Le jeu vidéo, premier marché culturel en France

Le E3, le plus grand salon mondial consacré aux jeux vidéo, s’ouvre mardi à Los Angeles, vitrine extravagante d’un secteur qui brasse des milliards chaque année.

 Ecoulé à 1,34 million d’exemplaires, le dernier «FIFA» est une des locomotives du marché du jeu vidéo.
Ecoulé à 1,34 million d’exemplaires, le dernier «FIFA» est une des locomotives du marché du jeu vidéo. AFP/Frederic J. Brown

    D'après vous, quel est le bien culturel le plus vendu en France en 2014, 2015 et 2016 ? Un livre ? Perdu ! La palme revient à la simulation de football « Fifa ». Ce jeu vidéo s'est écoulé à 1,34 million d'exemplaires l'année dernière. Un autre titre parviendra-t-il à son tour à atteindre un tel sommet ?

    Le salon mondial des jeux vidéo, l'E3 (Electronic Entertainment Expo) qui ouvre ses portes ce mardi à Los Angeles (Etats-Unis) et pendant lequel tous les professionnels du genre rivalisent de nouveautés, dévoilera peut-être celui qui fera le buzz avant les fêtes de fin d'année.

    Souvent comparée au Festival de Cannes, pour le cinéma, ou encore au Mondial de Paris, pour l'automobile, cette grand-messe annuelle célèbre au cours d'extravagantes conférences conçues comme de véritables shows à l'américaine les champions d'une industrie bien plus sérieuse qu'il n'y paraît.

    Avec des recettes atteignant un record de 4,3 milliards d'euros l'an dernier en France, le jeu vidéo est en effet désormais le premier marché culturel du pays, devant celui du livre, du cinéma et de la musique.

    Un marché boosté par la Switch de Nintendo

    Il affiche de surcroît une insolente santé, 18 % de hausse de chiffre d'affaires en 2017, notamment boostée par le succès de la nouvelle console de Nintendo, la Switch, mais aussi celui de quelques blockbusters (« Fifa 18 » évidemment mais aussi « Call of Duty WWII », « The Legend of Zelda », « Mario Kart 8 » ou encore « Assassin's Creed Origins ») vendus à plus de 1 demi-million de pièces chacun !

    « Breath of the Wild » est le dernier volet de la saga « Zelda ». Nintendo
    « Breath of the Wild » est le dernier volet de la saga « Zelda ». Nintendo AFP/Frederic J. Brown

    Malgré les émotions ludiques qu'ils procurent, ils n'ont rien d'une partie de plaisir pour ceux qui les imaginent et les produisent. Les sommes investies sont gigantesques et titillent souvent celles engagées pour la gestation d'un film hollywoodien.

    « Il faut compter entre 80 et 100 millions d'euros pour sortir un jeu premium comme ceux de la série des « Assassin's Creed », hors budget marketing qui peut rallonger la facture de plusieurs dizaines de millions », explique John Parkes, directeur général d' Ubisoft France, le fleuron français de la spécialité qui emploie plus de 2 500 personnes dans ses différents studios de création dans l'Hexagone.

    Plus rentable qu'«Avatar»

    L'investissement se transforme parfois en jackpot, car le marché est mondial et les fans répartis partout sur la planète. « Grand Theft Auto V », sorti en 2013, explose ainsi tous les compteurs. Un record de 227 millions d'euros a été investi pour le produire… mais, vendu à 90 millions d'exemplaires à travers le monde en 5 ans, il a rapporté plus de 5 milliards d'euros à son éditeur, l'américain Rockstar Games! A titre de comparaison, le film « Avatar » de James Cameron, au budget pharaonique de 360 millions d'euros n'a rapporté « que » 2,3 milliards de recettes.

    Face aux géants, le Japonais Nintendo et les Américains Electronic Arts et Activision, la France est loin de démériter. Ubisoft, créé en 1986 en Bretagne par cinq frères visionnaires, est aujourd'hui un mastodonte avec ses 32 studios et plus de 10 000 employés dans 30 pays.

    Celui à qui on doit les jeux comme « Rayman », « Just Dance », « les Lapins Crétins », « Far Cry », « Watch Dogs » ou la série des « Assassin's Creed » parmi les titres les plus connus peut se targuer d'être le deuxième développeur, en taille, dans le monde. « Sur ce marché en perpétuelle évolution, grâce aux avancées technologiques, nous avons l'ambition de toucher 5 milliards de joueurs d'ici à 10 ans », parie son patron John Parkes.

    L'e-sport suscite des passions

    L'objectif paraît fou. Mais il est à portée de manettes compte tenu du public de plus en plus large qui fait du jeu vidéo un loisir quasi quotidien. Car il faut mettre ses a priori au placard et oublier l'image, poussiéreuse, de l'adolescent boutonneux reclus dans sa chambre et hypnotisé sur l'écran de son PC.

    Ce loisir touche désormais toutes les tranches d'âge et devient même intergénérationnel. En 2005, seulement 29 % des Français reconnaissaient jouer. Ils sont plus de 53 % aujourd'hui dont la moitié sont des… joueuses !

    Cette envolée passionnée n'est pas près de s'arrêter en si bon chemin. Les plus grands studios misent désormais sur sa version sportive, l'e-sport, pour se développer encore plus. Le PSG a déjà ses équipes et l'éditeur américain Blizzard vient de lancer l'Overwatch League, un circuit de compétition copié sur le modèle des championnats nationaux de football, avec des clubs professionnels représentant plusieurs villes à travers le monde (une équipe parisienne est en cours de recrutement) et, bien entendu, leurs clubs de supporters…