Tour de France : Izoard, un col pour l'histoire

Jean Bobet, frère de Louison, triple vainqueur à l'Izoard, nous raconte les secrets de ce col mythique.

Jean Bobet, frère de Louison Bobet, nous livre les secrets du col de l'Izoard.
Jean Bobet, frère de Louison Bobet, nous livre les secrets du col de l'Izoard. « L’ÉQUIPE »/ALEXIS REAU

    Sa voix est douce et chantante. A 87 ans, Jean Bobet (2 participations au Tour en 1955 et 1957) aime à se souvenir des exploits de son frère, Louison, mort en 1983, à 58 ans, après avoir remporté trois Tour de France (1953, 1954 et 1955) et s'être imposé à trois reprises au sommet de l'Izoard. L'élégant Louison Bobet dont la mémoire est perpétuée avec une ligne de vêtements pour cyclistes qui porte son nom, dont un nouveau maillot Izoard 53.

    Que représente pour vous cette arrivée au col d'Izoard ?
    Jean Bobet.
    L'Izoard, c'était le jardin de Louison. Ça avait mal commencé. Dans le Tour 1948, il n'avait que 23 ans, il portait le maillot jaune depuis dix jours et il a eu un accident mécanique au pied de l'Izoard. Or, il n'était pas soutenu par le directeur de l'équipe de France et on lui a offert un vélo qui n'était pas le sien. Il a monté l'Izoard avec le vélo de Jean Robic (NDLR : le vainqueur du Tour 1947 était plus petit que lui).

    Comment a-t-il construit ses victoires en 1950, 1953 et 1954 ?
    La technique de Louison était toujours la même. Il roulait en tête dans la vallée du Guil en faisant attention à ne laisser partir aucun favori. A la sortie d'Arvieux, c'est là que tout commençait. Dans cette partie de l'Izoard, bizarrement il y a une longue ligne droite de 1 200 à 1 500 m. C'est là, à chaque fois, qu'il démarrait. Enfin, je m'exprime mal : Louison ne démarrait jamais. Il n'était pas de ces grimpeurs saccadés et nerveux. Il se mettait en tête et roulait sans se retourner. C'est comme ça qu'il a lâché bien des gens, dont le dernier, en 1954, était Kübler.

    Le décor était-il le même qu'aujourd'hui ?
    Oui. Simplement, dans ces années-là, à la sortie du village d'Arvieux, la route n'existait plus. C'était une route de terre gravillonnée... Tout ça a bien changé, mais loin de moi l'idée de vous faire entendre que c'était beaucoup plus dur. Je dirais même que c'est peut-être de plus en plus dur.

    Que vous inspire Romain Bardet ?
    Alors là monsieur, Romain Bardet c'est mon chouchou depuis six ans ! C'est un coureur qui m'intéresse beaucoup. J'avais été surpris parce qu'il était mal à l'aise quand on venait lui dire qu'il était l'intellectuel du peloton. Ça le gênait. Ça m'a touché parce que c'est ce dont je souffrais moi-même quand j'étais coureur. Dans les années 1950, un licencié de lettres, c'était très rare. Et Warren Barguil, je le trouve épatant.