Véronique Sanson : «J’ai un ange gardien archisolide»

Six mois de silence, depuis qu’on lui a diagnostiqué une tumeur sur une de ses amygdales. Véronique Sanson est encore fatiguée, mais elle se réjouit de remonter sur scène au printemps.

 Véronique Sanson lors du festival des Francofolies de La Rochelle, en juillet dernier. La chanteuse a appris son cancer durant l’été.
Véronique Sanson lors du festival des Francofolies de La Rochelle, en juillet dernier. La chanteuse a appris son cancer durant l’été. LP/Sarah Andersen

    On a tremblé en septembre, quand Véronique Sanson a dû annuler plusieurs concerts. Une tumeur à une amygdale. Un cancer quoi, cette sale maladie qui endeuille tant de familles. Six mois plus tard, Véronique Sanson rit au téléphone. Et nous avec. Les nouvelles sont bonnes. Elle est « très fatiguée », mais se remet vite. Elle parle avec émotion de « Duos volatils », joli album de duos sorti ces jours-ci, et se réjouit déjà de remonter sur scène au printemps prochain.

    Attendu en septembre, ce nouvel album a été repoussé suite à vos problèmes de santé. Sa sortie signifie que vous êtes guérie ?

    VÉRONIQUE SANSON. Je vais beaucoup mieux, oui ! Même si, comme toujours avec ce type de maladie, rien n'est garanti par contrat. J'ai encore des petites séquelles. Ça fatigue beaucoup ces trucs-là…

    On vous avait quitté en juillet aux Francofolies de La Rochelle en pleine forme. Quand avez-vous appris que vous aviez un cancer?

    Cet été, après cette série de festivals.

    Cela a-t-il été un coup de massue ?

    Étonnamment, sur le coup, je n'ai pas été foudroyée. Je l'ai pris avec philosophie. J'étais surprise que ça m'arrive à moi, qui me pensais indestructible. Je sais que j'ai un ange gardien archisolide. Il est tellement fiable que je le prête parfois à des gens qui ont d'horribles problèmes !

    Vous n'avez pas eu peur ?

    Je n'ai pas flippé, non. Mais j'étais furieuse de devoir annuler des concerts… Cela ne m'était jamais arrivé de ma carrière. Et elle commence à être longue ! Ça ne se fait pas chez moi, par respect pour le public, qui a acheté ses places et qui s'est organisé pour faire des kilomètres pour me voir. J'ai été très touchée par les nombreux messages que j'ai reçus. Les gens ont pris la peine de m'écrire des lettres, même des artistes dont je ne suis pas vraiment proche. Les fans, eux, n'ont pas cessé de me rappeler qu'ils étaient là. Ça m'a beaucoup encouragé. Je me suis dit que je n'étais pas un vieux Kleenex qu'on jette au premier essai de sabordage.

    Vous avez été soignée relativement rapidement !

    Ça dépend de quel côté on se place ! J'ai eu six semaines de traitement. Ça peut paraître court pour vous, mais cela m'a semblé très, très long. Je ne pensais pas que ça fatiguait autant. Et pourtant, on m'avait prévenu. Je ne pouvais vraiment pas bouger. Je n'arrivais plus à mettre un pied devant l'autre…

    Avez-vous eu peur pour vos cordes vocales ?

    Ça oui ! C'est le premier truc auquel j'ai pensé. Pour ça, j'ai eu la trouille, mais j'ai été vite rassurée. Mes cordes vocales sont intactes. C'est toute la périphérie autour qui n'allait pas. Les rayons, ce n'est pas comme Tchernobyl : ça ne s'arrête pas aux frontières, ça brûle tout ce qu'il y a à sa portée. Il va me falloir encore quelques mois pour que je sois au top. Je dois encore me reposer, je n'ai pas le choix.

    Pendant toute cette période, avez-vous continué à jouer du piano ?

