Le cri d’alarme de la Sécurité routière : «Il y a un relâchement général de tous les usagers»

Le nombre de morts sur la route a explosé au mois de mai, selon les dernières données, publiées ce mardi. C’est «très préoccupant», assure David Julliard, délégué adjoint interministériel à la Sécurité routière.

Excès de vitesse, téléphone au volant, absence de port de la ceinture de sécurité... Les causes de cette dégradation de sécurité routière sont nombreuses. (Illustration) LP/Arnaud Journois
Excès de vitesse, téléphone au volant, absence de port de la ceinture de sécurité... Les causes de cette dégradation de sécurité routière sont nombreuses. (Illustration) LP/Arnaud Journois

    Ce sont 293 personnes qui sont mortes sur les routes au mois de mai. 21 % de plus qu’en mai 2019, le mois de référence. Le nombre de motards qui a perdu la vie a presque doublé ; pour les cyclistes, il a été multiplié par quatre. Les chiffres publiés ce mardi interpellent. David Julliard, le délégué adjoint interministériel à la Sécurité routière, les analysent.

    Les derniers chiffres pour le mois de mai sont très mauvais…

    DAVID JULLIARD. C’est vrai, ils sont très préoccupants. 293 tués sur les routes, c’est 50 de plus qu’en mai 2019. Nous comparons à cette année-là, car 2020 et 2021, marquées par des restrictions sanitaires, ne sont pas représentatives. Si l’on regarde dans le détail, le nombre d’accidents et le nombre de blessés ont également augmenté, mais la hausse est encore plus marquée pour les tués. Les accidents ont donc été plus graves.

    Comment l’expliquer ?

    C’est difficile à dire pour ces chiffres, qui ne sont que provisoires. Pour disposer des définitifs, nous devons attendre trente jours, et il faut encore remonter toutes les causes stabilisées d’accident. Mais l’on sait que de manière classique, quand la météo est bonne, comme ça été le cas ce mois de mai, l’effet est négatif sur l’accidentalité. Parce que les usagers sont aussi plus nombreux sur les routes. Je crois aussi qu’il y a une forme de dégradation, de relâchement du comportement de tous les usagers.



    À quelques semaines des grands départs pour les vacances d’été, faut-il s’inquiéter ?

    À la Sécurité routière, nous allons avoir des campagnes de communication. Il faut continuer de répéter des conseils de bon sens, parfois rudimentaires. Ainsi tout le monde sait que le port de la ceinture de sécurité est obligatoire, mais des usagers l’oublient ou s’en affranchissent et le résultat est terrible : des centaines et des centaines de tués. Pareil pour l’usage du téléphone portable, interdit quand on conduit une voiture, un deux roue motorisé ou un vélo.

    Les cyclistes et les motards paient un tribut particulièrement lourd. Pourquoi selon vous ?

    Là encore, c’est lié au relâchement des comportements, mais pas uniquement de ces usagers fragiles. Ce qui est marquant, c’est que la hausse a lieu y compris en ville, on voit que les 22 cyclistes tués en plus l’ont été en agglomération. C’est la moitié de l’augmentation du nombre de cyclistes qui ont perdu la vie. Il faut faire attention quand on est soi-même un usager fragile ou quand on circule avec des usagers fragiles. Prenez le vélo, les accidents mortels se produisent en majorité lors de collision avec une voiture, un poids lourd ou dans l’angle mort d’un bus. Mais un tiers tout de même des cyclistes tués sur la route meurent d’une chute, seuls. Alors je tiens à rappeler cette règle importante, hors agglomération pour doubler un cycliste, il faut laisser 1m50 minimum d’écart.

    Après deux ans de pandémie, pendant laquelle on a moins circulé, sommes-nous moins « immunisés » contre les mauvais comportements sur la route ?

    Ce n’est pas impossible. Immédiatement après le confinement, on avait constaté une hausse des grands excès de vitesse. C’est même assez probable que le relâchement des contraintes sanitaires aboutisse au relâchement sur la route.