Climat : des ONG veulent attaquer la France en justice pour inaction

Après le maire de Grande-Synthe (Nord) qui attaque les pouvoirs publics pour «inaction» en matière de réduction des gaz à effet de serre, quatre associations écologistes déposent ce mardi un recours contre l’Etat.

 Les ONG soulignent que les « émissions de la France en 2016 et 2017 sont reparties à la hausse et que la France n’atteindra pas son objectif d’émissions de gaz à effet de serre en 2020 fixé par l’Union européenne ».
Les ONG soulignent que les « émissions de la France en 2016 et 2017 sont reparties à la hausse et que la France n’atteindra pas son objectif d’émissions de gaz à effet de serre en 2020 fixé par l’Union européenne ». AFP/Philippe Lopez

    Magali enseigne sur l'île de Saint-Martin et a vécu sans toit pendant une longue période après le passage du cyclone Irma en 2017. Du fait de sécheresses à répétition, Maurice, lui, voit années après années ses champs de lavande dépérir dans la Drôme. Quant à Jean-François, mytiliculteur sur l'île d'Oléron, il constate avec dépit que sa production de moules est de plus en plus affectée par la dégradation de leur milieu naturel. Magali, Maurice et Jean-François ont décidé de s'associer au recours en justice annoncé ce mardi par quatre associations écologistes contre l'Etat français pour « inaction face au changement climatique ».

    LIRE AUSSI > La planète brûle vraiment

    La Fondation pour la Nature et l'Homme (FNH, ex-fondation Hulot), Greenpeace France, Oxfam et Notre affaire à tous envoient ce mardi un courrier d'une quarantaine de pages au président de la République, à Matignon ainsi qu'à plusieurs ministres pour dénoncer le « non-respect de ses obligations internationales, européennes et françaises en la matière ». « Alors que nous connaissons depuis les années 1960 les causes du dérèglement climatique, les gouvernements français successifs ont toujours reporté à plus tard les décisions courageuses qui permettent d'éviter la catastrophe, dénoncent les quatre ONG. Les COP se succèdent et la France ne se donne pas les moyens d'aller plus loin sur le climat. »

    Les émissions repartent à la hausse

    Les ONG soulignent en effet que les « émissions de la France en 2016 et 2017 sont reparties à la hausse et que la France n'atteindra pas son objectif d'émissions de gaz à effet de serre en 2020 fixé par l'Union européenne ».

    Si l'Elysée ou Matignon ne répondent pas au courrier des associations ou que la réponse est jugée « insatisfaisante », les ONG déposeront en mars un recours devant le tribunal administratif de Paris. « Je les soutiens car si nous ne sommes pas ceux qui légifèrent, nous sommes ceux qui subissent l'inaction », explique le lavandiculteur drômois Maurice Feschet.

    François, pêcheur sur l'île de Sein, est lui aussi favorable à cette action contre l'Etat « parce que la montée des eaux est une réalité visible sur notre île ». Ce type de poursuites n'est pas une première. Comme nous le révélions le mois dernier, le maire EELV de Grande-Synthe (Nord) a lui aussi engagé une action contre l'Etat. « Partout dans le monde, des citoyens saisissent la justice, constatent les associations. Aux Pays-Bas, un tribunal a ordonné à l'Etat de rehausser ses objectifs de réduction des émissions de gaz à effet de serre au nom de la protection des droits de ses citoyens. »

    Pousser l'État à agir

    Pour l'ancienne ministre écologiste Cécile Duflot, aujourd'hui directrice générale d'Oxfam France, « la France est à la dérive sur ses objectifs ». « Notre but est de pousser l'Etat à agir et de lui demander comment il compte réparer les dommages provoqués en France par le réchauffement dans les champs de producteurs de lavande, de viticulteurs ou de personnes qui vivent en bord de mer et subissent la montée des eaux ». Les quatre associations en appellent aux citoyens qui peuvent soutenir cette initiative sur le site www.laffairedusiecle.org.

    La présidente de la FNH, Audrey Pulvar, est persuadée que cette action peut faire bouger l'Etat : « La justice européenne a déjà condamné la France à agir pour une meilleure qualité de l'air. » La cour administrative d'appel de Nantes avait de son côté condamné la France pour ses insuffisances et retards dans le dossier des algues vertes. « Plus les citoyens seront nombreux à nous soutenir, mieux ce sera », insiste celle qui a pris la succession de Nicolas Hulot au sein de sa Fondation.