«Forêts urbaines» à Paris : une bonne idée, mais beaucoup de pièges à éviter

Des études récentes montrent que toutes les espèces d’arbres ne permettent pas de réduire la pollution et de rafraîchir les villes.

 La mairie de Paris veut implanter une petite forêt urbaine sur le parvis nord de la gare de Lyon.
La mairie de Paris veut implanter une petite forêt urbaine sur le parvis nord de la gare de Lyon. Ville de Paris / Apur / Céline Orsingher

    Dans l'optique de rendre l'air plus respirable dans la capitale, Anne Hidalgo, la maire de Paris, a annoncé jeudi dans Le Parisien l'implantation de quatre espaces boisés intra-muros d'ici l'année prochaine. Ombre, fraîcheur, absorption de polluants, biodiversité... Les bienfaits des arbres en ville sont largement documentés. Mais végétaliser demande de respecter des règles pour rendre efficace la climatisation de l'air et la captation des particules fines. Et même éviter de polluer davantage.

    Certains arbres polluent

    Car certains arbres, sous l'effet du rayonnement solaire, émettent des composés chimiques volatils qui, mêlés aux oxydes d'azote diffusés par les véhicules, amplifient la pollution à l'ozone pendant les pics de chaleur. Les coupables? Le platane, le peuplier ou encore diverses espèces de chênes et de saules. Un article publié en 2017 par des chercheurs allemands a démontré que les composés végétaux ont pu contribuer certains jours à hauteur de 60 % à la formation de l'ozone lors d'une forte canicule en 2006, à Berlin.

          Le Parisien Data / Victor Alexandre
    Le Parisien Data / Victor Alexandre Ville de Paris / Apur / Céline Orsingher

    Or, la carte actuelle des arbres à Paris montre un cocktail de l'ozone détonant sur les quais de Seine, où le trafic automobile rencontre peupliers et platanes. A l'inverse, les bons élèves — le frêne, le mélèze, l'aulne, l'érable ou le bouleau — y sont absents, alors qu'ils longent de larges tronçons du boulevard périphérique, très fréquenté également. Que dit le projet de la maire de Paris ? Sur les berges de Seine, Anne Hidalgo a expliqué qu'elle n'envisageait pas de « plantation d'arbres mais plutôt de l'herbe » pour en respecter la « minéralité ». Dans ce cas, il reste un levier pour réduire la formation d'ozone : la réduction du trafic, amorcée avec l'interdiction des voies sur berges aux voitures.

          Le Parisien Data / Victor Alexandre
    Le Parisien Data / Victor Alexandre Ville de Paris / Apur / Céline Orsingher

    La bonne espèce au bon endroit

    Si certains arbres sont davantage recommandés que d'autres pour limiter la pollution, il serait néfaste de limiter drastiquement le nombre d'espèces à implanter. Dans un guide remis notamment à l'Association des maires de France, le groupe de réflexion britannique Trees and Design Action Group recommande d'éviter les « situations de monoculture et de vulnérabilité aux maladies et aux parasites ». Il invite plutôt à choisir le « bon arbre au bon endroit » en fonction des caractéristiques du sol, du vent, de la pollution...

    Autre danger : les « canyons urbains » où stagneraient les particules dangereuses. Dans certaines rues étroites ou quand des immeubles imposants se font face, des feuillages denses peuvent empêcher la circulation de l'air et donc la dispersion des polluants. Mieux vaut des grands arbres dans les zones piétonnes que sur les artères embouteillées.

    Enfin, afin de soulager les nez et les yeux, déjà soumis à rude épreuve en ville, il est préférable d'éviter d'abuser près des habitations d'arbres allergisants comme le frêne, l'aulne ou le bouleau.

    Transformer les « îlots de chaleur urbains » en oasis de fraîcheur ne doit rien laisser au hasard non plus. Certaines espèces, pour résister à la sécheresse, retiennent leur eau... et en font moins bénéficier les humains ! Pour profiter d'un air rafraîchi dans les espaces publics, les arbres choisis devront être implantés de préférence au sud et à l'ouest du lieu. Ils offriront l'ombre idéale aux adeptes de la sieste, l'après-midi, quand les températures sont les plus fortes.