Et si les JO s’arrêtaient ? La cérémonie de clôture de Paris 2024 sera dystopique et invitera à la réflexion

Si la cérémonie d’ouverture sur la Seine est dans tous les esprits, Thomas Jolly répète actuellement aussi le spectacle de la cérémonie de clôture, prévue le 11 août au Stade de France.

    Une immense bâche sombre ― de la taille de la pelouse du Stade de France où le spectacle se déroulera le 11 août prochain ― a été déployée. Au milieu une imposante estrade, des échafaudages et même une grue. C’est dans cet espace verdoyant, à une heure de Paris, que se déroulent en soirée (pour être dans les mêmes conditions que le jour J) les premières répétitions de la cérémonie de clôture des Jeux olympiques.

    Si les secrets du spectaculaire show sur la Seine, le 26 juillet en ouverture des JO, sont bien gardés, Thomas Jolly lève peu à peu le voile sur les préparatifs du 11 août. « Je suis très impatient d’ouvrir le coffre-fort, il est tellement plein de surprises et de choses que j’ai envie de partager… Sur cette cérémonie de clôture, c’est plus heureux, plus détendu. »

    La section gymnastique des sapeurs-pompiers de Paris à l'œuvre.
    La section gymnastique des sapeurs-pompiers de Paris à l'œuvre. LP/Alexandre Delaitre

    Il enchaîne : « On a tout un espace sur le modèle du stade de France pour répéter, alors qu’on n’a pas pu reproduire les 6 km de la Seine. Pour la cérémonie d’ouverture, tout est morcelé, et moi-même, je vais la découvrir le soir même. Ce sera une unique fois et c’est ça qui la rend aussi puissante. Là, on est dans un autre rapport au temps et à l’espace. »

    Pas de fil conducteur entre les spectacles

    Les performeurs sont essentiellement des circassiens, des acrobates, des danseurs et même des membres de la section gymnastique des sapeurs-pompiers. La musique est transmise par des oreillettes. Pas de costumes encore, ni de lumières ou de décors, « le spectacle est en pleine construction », sourit le directeur artistique des quatre cérémonies des Jeux olympiques et paralympiques, quatre « moments de fête. »

    Ne cherchez pas de fil conducteur entre les spectacles. Si c’est la même équipe artistique qui est aux manettes, il ne s’agit pas d’une série. « L’idée est toujours de se saisir du terrain dans lequel on est. Au stade de France, on travaille sur l’histoire des Jeux olympiques, alors que sur la Place de la Concorde (pour la cérémonie d’ouverture des Jeux paralympiques), on se saisira des motifs architecturaux, de l’obélisque et des Champs-Élysées », résume Thomas Jolly.



    La cérémonie du 11 août, pour laquelle des billets sont encore disponibles, sera ainsi une dystopie, une projection dans le futur. « C’est important de montrer la beauté des Jeux mais aussi leur fragilité, et donc leur valeur, pointe Thomas Jolly. Je voulais qu’on fête la fin des Jeux, qu’on célèbre ce monument humain. Un monument que je pense fragile, car toujours dans le bruit du monde, poursuit Thomas Jolly. D’ailleurs, les Jeux, créés à l’Antiquité ont disparu, avant d’être refondés. »

    Un clin d’œil à la situation politique ? « Non »

    L’histoire se répète. Les auteurs ont ainsi créé un spectacle « où l’on imaginerait que les Jeux ont une nouvelle fois disparu et que quelqu’un les refonderait, dans un avenir plutôt lointain », histoire selon le directeur artistique « de se rendre compte que ce monument est précieux et que cette fête que l’on fera, ce soir-là avec les athlètes, sera une fête en conscience. » C’est cette scène aérienne ― qui interviendra au milieu de la partie artistique prévue pour durer une quarantaine de minutes ― que les danseurs et acrobates ont répétée mercredi soir.

    La nuit tombe, sur le plateau, les performeurs sont projetés des milliers d’années plus tard et retrouvent les vestiges de notre civilisation, ceux aussi de Jeux olympiques s’étant déroulés en 2024. « Cette dystopie permet de nous projeter dans le futur et de nous questionner : et si les Jeux olympiques s’arrêtaient ? », poursuit Thomas Jolly. « C’est triste et en même temps, ça nous demande davantage de croire en nous, en notre avenir et de faire des choix importants pour nous tout et pour notre avenir commun. » Un clin d’œil à la situation politique actuelle ? « Non », jure le créateur.

    Tony Estanguet, président du comité d’organisation (à gauche), et Thomas Jolly, chorégraphe et metteur en scène des cérémonies d'ouverture et de clôture (à droite).
    Tony Estanguet, président du comité d’organisation (à gauche), et Thomas Jolly, chorégraphe et metteur en scène des cérémonies d'ouverture et de clôture (à droite). LP/Alexandre Delaitre

    Car, même si la cérémonie « portera un message qui ne sera peut-être pas relié à certains types d’idées » avancés par certains partis, le spectacle « a été imaginé il y a un an et demi. » « On fait peut-être face actuellement à ce genre de questionnement, poursuit le directeur artistique. On est interrogé sur notre vivre ensemble et sur notre avenir commun. Les spectacles sont toujours porteurs de sens, ils doivent nous réjouir, nous donner de l’émotion mais aussi nous interroger. Il me semblait important de montrer à quel point les Jeux olympiques sont précieux. »