Coup d’Etat au Burkina Faso : mutineries, président arrêté... le point sur la situation

Le président Roch Marc Christian Kaboré aurait été arrêté ce lundi au lendemain de mutineries dans des camps militaires de ce pays. La France appelle à éviter tout déplacement.

Ce lundi soir, des militaires en uniforme ont annoncé à la télévision avoir pris le pouvoir. RTB/Reuters TV
Ce lundi soir, des militaires en uniforme ont annoncé à la télévision avoir pris le pouvoir. RTB/Reuters TV

    Que se passe-t-il au Burkina Faso ? Ce lundi, la situation à Ouagadougou, la capitale semble s’enfoncer un peu plus dans le chaos. Mutineries, attaques djihadistes… Face à de multiples incidents, la France appelle ses ressortissants présents sur place à « éviter tout déplacement ».

    Le Parisien fait le point sur ces violences déclenchées à l’issue de plusieurs mois de manifestations pour dénoncer l’incapacité du pouvoir à contrer les attaques djihadistes que se multiplient dans la région du Sahel.

    Le sort du président Kaboré en suspens

    Selon RFI, le président Kaboré a été arrêté dans la nuit. Il serait détenu dans un camp militaire. L’agence Reuters précise qu’il serait aux mains de mutins de l’armée du Burkina Faso.

    Des soldats encagoulés ont pris position devant la télévision nationale, rapporte d’ailleurs l’AFP, qui confirme par ailleurs l’arrestation de Roch Marc Christian Kaboré. Mais d’autres sources indiquent toutefois que le président est en sécurité.

    Dans ce contexte, les Etats-Unis ont appelé lundi l’armée du Burkina Faso à la « libération immédiate » du président Roch Marc Kaboré et à « respecter la Constitution » et « les dirigeants civils » du pays.

    Des mutineries au coup d’Etat

    Le Burkina Faso est en proie à des violences djihadistes et à de nombreuses mutineries qui ont eu lieu dans plusieurs casernes militaires dont celles de Sangoulé Lamizana et de Baba Sy, ainsi qu’à Kaya, Ouahigouya dans le nord du Burkina où sont en majorité concentrées les attaques islamistes observées ces dernières semaines.

    Une mutinerie a également eu lieu à la base aérienne de Ouagadougou. Le gouvernement a réagi en reconnaissant ces tirs dans plusieurs casernes, démentant cependant « une prise de pouvoir par l’armée ».

    C’est pourtant bien un coup d’Etat qui est en cours au Burkina Faso. Ce lundi soir, des militaires en uniforme ont annoncé à la télévision avoir pris le pouvoir et décidé la dissolution du gouvernement et la fermeture des frontières. Les putschistes se sont toutefois engagés au « retour à un ordre constitutionnel » dans « un délai raisonnable ».

    Plusieurs organisations internationales ont dénoncé ce putsch. Le secrétaire général de l’ONU, Antonio Guterres, a notamment « condamné fermement » dans un communiqué le « coup d’Etat » militaire commis au Burkina Faso, appelant leurs auteurs « à déposer les armes » et à protéger « l’intégrité physique » du président Roch Marc Kaboré. L’Union africaine a de son côté dénoncé une « tentative de coup d’Etat ».

    Les mutins veulent plus de moyens pour lutter contre le djihadisme

    Les mutins réclament le départ des chefs de l’armée et des « moyens adaptés » à la lutte contre le djihadisme alors que le Sahel est de plus en plus déstabilisé par les djihadistes qui frappent aussi le Niger et le Mali voisin, pays qui a été le théâtre de deux coups d’État en quelques mois.

    « Nous voulons des moyens adaptés à la lutte » anti-djihadiste « et des effectifs conséquents », ainsi que le « remplacement » des plus haut gradés de l’armée nationale, indique dans un enregistrement sonore un militaire de la caserne Sangoulé Lamizana, qui souhaite en outre « une meilleure prise en charge des blessés » lors des attaques et des combats avec les djihadistes, ainsi que « des familles des défunts ».

    Ce militaire n’a pas réclamé le départ du président, accusé par une grande partie de la population, excédée par la violence, d’être « incapable » de contrer les groupes djihadistes. Au pouvoir depuis 2015, Roch Marc Christian Kaboré a été réélu en 2020 sur la promesse d’en faire sa priorité.

    Les revendications des mutins ont été confirmées par d’autres sources militaires et des discussions infructueuses ont eu lieu entre leurs représentants et le ministre de la Défense, le général Barthélémy Simporé, selon une source gouvernementale.

    Un couvre-feu avait été imposé

    Ce dimanche soir, le président Kaboré, a décrété « jusqu’à nouvel ordre » un couvre-feu de 20 heures à 5h30. Le gouvernement a également annoncé la fermeture des écoles lundi et mardi.

    Comme le Mali et le Niger voisins, le Burkina Faso est pris dans une spirale de violences attribuées à des groupes armés djihadistes, affiliés à la nébuleuse terroriste islamiste Al-Qaïda et au groupe djihadiste ultraradical de l’État islamique.

    Les attaques qui visent civils et militaires sont de plus en plus fréquentes et en grande majorité concentrées dans le nord et l’est du pays. Les violences islamistes ont fait plus de 2000 morts en près de sept ans et contraint 1,5 million de personnes à fuir.

    Paroxysme de la tension après des mois de manifestations

    Depuis des mois, des manifestants dénoncent dans plusieurs villes du Burkina Faso l’incapacité du pouvoir à contrer les attaques djihadistes. Ces événements ont régulièrement été interdits et dispersés par les policiers anti-émeutes.

    Tout au long de la journée de dimanche, des manifestants ont apporté leur soutien aux mutins et ont dressé des barrages de fortune dans plusieurs avenues de la capitale, avant d’être dispersés par la police, ont constaté des journalistes de l’AFP.

    L’ombre du général Diendéré et de l’ancien président du Burkina Faso

    Un des camps attaqués, Sangoulé Lamizana, abrite la Maison d’arrêt et de correction des armées (Maca) où est détenu le général Gilbert Diendéré, proche de l’ancien président Blaise Compaoré renversé en 2014. Depuis lors, Blaise Compaoré vit depuis en Côte d’Ivoire.

    Le général Diendéré a été condamné à 20 ans de prison pour une tentative de putsch en 2015 contre le président Kaboré. Il est actuellement jugé pour son rôle présumé dans l’assassinat de l’ancien président Thomas Sankara, icône panafricaine, en 1987. L

    Le procès des assassins présumés de Sankara, qui devait entrer lundi dans la phase des réquisitoires et plaidoiries devant le tribunal militaire de Ouagadougou, a été reporté à une date indéterminée, selon une source judiciaire.