Procès de Peter Cherif : le djihadiste accusé d’avoir été le geôlier d’humanitaires français enlevés au Yémen
Trois personnes de l’ONG Triangle Génération humanitaire ont été retenues captives, en 2011, par Al-Qaïda dans la péninsule arabique. Peter Cherif est soupçonné d’avoir été le geôlier que les ex-otages avaient baptisé « le Français ».
La mémoire collective a largement occulté cet épisode. Le 28 mai 2011, trois humanitaires français de l’ONG lyonnaise Triangle Génération humanitaire s’apprêtent à revenir déjeuner dans leur maison de Say’un au Yémen. Alors qu’ils se trouvent devant le portail, un 4 x 4 avec à son bord cinq hommes équipés de Kalachnikovs bloque la ruelle. Les malfaiteurs ligotent les trois ingénieurs et les kidnappent.
Amélie, Léa et Pierre, âgés de 25 à 30 ans, resteront otages aux mains d’Al-Qaïda dans la péninsule arabique (Aqpa) pendant plus de cinq mois avant leur libération à la mi-novembre 2011. Peter Cherif est accusé d’avoir été l’un de leur geôlier, ce qu’il conteste.
Les chevilles fracturées
Auditionnés après leur libération, les trois humanitaires décrivent tous la présence parmi leur garde d’un homme rebaptisé « le Français » ou « le traducteur ». Plusieurs indices les ont convaincus de la nationalité de ce geôlier qui prend le soin d’apparaître toujours le visage dissimulé derrière un foulard. Au-delà de sa maîtrise parfaite de la langue de Molière, ils ont noté l’emploi de l’expression idiomatique comme « on va pas vous prendre la tête ». L’homme connaît aussi le Spasfon, le Doliprane et la ville de naissance des captifs. Un détail les a également frappés : il est équipé d’une lampe frontale de la marque tricolore Petzl.
Les enquêteurs pensent immédiatement à Peter Cherif, le seul Français, à leur connaissance, à avoir rejoint Aqpa à l’époque. Le djihadiste est arrivé au Yémen peu de temps avant le rapt. La description morphologique correspond également au Parisien. Les humanitaires ont constaté que leur geôlier présentait un souci aux chevilles, or, à l’époque où il souhaitait intégrer l’armée, l’ancien pilier de la filière des Buttes-Chaumont s’était fracturé les chevilles lors d’un saut en parachute.
Dans le cadre de l’information judiciaire, des enregistrements sonores de Peter Cherif sont soumis aux anciens captifs. Même s’ils se disent incapables de le reconnaître formellement, ils estiment élevée la probabilité que cette voix corresponde à celle du « Français ».
Lors de l’instruction, Peter Cherif a réfuté toute implication dans cet enlèvement. « Je n’y ai en aucun cas participé », a-t-il martelé. Les trois anciens otages ont indiqué qu’ils avaient toujours été bien traités durant leur captivité. Un seul d’entre eux s’est constitué partie civile. Les deux autres déposeront devant la cour en tant que simples témoins.
