Hauts-de-Seine : la crise sanitaire booste les conseils municipaux en ligne

Faute de pouvoir laisser les habitants assister aux débats du conseil municipal, de plus en plus de villes les retransmettent en direct.

 Depuis juillet 2020, les séances du conseil municipal de Levallois-Perret sont retransmises en temps réel.
Depuis juillet 2020, les séances du conseil municipal de Levallois-Perret sont retransmises en temps réel. DR.

    Voilà presque un an que les chaises sont vides, souvent remisées pour revoir la configuration des espaces et respecter la distanciation entre élus. L'impossibilité pour les citoyens d'assister aux conseils municipaux de leur commune met à mal un volet important de la démocratie locale. Un mal pour un bien diront certains car des municipalités qui traînaient des pieds pour filmer les débats s'y sont mises depuis leur installation avant l'été. Parmi les villes des Hauts-de-Seine de plus de 60 000 habitants, neuf proposent désormais des retransmissions sur leur site Internet ou via les réseaux sociaux. Mais Boulogne-Billancourt et Issy-les-Moulineaux font de la résistance.

    Elles s'y sont mises ces derniers mois. À Levallois-Perret, le conseil est retransmis en direct sur la page Facebook de la ville depuis le 3 juillet, date du premier conseil de la mandature. « Ce dispositif à vocation à perdurer », explique Agnès Pottier-Dumas, maire (LR) de la ville. Son prédécesseur, Patrick Balkany, n'a jamais fait le choix de la retransmission mais ses éclats de voix ont été régulièrement filmés par les caméras de télévision. Si les séances sont nettement moins explosives, elles attirent jusqu'à 8200 connexions et 250 personnes en moyenne devant leurs écrans au même moment. Et comme tout est fait en interne, la ville estime que le coût de ces retransmissions « n'a pas d'impact ». Seule la traduction des débats en langue des signes, mise en place le 14 décembre dernier, est externalisée.

    « C'est dans l'air du temps »

    Courbevoie transmet le conseil en direct depuis février. « C'est une nécessité compte tenu du contexte sanitaire », estime Jacques Kossowki (LR), le maire de la ville, qui a fait appel à un prestataire pour la captation des débats, pour une facture de près de 3 000 €. « C'est un coût au regard des 80 personnes qui nous regardent mais c'est dans l'air du temps », ajoute l'édile qui cesserait la retransmission « si les débats deviennent trop exubérants en raison de la présence des caméras ».

    Enfin Neuilly se plie à l'exercice depuis le couvre-feu. « Nous n'avons pas encore fait de bilan, mais le nombre de connexions se compte en quelques dizaines » indique le maire (DVD) Jean-Christophe Fromantin, qui ne semble pas convaincu. « Nous avons davantage du public en présentiel et c'est ce qu'il faut privilégier, évidemment quand cela sera de nouveau possible. »

    Boulogne-Billancourt et Issy-les-Moulineaux s'y opposent. Les deux villes voisines ont expérimenté la retransmission lors de mandatures précédentes mais le résultat n'a pas été jugé concluant. « Très peu de gens suivaient les séances en direct », se souvient Pierre-Christophe Baguet, maire (LR) de Boulogne-Billancourt. Quand la question s'est reposée avec la crise sanitaire, l'édile a tranché en sa défaveur. « Là nous avons un problème de comportement dans cette mandature. J'ai une opposition qui, dès le premier conseil municipal, fait un peu ce qu'elle veut, des gens se lèvent pour filmer leurs camarades... Le conseil municipal ne doit pas se transformer en spectacle, il vaut mieux se concentrer sur le fond des délibérations », estime l'élu qui prend pour exemple « l'incident » avec Pauline Rapilly-Ferniot.

    Au lendemain de la séance du 11 février dernier, l'élue avait diffusé sur les réseaux sociaux une vidéo d'elle dans la salle du conseil alors qu'elle dénonçait des remarques sexistes dont elle se disait victime de la part d'élus de la majorité. Le maire lui avait coupé le micro. La séquence filmée par un autre élu était devenue virale. Pour le maire, tout cela était « télécommandé ». Pour la conseillère municipale, la vidéo était un moyen de montrer « réellement ce qu'il se passe », à défaut d'une diffusion, à laquelle les élus socialistes et écologistes sont favorables.

    Délibérations téléchargeables à Issy

    De l'autre côté de la Seine, à Issy-les-Moulineaux, André Santini est également contre. Lui aussi avait expérimenté la retransmission lors d'un mandat précédent mais l'avait abandonnée face à une trop faible audience. La crise sanitaire ne change pas la position de la ville, pourtant ultra-connectée. « Le déroulement des débats est plus facilement compréhensible en présentiel », explique Philippe Knusmann, adjoint au maire.

    En attendant le retour du public, ce dernier renvoie les citoyens à la lecture des compte-rendus des délibérations téléchargeables sur le site de la ville. « Ce n'est pas satisfaisant, mais nous préférons éviter que les positions des uns et des autres soient mal comprises ou ne relèvent pas de la réalité de l'intégralité des débats ».