Pascal Pavageau : «FO va être constructif et résistant»

Elu ce vendredi par 97 % des voix à la tête de Force Ouvrière lors du Congrès qui se tenait à Lille (Nord), Pascal Pavageau entend tenir une ligne plus combative que celle de son prédécesseur.

 Pour Pascal Pavageau, le nouveau patron de FO, «la meilleure défense c’est l’attaque, la revendication, la proposition».
Pour Pascal Pavageau, le nouveau patron de FO, «la meilleure défense c’est l’attaque, la revendication, la proposition». LP/Arnaud Journois

    Jusqu'au bout ! Le 24e congrès de Force Ouvrière, réuni cette semaine, aura eu des allures de camps retranchés. En plein milieu de son discours, au moment où ce dernier lui rendait hommage, Jean-Claude Mailly s'est fendu d'un tweet assassin contre son successeur : « Je suis redevenu libre ! Discours du nouveau secrétaire général de FO : hypocrisie et duplicité ».

    Des règlements de compte en famille - à l'image des derniers mois — se sont joués pendant cinq jours sous la voûte du palais des congrès de Lille, où 3 500 militants se sont réunis pour faire le bilan du secrétaire général sortant et tracer la feuille de route du nouveau visage de FO. Pascal Pavageau, 49 ans a été élu à la quasi-unanimité de 97 % (5 841 voix sur 6 032 voix). La maison ne s'est pas fracturée, assure le nouveau N° 1 de FO qui arrive accompagné d'une jeune garde au bureau confédéral de l'organisation, renouvelé quasiment pour moitié. Applaudi chaudement par une grande partie de la salle, ce fonctionnaire d'État, ingénieur de formation, s'affiche comme candidat de la base, plus radical que son prédécesseur.

    Le nouveau FO durcit le ton. Ne courez-vous pas le risque de faire doublon avec la CGT ?

    PASCAL PAVAGEAU. Je vais renouer avec ce que nous avons abandonné depuis les années 1980. Comme il n'y avait plus de grain à moudre, nous nous sommes réfugiés dans le défensif pour « protéger la meule ». Aujourd'hui, nous sommes attaqués comme jamais, mais je trouve que la meilleure défense c'est l'attaque, la revendication, la proposition. FO va être constructif et résistant. Notre cap renoue avec ce que faisaient nos anciens depuis 1948. FO va défendre un programme revendicatif en toute indépendance, et non politique, face à la vision du nouveau monde que nous oppose le Président de la république. En cela, notre organisation a toute sa place dans le paysage syndical.

    Etre constructif cela signifie quoi avec un gouvernement que vous dites vouloir combattre ?

    En 2009, avec plusieurs fédérations, j'avais proposé une banque publique pour l'industrie. Il se trouve qu'une fois élu, le président François Hollande a repris l'idée en créant la BPI. Typiquement, voilà un bon exemple du rôle des organisations syndicales qui ne cogèrent pas mais construisent en faisant des propositions qui pourront être reprises par les politiques et l'exécutif. Nous ne voulons pas à être des co-législateurs, mais revendiquer pour améliorer le quotidien de l'ensemble des travailleurs.

    Ce congrès a été marqué par des échanges très vifs entre des militants qui défendaient Jean-Claude Mailly et ceux qui contestaient sa ligne en 2017… Y a-t-il un risque de scission ?

    Jean-Claude avait dit que « cela allait être un congrès rock'n'roll ». Moi j'avais parlé de congrès hard rock en référence à la musique que j'écoute. On n'est pas tombé dans le piège du congrès death metal, ou trash metal. Tout s'est passé dans la tradition de FO : le linge sale a été lavé en famille, les choses sont dites, et cela est resté franc, cash et fraternel. Toutes les interventions, même les plus enflammées, se sont conclues en me demandant de réunifier la maison. Avec une élection et des résolutions adoptées à la quasi-unanimité, le temps n'est pas à la fracture.

    Dans un tweet, Jean-Claude Mailly a taxé votre discours de duplicité et d'hypocrisie. La guerre n'est visiblement pas finie !

    Si, elle est finie totalement, nous n'allons pas vivre dans le passé. Avec Jean-Claude Mailly nous avons eu nos divergences de points de vue ou de positionnement, qui datent je le rappelle de la dernière année de son mandat, mais pour moi il est et demeure un camarade.

    Nombre de militants ont réclamé la convergence des luttes. Ce n'est plus tabou ?

    Cela fait partie de l'histoire syndicale. Mais c'est une terminologie un peu datée et instrumentalisée sur un plan politique. Je préfère parler d'unité d'action. Chaque fois qu'on pourra la réaliser entre les organisations syndicales, nous serons là. On le sait tous : l'union c'est la force ! C'est déjà le cas dans une immense majorité d'entreprises, parfois dans des branches et de temps en temps sur le plan interprofessionnel. L'unité d'action peut aussi se faire entre les différents mouvements spécifiques et catégoriels, dès lors qu'ils ont une base de revendication commune : par exemple la baisse drastique du pouvoir d'achat, le refus de répartir la richesse produite par l'ensemble des travailleurs du public ou du privé ou encore l'individualisation et le fait qu'on déprotège et casse les droits collectifs tant dans le public que dans le privé.

    Allez-vous prendre contact rapidement avec vos homologues syndicaux ?

    Je vais les appeler pour me présenter, même si l'on se connaît déjà, et aussi leur expliquer quel est mon mandat. C'est ce que me demandent mes militants. Si l'on est en capacité de se revoir courant mai tous les cinq, afin de se mettre d'accord sur un diagnostic voire des actions communes, c'est tant mieux.

    Et le patronat ?

    Je ferai de même, comme avec le gouvernement, s'ils souhaitent me rencontrer.

    Le 1er mai sera une fois encore divisé. Le regrettez-vous et où défilerez-vous ?

    Les conditions n'étaient pas remplies pour un 1er mai unitaire. FO va défiler dans bon nombre de départements mais le bureau confédéral n'a pas prévu, pour l'instant, de se déplacer.