Le nombre de comparutions immédiates a doublé

  • Le nombre de comparutions immédiates a doublé
    Le nombre de comparutions immédiates a doublé DDM
Publié le
La Dépêche du Midi

C'est une volonté du parquet du tribunal de Castres: en augmentant nettement le nombre de comparutions immédiates, l'institution judiciaire entend apporter une réponse rapide et ferme sur certains faits délictueux. En six mois, le palais de Justice a ainsi utilisé cette procédure autant de fois que pour la totalité de l'année 99.

C'est une arme judiciaire redoutable et redoutée par les prévenus et leurs avocats: la comparution immédiate est un moyen très rapide pour juger un délit sous certaines conditions particulières.

En 1999, le tribunal correctionnel de Castres avait utilisé cette procédure à 15 reprises. Depuis le début 2000, ce sont déjà 17 individus qui ont été jugés de la sorte. On se dirige donc vers un doublement du recours à la comparution immédiate: « Ce n'est pas parce que la délinquance a augmenté. C'est tout simplement une volonté du parquet et du tribunal d'apporter une réplique judiciaire efficace quand le dossier s'y prête. » explique le substitut du procureur de la République Philippe Combettes.

En fait, la comparution immédiate est le chemin le plus court qui puisse exister entre le délit et son jugement.

Suite à une infraction et à l'arrestation de l'auteur présumé, celui ci est placé en garde à vue. S'il n'encours pas une peine maximale supérieure à 7 ans de prison, le Procureur peut décider de l'envoyer devant les juges dans la foulée.

Philippe Combettes précise: « Il ne s'agit pas de juger tout et n'importe quoi en comparution immédiate. Généralement, nous l'utilisons pour des faits ayant provoqué un trouble de l'ordre public important. Ou bien lorsqu'il s'agit de multirécidivistes qui ont commis des délits simples, avérés ou qui se sont déroulés en flagrance. Il faut que le dossier soit carré. » Ce type de comparution, prévue par le code de procédure pénale, permet aussi parfois de rassurer la population. Les affaires comme celle de la voiture bélier de Graulhet, du gymkhana dans la gendarmerie de Lavaur, ou du récidiviste de la conduite en état d'ébriété ayant provoqué un accident grave illustrent bien la palette des affaires visées.

Ceci dit, de telles comparutions ne vont pas sans bouleverser le fonctionnement du tribunal castrais. En l'espace de quelques heures, il faut rassembler les juges et le parquet, étudier le dossier, informer l'avocat et mettre en route l'audience. « Je sais que les avocats sont parfois réticents. Mais nous travaillons ici au TGI de Castres dans de bonnes conditions. L'avocat a accès au dossier et nous lui laissons prendre tout le temps qu'il désire pour parler avec son client et pour étudier les procès-verbaux. Je pense qu'ainsi les droits de la défense sont préservés. » Cette procédure, qui n'est pas faite pour déplaire non plus aux services de police ou de gendarmerie, vient casser l'image de lenteur qui colle à l'institution judiciaire. Les délinquants sont avertis.

Jean-Marc GUILBERT


Les avocats pour une justice rapide mais pas expéditive

La procédure de comparution immédiate est souvent regardée avec méfiance par les avocats. Me Yves Salvaire, bâtonnier du barreau de Castres donne son impression générale: « Nous souhaitons un développement raisonnable de cette procédure, au cas par cas, et en fonction des dossiers. Nous sommes favorables à une justice rapide mais pas expéditive. Même si je comprends parfaitement la volonté de donner une réponse rapide à un trouble de l'ordre public. » Dans le détail, le bâtonnier explique que la comparution immédiate comporte des inconvénients tant pour les prévenus que pour les victimes: « L'auteur présumé convoqué immédiatement est parfois affolé et n'est pas toujours en état de donner les bonnes explications au tribunal et à son avocat. Et nous n'avons pas toujours le temps de rassembler les éléments de personnalité qui aideront à bien le juger. On a parfois l'impression que le tribunal a déjà décidé que le prévenu va aller en prison automatiquement. » De l'autre côté de la barre, les victimes des faits incriminés peuvent être rassurées de voir l'auteur jugé mais aussi parfois peuvent manquer de temps. Yves Salvaire explique: « Lorsqu'il s'agit de vol par exemple, il n'est pas toujours évident de retrouver les justificatifs du préjudice. Certes, elle peut toujours faire un procès civil par la suite, mais cela demande un délai de 6 mois minimum! De même, dans les cas d'agression, il me semble que la victime peut se trouver encore sous le choc et n'est pas forcément en état de dire tout ce qu'elle a dire. » Globalement, Yves Salvaire traduit une opinion générale chez les avocats: on est pas très chaud pour la comparution immédiate. Quant à la possibilité qu'à l'auteur de refuser de comparaître: « Faut pas rêver. Si le prévenu refuse d'être jugé, il est sûr d'aller en prison en attendant son futur jugement. Ce recours n'est jamais utilisé. »

Voir les commentaires
Réagir
Vous avez droit à 3 commentaires par jour. Pour contribuer en illimité, abonnez vous. S'abonner

Souhaitez-vous recevoir une notification lors de la réponse d’un(e) internaute à votre commentaire ?