Provins : accusés d’avoir poussé leur ami dans les escaliers, deux marginaux face aux juges

Deux hommes sont jugés depuis ce mardi, accusés d’être à l’origine de la mort d’un quinquagénaire, frappé et poussé dans un escalier, à Provins, en octobre 2015.

 Maître Fatthi Irguedi, avocat, est le conseil d’un des deux accusés.
Maître Fatthi Irguedi, avocat, est le conseil d’un des deux accusés. LP/ARNAUD DUMONTIER

    « Ils ont changé de versions dix fois durant l'enquête », résume d'emblée la policière, qui a démêlé l'affaire de ce quinquagénaire de Provins, poussé dans un escalier et dont le crime a été maquillé en accident, il y a quatre ans.

    Dans le box des accusés, comme devant les enquêteurs, les deux hommes jugés, depuis ce mardi et jusqu'à jeudi, « pour violences en réunion ayant entraîné la mort, sans intention de la donner », continuent à modifier leurs déclarations devant la cour d'assises de Seine-et-Marne.

    « C'est une toute nouvelle version ! » « Vous n'avez jamais dit cela. » Autant de phrases répétées par le président, alors que de nouvelles réponses sont apportées à presque chaque question.

    Des marginaux sous l'emprise de l'alcool

    L'affaire, sordide, se déroule dans un milieu de marginaux et pourrait être liée à un mystérieux ticket gagnant de jeux à gratter. On évoque un gain de 4 000 euros.

    Les deux accusés, Frédéric Jannic, 44 ans, et Ghislain Lefevre, 50 ans sont deux marginaux, à l'enfance chaotique et vivant des minimums sociaux. Ils admettent finalement une chose. Ils ont bu des verres au domicile de Jean-Marcel, 56 ans, la victime, un autre marginal.

    On est le 8 octobre 2015, dans l'après-midi. Ensuite, les versions divergent constamment.

    Autre certitude, la victime a été découverte agonisante, au pied de l'escalier de son appartement, le lendemain matin. Son décès, le jour suivant, est dû à une fracture de la boîte crânienne, avec enfoncement, et hémorragie cérébrale.

    Le défunt enterré dans le carré des indigents

    Il passe pour un accident, dans un premier temps. Sans famille, sans ressource, Jean-Marcel est enterré dans le carré des indigents. Trois semaines plus tard, une policière de Provins reçoit un ami de la victime, qui lui explique qu'il serait décédé dans des circonstances suspectes.

    La fonctionnaire se renseigne et se rend sur place. Rapidement, certaines déclarations l'amènent à la conclusion que « la pièce de l'appartement avait été bougée », explique-t-elle à la cour.

    L'utilisation du produit Bluestar permet de révéler des traces de sang, qui ont été effacées. « Il y en avait partout, témoigne l'enquêtrice du commissariat. La pièce a été nettoyée avant l'arrivée des sapeurs-pompiers venus secourir la victime. »

    Au fil des écoutes, les enquêteurs ciblent deux hommes. « Je n'ai jamais tué quelqu'un », clame Frédéric Jannic, déjà condamné à deux reprises pour des faits de viol et d'agression sexuelle.

    Un accusé : « J'ai entendu un boum quand je partais »

    « Je n'ai rien fait », assure son côté Ghislain Lefevre, avant d'admettre : « J'ai entendu un boum quand je partais ».

    « C'est surprenant, dans certaines auditions, il s'accuse. Est-ce qu'il protège M. Jannic ? », demande Me Fatthi Irguedi, l'avocat de Ghislain Lefevre.

    « On le dirait », répond la policière. D'autant que plusieurs proches décrivent « la peur bleue » de ce dernier pour son coaccusé. Ils évoquent aussi son incapacité à gérer la vue du sang, ce qui serait incompatible avec la pièce nettoyée après les coups qu'aurait subie la victime.

    Reste que les deux hommes, qui encourent jusqu'à 20 ans de prison, pouvaient se révéler « violents sous l'emprise de l'alcool ».

    Pour l'enquêtrice, les deux hommes ont porté des coups dans le petit appartement. « Ils n'y sont pas allés de main morte », commente-t-elle.