«On se croirait dans un supermarché» : plongée dans une cité aux mains des dealers, à Saint-Ouen

LE PARISIEN WEEK-END. Une petite barre HLM tranquille, non loin du métro et du commissariat, est devenue une plaque tournante du trafic de drogue. Comment tiennent les habitants ? Reportage à Saint-Ouen, en Seine-Saint-Denis.

 A 250 m du métro, au cœur de la ville de Saint-Ouen, la cité Charles-Schmidt et ses 113 logements.
A 250 m du métro, au cœur de la ville de Saint-Ouen, la cité Charles-Schmidt et ses 113 logements. Le Parisien

    Paul (le prénom a été modifié) ne sait plus quoi dire à ses enfants. Toutes les nuits, sous ses fenêtres, des guetteurs hurlent dès qu'apparaissent les forces de l'ordre. Leurs cris d'alerte – « Artena ! Artena ! » – résonnent dans l'immeuble, les cages d'escalier, et réveillent en sursaut les petits. « Ils me demandent pourquoi ce bruit, pourquoi ces gens qui s'égosillent, pourquoi la police. C'est traumatisant pour eux », soupire Paul, qui vit depuis une dizaine d'années dans la cité Charles-Schmidt, à Saint-Ouen (Seine-Saint-Denis), près de Paris. « Alors, moi, j'esquive, je parle d'autre chose. Mais ils grandissent, ils comprennent. »

    Grise et banale, cette barre de 113 logements – répartis sur trois escaliers – est devenue, au fil des décennies, le plus gros point de vente de drogue de la ville. Un « four », dans le jargon de la rue. La faute à la configuration des lieux. Minuscule cité, le 26, rue Charles-Schmidt est trop bien situé, à 250 m du métro Garibaldi, et dans un quartier qui n'a rien d'effrayant. Au contraire, il est sympathique et vivant, en pleine gentrification, avec ses boulangeries, ses bars, son magasin bio, son caviste et son marché couvert.