Théâtre : Pierre Palmade et Catherine Hiegel en mère et fils dans «Le lien»

Les deux comédiens incarnent «Le Lien», de François Bégaudeau, pièce piquante, drôle et touchante sur une relation familiale explosive.

 Paris (14e), le 11 janvier 2019. Catherine Hiegel et Pierre Palmade campent une mère et son fils qui se déchirent lors d’un repas en tête à tête.
Paris (14e), le 11 janvier 2019. Catherine Hiegel et Pierre Palmade campent une mère et son fils qui se déchirent lors d’un repas en tête à tête. LP/Frédéric Dugit

    Un face-à-face tendu entre un fils et une mère, une pièce sur ce lien unique qui les unit, ce qu'il est et ce qu'on en fait… Un déjeuner du samedi en province. Stéphane est Parisien et romancier un peu connu, Christiane est retraitée de la fonction publique, petite employée qui se contente de peu. Au fromage, le tête à tête vire à l'affrontement. Au procès, plutôt, qu'il lui intente avec virulence, cruauté et maladresse.

    Tout commence par son soliloque à elle, une enfilade de tout et surtout de rien, le quotidien, le trivial, le superficiel, cette fromagerie du supermarché fermée pour stérilisation… Il fulmine, se lève, fume. Elle poursuit, invariablement. Il explose, prétend partir pour ne plus jamais revenir. Qu'il soit là ou non ne change rien, lui reproche-t-il.

    Elle ne s'intéresse pas à lui, ne lit pas ses livres, ne lui pose aucune question sur sa vie, parle pour ne rien dire et non pour échanger. Il est là, celui lui suffit à elle. Mais il intellectualise la relation, aimerait quelque chose de plus personnel, sinon profond. Tout est sujet de réflexion à ses yeux, ironique, il argumente, raisonne la pousse. Elle est plutôt dans l'organique, la présence charnelle…

    Détours de l'âme humaine

    Les mots sont durs, heurtent, meurtrissent, mais l'amour demeure derrière la couche d'animosité, tapis sous l'orage. On le voit, on le ressent dans les yeux et les gestes de Catherine Hiegel, mère stupéfaite et blessée, piquante et touchante. Il est moins évident dans ceux de Pierre Palmade, blanc et hagard, migraineux. L'humoriste et acteur était tout trouvé pour camper ce fils qui se montre injuste tout en visant juste, exprimant au travers de cette crise ses névroses et angoisses profondes. L'arrivée de la voisine (Marie-Christine Danède) va apaiser les esprits.

    Mis en scène par Panchika Velez, qui avait monté en septembre le très joli « Au début », du même auteur, « Le lien » montre combien François Bégaudeau sait si bien explorer les détours de l'âme humaine. Sa pièce se déroule le temps de ce repas orageux, le temps de rire du mordant des répliques, de s'émouvoir devant une relation qui renvoie chacun à sa vie propre.

    NOTE DE LA RÉDACTION : 4/5

    «Le Lien», au théâtre du Montparnasse (Paris 14e), du mardi au samedi à 20h30, matinée samedi à 17h30. De 10 à 54 euros. (01 43 22 77 74).