Comment Berd’huis se prépare à accueillir Emmanuel Macron

Le président de la République se rend, jeudi, dans ce bourg de 1118 âmes, invité du 13 heures de TF1, délocalisé pour l’occasion.

 L’école du village de Berd’huis, dans l’Orne, où se déroulera l’interview du président Emmanuel Macron ce jeudi.
L’école du village de Berd’huis, dans l’Orne, où se déroulera l’interview du président Emmanuel Macron ce jeudi. LP/Yann Foreix

    « Emmanuel Macron se rendra dans le Perche jeudi! » C'est une petite radio, installée dans un coin du bar, qui crache la nouvelle, dans une indifférence relative. Il n'est pas encore 11 heures mais ils sont trois, accoudés au comptoir de l'Hôtel du croissant, à Berd'huis dans l'Orne, sifflant tranquillement leur galopin de blonde. C'est dans ce village de 1118 habitants que va se déplacer le président de la République, invité du journal de 13 heures de TF 1, exceptionnellement délocalisé dans la classe de CE2 de l'école locale.

    Rien qui ne déclenche l'enthousiasme au « Croissant ». Maurice, 72 ans et retraité, évoque derechef « la hausse de la CSG ». « On a quand même l'impression qu'il y a surtout eu « plus pour les riches que pour les ouvriers », poursuit Christophe, la petite cinquantaine, employé d'une usine automobile. « Vous êtes au courant qu'ici, ça vote fort pour le FN ? », glisse Patrick, le serveur à la chemise aux carreaux de couleurs. Au premier tour de la présidentielle, Marine Le Pen est arrivée en tête (30 %), devant François Fillon puis Emmanuel Macron (tous les deux à 20 %). Au second, le marcheur l'a emporté, mais avec une avance moindre qu'au niveau national (54,5 % à 45,5 %).

    Pernaut et Macron ne se rendent pas au chevet du village qui souffre

    Berd'huis n'a pourtant rien du cliché du village fantôme que fuit la vie à mesure que désertent commerces et services. Eventré par une départementale, qui lui assure un transit conséquent, ce bourg affiche fièrement son hôtel bar, ses boucherie, pharmacie, bureau de Poste, coiffeur, ses trois médecins généralistes, autant d'infirmières et un dentiste ! Une rareté pour un patelin de ce gabarit. Jean-Pierre Pernaut et Emmanuel Macron ne se rendent donc pas au chevet du village qui souffre, mais posent leurs valises dans l'appartement témoin d'une campagne hexagonale meurtrie. Le journal sera tourné dans une salle de classe de l'école, moderne, équipée de la fibre et de matériel numérique.

    « La maîtresse nous a dit qu'il fallait l'appeler Président, et pas par son prénom », balbutie un élève à la sortie de l'école. « Ça fait bizarre pour une si petite commune mais on est contents », réagit une retraitée. Elle explique cette venue parce qu'« on a l'impression qu'il délaisse les p'tites communes » depuis son élection. En plein conflit social (SNCF, hôpitaux, étudiants…), Macron fait un pas de côté, et choisit de s'adresser à une France plus rurale et âgée, peu choyée en ce début de quinquennat. Et ce, avant d'être conjointement interrogé dimanche par Jean-Jacques Bourdin (RMC) et Edwy Plenel (Mediapart)!

    Ancienne sénatrice de centre droit, la maire (sans étiquette) de Berd'huis Brigitte Luypaert, 64 ans, se dit « fière » de « recevoir le président ». Mais si sa ville se porte bien, elle n'entend pas taire les difficultés de « ses collègues » du département. Elle raconte les « zones blanches » téléphoniques, « les maires préoccupés », à qui on parle de fermetures d'écoles, les baisses de dotations qui mettent les bourgs à genou. « On est inquiets dans le rural, il faut nous aider à rester vivants ! »