Pistes cyclables à Paris : que pensent les usagers du nouveau Réseau express vélo ?
Du bois de Vincennes à celui de Boulogne, et de porte d’Aubervilliers à Châtelet, la première phase du Réseau express vélo (REVe) est sur le point d’être achevée. Nous l’avons parcouru.
Nom de code « REVe » comme « Réseau Express Vélo ». Après de longs mois de travaux perturbants, de nouvelles pistes cyclables bidirectionnelles, séparées du trafic motorisé, sont apparues dans le paysage parisien. D'Ivry-sur-Seine à Javel, du bois de Vincennes à celui de Boulogne et de porte d'Aubervilliers à Châtelet, la première étape du REVe est sur le point d'être achevée.
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Cette infrastructure était une promesse d'Anne Hidalgo (PS), la maire de Paris, qui a consacré 150 millions d'euros à son plan vélo. Le résultat est là, visible : le réseau est adopté par des cyclistes toujours plus nombreux. Le REVe répond-il aux attentes de ses usagers ? Nous avons parcouru l'ensemble du réseau pour rencontrer les cyclistes et évaluer ce qui fonctionne, mais aussi ce qui pourrait être amélioré.
Des voies plus sûres, plus pratiques et plus rapides
Si les quais Branly (VIIe) et Saint-Bernard (Ve) n'ont pas encore leur piste cyclable bidirectionnelle entièrement ouverte, le Réseau express vélo offre, entre ces deux quais, un bel aperçu, sur 5,8 km, de son potentiel. Le pont de l'Alma passé, Rachid, 49 ans, nous talonne avec son vélo : « J'emprunte très souvent cette piste, souligne celui qui vient de Rueil-Malmaison (Hauts-de-Seine). C'est magnifique. Pour un cycliste, c'est un véritable plus. Moins pour les automobilistes… Sur un vélo, on se sent vraiment en sécurité. »
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Au niveau de l'Assemblée nationale, il est bon de longer la Seine, et de ne plus être obligé d'emprunter le boulevard Saint-Germain et ses nombreux feux. Sur leur Vélib', Arnaud, Francilien, et Vanessa, de Bruxelles, expérimentent pour la première fois la piste. La Belge paraît déjà convaincue : « A Bruxelles, il y a beaucoup de voies cyclables, mais ce sont le plus souvent des simples marques au sol. Il n'y a pas de délimitation physique. Ils commencent à faire pareil sur les grands axes. Là, je me sens sereine. »
La même mélodie se fait entendre du côté de la piste de Rivoli qui rejoint Bastille à Concorde, avec cette fois-ci Fred sur son vélo à assistance électrique : « C'est génial mais il faut toujours rester vigilant. Et c'est normal : on ne se trouve pas sur une autoroute cyclable. On n'est qu'un élément parmi d'autres. Mais ça valait le coup d'attendre », remarque celle qui se rend de Montrouge aux Buttes-Chaumont, soit près de 10 km à avaler.
Au nord du REVe, rue d'Aubervilliers (XIXe), Anja, une Berlinoise qui vit à Paris depuis cinq ans, est aux anges. « C'est de mieux en mieux. Je parcours 10 km par jour, du XIXe au XVIe arrondissement, j'ai des pistes sur toute ma route ».
Une signalisation à améliorer
Cependant tout n'est pas parfait dans le REVe. « Les pistes sont bien, le problème c'est les gens et les incivilités », estime Christophe, croisé rue du Château-Landon (Xe). Boulevard de Sébastopol ou rue de Rivoli, la vigilance est de mise pour le cycliste. A plusieurs reprises, l'accident n'est pas loin, notamment aux intersections. Ici, un piéton ne regardant que dans le sens de circulation des voitures et s'engageant sur la piste sans jeter un coup d'œil. Là, un cycliste ne respectant pas le feu de signalisation. Ailleurs, une voiture coupant la piste cyclable sans respecter la priorité. Sans oublier les camions qui confondent la piste avec une aire de livraison…
Certains croisements de trafics sont peu lisibles. Des feux de signalisation manquent sur les pistes cyclables. Devant la gare de l'Est, la piste se fraye un chemin entre trois flux motorisés… Frissons garantis.
Cynthia, sur sa trottinette électrique, trouve qu'il y a « beaucoup trop de bosses ». « La qualité de finition est à améliorer, abonde Jean-Sébastien Catier, porte-parole de Paris en Selle. Revêtement, bordures, potelets… Ce sont choses pas compliquées et pas chères mais qui comptent pour le confort et la sécurité ».
Un manque de continuité
Autre gros point noir : la jonction avec les places, comme celle de République ou encore de la Concorde. Croisé à la fin de la piste cyclable de Rivoli, avant d'être obligé de s'engouffrer dans le trafic routier de la Concorde, Jérôme ne cache pas son mécontentement. « La piste bidirectionnelle est plutôt satisfaisante, commence-t-il par expliquer. Mais arrivé à Concorde, on passe de tout à rien. C'est vraiment zéro pointé, avec les voitures, les pavés… »
Pour rejoindre Suresnes (Hauts-de-Seine), cet ingénieur préfère passer par le Cours la Reine que de prendre la piste cyclable des Champs-Elysées, pourtant sur le REVe, mais « qui ne vaut pas la moyenne à cause notamment des pavés ».
Mais l'un des principaux reproches adressés au réseau existant est son manque de densité dans Paris et surtout l'absence de continuité avec la banlieue. Depuis plusieurs mois, les associations cyclistes d'Ile-de-France planchent sur un réseau express régional vélo, qui relierait les communes du Grand Paris sur des axes sécurisés. Et dans la capitale, l'association Paris en Selle a récemment présenté son projet de réseau « Vélopolitain », qui reprendrait les itinéraires desservis par les lignes de métro. Un autre rêve à réaliser.