Une sur la visite de Macron : les journalistes de La Provence mettent fin à leur grève

Le directeur de la rédaction avait été momentanément mis à pied après la publication d’une Une du journal liée à la visite d’Emmanuel Macron à Marseille qui n’avait pas plu à la direction du journal.

« Nos infos, c’est pas du travail d’a(r)mateur », « la liberté de la presse à l’article de la mort » ou encore « On recoupe les infos, coupez pas les têtes », pouvait-on lire sur des pancartes brandies durant un rassemblement organisé ce lundi devant les locaux du journal. AFP/Nicolas Tucat
« Nos infos, c’est pas du travail d’a(r)mateur », « la liberté de la presse à l’article de la mort » ou encore « On recoupe les infos, coupez pas les têtes », pouvait-on lire sur des pancartes brandies durant un rassemblement organisé ce lundi devant les locaux du journal. AFP/Nicolas Tucat

    Les journalistes de La Provence ont finalement décidé ce lundi de mettre fin à leur grève déclenchée en réaction à la mise à pied du directeur de la rédaction après une Une sur la visite d’Emmanuel Macron jugée « ambiguë » par la direction.

    Plusieurs dizaines de journalistes s’étaient pourtant rassemblés ce même jour devant les locaux du quotidien à Marseille pour réclamer des garanties sur « l’indépendance de la rédaction ».

    Ce rassemblement avait été maintenu malgré la réintégration du directeur de la publication, Aurélien Viers, mis à pied vendredi pour cette Une, mesure qui avait entraîné une grève des journalistes.

    « Nous attendons des garanties de la part de la direction de la Provence sur l’indépendance de la rédaction », a notamment réclamé Sylvain Pignol, élu SNJ au CSE de ce journal régional, qui est détenu par l’armateur CMA CGM du milliardaire Rodolphe Saadé, basé à Marseille. « Nos infos, c’est pas du travail d’a (r) mateur », « la liberté de la presse à l’article de la mort » ou encore « On recoupe les infos, coupez pas les têtes », pouvait-on lire sur des pancartes brandies durant le rassemblement.

    Confrontée à une grève des journalistes depuis vendredi, la direction a décidé dimanche de réintégrer Aurélien Viers, qui avait été mis à pied suite à la Une du quotidien jeudi, barrée du titre « Il (Emmanuel Macron, NDLR) est parti et nous, on est toujours là… »

    « Il peut y avoir des erreurs de commises »

    La direction estimait que cette phrase, attribuée en pages intérieures à un habitant d’une cité paupérisée de Marseille où s’était rendu le chef de l’État mardi pour une opération contre le trafic de drogue, pouvait donner l’impression que le journal donnait la parole à des trafiquants.

    Aurélien Viers était présent ce lundi devant le journal. « J’ai obtenu des garanties suffisamment fortes dimanche pour revenir au travail et me dire que je pouvais travailler avec la rédaction en toute indépendance éditoriale, sans pression », a-t-il déclaré.

    Concernant la Une il a expliqué : « Il y a eu une erreur dans le fait d’écrire une citation sans savoir qui est l’auteur, il y a une ambiguïté (…) donc je pense qu’on peut reconnaître ça. C’est pas grave, on fait 364 Unes dans l’année, il peut y avoir des erreurs de commises ».

    La grève prend fin

    Sylvain Pignol a lui expliqué que les organisations syndicales de La Provence réclamaient « la publication d’un texte à nos lecteurs, signé de la rédaction, qui explique les raisons de notre mouvement et qui affirme qu’il n’y a pas eu d’erreur ».

    Il faut par ailleurs « renforcer » la charte d’indépendance et de déontologie, « notamment avec un dispositif qui doit permettre de ne pas décider de mettre à pied le directeur de la rédaction sans aucune discussion, sans aucune concertation », a-t-il réclamé.

    À l’issue d’une assemblée générale organisée dans l’après-midi, 94 votants se sont prononcés pour la reprise du travail, tandis que 71 journalistes ont voté en faveur de la poursuite du mouvement de grève.

    La Une n’avait « rien de scandaleux »

    « On n’est pas une rédaction qui a une culture sociale hyper développée, mais par contre sur les valeurs, on ne veut pas transiger », a expliqué Sylvain Pignol, élu SNJ au CSE, durant le rassemblement, en indiquant qu’avant 2023, le quotidien régional n’avait « connu dans son histoire qu’un seul jour de grève ». La une sur la visite d’Emmanuel Macron « n’avait rien de scandaleux, était parfaitement intègre sur le plan déontologique », a-t-il affirmé.

    Après avoir repris le groupe La Provence en 2022, Rodolphe Saadé a pris une participation dans M 6, racheté La Tribune et annoncé la semaine dernière le rachat d’Altice Media, maison mère de BFMTV notamment.

    S’ils se sont « félicités de la réintégration du directeur de la rédaction de La Provence », les sociétés des journalistes de BFMTV et RMC, ainsi que les syndicats d’Altice Media (SNJ, CGT et SNME-CFDT) ont estimé dimanche dans un communiqué qu’en « intervenant directement auprès du directeur de la publication, l’actionnaire a franchi une ligne rouge » et se disent « prêts à se mobiliser » si « l’indépendance des rédactions et la liberté éditoriales » étaient à nouveau menacées.