RECIT. Explosions de bipeurs au Liban : comment s’est déroulée cette attaque inédite qui vise directement le Hezbollah ?

Il est 15h30 à Beyrouth, un mardi comme les autres. Dans un supermarché, un homme s’affaire à choisir des fruits et légumes, un sac plastique à la main. Une sonnerie semble provenir de sa poche, mais il n’y prête pas attention, accaparé à faire ses courses. En un dixième de seconde, il s’effondre. L’explosion, violente et inattendue, le projette au sol. Le silence est brisé par la panique des clients autour de lui, qui s’écartent rapidement, sidérés par ce qui vient de se produire.

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Cette scène, capturée par une caméra de surveillance, est rapidement diffusée sur les réseaux sociaux, mais ce n’est qu’un aperçu de l’horreur qui se déroule simultanément à travers tout le Liban, notamment dans la plaine de la Bekaa, fief du Hezbollah.

De nouvelles explosions de talkies-walkies du Hezbollah

Alors que le pays tente de se remettre de cette stupéfiante vague d’explosions, de nouveaux incidents surviennent ce mercredi 18 septembre. Des talkies-walkies du Hezbollah explosent dans la banlieue sud de Beyrouth, ainsi que dans le sud et l’est du Liban, faisant au moins trois morts et plusieurs dizaines de blessés. Les explosions ont notamment eu lieu lors des obsèques de membres du Hezbollah, tués la veille dans les incidents impliquant des bipeurs.

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Le bilan total est lourd : 12 morts, dont des enfants, et près de 2 800 blessés, selon les dernières estimations du ministère de la Santé libanais. Les hôpitaux, rapidement débordés, peinent à accueillir toutes les victimes. Certains, trop grièvement atteints, sont transférés en Syrie et en Iran pour y recevoir des soins. Parmi les blessés, l’ambassadeur d’Iran au Liban, Mojtaba Amini, a perdu un œil. L’onde de choc n’épargne personne, même pas les enfants, comme cette fillette de 9 ans tuée dans l’est du pays par l’explosion du bipeur de son père.

L’hypothèse d’une attaque d’Israël avancée

Une attaque qui vise directement les membres du Hezbollah, tous équipés de bipeurs. "Ils ont pu cibler toute l’organisation, car chaque membre du Hezbollah, y compris certains représentants iraniens, en possédait un", explique Elizabeth Sheppard Sellam, chercheuse en relations internationales. En février, le chef du mouvement chiite libanais, Hassan Nasrallah, avait exhorté ses partisans à "enterrer" leurs téléphones portables jugés trop vulnérables au piratage et à l’espionnage, leur conseillant de se tourner vers des solutions plus rudimentaires comme les bipeurs.

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Une solution qui s’est révélée être un piège mortel. Fabriqués par la société taïwanaise Gold Apollo, ils avaient été adoptés par le Hezbollah. Mais les premières enquêtes montrent que ces appareils ont été modifiés avant leur arrivée au Liban, il y a de cela quelques mois.

Bien qu’Israël n’ait pas officiellement revendiqué l’attaque, plusieurs sources concordantes laissent penser que le pays en est l’auteur. Selon le New York Times, l’État hébreu aurait caché des explosifs dans les bipeurs achetés par le Hezbollah à Taïwan et à les activer à distance, selon le récit de plusieurs responsables américains au journal.

"C’est une attaque impressionnante d’un point de vue technique"

Pour Elizabeth Sheppard Sellam, cette opération est le fruit d’une infiltration particulièrement sophistiquée. "C’est une attaque massive, très impressionnante d’un point de vue technique, car elle cible non seulement les appareils, mais aussi toute la chaîne d’approvisionnement du Hezbollah", explique-t-elle.

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La société Gold Apollo, mise en cause, a rapidement tenté de se distancier des événements. Dans un communiqué, elle a précisé que les bipeurs en question avaient été fabriqués par son partenaire BAC Consulting, basé à Budapest, et qu’elle n’était pas impliquée dans le processus de fabrication.

Le mouvement chiite, quant à lui, n’a pas encore réagi à cette attaque d’une violence inouïe, mais son chef Hassan Nasrallah est attendu pour prononcer un discours ce jeudi 19 septembre. Avec les nouvelles explosions mercredi, l’embrasement du Moyen-Orient ne semble tenir qu’à un fil.