Avec «Stupéfiant !», Léa Salamé va tenter de vaincre la malédiction

France 2, 22 h 45. Léa Salamé lance ce mercredi soir « Stupéfiant ! », la nouvelle émission culturelle de la Deux. Un défi dans une case sinistrée depuis des années.

Léa Salamé sera à la tête de sa première émission culturelle.
Léa Salamé sera à la tête de sa première émission culturelle. (Nathalie Guyon.)

    « Souhaitons bonne chance à Léa Salamé, lance Franz-Olivier Giesbert, l'ex-monsieur culture du service public. J'ai passé mon temps à hurler qu'il n'y avait plus d'émissions culturelles sur France 2. » De la chance, Léa Salamé en aura besoin. Avant « Stupéfiant ! », les précédentes tentatives ont quasi toutes échouées, qu'elles soient diffusées le dimanche, le vendredi, le jeudi ou le mercredi. Aux oubliettes « Avant-Premières », « Semaine critique », « Vous aurez le dernier mot » ou « Café littéraire ». Ces émissions de deuxième partie de soirée ont rejoint le cimetière des magazines culturels après seulement... une saison ! Une hécatombe qui remonte à la fin de « Campus », présenté par Guillaume Durand, de 2001 à 2006.

    Pour conjurer le sort, France 2 a tenté d'envoyer au front le soldat Aïda Touihri en 2013. Mais l'audience de « Grand Public » a eu du plomb dans l'aile (moins de 500 000 téléspectateurs) et, dix mois plus tard, l'émission a rejoint le brancard du samedi après-midi. « Il y a une vraie malédiction quand on prononce le mot culture, constate la productrice Rachel Kahn. Ça fait immédiatement bailler les téléspectateurs. C'est dissuasif. Pourtant, on a tout essayé. Il faudrait se faire à l'idée que rassembler 600 000 personnes devant une émission culturelle, c'est un bon score. C'est forcément clivant. »

    >>  VIDEO. Découvrez le générique de « Stupéfiant! »

    Mais les faibles audiences n'expliquent pas tout. Aux commandes d'« Avant-Premières », Elizabeth Tchoungui a passé un mauvais moment de septembre 2011 à juin 2012 : « Certains m'attendaient avec un kalachnikov. Je n'étais pas du sérail. Et on me le faisait bien sentir. Le défaut des émissions culturelles, c'est qu'elles restent très parisiennes et élitistes. » Franz-Olivier Giesbert, lui, voit la main de Nicolas Sarkozy, alors président de la République, dans l'arrêt de sa « Semaine critique », en 2011. « On a explosé en plein vol pour des raisons politiques », assure celui qui lancé Nicolas Bedos. Avant lui, France 2 avait chipé Daniel Picouly à France 5 pour transformer son « Café Picouly » en « Café littéraire ». « Un cadeau empoisonné, regrette l'homme de lettres, aujourd'hui réfugié sur France Ô. Personne n'y croyait et on n'était diffusé qu'une semaine sur deux. On m'a scié les jambes. » Depuis, France 2 mise davantage sur le divertissement. Il faudra laisser du temps à « Stupéfiant ! » pour s'installer. » Bernard Pivot, à l'origine du succès d'« Apostrophes » et de « Bouillon de culture, » se montre plus optimiste : « Bien sûr qu'il y a une place pour une émission culturelle. Il devrait même y en avoir plusieurs. »