20% des lits fermés à l’hôpital faute de soignants : le gouvernement annonce le lancement d’une «enquête»

Près d’un lit sur cinq serait fermé dans les grands hôpitaux publics de France, selon une enquête menée par Jean-François Delfraissy, président du Conseil scientifique et du Comité consultatif national d’éthique (CCNE). Gabriel Attal annonce ce mercredi une « enquête ».

Les hôpitaux sont en manque d’infirmières, d’aides-soignantes mais aussi de médecins titulaires. LP / Carole Sterlé
Les hôpitaux sont en manque d’infirmières, d’aides-soignantes mais aussi de médecins titulaires. LP / Carole Sterlé

    L’hôpital public va-t-il craquer ? Sur le papier, près d’un lit disponible sur 5 est actuellement fermé dans les hôpitaux publics de France, selon une enquête menée par Jean-François Delfraissy, président du Conseil scientifique et du Comité consultatif national d’éthique (CCNE) et relayée par Libération. Une situation provoquée entre autres par la pénurie d’infirmières, d’aides soignantes et de médecins épuisés par une crise sanitaire sans fin.

    Un constat d’autant plus préoccupant que déjà en 2020, 5 800 lits avaient été fermés, selon un rapport de la Direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques (Drees), publié en septembre et évoqué par le quotidien. Depuis 2013, ce sont en tout 27 000 lits d’hospitalisation qui ont été fermés, soit une baisse de 6,5 % en sept ans, note encore l’étude. Les grands centres hospitaliers seraient donc au bord de la rupture.

    A tel point qu’au sortir du Conseil des ministres, Gabriel Attal, porte-parole du gouvernement a annoncé le lancement d’une « enquête auprès de l’ensemble des établissements de santé pour objectiver la situation et son exploitation est en cours ». Et de préciser : « Les chiffres seront communiqués prochainement ».

    « Une crise des valeurs »

    « Je ne sais pas comment on va passer l’hiver. Nous sommes au bord du précipice », s’inquiète auprès du journal le Dr Patrick Goldstein, chef des urgences du CHU de Lille et patron du Samu du Nord. Le docteur pointe un « mal-être massif, une démotivation » qui expliquent ces départs en série de soignants et les difficultés de recrutement. « C’est ce que j’appelle une crise des valeurs, indique-t-il. Le monde d’aujourd’hui à l’hôpital est pire que celui d’hier ».

    Selon la Conférence des présidents de commission médicale d’établissement de CHU, l’absentéisme gagne effectivement du terrain. Et la pandémie n’a rien arrangé. La moyenne nationale tournerait autour de 11 %, « alors que nous étions autour d’une moyenne nationale de 8 % à 9 % avant l’épidémie de Covid », précise son président François-René Pruvot. À Paris, cet absentéisme pointe à 9,5 % alors qu’il était de 8 % avant la crise sanitaire, relève encore Libération.



    Pour l’heure, les inquiétudes se concentrent surtout sur le personnel infirmier. Comme à Marseille : « Il nous manque 120 infirmières, estime le professeur Jean-Luc Jouve. Nous avions un manque chronique de 60 infirmières avant le Covid, mais aujourd’hui il a donc doublé. Avec une grosse difficulté chez les infirmières spécialisées ».

    « Je n’ai pas de médecins cachés dans le placard »

    Interrogé dans le journal, le ministre de la Santé Olivier Véran ne nie pas les difficultés, mais refuse pour autant d’en confirmer l’ampleur. « Oui, il y a un certain nombre d’unités dans des hôpitaux qui sont obligées de fermer temporairement, ou de réduire la voilure, faute de soignants, faute surtout de pouvoir en recruter », concède-t-il.

    Et d’ajouter : « Je n’ai pas de médecins cachés dans le placard, ni des infirmières qui attendent dans une salle qu’on appuie sur un bouton pour les déployer dans les hôpitaux. Je ne vais pas mentir aux gens. Il y a des décisions qui n’ont pas été prises il y a vingt ans, on les paye aujourd’hui. On ne réécrit pas l’histoire en un claquement de doigts, mais on peut inverser la vapeur maintenant ».

    Ce mercredi à la mi-journée, Gabriel Attal a de son côté précisé qu’il existait « des problèmes de recrutement » de soignants et aussi avancé la thèse d’un « impact dû à l’épidémie » de Covid qui a poussé à « la suspension de lits en chambres doubles ».