L’A13 paralysée par les taxis près de Paris

Les chauffeurs de taxi réclament une meilleure prise en charge par la CPAM des trajets de patients. Ceux des Yvelines se sont réunis ce lundi matin à Louveciennes et sur l’aire de Morainvilliers pour bloquer l’autoroute au niveau du Chesnay-Rocquencourt.

Le Chesnay-Rocquencourt, ce lundi. Environ 150 chauffeurs de taxis se sont mobilisés en bloquant l'A13, en soutien des agriculteurs et pour réclamer de meilleurs remboursements des courses de santé auprès de l'assurance maladie, leurs frais ayant fortement augmenté.
Le Chesnay-Rocquencourt, ce lundi. Environ 150 chauffeurs de taxis se sont mobilisés en bloquant l'A13, en soutien des agriculteurs et pour réclamer de meilleurs remboursements des courses de santé auprès de l'assurance maladie, leurs frais ayant fortement augmenté.

    « Ça fait onze ans que je suis taxi et aujourd’hui je gagne moins en travaillant plus. Je fais 11 à 14 heures par jour. » Stationnée depuis 6h30 avec 80 de ses collègues sur le parking du Pacha Club, à Louveciennes (Yvelines), Isabelle attend le top départ pour l’opération escargot lancée par les fédérations de taxis contre la réforme de la Cnam. Une manifestation lancée alors que les agriculteurs prévoient aussi des blocages sur l’A13, à hauteur du péage de Buchelay.

    Tony, l’organisateur pour cette partie à l’ouest de Paris, a tout prévu. Dans son coffre des thermos de café pour qui veut et de la sono pour mettre l’ambiance. On discute enfant, charges sociales, licence et de la mine, autrement dit les courses en ville. Certains chauffent un peu l’ambiance en klaxonnant ou en jetant ici ou là des pétards. 7h30, Tony donne les consignes de sécurité : « Pas de violence, on se suit à 1,50 m et on respecte les règles. Tout le monde monte dans sa voiture. »

    Finalement, le cortège s’ébranle une heure plus tard, pour rejoindre sur l’A13 et gonfler les rangs de la cinquantaine de taxis partis une heure plus tôt de l’aire de repos de Morainvilliers. « Nous nous sommes positionnés en amont pour informer les automobilistes du ralentissement », assure la Société des autoroutes Paris-Normandie (SAPN).

    Une perte d’environ 20 % par course avec des patients

    La raison de leur colère : leur nouvelle convention avec la Cnam sur le transport sanitaire, qui doit entrer en vigueur au 1er février. Elle modifie notamment les tarifications de la prise en charge des frais de transport des patients

    « Cette année, il n’y a pas eu de concertation sur cette convention. L’État a décidé une hausse de nos tarifs de 4 à 5 %, mais la Cnam dans sa convention a décidé qu’elle ne pourrait pas dépasser 0,7 à 1 % pour elle et de surcroît elle a déplafonné les remises, explique Nagib Laghroudi, président du syndicat des taxis des Yvelines. Aujourd’hui, un chauffeur de taxi fait une remise de 20 % du prix de la course à la sécurité sociale. Et si on n’accepte pas, on est déconventionné. »



    De quoi inquiéter ces professionnels de la route, qui ne savent à quelle sauce ils vont être mangés. « En gros, ils veulent faire travailler les taxis au rabais et parquer les patients, résume Bekir, un taxi parisien.

    Avec les charges importantes « je suis toujours à découvert »

    Isabelle, elle, voit, encore une nouvelle ponction sur son salaire. « Aujourd’hui, quand on fait une course à 100 euros pour la Cnam, on est payé 80 euros. Sur une course on perd 20 %, c’est beaucoup et si en plus il n’y a plus de limite, lâche-t-elle dégoûtée.

    « En tant que femme seule, c’est très dur. Je suis toujours à découvert. On a des charges importantes : l’emprunt sur la voiture, sur la licence, le carburant… » énumère-t-elle. Je n’ai pas l’habitude de me plaindre, mais si on accepte ça, on ne pourra plus vivre décemment. On nous met le couteau sous la gorge, confie la professionnelle, qui parvient à se dégager un salaire d’environ 1 500 euros pour 50 heures de travail hebdomadaire.

    Aigremont, ce lundi matin.
    Aigremont, ce lundi matin.

    D’autres de ses collègues parviennent tout juste à se payer le Smic. Et ils broient du noir pour l’avenir, car le transport sanitaire représente 60 à 80 % de leur chiffre d’affaires. Or, il serait aussi question de le réorganiser.

    Le préfet recommande « d’éviter les déplacements non indispensables »

    « La Cnam veut mettre en place des plateformes pour le transport des patients. Ils ne pourront plus choisir leur taxi et seront parfois plusieurs dans la même voiture, précise Tony, dégoûté. Les patients, ce n’est pas du bétail. On tisse des liens. Moi, j’ai un patient que j’ai suivi durant des années. Je le conduisais plusieurs fois par semaine à l’hôpital pour ses dialyses. Je faisais en sorte d’être toujours disponible pour lui. Il est décédé la semaine dernière. Je vais aller à son enterrement. C’est aussi ça être taxi », poursuit Tony, qui sur l’A3 était en tête de cortège. Derrière cette centaine de taxis, plus de vingt kilomètres de bouchons.

    Au regard de la mobilisation conjointe des taxis et des agriculteurs, le préfet des Yvelines invite les habitants à « privilégier les transports en commun pour les déplacements en Île-de-France ». Il recommande également « d’éviter les déplacements non indispensables ». Des points de blocage sont en effet prévus dès 14 heures sur l’A10 (échangeur de Longvilliers) et sur l’A13 (péage de Buchelay).