Pour ou contre Airbnb : le dilemme de Saint-Malo

Destination bretonne incontournable, la cité corsaire est envahie de biens en location de courte durée au désespoir de certains habitants. La municipalité va s’attaquer au problème.

Véronique Deschamps et Franck Rolland font partie du collectif « Saint-Malo, j’y vis… J’y reste ». LP/Solenne Durox
Véronique Deschamps et Franck Rolland font partie du collectif « Saint-Malo, j’y vis… J’y reste ». LP/Solenne Durox

    Dieu qu’elle l’aime cette ancienne maison religieuse du XVIIe siècle, miraculeusement épargnée par les bombardements. Elle y vit depuis vingt-huit ans. Et pourtant, Véronique Deschamps ne s’y sent plus chez elle depuis 2016, date à laquelle l’un des trois appartements aménagés dans cette petite bâtisse malouine est devenu un logement loué toute l’année sur Airbnb. Allées et venues incessantes, incivilités… « Je n’ai jamais demandé à vivre dans un hall de gare. C’est un cauchemar. Je souffre et les propriétaires qui sont au Canada n’en ont rien à faire », s’énerve cette coiffeuse de 57 ans qui poursuit ses voisins en justice. « J’en suis déjà à plus de 9000 euros de procédure judiciaire depuis trois ans. D’autres habitants dans le quartier ont lâché l’affaire et préféré déménager à cause des nuisances. »

    Avec Franck Rolland, Véronique Deschamps a créé en 2019 le collectif « Saint-Malo, j’y vis… J’y reste » afin de dénoncer les excès liés aux locations de courte durée. Certains immeubles sont vidés de leurs habitants au profit des voyageurs. Tous deux se défendent d’être anti-tourisme et même anti-Airbnb mais ils désespèrent de voir un « tourisme de passage mortifère » détruire leur belle cité corsaire. Intra-muros, beaucoup de commerces traditionnels ont disparu, remplacés par des boutiques de biscuits bretons. Il n’y a plus de boucherie. Les boîtes à clé fleurissent sur les portes et le mobilier urbain. La municipalité en a d’ailleurs fait retirer quelques-unes le mois dernier. Le nombre de biens disponibles sur Airbnb est passé de 333 en 2014 à plus de 2500 aujourd’hui. « La location de courte durée étant plus rentable que celle à l’année, il est de plus en plus difficile pour les habitants de se loger », assure Franck Rolland. Les biens à la vente sont aussi plus rares et chers.