 juin, les résultats des élections européennes en France à l’échelon des 577 circonscriptions législatives, c’est-à-dire les unités territoriales correspondant à l’élection des députés.
Cette présentation du vote du dimanche 9 juin est à première vue très encourageante pour le Rassemblement national (RN) de Jordan Bardella, dont la liste est arrivée en tête dans 457 circonscriptions.
La carte ci-dessous présente, à l’échelle de chaque circonscription, la nuance politique arrivée en tête et les résultats des principaux partis lors des européennes.
Impossible, pour autant, d’interpréter les votes aux élections européennes comme des précurseurs exacts des scrutins législatifs des 30 juin et 7 juillet.
- Tout d’abord, calquer les résultats des européennes sur ceux des législatives pourrait, au mieux, permettre d’esquisser ce à quoi ressemblerait le premier tour. Mais dans l’immense majorité des cas, un deuxième tour est nécessaire pour élire un député. La projection des résultats des européennes ne donne que très peu d’informations sur l’issue d’un duel ou d’une triangulaire.
- L’élection des eurodéputés, qui se fait lors d’un scrutin proportionnel, a encouragé la multiplication des listes car il « suffit » d’obtenir 5 % des voix pour avoir des élus. Les listes concurrentes à gauche lors des européennes semblent s’être rangées à l’idée d’un « front populaire » commun pour les législatives. Suivant cette logique, les résultats du 9 juin laissent penser que la gauche disposerait d’un réservoir de voix plus important : une stricte addition des suffrages qui s’étaient portés sur les listes du Parti socialiste-Place publique (PS-PP), de La France insoumise (LFI), d’Europe Ecologie-Les Verts (EELV), du Parti communiste (PCF) et du Nouveau Parti anticapitaliste (NPA) placerait cette alliance en tête dans 258 circonscriptions. C’est ce que nous avons calculé pour réaliser la projection fictive ci-dessous.
Que l’on regarde les résultats par listes ou par grands blocs, les élections législatives procèdent d’une mécanique bien différente des élections européennes. Il s’agit de 577 scrutins distincts, dans lesquels l’implantation et la notoriété des personnalités politiques peuvent jouer un rôle déterminant.
Les thèmes de la courte campagne électorale différeront aussi, puisque les compétences du Parlement européen et de l’Assemblée nationale ne sont pas les mêmes. Alors que la participation a plafonné à 51,83 % des inscrits sur les listes électorales le 9 juin, le niveau de mobilisation, difficile à anticiper, jouera également un rôle majeur dans l’issue du prochain scrutin.
Plusieurs précédents invitent à la prudence quand on s’essaie à appliquer les résultats d’un scrutin à un autre. En 2017, l’analyse des scores de la présidentielle remportée par Emmanuel Macron laissait entrevoir un raz-de-marée pour La République en marche aux législatives de juin, certaines projections créditant le parti de 400, voire de 450 élus sur 577. Le parti présidentiel avait finalement envoyé 361 députés au Palais-Bourbon.