Sûreté nucléaire : la France face à un risque de « paralysie »

    L’Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN) met en avant les dangers que ferait peser sa suppression, prévue par le gouvernement.

    Croissy-sur-Seine (Yvelines), le 15 octobre 2022. L'IRSN traite des données venues de toute l'Europe. LP/Mehdi Gherdane
    Croissy-sur-Seine (Yvelines), le 15 octobre 2022. L'IRSN traite des données venues de toute l'Europe. LP/Mehdi Gherdane

      Le Conseil d’administration (CA) de l’Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN) a voté jeudi une motion alertant sur un risque de « paralysie » de la sûreté nucléaire. Ce danger proviendrait de la suppression de l’institut, qui est prévue dans un projet gouvernemental de réorganisation.

      « Le conseil d’administration alerte le gouvernement et appelle à la vigilance sur le risque de départs du personnel de l’IRSN pouvant entraîner une paralysie du système de contrôle en radioprotection et sûreté nucléaire », indique cette motion votée à une très large majorité (18 voix pour, 4 contre, 2 abstentions), selon l’intersyndicale de l’institut.

      En pleine relance du nucléaire français, le gouvernement a annoncé le 8 février son intention de supprimer l’IRSN, vigie et expert du risque radiologique, pour « fluidifier les processus d’examen » : experts et scientifiques rejoindraient les équipes de l’Autorité de sûreté nucléaire (ASN, le gendarme du nucléaire civil) et du Commissariat à l’énergie atomique (CEA).

      Le soutien de certains représentants de l’État

      Les syndicats redoutent la fin de la structure « duale » du système de sûreté français (ASN/IRSN), certains y voyant une manière de mettre au pas l’institut. Ils craignent également de voir partir au CEA la branche recherche de l’IRSN, qui alimentait l’expertise.

      Le Conseil d’administration de l’IRSN compte 25 membres, dont une députée, un sénateur, dix représentants de l’État, cinq personnalités qualifiées nommées par décret et choisies en raison de leur compétence dans le domaine d’activité de l’Institut, et huit représentants élus des personnels de l’établissement. Si cette motion a une « portée symbolique », au regard de la composition du CA, « cela veut dire que des représentants de l’État ont voté pour cette résolution », selon l’intersyndicale, qui y voit « une première reconnaissance de ce que nous défendons ».

      Une « diaspora » des experts de l’IRSN « aurait pour conséquence de priver la France de sa capacité de recherche et d’expertise à un moment crucial marqué par les défis de l’allongement de la durée de vie des réacteurs existants et de la création de réacteurs de nouvelle génération », souligne la motion. Le CA rappelle également au gouvernement dans cette motion le rôle de l’IRSN dans « la protection des travailleurs, de la population et de l’environnement contre les rayonnements ionisants avec un large spectre, la gestion de crise et des situations post-accidentelles, les usages de la radioactivité dans les domaines industriels, médical et militaire ».

      Les syndicats entendent faire part de leurs craintes à la ministre de la Transition énergétique, Agnès Pannier-Runacher, qui doit les recevoir ce vendredi. Lundi, ils prévoient de revenir un peu plus nombreux afin de manifester sous les fenêtres du ministère avec les salariés en grève ce jour-là.