Oise : le lapin de garenne en danger de disparition

L’emblématique animal de nos campagnes est au cœur d’une querelle entre agriculteurs, qui le jugent nuisible, et chasseurs, qui s’inquiètent de sa raréfaction.

 Grâce à l’arrêté de la préfecture plaçant le lapin dans la liste des nuisibles, les agriculteurs ont la possibilité de le chasser tout au long de l’année, pour protéger leurs récoltes (Archives).
Grâce à l’arrêté de la préfecture plaçant le lapin dans la liste des nuisibles, les agriculteurs ont la possibilité de le chasser tout au long de l’année, pour protéger leurs récoltes (Archives). LP

    « C'est un grand soulagement pour la profession », se félicite ce vendredi Thierry Bourbier, le patron du syndicat FDSEA 60, dans l'édito du magazine professionnel « l'Oise agricole ». L'arrêté classant le lapin de garenne sur la liste des espèces nuisibles, pris il y a un an, est reconduit. Il permet aux agriculteurs d'abattre les rongeurs à n'importe quel moment de l'année. « Il est nécessaire de prévenir une forte augmentation de cet animal », justifie notamment la préfecture.

    « Il est indispensable de relancer cette espèce »

    Pourtant, les chasseurs avaient demandé son retrait de la liste, car ses effectifs sont en chute libre. En 2006-2007, 13 000 rongeurs à grandes oreilles avaient été « prélevés » dans l'Oise. Contre à peine 2 000 en 2017-2018. « C'est très inquiétant, confie Kévin Le Tohic, coordinateur petit gibier à la fédération de chasse du département. C'était le gibier de base il y a quelques décennies. Si on veut revenir à une chasse populaire, il est indispensable de relancer cette espèce. »

    DR/Nicolas Bestel
    DR/Nicolas Bestel LP

    Les agriculteurs partagent ce constat. « C'est vrai qu'il y en a moins. Mais ce qui pose problème, c'est la surpopulation sur certains points. Si la population est maîtrisée, il n'y a pas de souci », déclare Thierry Leysens, responsable de la section dégâts de gibier à la FDSEA 60. Car les lapins de garenne prospèrent encore le long des voies de chemin de fer et des autoroutes. « Là, les dommages peuvent être conséquents pour les cultures, notamment sur les jeunes betteraves, qui ne repoussent pas une fois mangées », avance Thierry Leysens.

    Quels sont l'ampleur et le coût de ces destructions ? « Nous n'avons pas d'étude détaillée car ce n'est pas un dégât remboursé par la fédération de chasse, explique Thierry Leysens. Nous avons juste des retours d'agriculteurs. Nous allons approfondir le sujet. »

    « Lapin de garenne, nuisible il restera ! »

    La préfecture justifie sa décision d'autoriser le prélèvement des lapins en toutes saisons : même si le garenne se fait plus rare, cela ne suffit pas, hors période de chasse, à « garantir une absence d'atteintes aux cultures ou semis sensibles ». Ce classement est toutefois rediscuté chaque année. « Au moins le débat est lancé. Il faut une prise de conscience », avance Kévin Le Tohic qui milite pour un découpage du département en fonction de l'abondance locale du rongeur.

    Les débats entre chasseurs et agriculteurs promettent d'être animés. Concernant les prélèvements du petit mammifère réalisés sur la dernière saison, Thierry Bourbier n'en démord pas : « Le compte n'y est pas. » Et le titre de son éditorial annonce la couleur : « Lapin de garenne, nuisible il restera ! »

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