Go-fast sur l’A 10 : 2 à 4 ans de prison pour les convoyeurs de résine de cannabis

Un peu plus d’un an après la saisie de 505 kg de résine de cannabis au péage de Saint-Arnoult-en-Yvelines, les six auteurs de ce go-fast organisé depuis l’Espagne ont été condamnés par le tribunal correctionnel de Versailles à des peines allant de 2 à plus de 4 ans.

Saint-Arnoult-en-Yvelines. Parmi les six personnes condamnées, certaines ont participé à plusieurs convois entre le 6 septembre et le 9 novembre 2022. LP/Aurélie Audureau
Saint-Arnoult-en-Yvelines. Parmi les six personnes condamnées, certaines ont participé à plusieurs convois entre le 6 septembre et le 9 novembre 2022. LP/Aurélie Audureau

    « De toute façon, frérot, Inch’Allah, je vais arrêter. Je fais celui-là et peut-être un après, mais c’est fini ! » Sofiane, 29 ans, habitant d’Argenteuil (Val-d’Oise), ne croyait pas si bien dire. Il a été interpellé quelques heures après ce message, adressé à l’un de ses complices, par les douanes alors qu’il transportait 505,27 kg de résine de cannabis dans une BMW.

    Dix-huit mois après cette folle expédition nocturne depuis l’Andalousie jusqu’en Île-de-France, lui et quatre autres participants à ce go-fast – un sixième fait l’objet d’un mandat d’arrêt – se sont retrouvés mercredi devant le tribunal correctionnel de Versailles.

    Ils ont entre 25 et 29 ans, certains se connaissent depuis le lycée, d’autres pas. Il y a l’équipe du sud et celle de l’Île-de-France. Tous les six, dont une jeune femme, ont été condamnés pour leur participation à ce go-fast, d’une valeur selon les douanes de plus de 1,5 million d’euros, à des peines allant de 2 à plus de 4 ans de détention. Les enquêteurs imputent à certains d’entre eux la participation à plusieurs convois entre le 6 septembre et ce fameux 9 novembre 2022.

    Le transporteur interpellé près du péage de Saint-Arnoult

    Ce soir-là, en pleine nuit, une BMW, conduite par Sofiane déboule au péage de Saint-Arnoult-en-Yvelines. Les douanes décident de contrôler le véhicule. Le conducteur force la barrière de péage. Les fonctionnaires ont juste le temps de déployer une herse, trois pneus sont crevés, mais l’automobiliste poursuit sa course avant de percuter un véhicule à la hauteur de Boinville-le-Gaillard.

    L’homme s’extirpe de sa voiture et prend la fuite à pied. Il est interpellé quelques instants plus tard. À l’intérieur de la grosse cylindrée, 12 valises marocaines, des cabas contenant au total… une demi-tonne de résine de cannabis.



    La section de recherches de la gendarmerie de Versailles, chargée de l’enquête, parvient, grâce aux plaques d’immatriculation des véhicules, aux ADN retrouvés dans la BMW, à la géolocalisation et à la téléphonie à identifier les participants à ce go-fast.

    Leur mission : « protéger le convoi et percuter les voitures de police si besoin »

    Outre Sofiane, le transporteur de la résine, qui écope de 53 mois de prison dont 24 avec un sursis probatoire de deux ans, il y a Sami, 28 ans, et Hamza, 27 ans, l’équipe d’Île-de-France (Stains et Argenteuil). À bord d’une Seat Leon, voiture de location, ils sont chargés de « protéger le convoi et si besoin percuter les véhicules de la police ». Ils sont condamnés pour le premier à 3 ans de prison ferme et pour le second à trois ans dont deux avec sursis probatoire.

    Il y a aussi Anaïs, 25 ans, de Saleilles (Pyrénées-Orientales) ouvreuse du convoi, mais dont la Volkswagen tombe en panne et Mathieu, 25 ans, de la même commune qui lui viendra en secours, après avoir « sécurisé » le passage du véhicule à la frontière espagnole. Enfin Djilalli, 27 ans, père de 4 enfants, impliqué également, chez qui on retrouvera une compteuse à billets « poussiéreuse et dans un garage » selon son propriétaire. Il est relaxé pour l’ensemble des faits mais condamné à 4 mois de prison pour ne pas avoir donner les codes de déblocage de son téléphone, son ami d’enfance Mathieu est condamné à 3ans dont un avec sursis et la jeune femme à 42 mois d’emprisonnement, dont 20 avec sursis.

    Tous reconnaissent avoir participé à ce convoi, mais tous refusent d’en dire plus sur leur implication, leur rôle précis et restent évasifs sur les précédents go-fasts. Les communications sous pseudo sur la messagerie cryptée Signal, ce ne sont pas eux, assurent-ils. « C’est une enquête 2.0, purement technique », dénonce un avocat de la défense, assurant que son client n’est pas le soi-disant Fred, un peu trop bavard dans ses messages. Un autre conteste le tapissage organisé pour l’identification de l’acheteur de la BMW au nom d’une entreprise fantôme.

    Payés entre 50 et 1 000 euros, parfois via Vinted

    Sofiane explique avoir participé car il devait de l’argent. « Je n’étais pas au courant de la quantité que je transportais », assure-t-il. Mathieu, sans emploi, dit avoir été rémunéré 50 euros pour le passage à la frontière. « C’est peu cher payé » assure la présidente. « C’est juste une demi-heure », lui répond-il. Anaïs, qui travaillait dans le prêt-à-porter, indique avoir été rémunérée entre « 300 et 700 euros, reçus par Vinted ». Hamza « entre 800 et 1 000 euros trouvés dans la boîte à gants du véhicule ». Aucun ne dit connaître le commanditaire.

    « Pour des sommes dérisoires, on participe à ce désastre social qu’est le trafic de stupéfiants. Tous expliquent être des petites mains avec un commanditaire jamais identifié », souligne le procureur, qui avait requis pour certains des peines plus importantes.