    Je n'avais pas envie d'en faire. Dans ces moments-là, on pense à tout sauf à la musique. On est concentré, pour ne pas mourir. De toute façon, il ne faut jamais composer à chaud. Je recommencerai à écrire quand tout sera digéré.

    Quand remonterez-vous sur scène ?

    En avril et en mai 2019. On va faire les dix dates qu'on a annulées. Et le 24 avril, je fêterai mes 70 ans sur la scène du Palais des Sports, à Paris, où j'ai été la première femme à se produire. J'ai l'impression de boucler la boucle. Et je ferai aussi j'espère des festivals d'été, car j'adore ça. Si tout va bien, bien sûr !

    Ferez-vous sur scène les reprises avec Souchon, Bruel, Vianney, la famille Chedid, et tous les autres artistes qui figurent dans votre nouvel album, « Duos Volatils » ?

    J'en ai fait quelques-uns l'été dernier aux Francos. Mais réunir tout le monde sur une date, c'est impossible, à cause des emplois du temps de chacun. Mais je les invite à me rejoindre sur scène où ils veulent durant la tournée. Ce serait super sympa de se retrouver pour la télévision! Mais en ce moment, on ne peut rien prévoir avec moi…

    D'où est venue l'idée de cet album de duos ?

    Quelqu'un m'a fait réécouter « Comme ils l'imaginent », un album de duos que j'avais fait à La Rochelle en 1994. Il n'y avait autour de moi que des hommes : Marc Lavoine, Alain Chamfort, Maxime Le Forestier et plein de gens super. Et je me suis dit que ce serait une bonne idée de le refaire avec d'autres chanteurs et la jeune génération.

    Se sont-ils glissés facilement dans votre univers ?

    Les jeunes connaissent tous mes textes par cœur, car leurs parents les ont gavés avec mes chansons, les pauvres ! Mais ça m'a beaucoup ému de les voir aussi bien chanter ces textes, alors qu'ils ont forcément moins de vécu que moi. Comme Tim Dup, un jeune homme de 23 ans que je ne connaissais pas et qui a choisi « Toute une vie sans te voir », une chanson profonde.

    Vos invités ont-ils pu choisir la chanson qu'ils voulaient ?

    Je leur ai donné carte blanche, oui ! J'étais une sorte de directrice vocale, mais le but était que chacun mette sa personnalité et son ressenti et me surprenne, sinon ce n'est pas drôle. Alain Souchon a glissé un « Madame » à la fin d'une phrase de « Bahia ». Il n'y a que lui pour faire ça. Je suis tombée par terre d'attendrissement. Quand j'entends quelqu'un reprendre une chanson, je remarque souvent que le texte n'a plus du tout le même sens. Je découvre la partie inconsciente des paroles. À chaque fois, ça me scotche dans mon fauteuil.

    SUBTILS « VOLATILS »

    Les amis de toujours, Eddy Mitchell, Hubert-Félix Thiéfaine, Bernard Lavilliers ou Michel Jonasz. Et les plus jeunes, Christophe Maé, Zaz ou Jeanne Cherhal. Tous ont dit « oui » à Véronique Sanson pour 15 « Duos Volatils », forcément inégaux. Évidemment, on passe en boucle les nouvelles versions des tubes. « Chanson sur ma drôle de vie », avec Vianney, totalement à l'aise. Un « Bahia » tout en douceur et poésie avec Alain Souchon. Mais c'est le « Amoureuse » version Julien Doré, né dans « Taratata », qui scotche. Patrick Bruel fait mouche en formule piano-voix sur « Visiteur et voyageur ». Mais c'est le tout jeune Tim Dup, 24 ans, qui est la découverte de ce disque avec un joli duo « Toute une vie sans te voir », titre sur la rupture, écrit pour Michel Berger, bien avant sa naissance, en 1979.

    NOTE DE LA RÉDACTION : 4/5

    « Duos volatils », album de Véronique Sanson, Columbia, 1 CD, 16,99 €.